[Quête] Sur les traces du Maître d'Asgard

Le silence s'abat sur Asgard. Un silence opaque que rien ne vient perturber. Pour un temps, quelques infimes secondes, le blizzard semble s'apaiser. Le froid de ces terres gelées n'est pas plus clément pour autant. Est-ce ainsi qu'est Asgard. La fière, l'impétueuse parfois, la forte et puissante terre des Dieux nordiques, Asgard. Contrée de mythes et de légendes, qui est réellement capable de la percevoir à sa juste valeur. Qui peut prétendre comprendre ses secrets, découvrir ses recoins cachés aux yeux des mortels...

Un voile de douceur couvre doucement les lieux, se distillant peu à peu autour de la majestueuse statue du divin alors qu'elle entoure avec précaution le gardien d'Epsilon et son compagnon animal. Une voix s'immisce au coeur de l'esprit du guerrier divin. Une femme. Ce qu'elle lui narre ? Il n'en comprendra pas un mot. Un langage étrange, comme extirpé d'un âge que les hommes auraient oublié depuis trop longtemps pour le comprendre, pour en percevoir le sens. Le timbre est profond, paisible. Et de ces mots qu'il ne comprend pas se dégage une infinie sagesse.

Une forme vaporeuse se matérialise à quelques pas de lui, auréolée de lumière opalescente. Si elle a tout des traits d'un être humain, sa beauté lunaire possède quelque chose d'irréel, de surnaturel. De longs cheveux blancs encadrent un visage qui ne lui apparaîtra pas plus nettement, ses pourtours restants à l'égal d'un être fantomatique, légèrement translucides.
Un ange, peut être Ashram fera-t-il se parallèle. Ou peut être interprètera-t-il autre chose face à ce qui se dessine de plus en plus nettement sous ses prunelles.

Un délicat sourire semble se dessiner sur ses traits alors que cet esprit aussi léger qu'une bulle de savon fait un pas vers le guerrier agenouillé aux pieds de la statue du puissant Odin.

" Valeureux Ashram.
Toi qui as bravé les dangers les plus terribles de ce monde.
Toi qui n'as pas hésité un instant à protéger un être avec qui tu n'avais pas le moindre lien, aussi divin soit-il.
Toi qui es le seul à nourrir une véritable inquiétude sur ce qu'il est advenu de mon époux "

Avançant d'un pas de plus, le sourire délicat qui illumine son visage pâle semble accorder la réponse à une question qui n'est pas encore formulée.

" Oui, Ashram.
Je suis Frigg. Déesse la Magie d'Asgard, protectrice des liens qui unissent les femmes aux hommes, épouse du seigneur à qui tu as juré allégeance. "

Son regard dévie lentement vers la voûte céleste qui s'étend au-dessus d'eux, comme si ses prunelles de nacre perçaient les nuages qui l'empêchaient de la contempler sans le moindre effort.

" Je ne suis pas parmi vous pour l'heure.
Mon temps... n'est pas encore venu.
Le mystère et la magie baignent ce monde. Tout a une raison. Tout arrive quand cela doit arriver.
Je t'ai observé, toi, mais aussi tes frères.
J'ai suivi ta route des yeux. Je t'ai vu trébucher, mais toujours tu as trouvé la force de te relever. "

Le calme, le silence, semblent être les seuls attributs qui régissent ces lieux à cet instant. Un court instant qui ne durera peut être que le temps d'un bref songe. Un instant qu'il convient d'aborder à sa juste valeur. Rien n'est jamais fait au hasard dès qu'il s'agit de magie.
Les humains ne la perçoivent que trop rarement et peu sont les élus à la ressentir, elle qui est pourtant présente où que le regard porte. Chaque plante, chaque animal, chaque pierre que compte ce monde, jusqu'à et y compris les humains qui le parcourent, sont tous influencés par la magie. Puissante, dangereuse ou au contraire protectrice, il faut savoir la percevoir pour en tirer l'essence tout autant que les secrets.

Un délicat sourire reste doucement fixé sur les lèvres blanches de la déité du froid. Le silence respectueux qu'elle observe en attendant que le Loup d'Asgard rassemble ses pensées en des mots distincts, est presque religieux.

"Les humains ont besoin d'actes et de paroles fortes pour considérer un mérite comme acquis.
Pour ma part... les ondes que dégagent ton coeur me suffisent."

Elle fait un pas. Aussi léger qu'une bulle de savon, que l'aile fragile d'un papillon, son pied nu ne laisse aucune trace au sein de la neige épaisse qui recouvre le parvis du Palais de son époux.

"La détresse sincère, de celle qui semble ne pas trouver d'issue, est le plus puissant appel qu'un humain puisse matérialiser vers les dieux que nous sommes. Je vois que le puissant Zeus lui même, y a prêté toute l'attention qu'il se doit.
Sois rassuré, Loup d'Epsilon, car mon existence n'est pas en péril. Ni aujourd'hui, ni demain. Je ne réside pas sur le même plan que toi, même si tu peux me voir et m'entendre."

A ces quelques mots, alors qu'un léger silence s'instaure de nouveau entre la divine et l'humain agenouillé, les traits translucides de Frigg semblent se figer. Tout n'étant que sensation et perception, face à cette créature divine égarée dans le monde mortel, il reste cependant difficile d'en avoir la certitude.

"Je le sais Ashram... est-ce bien pour cette raison, parce que ton coeur ne sait comment retrouver celui qui doit le guider, que je t'apparais aujourd'hui.
Odin court un très grand danger. Sur tes épaules, reposera le fardeau de son destin. Car Odin est puissant, bien plus que tu ne saurais sans doute l'imaginer. Mais il est confronté à quelque chose qu'il ne connait pas. Une chose terrible que les entrailles de la terre n'aurait jamais du réveiller."

La paume de Frigg s'élève dans les airs pour se poser au sommet de la tête d'Ashram agenouillé. Il n'en ressentira pas le moindre contact physique, mais en son coeur rayonnera une lumière qu'il ne pourra ignorer.

"Je te l'ai déjà dit. Il ne m'appartient pas de te révéler ce qui doit rester caché à tes yeux.
Cependant... si tu réponds à ma question et que ta réponse trouve un écho en moi, alors je t'offrirai un présent qui t'aidera dans ta quête.
Réfléchis bien, Ashram, et dis moi... ce qui compte le plus à tes yeux."

A peine Ashram prononce-t-il ses dernières paroles que l'espace se fige tout autour de lui. Le vent ne souffle plus. La température se stabilise. Les arbres n'oscillent plus sous les assauts des éléments. Plus un chant, plus une brise, plus un bruit. La neige cesse de tomber. C'est comme si le temps venait de s'arrêter abruptement. Vivants, respirants, Ashram et son loup sont désormais seuls.

Seul le regard pâle de la déesse conserve une faible lueur qui vibre presque imperceptiblement au fond de ses prunelles d'ivoire.

L'obscurité s'abat sur les deux compagnons vibrants de vie au centre de ce monde qui semble soudain en pause. Aucun son, aucun mouvement, plus rien ne vit, plus rien ne bouge, plus rien n'est perceptible. Il fait sombre... il fait si sombre... que cela en devient inquiétant.

Sont-ils toujours en Asgard ? La déesse les aurait-elle envoyés vers une destination aussi opaque que l'eau trouble d'un fleuve boueux...? Ou est-ce là un songe, une illusion... peut être un message ou une épreuve.

S'il tente d'avancer, il se rendra vite compte qu'aucun obstacle n'entrave sa route. Rien. Plus rien. C'est comme s'ils venaient tous deux d'être précipités au coeur d'un monde parfaitement vide. Un monde sombre. Un monde qui n'aurait pas encore été créé. Un endroit qui n'attendrait qu'un mot, qu'un geste pour s'éveiller, pour s'épanouir, pour s'ouvrir à l'homme et à son compagnon.

Un hurlement strident déchire l'air au moment où Ashram en appelle à sa divinité tutélaire. Le noir n'est certes pas moins opaque qu'auparavant, mais au moins une once de vie, aussi malveillante soit-elle, s'éveille dans ce paysage stérilisé.

Le cri est hargneux, agressif, brutal. Il ne provient pas de son seigneur et maître, cela est une certitude irréfutable. La vue ne semble pas encline à revenir, à moins que cette terre d'obscurité ne souhaite pas s'éveiller à lui. Frigg n'a-t-elle pas dit plusieurs fois... qu'elle ne révèlerait rien de ce qui était caché. La vue ne lui sera d'aucun secours aujourd'hui, cela est certain. Ashram semble avoir perçu le message de sa déesse à la hauteur de ce qu'il représente. Il n'a jamais tenté de voir, mais plutôt de percevoir. En cela a-t-il saisi les mots de l'épouse du Grand Nord.

Un souffle glacial balaye le guerrier divin et son loup, alors qu'un nouveau hurlement de terreur résonne tout autour d'eux, semblant plus proche que le précédent.

Une odeur de chair en putréfaction s'immisce dans l'air, allant sans doute jusqu'à provoquer un violent haut le coeur tant elle est nauséabonde. Au moment où cette odeur gagne leurs odorats, l'atmosphère change de nouveau. Le blizzard s'apaise, bien qu'un froid mordant persiste à rafraîchir leurs peaux. Au loin l'océan fait rage, cognant avec violence contre on ne sait réellement quelle surface. Si Ashram pourra percevoir une très faible odeur saline, aucune goutte d'eau ou vague quelles qu'elles soient ne viennent le percuter.

Quelque chose les frôle. A en croire ses déplacements et l'impression qui les gagne lorsque la créature passe à côté d'eux, elle semble d'une taille gigantesque.

Un borboris inaudible. Une très légère émanation d'un cosmos qu'il connait très bien. Un cosmos de glaces éternelles, le cosmos de son seigneur. Une énergie qui semble s'amenuiser au fur et à mesure qu'une seconde émanation de cosmos profondément noire, violente, malsaine, prend de l'ampleur.

Un voile de fumée blanche envahit ce qui n'était resté qu'une profonde obscurité depuis le départ. Balayant le sol et tout ce qui n'a jamais été matérialisé, Ashram se retrouve de nouveau aux pieds de l'imposante statue d'Odin, alors que le regard diaphane de Frigg est posé sur lui. Silencieuse, la déesse se tient à quelques pas et observe le retour de son protégé.

Le regard clair de la divinité ne quitte pas le chevalier au Loup. Perturbé par les sensations qui viennent d'affluer dans son esprit, qui ne le serait pas en de telles circonstances, Ashram est pourtant empli d'une détermination qui semble sans faille.
Lorsqu'il relève les yeux vers elle, la déesse incline doucement le visage en signe d'assentiment, alors que l'expression de son visage se pare de sévérité.

" Tes sens ont perçu la menace à la hauteur de sa dangerosité, Ashram.
Je félicite ton esprit d'analyse pour avoir ainsi percé le mystère qui enveloppait ce que tu n'as pu voir "

Un pentacle se dessine soudainement sous les talons du guerrier toujours agenouillé face à la divinité d'Asgard. Auréolées de l'énergie propre à Frigg, une signature cosmique qu'il saura désormais reconnaître où qu'il aille, de fines runes cabalistiques tracent de sinueux chemins sous le guerrier divin.

" Mon présent pour toi, Ashram, va te conduire là où tout a commencé.
Tu devras chercher, tu devras trouver. Trouver le passage qui te permettra de rejoindre mon époux.
Tu le devras Ashram... Car toi seul en as la capacité "

Les mots de Frigg résonnent puissamment dans l'air, comme si cette dernière phrase revêtait une importance qui ne devrait pas être négligée ou sous estimée.
Toi seul le peux... Ashram. Pourquoi ? Pourquoi lui ? Comment ? Il lui faudra le découvrir.