Spectre de la Mandragore de l'étoile Céleste de la Blessure [ok]

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En Grèce, il y a longtemps déjà …

Je suis née de père et de mère inconnus et on m’avait retrouvée au pied de la statue d’Athéna à Athènes. J’ai été recueillie et élevée par les prêtresses qui dès qu’elles perdaient leur virginité ne pouvaient plus la servir. Les premières années ne furent pas de tout repos, car bien que n’étant qu’une enfant être retrouvée aux pieds de la statue dans le temple sacré implique de nombreuses conséquences, il fut même un temps où l’on se demanda si je n’étais pas la réincarnation d’Athéna en personne, mais j’étais dépourvue de cosmos et l’explication de mon arrivée si « miraculeuse » fut bien moins reluisante, les prêtresses allaient m’apprendre par la suite que seules les plus novices d’entre elles avaient cru un miracle divin, les plus âgées y avait vu certes un signe des Dieux, mais révélèrent qu’elles m’avaient trouvée avec un mot, simple et d’une écriture hésitante, résumant en quelques mots que je me trouvais là car ma mère avait préféré m’abandonner au temple plutôt qu’à la mort …

Les premières années passèrent avec une lenteur désespérante, bien que pas malheureuse, je ne m’adonnais qu’à de longues études du matin au soir, ayant pour interdiction de sortir du temple, à jamais enfermée avec ces femmes que j’appréciais, en tout cas les plus jeunes d’entre elles avec qui je m’amusais à faire des farces aux plus anciennes, me dénonçant par la suite et usant de mon sourire d’ange afin que mes comparses ne soient pas punies… et cela marchait.

Seule la matriarche ne marchait pas ainsi, peut être avait elle déjà pressenti en moi à cette époque mon véritable rôle dans l’histoire…

Mon enseignement purement théorique dura jusqu’à mes 7 ans environ, où l’on jugea bon de m’enseigner autre chose que des livres…

C’était à l’aube de mon 8^ème anniversaire, alors que j’étais une nouvelle fois cachée dans le temple que se déroula un événement auquel je ne m’attendais pas. Je m’étais réfugiée aux pieds de l’immense statue de la Déesse de la Justice, faite d’or et d’ivoire, cette statue m’avait toujours fascinée, la Déesse elle-même m’avait toujours fasciné, et bien que l’on dise qu’elle vive non loin d’Athènes, dans un Sanctuaire, je ne l’avais jamais rencontré…

« Ha tu es là ! »

La matriarche venait de me retrouver, elle devenait de plus en plus rapide…

« Oui mère » avais je dis d’une petite voix fluette, la matriarche regarda Athéna et s’inclina devant la statue avant de reprendre…

« Tu passes beaucoup de temps en compagnie de notre Déesse. »

« Il me semble par moment que j’entends sa voix, je ne sais véritablement pourquoi. Mais pourquoi me cherchiez-vous ? »

« Aujourd’hui est un grand jour pour toi, car tu vas enfin sortir du temple… »

A ces mots mon visage s’illuminait, sortir et voir le monde, voilà une chose que je n’espérais plus, alors que le soleil passait sur mon visage j’allais me blottir dans les bras de cette vieille femme, portant la tunique traditionnelle des prêtresses que je portais également, mais à plus petite échelle…

« Tu vas sortir du temple pour être présenté à la plèbe »

« Mais alors ?... » Il y avait comme une sorte de terreur dans ma voix.

« Oui ma fille, je vieillis et bientôt tu devras prendre ma place, d’ici quelques années… »

« Pourquoi moi ?! Je suis certainement la plus indisciplinée de vos élèves… »

Un petit sourire se fit sur le visage de la vieille femme, relevant ses rides et dévoilant on ne sait comment un air de malice dans ses yeux… je n’eus pas de réponse, elle s’assit près de moi, regardant Athéna…

« Qui peut se vanter de prédire l’avenir ? Qui peut se vanter de connaître les volontés des Dieux. Tu es belle et c’est sur toi que les regards se tourneront. Acceptes-tu ce fardeau ? »

« Je… ne peux vous répondre, je manque tellement de sagesse… »

« La sagesse est un art bien difficile et même moi je ne le maîtrise pas totalement… allez, prépare toi… »

Et il en fut ainsi fait, le soir même je fus présentée à la plèbe sous le nom d’Anïa, mes traits juvéniles éblouirent le peuple d’Athènes et les autres prêtresses qui chantèrent les louanges d’Athéna pendant une bonne partie de la nuit alors que j’avais déjà sombré dans les bras de Morphée depuis fort longtemps…

Les années passèrent à une vitesse folle depuis ce jour, où mon entrainement redoubla, un entrainement de chant, de danse, de rituels, chacun étant plus intéressant que le précédent, j’étais enfin sortie des livres, le monde s’ouvrait à moi et je m’ouvrais à lui, cultivant ma beauté et mes charmes autant que mon sens de la répartie. Je n’apprenais pas le maniement des armes, cela était réservé aux hoplites et aux cavaliers, la plupart des fils de riches bourgeois Athéniens.

C’est à l’aube de mon vingtième anniversaire que la prêtresse et moi furent conviées à une réunion importante dans la ville d’Eleusis où officiait un vieux prêtre avec son apprenti que l’on disait être d’une autre origine, des lointaines contrées au-delà même de Troie, mais peu de choses étaient connues de lui. La population avait peur de ses « pouvoirs »… qui était-il ? Je ne le savais pas et après tout, c’était un homme, il n’avait pas à m’intéresser, pas tant que je ne serais qu’élève et non prêtresse du temple entrain de former une remplaçante

Nous nous rendîmes donc à Eleusis un soir d’une nuit sans lune lorsque nous pénétrâmes dans la cité, tout était merveilleux, c’était pour la première fois que je m’éloignais autant du temple d’Athéna. Là, la population nous attendait, espérant un traité entre nos deux cités.

Ce fut le vieux prêtre qui nous accueillit, un homme chauve aux traits presque aussi vieux que ceux de la matriarche du temple, il était seul et ma maîtresse alla à sa rencontre avec une facilité déconcertante, il devait vraisemblablement se connaître auparavant.

On me présenta au prêtre, un homme très gentil et doux au demeurant, je devais danser ce soir là, lors du banquet, je portais une magnifique robe blanche, longue, mes pieds nus et mes chevilles vêtues de bracelets en or. Mon visage voilé d’un simple tissu de soie presque transparente.

Et la soirée s’engagea, dans les rires et les chants, jusqu’au moment tant attendu, la danse et le rituel que je devais faire devant le prêtre d’Hadès, mais alors que j’engageais ma grâce et ma beauté dans une danse hypnotique je remarquais aux côtés du prêtre un jeune homme d’environ mon âge, cependant son visage était différent de tous les autres, les yeux légèrement en amande et une étrange canne à sa taille, il m’observait, comme tout le reste de l’assemblée me direz vous, mais quelque chose d’autre se passait entre lui et moi, quelque chose d’indéfinissable. Je vis ma matriarche en grande conversation avec le prêtre d’Eleusis et j’avais comme l’impression que c’était de moi dont il était question…

Il est vrai que la matriarche m’avait dit que le prêtre était très porté sur la botanique, tout comme moi, mon cours préféré consistait à étudier les herbes et les différentes plantes, mais celle qui me fascinait le plus était la mandragore, une plante légendaire aux milles et un pouvoirs, si dangereuse, que seul le temple avait le droit d’en posséder un échantillon. J’avais travaillé de longues années dessus. Mais alors que je me perdais dans mes pensées j’entendis la fin de la musique et enfin du repos pour moi, je retournais auprès de la matriarche et attendis quelque temps, appréciant les félicitations autant sur ma prestation que sur ma beauté lorsque j’avais ôté mon voile de mes yeux.

J’en avais assez de tout cela et pris l’initiative de m’isoler dans le temple, histoire de m’égarer un peu et de découvrir ce lieu encore inconnu…

Mais c’est à ce moment qu’un homme de la fête fit son apparition, un des seuls prêtres d’Athéna de tout le temple, me complimentant tout d’abord sur ma tenue et ma danse, sur ma beauté, il alla rapidement sur un autre terrain, celui de la séduction, me proposant une forte somme et une nouvelle vie si j’acceptais de lui appartenir. Ma réponse fut négative, bien évidemment, mais il insista, tentant de me brutaliser, mais c’est alors que son agression allait parvenir à ces fins que j’entendis la voix d’un homme…

« Lâchez-là prêtre où vous allezconnaître ma colère »

Le prêtre semblait furieux de l’intervention de cet homme…

« Ne te mêle pas de ça étranger! »

« Tu es dans le temple de mon Dieu Hadès, je n’aurai aucun scrupule à ôter ta vie si jamais tu la touches encore une fois… »

A ce moment là, je me jetais sur mon assaillant, mais ce dernier, bien qu’âgé n’eut aucune peine à me gifler me faisant tomber au sol… se désintéressant de moi il courut vers l’étranger vêtu d’un étrange habit noir, poignard à la main, je lui criais alors…

« ATTENTION!!! »

L’homme se retourna et sortit sa canne en criant…

« Feu ! »

Un brasier enveloppa alors le prêtre, le carbonisant littéralement sur place, ne laissant là que quelques cendres. J’étais apeurée, par ce que je venais de subir et ce que je venais de voir… L’homme se pencha sur moi, me tendant sa main afin que je me relève, tremblante, j’acceptais sans réellement comprendre pourquoi, mais c’est à ce moment oui, que je pense avoir lié mon cœur au sien…

Ma maîtresse et le vieux prêtre d’Hadès vinrent alors à notre rencontre, ils ne dirent rien, mais voilà, tuer un prêtre d’Athéna avait certaines conséquences et même si nous tous approuvions le geste du disciple du prêtre d’Eleusis, il n’allait pas en être de même pour certains qui ne cherchaient que la guerre entre nos deux cités.

Cela fait désormais plusieurs mois qu’il était intervenu. Je découvris qu’il s’appelait Belgarath.…Je me suis surprise à sentir battre mon cœur à chaque fois que je pensais à lui, lui aussi m’aime, mais nous nous ignorions, nous ne voulions pas nous aimer, sinon tout s’écroulerait…notre vie à laquelle nous étions destinés … lui Hadès, moi Athéna, les deux opposés. Pourtant je pensais à lui chaque jour et lui à moi chaque nuit. Nos peuples veulent s’entretuer, nos dieux ne se comprennent pas.

Nous nous rapprochâmes de jour en jour laissant un peu plus nos sentiments d’étaler, mais la vie passait et c’est lors de notre 25 ème anniversaire à chacun que nos maîtres respectifs sombrèrent dans le repos éternel. Mais c’est également ce jour que nous nous laissâmes aller à notre amour, avant d’apprendre les terribles nouvelles… je parlais à Belgarath, alors que nous étions allongés dans son lit au temple d’Eleusis…

« Belgarath, hé! Belgarath! »

« Ho! C’est toi? Excuse, moi j’étais perdu dans mes pensées »

« Belgarath, avons nous fait une bêtise ! »

« Une bêtise, non, je ne crois pas. Enfin… est ce que vivre est une bêtise? Est-ce qu’aimer en est une? Non… »

J’étais songeuse, mes longs cheveux blonds étaient couverts de sueurs sur le lit, je regardai alors Belgarath et lui dit…

« Promets-moi une chose Belgarath… »

« Laquelle? »

« Si jamais nous devions être séparés, bats-toi, bats-toi toujours pour ce que tu penses être juste, personne n’a le droit de te dicter ta façon de penser… promets-le moi »

« Je te le promets »

« Tu es éternel Belgarath, comme ta magie… alors vis pour nous deux, je t‘en prie»

Et je ne croyais pas si bien dire, il fut nommé peu de temps après prêtre d’Eleusis et moi grande prêtresse d’Athéna, nos maîtres respectifs avaient vécu bien au-delà de ce qu’un être humain normal à l’époque pouvait vivre. Comme s’ils voulaient nous laisser un peu de temps avant la guerre. J’officiais encore jusqu’à l’âge de mes 30 ans en tant que prêtresse d’Athéna, j’avais déjà une jeune apprentie, très prometteuse.

Nous nous revîmes quelques fois après cela, prétextant de part et d’autre, divers voyages. Mais en réalité nous nous retrouvions et à chaque fois c’était plus dur de se quitter. Jusqu’au jour où Belgarath fut accusé de trahison par son peuple et moi capturée et emmenée, alors, il se servit de sa magie pour me libérer et s’enfuyait. Peu de temps après je reçus un message qui me disait qu’il était mort et je n’en crus pas un mot. Pour ma part, j’avais été aussi condamnée … Condamnée à épouser le Roi d’Athènes et alors chaque soir il me touchait et je pleurais … je pleurais la première fois puis à chacun des assauts de ce tyran alors que la fleur que j’étais se fanait inexorablement. Cet immonde porc posant ses mains sur mon corps si magnifique lui inventant chaque soir des « jeux » de plus en plus humiliant, et des idées de plus en plus tordues… mes anciennes amies ne m’adressaient plus la parole, plus rien dans ce monde ne me retenait à la vie, aucun d’eux ne voulait me pardonner, contrairement à ce qu’enseignait la Déesse Athéna, le pardon et l’amour… mais aucun ne voulait m’écouter et je n’avais bientôt plus droit à la parole, mais quelque part je restais vivante pour celui que j’aimais réellement et que je sentais en vie. Dévorée par la seule pensée de le retrouver, je fuguais d’Athènes, loin de cette déesse et de ce peuple et je décidais d’aller rejoindre Belgarath, éventuellement de m’allier au pire ennemi d’Athéna, Hadès lui-même, c’est alors que je trouvais mon éternel amour à Eleusis dans le Temple d’Hadès.

Mais voilà je ne voulais pas qu’il abandonne sa vie pour être avec moi, il vénérait plus que tout Hadès et sa fonction de prêtre, ainsi je pris l’ultime décision, je me suis jetée sur son épée pour qu’il n’ait pas à choisir entre sa fonction et moi et pour que notre amour ne meure jamais. Quand je rendis mon dernier son souffle il procéda à mes funérailles pour que mon âme soit acceptée dans les Enfers.

Quelques jours passèrent et Athènes déclara la guerre contre Eleusis, une occasion rêvée pour que Belgarath puisse se venger de ma mort, mais je n’en su rien car déjà j’étais aux enfers et déjà je fus jugée...

Je traversais le Styx et là, aucun des Juges ne savait où me mettre parce que j’avais commis beaucoup de péchés sur les derniers instants de ma vie : j’avais menti à Athènes, je me suis suicidée, j’avais aimé alors que je n’en avais pas le droit, j’avais abusé de la croyance des Athéniens alors que j’étais prêtresse … avec tout cela je devais aller dans plusieurs prisons différentes mais ils n’arrivaient pas à ce décider laquelle en premier …

C’est alors que finalement je fus envoyée dans le cocytus, car tous ces crimes méritaient le nom de complot contre Dieu lui-même… mais ils avaient omis une chose, une chose qu’ils n’avaient pas prévu… la mort de Belgarath et son désir de vengeance si puissant qu’il ne put mourir complètement, devenant un serviteur d’Hadès…

C’est alors que je sentis une nouvelle puissance naître en moi, comme si quelque chose m’appelait et c’était le cas… une puissance des ténèbres m’arracha au froid du Cocytus et un surplis vint recouvrir mon corps… je ne comprenais pas tout, je ne savais pas… je sentis alors mon corps se tordre et redevenir poussière… de la téléportation ?

Lorsque je réouvris mes yeux je vis une immense salle, un escalier et deux dragons gardant celui-ci…

« Tu es à la Guidecca… »

Je relevais alors mon visage vers ce trône, je regardais sur ma peau, quelle était cette armure ? Puis je compris… il était Hadès !

« Seigneur, je suis votre servante… » ma voix était encore tremblante du froid du cocytus mais le cosmos de l’empereur des morts vint me réchauffer une étrange sensation pour un être que l’on disait froid…

« Anïa, tu as été réveillée par la volonté de ton surplis, les registres ont été étudiés, la mandragore est ta plante et tu sais en user mieux que quiconque au sein de mon royaume. Si tu le souhaites je t’offre une nouvelle vie à mon service à une seule condition… Belgarath a été ton amant autre fois et il a également rejoint mon armée. Tu ne devras jamais te présenter à lui comme celle que tu es réellement, pour cela tu porteras un masque qui cachera ton visage et s’il vient un jour dans ta bouche un Verbe qui te trahirait, tu redeviendras un simple cadavre dans le cœur du Cocytus et il m’appartiendra à moi seul de lever cette malédiction… »

Je réfléchissais… d’un côté je pouvais revoir Belgarath de l’autre il ne pouvait savoir qui j’étais… mais la volonté de le revoir fut plus forte que toute les autres, aussi j’acceptais et devenais une des étoiles célestes de sa majesté Hadès… Anïa de la mandragore de l’étoile Céleste de la douleur et j’obéis à mon seigneur et maître Hadès, empereur des morts…