Après l'apocalypse.

Siam avait voyagé rapidement, fendant l'espace dans les terres d'Asgard,remontant les domaines jusqu'à celui de Zeta, celui d'Arbhaal du Tigre Viking. Guidée par les marques cosmiques du guerrier divin, elle remonta la piste et déboucha aux portes de ses appartements. "Seigneur Arbhaal, me voici pour restaurer l'armure", lança la jeune femme qui portait sur l'épaule un sac en toile drue contenant de nombreux items. Le détenteur du saphir de Zeta vint l'accueillir et dans un contexte plus intimiste qu'au Palais d'Odin, ils se rendirent en la résidence d'Arbhaal.

L'armure attendait là, tigre aux dents de sabre trônant majestueusement sur le sol. Une puissance sauvage se dégageait d'elle, ainsi qu'une souffrance. Siam se prépara à commencer le travail en retirant son armure de Nidhögg. Face à face, dragon et tigre semblaient s'observer, reconnaissant la valeur de l'autre. La jeune guerrière était vêtue d'un pantalon pour homme sombre, de bottes en cuir sombre à lacets le long du mollet, et d'une chemise ample et blanche. Là, elle entreprit de sortir "son" matériel, ou plutôt celui des forgerons d'Asgard, tout en observant avec une attention accrue l'armure à restaurer. Sur une petite table située contre un mur de pierre, elle déposa un pot de poussière d'étoile, un de Star Iron semi-brut, le marteau sacré et le burin du forgeron, ainsi que des chiffons. Elle se retourna vers Arbhaal avec un bocal vide pourvu d'un bec verseur.

- Arbhaal, je vais avoir besoin de ta participation. D'abord, il me faut ton sang. Ton armure est très abîmée en surface mais les blessures, impressionnantes, ne l'ont pas touchées en profondeur. Remplir ce bocal à moitié sera, à mon avis, plus que suffisant. J'aurais besoin d'une bassine d'eau également. Tiens, dit-elle en lui tendant le bocal. Quand tu l'auras rempli à demie, tends-moi ton bras.

La guerrière de Nidhögg se dirigea vers l'armure du Tigre viking et étala chacune des pièces au sol afin d'en évaluer l'état exact. Quand ce fut fait, Arbhaal lui tendit son bras ensanglanté et, usant de son cosmos de Vie, Siam referma sa blessure. Elle récupéra le bocal de sang et se mit à l'ouvrage. D'abord, elle étendit sa conscience, englobant tout ce qui se trouvait ici. Puis elle fixa son attention sur le sang et sur l'armure. Leurs énergies étaient celles de fauves, forts et dignes. Cette étape lui avait servi à s'aligner sur l'armure. A présent, elle pouvait commencer son travail !

L'opération dura trois bonnes heures. Bien sûr, avec le temps, elle s'améliorerait et saurait faire plus court, mais elle avait peaufiné son travail à l'extrême. C'était une armure puissante, qui demandait une attention toute particulière, et le sang d'Arbhaal renfermait lui aussi un puissant cosmos résiduel. Travailler les deux à la fois fut un honneur pour elle. Elle avait traité une pièce après l'autre, usant d'un peu à chaque fois du liquide rouge sombre. Elle avait manipulé le burin et le marteau à maintes reprises. Elle avait comblé certaines failles par du Star Iron mêlé au cosmos liquide du guerrier divin, et à chaque fois elle avait saupoudré de poussière d'étoile en vue de mêler star iron et armure, afin qu'ils ne fassent désormais qu'une seule entité. Pendant tout ce temps, elle avait été dans un lieu hors du temps et de l'espace. Comme à chaque fois qu'elle forgeait, Siam entrait non pas en transe mais dans un état second où elle vivait avec l'armure. Rien d'aure n'existait sinon ce lien que seuls connaissent les forgerons sacrés. En définitive, l'armure de Zeta, de l'étoile polaire du Tigre viking, avait été restaurée et étincelait de milles feux.

Siam retourna dans le monde réel et chercha Arbhaal du regard. Ses yeux mirent encore quelques secondes avant de réellement se fixer sur lui. Elle était haletante et en sueur. Sa chemise lui collait à la peau, mais ses yeux brillaient. "Le travail est terminé. Guerrier de Zeta, ton armure t'appelle !"

Le guerrier de Zeta m'avait félicité avec une sincérité dans la voix emprunte de fierté. Nous regardâmes son armure, la ressentions, sauvage. Le temps s'étira puis Arbhaal tourna la tête. Le guerrier divin ressentit l'arrivée de puissances cosmiques sur nos terres glacées. Il prit congé, puis quitta son domaine à une vitesse fulgurante, comme un éclair, ou un rayon de lumière. Siam, quant à elle, n'avait même pas ressenti les deux puissances depuis le domaine de Zeta où elle se trouvait. Les perceptions des premiers protecteurs des domaines étaient absolument hors normes. A cet instant, Siam entrevit la possibilité que peut-être un jour elle revêtirait une de ces armures vibrantes et sauvages, témoins du passé d'Asgard, de son histoire, de ses guerres et de sa vie. Elle se plut à rêvasser encore quelques instants, se laissant aller à la fatigue induite par l'opération de restauration, et ferma les yeux quelques instants, à même le sol, pourvu heureusement d'un tapis épais. Le temps, encore, se dilua quelques minutes, puis elle rouvrit les yeux. Non, elle ne devait pas dormir ! Dame Séléné, Siam devait se rendre à nouveau auprès d'elle.

Arguant cela, la jeune détentrice de l'armure de Nidhögg se releva, fit des allers et retours à travers la salle et replaça chacune des pièces, chaque matériaux et chaque ingrédient dans l'épais sac de toile qu'elle avait utilisé à l'aller. En quelques minutes, elle était prête. Puis elle sortit. Oui, elle pouvait être fière de son travail. Elle reconnut de l'orgueil aussi dans son esprit, mais elle y accéda. Pourquoi refuser d'accepter la réalité : elle avait réparé avec succès l'armure de l'un des sept guerriers divins d'Odin, protecteurs uniques des sept domaines d'Asgard ! Et elle n'avait que trois ans ! Oui, elle était fière et se disait enfin que peut-être elle parviendrait à marquer son monde, à atteindre ses buts, à devenir ce qu'elle ignore encore, mais qui marquerait les esprits. Mais ça, c'était encore dans quelques années certainement... Pour le moment, elle profitait de Nidhögg et de sa force sauvage et méditait quand elle le pouvait aux multiples sens de ses dernières maximes, avant qu'il ne retourne entre les branche de l'arbre-monde, d'où il ressortira un jour, certainement... peut-être pour la chercher au jour de sa mort ? Quel honneur ce serait...

Elle se rendit soudain compte qu'elle se trouvait à l'extérieur, déjà en train de marcher à travers les steppes blanches, fouettées par un vent d'un froid mordant. Les lèvres de la jeune femme étaient déjà gercées car elle n'avait pas brûlé son cosmos pour se protéger. Quelle idée ! Elle remédia à cela immédiatement, assez pour ne pas subir les affres du froid, porteur d'une mort douloureuse et surtout lente, mais pas assez pour se trouver au chaud. Vêtue de l'armure du dragon à la frappe féroce, sac de toile sur le dos, elle mobilisa davantage la puissance de l'animal sacré du Ragnarok et se propulsa en avant, sourire aux lèvres et les cheveux virevoltant comme des vagues de nacres sous la houle d'une mer agitée. Le palais du seigneur Odin n'était pas si loin, pour un guerrier divin...

Palais d'Odin