Reconstruire avant la morsure de l'hiver [FINISHED ; Siral Makar assure les finitions]

La Cape de Chamois est de nouveau aperçue au domaine des trésors oubliés. Mais cette fois elle se montre de près, parmi les hommes de Delta. On l’acclame car on a parlé, chacun sait que le guerrier divin au casque intégral comptait parmi ceux qui ont redonné vie à la forêt noircie par le feu d’Arès. Le chevalier de Midgard salue de la tête ceux de son peuple qui se sont attroupés autour de lui, mignonne de sa main d’orichalque les têtes blondes qui lui tournent autour, et si on pouvait voir son sourire, nulle doute qu’on verrait briller son émail comme un diamant, apanage des héros au cœur généreux, dont la blondeur évoque les blés et l’été.

Bref, Scud est là, en renfort pour reconstruire. Après une cervoise bien savoureuse, il endosse le rôle de contremaître et soulage les bras des asgardiens de son cosmos. C’est que les pauvres bougres vivent parfois à dix dans une ruine, le village est vraiment sinistré et avec l’hiver qui commence, il faudrait voir à accélérer la cadence. Le chevalier orange dégaine Virago, la lame enchantée de Svartalfheim. De la main droite il redresse un massif tronc, et de sa main armée il le débite à distance, Virago générant ses redoutables tranches cosmiques. Et à la chaîne, on déplace les planches ainsi fournies sur les différents chantiers. Scud prend facilement de l’avance sur ses hommes, et alors il rengaine, et ses deux mains s’orientent vers ceux qui en ont le plus besoin, soulageant les épaules des travailleurs avec son cosmos capable de soulever d’importantes charges. De temps à autre une jeune femme lui porte une cervoise en rougissant, et il s’appuie d’une main sur le pommeau de son épée. Et ça repart, pour ne finir qu’à la nuit tombée. Scud sera le dernier couché, parcequ’une journée de travaux intensifs, ça se soulage en levant le coude et les femmes.

"Une bonne nuitée Makar ?"

"Hum oui, oui."

Scud observe l’Intendant royal de son œil gouailleur.

"J’ai pô bien bossé hier dites donc ?"

Siral hésite, ça lui fend le fion mais c’est un homme juste, trop droit pour exprimer le contraire de ce qu’il pense lorsqu’il constate du travail bien fait.

"Vous avez fait votre devoir, je n’ai rien à redire."

"Ah ah !"

Monsieur Makar se raidissant, la voix affermie, sévère :

"Et vous l’ferez de nouveau aujourd’hui !"

Le chevalier orange sourit large, opinant du chef, les sourcils hauts.

Et c’est reparti pour une journée de labeur. Un tas de planches vole par là, une caisse de clou gravite par ici, Scud gratifie la fille du tavernier d’une main aux miches, Scud s’amuse de Siral qui va et vient d’un chantier à l’autre, le petit pas rapide et la nuque roide, Scud devise avec un petit groupe de travailleurs :

"Vous connaissez l’histoire du pêcheur et d'l'indien ?"

Les hommes font non de la tête ou marmonnent.

"J'vous la raconte. C'est un colon anglais qui pêche à la rivière, enfin il essaye, parcequ’il a beau s’montrer patient et discret, ça mort pas. Des heures qu’il est là, et pas un poisson alors que l’endroit est bien connu des indiens pour ses truites savoureuses. Justement, vla un indien qui s’accroupit sur la berge, trempe un doigt dans la rivière, et tire une grosse truite. Not’ pêcheur en revient pas ! Alors il demande à l’indien comment il s’y prend. L’indien lui dit : « Le soir, avant le dîner, vise le trou du cucul à ta femme avec ton index, et mets y jusqu’à la première phalange. » (les Asgardiens échangent un sourire) Le pêcheur acquiesce, un peu dubitatif quand même, mais le soir venu, il peut pas s’empêcher d’essayer. A peine rentré, il va à la cuisine et s’approche de son épouse qui lui tourne le dos, et hop, un doigt dans le fondement. (les Asgardiens ricanent) Sa femme demande doucement : « C’est toi l’indien ? »"

Et les asgardiens rient comme des diables, Scud pris dans cette cascade d’esclaffade communicative. Ces quatre villageois de Delta n’ont pas ri comme ça depuis un bon moment, et ils s’en donnent à cœur joie, réchauffés qu’ils sont à la vue de leurs maisons redressées et de ce guerrier divin à l’aura chaleureuse.

Le chantier avance bien, on est tout près de l’étape « finissions », Scud et Siral Makar agissent avec une cordiale efficacité, deux style opposés qui se révèlent plutôt complémentaires sur le terrain. La cape de chamois a levé le nez quand deux cosmos étrangers ont surgi aux portes du royaume, mais il a tout de suite perçu l’interception assurée par le Tigre Viking. Et puis les travaux ont continué, sans faiblir.

Mais cette fois, après que deux nouvelles signatures cosmiques se soient avancées sur le nouveau domaine, il ne perçoit pas de frères ou de sœurs venir à leur rencontre. Quatre visiteurs initiés sur les terres blanches, Scud va devoir laisser notre cher Intendant s’occuper des finissions (et qui mieux que lui pour ça !).

S’enroulant dans sa cape tel le magicien de cabaret, le chevalier orange disparaît.