[FB] Il était une fois un frère et une sœur [PV Altia]

"Et celle là c'est quoi maman ?"

Mes doigts parcourent le papier, passent par la tige, bifurquent sur une feuille pour atteindre les pétales. Elle est jolie, simple  et toujours rayonnante comme ma maman. Coller des fleurs sur ce livre c'est sa passion et moi, Aria, je l'aide de mon mieux. Cette fleur au coeur jaune et aux pétales ivoires c'est moi qui l'ai trouvée à l'arrière de la maison et tout de suite je l'ai apportée à maman. Le livre est bien fourni et il n'est pas exclu que la belle fleur soit déjà à l'intérieur mais maman m'a donnée le droit de la coller. Elle fera comme à chaque fois, un dessin et des écritures sur le coté. Le nom de la fleur, l'endroit et une description je crois.

"Je te l'ai déjà dit Aria, une marguerite."

Elle me sourit et attrape ma main. On doit éviter de trop toucher les fleurs sinon elles s’abîment. Je le sais. Sa main est douce, comme toujours et je lui rends son sourire toujours trop contente de passer un peu de temps ensemble.

Nous habitons une maison modeste, un peu à l'écart du village sans en être trop éloignée pour autant. C'est papa qui l'a construite de ses mains et mon grand frère l'a aidé. Maman dit qu'il était trop petit mais je suis certaine qu'il a aidé papa. Mon grand frère est toujours là pour aider. Une fois par exemple je me suis piquée à cause d'une rose, et bien Altia a retiré la ronce sans me faire mal !

La bouilloire siffle rappelant à maman ses obligations. A contre cœur, je lui laisse ranger l'herbier que nous continuerons plus tard et elle se dirige vers la cuisine. Je gonfle les joues un peu déçue d'être mise de coté pour finalement quitter ma chaise et me diriger vers l'extérieur. Je vais rejoindre Altia qui doit être avec papa, lui il pourra jouer avec moi. Au moment de passer la porte je fais signe à maman.

"Je vais jouer avec Altia, maman."

"Ne vous éloignez pas trop et ne traînez pas, on va bientôt déjeuner."

"Oui maman."

Je quitte la maison et respire l'air frais du dehors. Il n'y a pas de grand soleil, le temps y est même couvert mais pas de pluie. Les alentours sont verdoyants, les fleurs nombreuses et colorées. Un paysage angélique s'offre à mes yeux de petite fille.

J'aime ma vie.

Je sors du jardin tout en courant à grandes enjambées. Je cours encore et encore pour rejoindre mon frère, peut être même que papa est dans les environs aussi.

"Altia ! Altia ! Tu es où grand frère ? "

J'arrive à la lisière de la forêt. Je n'ai pas le droit y entrer. Pourtant je sais que les plus belles fleurs si trouvent. C'est tentant. Je lève les yeux. Ils sont grands les arbres, beaucoup plus grands que moi. Et ces jolies feuilles portant cette belle couleur émeraude. Je souris, en les contemplant. J'entends le chant des oiseaux. Un petit bruissement, et j'aperçois un écureuil qui court sur une branche, rejoint son nid. Je m'émerveille de tout. Il est bon, de vivre ici.

Comme ça c'est bon Papa ?

Oui, vas-y, essayes.

C'est alors qu'un bruit sourd se fit entendre. Puis, le jeune garçon âgé d'une dizaine d'années se retourna vers son père, un regard empli de joie et avec un sourire débordant de fierté. Le jeune Altia vient de couper sa première bûche de bois d'un coup sec.

Bravo ! Je suis fier de toi ! Comme ça, on pourra ramasser plus de bois à nous deux pour cet hiver.

Dit le père, brossant les cheveux roux de son fils.

Ce dernier était épanoui dans cette vie. Une vie simple, auprès de ses parents et surtout de sa petite sœur. Cette dernière, Altia ferait tout pour la protéger. Alors son premier objectif est de devenir plus fort, évidemment. Les moqueries à cause de leurs couleurs de cheveux sont courantes. Sans aller jusqu'à la violence, les deux enfants doivent souvent se défendre des autres s'ils veulent être tranquille. Les enfants sont parfois cruels et il est hors de question pour Altia de laisser Aria vivre ce qu'il a vécu plus jeune. Bien que pas bien vieux, c'est ce qu'il se dit déjà. Sa sœur, c'est son trésor.

Une deuxième bûche est explosé en deux sur un tronc coupé. Cette fois c'est le père, qui accélère la cadence, alors qu'Altia est parti chercher des bûches supplémentaire pour les disposer sur le tronc, tout en ramassant celle déjà coupé. C'est un travail physique, sous ce soleil de Grèce qui n'est pas en enclin à baisser sa chaleur. Une goutte de sueur perle sur le front du rouquin, qui l'essuie avec sa manche alors qu'il se relève. Satisfait du travail accompli, il regarde le paysage qui s'offre à lui, et un sourire se dessine son visage. Il aime cette vie.

Aidant son père à prendre les bûches coupés, le parent et son enfant reparte en direction de la petite maison qu'ils habitaient, assez proche de la forêt. Longeant cette dernière pour rentrer, ils tombèrent sur nulle autre qu'Aria, à la lisière de la forêt. Se rapprochant petit à petit, alors que la pile de bûche est plus haute que la tête du rouquin, ce dernier la mit sur le côté alors qu'il vit l'air curieux de sa sœur.

Aria, tu sais bien qu'on a pas le droit d'entre dans la forêt. Qu'est-ce que tu fais là ?

Prise en flangrant délit.

Rêveuse d'aventure au sein de cette immensité sauvage, je n'ai pas remarqué la présence de papa et d'Altia. En bon protecteur, grand frère me reproche quelque chose que je sais. Ce n'est pas grave, un jour j'irais chercher pleins de fleurs pour le livre de maman et je trouverais même la fleur rose des princesses. J'attrape la bûche qui gêne Altia pour mieux le voir, c'est lourd mais je la bloque bien à l'aide de mes deux bras. Petite contribution de ma part au travail des deux hommes de la maison.

"Je suis pas entrée dans la forêt d'abord !"

Je gonfle les joues comme à mon habitude lorsque je suis contrariée, déviant par la même occasion mon regard à l'opposée de mon grand frère. Je sais bien que la forêt n'est pas très sûre dernièrement depuis l'attaque des animaux de la ferme voisine. Sauf qu'on ne sait pas quel animal sauvage c'était et en plus c'était il y a plus de quinze jours ! Papa l'a dit lui même, il n'y a plus eu d'attaque depuis.

Fière en apparence, je me résigne toutefois à lui dire pourquoi je suis ici à l'extérieur de la maison.

"Je suis venue pour jouer avec toi. Maman est à la cuisine. Je m'ennuie."

Je me déride bien vite regardant une nouvelle fois en direction de la forêt. Je suis certaine que cette forêt est la même que celle de l'histoire de maman. C'est une forêt magique où une princesse à la chevelure rousse s'aventure pour trouver la plus belle fleur du royaume dans le but de sauver son prince d'un profond sommeil sans rêve ! Cette fleur serait super jolie dans le livre de maman en plus.

"Il doit y avoir plein de jolies fleurs... Papa on peut y aller dis ? S'il te plait !"

Notre père, souriant et en sueur, secoua la tête pour  toute réponse. Il en profita pour réajuster une de ses bûches avant de faire quelques pas en direction de la maison.

"Je dois encore ranger toutes les bûches avant le repas, je n'ai pas le temps Aria. Une prochaine fois peut-être."

"Mais je peux y aller avec Altia Papa, regarde il est fort !"

J'en profite pour replacer maladroitement la bûche dans les bras de mon frère pour démontrer mes dires à papa. La situation est cocasse puisque je présente, à l'aide d'une gestuelle bien huilée, mon frère comme serait présenté un produit de qualité par un marchand ambulant. C'est généralement avec ce petit coté clown que j'arrive généralement à faire céder nos parents.

J'attends une réponse de l'un ou de l'autre.

Elle n'y était pas entrée, mais elle en mourrait d'envie, cela se voyait bien sur son visage. Et Altia l'avait bien remarqué. C'est aussi pour la protéger, qu'il fait cela. Peut-être même la protégé d'elle, et de sa curiosité qui pourrait la mettre en danger. Mais ses joues gonflés l'a rendait si adorable qu'il ne pu que lui sourire.

Aria prit ensuite la bûche coupée qui dépassa, pour la porter à bout de bras. Elle avait du mal à la soulever, mais elle tenait tout de même le choc. Puis elle finit par lâcher la raison qui l'amenait vraiment ici. Elle s'ennuyait tout simplement et est venu ici pour jouer avec Altia. Mais Aria ne lâcha pas pour autant le morceau concernant la forêt et demanda même au père de les accompagner tous les deux pour pouvoir y entrer. Ce que le père refusa, les bras rempli de bûches qu'il devait amener à la maison. Altia comprit tout à fait la décision, mais sa petite sœur est têtue et quant à elle, continua sur son idée. Elle remit ainsi dans les bras la bûche qu'elle avait prise auparavant des mains de son frère. Ce dernier, ne s'y attendant pas, fit comme il peut pour faire tenir la bûche dans ses bras, titubant quelque peu, avant de finalement tombé et lâchant toutes les bûches sur le sol. Cela fit bien rigoler le père, tandis qu'Altia se gratta l'arrière de la tête; avec un sourire gêné.

Non, c'est non, Aria. Vous pouvez jouer mais ne tardez pas trop quand même, le repas sera bientôt prêt.

Le rouquin acquiesça aux paroles de son père, avant de prendre sa suite.

Je ferais attention à elle, ne t'inquiète pas !

Dit-il, alors que son père leur retourna à tous les deux un sourire chaleureux. Il posa ensuite ses bûches et récupéra celle d'Altia. Mais avant cela, il en profita pour prendre ses deux enfants dans ses bras, avant de retourner vers la maison avec les bûches. La fratrie était maintenant seul à quelques centaines de mètres de la maison et juste devant la forêt.

Qu'est-ce que tu veux faire alors, Aria ? Et je te préviens, ne me dis pas que tu veux aller dans la forêt !

Ma famille, je l'aime par dessus tout. La gentillesse de papa et maman, la protection d'Altia... Même pour toutes les fleurs du monde je ne les échangerais pas. Des moments comme celui-là je les chéris par dessus tout. Il y a de tout dans notre famille, de l'amour et des signes cocasses comme par exemple mon grand frère avec ses buches. Papa prit sur lui de toutes les porter pour me laisser jouer avec Altia, je ne peux m'empêcher d'être impressionnée par sa force.

"Wouah Papa tu es trop fort !"

Puis il partit pour nous laisser seuls Altia et moi. Mon frère m'avertit à la seconde même de ne pas penser à jouer dans la forêt. Trop intelligent, il lit en moi comme dans un livre ouvert.... Il m'a coupé l'herbe sous le pied mais je ne compte pas me laisser faire. J'aime braver l'interdit.

Je tourne autour de mon frère, fait semblant de réfléchir à un jeu. Je prends bien soin de ne pas regarder la forêt. Ne surtout pas regarder la forêt c'est la base même de mon prochain plan. J'ai même enlevé cette lueur d'espièglerie dans mon regard. Il ne doit se douter de rien. En plus il est plus grand et plus rapide que moi, facteur à prendre en compte.

Je me fige soudainement, mon regard en direction de la maison familiale. Je la fixe de longues secondes, assez pour attirer l'attention de mon frère puis je la pointe du doigt. Il ne verra rien mais il cherchera... avec un peu de chance. Mon index touche sa poitrine et je crie.

"C'est toi le chat !"

L'instant de vérité. Je m'élance à grandes enjambées pour m'enfoncer dans la forêt. Profitant de la proximité j'ai réussi à y entrer mais pour combien de temps ? Combien de temps avant qu'Altia ne me rattrape et me botte les fesses comme il sait si bien le faire ? Je cours vite, j'essaie de maintenir une bonne allure. J'évite les racines, saute au bon moment et tourne pour me cacher derrière un grand chêne.

Mon cœur palpite, Altia m'a t'il suivi ? Je reprends mon souffle tout en admirant déjà le paysage. La forêt était magnifique.

Le père était déjà sur son chemin vers la maison avec toutes les bûches, laissant ses enfants juste devant la forêt pour qu'ils jouent quelque temps avant le repas. La question maintenant était: à quoi la fratrie allait-elle joué ? Si Altia avait demandé à Aria ce qu'elle voulait faire, cette dernière mis un certain temps à se décider. En effet, elle hésita ou du moins réfléchit longtemps, tournant autour du rouquin, qui croisa ses bras au bout d'un moment. Le temps commença à se faire long, alors Altia reprit la parole.

Décides-toi vite, où les parents vont nous appeler pour manger et on aura rien fait.

Dit-il, un léger sourire en coin.

Et finalement, la rouquin prit sa décision, pointant la maison familiale. Machinalement, Altia regarda ce que sa sœur pointait du doigt, mais cette dernière avait visiblement une autre idée en tête. Touchant la poitrine de son frère, la rouquine s'enfonça ensuite dans la forêt à toute vitesse, à la surprise d'Altia. Il savait bien qu'il aurait du lui dire quelque chose plus tôt, il avait bien vu son regard, il la connaît par cœur pourtant.

Oi, Aria, attends !

Cri-t-il alors qu'elle s'était déjà élancé dans la forêt.

Mais maintenant il n'avait plus le choix, il n'allait pas la laisser toute seule là-dedans. Alors à son tour, le rouquin entra dans la forêt en courant. Il couru vite, essayant de rattraper sa sœur, mais cette dernière, plus petite et surtout agile, se glissa dans des endroits où le jeune garçon du faire de petit détour, lui faisant tout de même perdre du temps. Il fallait pourtant bien qu'il la rattrape, ne serait-ce que pour lui mettre une bonne soufflante. Mais arriva un moment où le garçon se retrouva seul au milieu de la forêt. Il regarda de tous les côtés, mais ne vit personne.

Aria ! Où est-tu ?!

Hurla-t-il dans la forêt. Mais cette dernière ne portait pas la voix, ainsi le cri du rouquin resta emprisonné tout autour de lui. Sa voix ne portait pas assez. Mais au point où il en était, il n'avait rien à perdre, autant continué à la chercher. Ainsi, le rouquin se remit à courir comme un dératé dans cette fichue forêt pour retrouver sa sœur. Au bout de quelques minutes, il s'arrêta une nouvelle fois, mais il ne l'avait toujours pas trouvé. Soudain, un bruit de feuillage se fit entendre, éveillant immédiatement l'attention du jeune garçon qui se retourna.

Aria !

S'écria-t-il. Mais ce n'était pas soeur. Sauf si on considère que d'un coup, Aria Verana a pris une bonne centaine de kilos et une grosse fourrure. Non, ce n'était pas Aria, mais bien un immense sanglier. Altia lui, se figea. Son père lui avait déjà dit comment réagir face à des animaux sauvages, si jamais il tombait dessus. Mais en voir un en vrai est tout autre chose. Altia ne bougea plus, se tenant fixe face à la bête, puis amorçant doucement un pas pour reculer petit à petit. Il fallait être très prudent, sinon il y passait. Et dire qu'Aria est encore dans cette forêt toute seule.

Je cherche à reprendre mon souffle, mon cœur lui n’a pas envie de se calmer si bien que si Altia me retrouve je serais incapable de prendre la fuite à nouveau. C’est dur de semer son grand frère ! Je ferme les yeux quelques instants avant de sentir une légère brise comme des feuilles qui se lèvent. C’est mon grand-frère ! Il ne m’a pas vu me cacher et continue encore plus loin dans la forêt, là où c’est sans doute encore plus dangereux. La décharge que je ressens dans tout mon corps m’annonce que j’ai fait une bêtise, une grosse bêtise. Alors à mon rythme, j’essaie déjà de rattraper Altia.

Je me crispe, essaie d’accélérer, ferme les yeux et bute subitement sur quelques choses d’encore plus tendu que moi. Altia. Je fronce les sourcils le choc m’a fait un peu mal et j’allais me plaindre comme il se doit lorsque je remarque que mon grand frère, lui, n’a pas bougé. Pourquoi ? J’attrape sa manche avant que je ne vois son regard. J’en suis le prolongement pour finalement poser mes yeux sur une immense bestiole. Un gros cochon avec des os qui sortent de la bouche !

« Le monstre qui garde la princesse… »

Je viens de chuchoter, plus pour moi-même que pour mon frère. Il semble impressionné par la stature du monstre. Mon frère est encore plus fort qu’un chevalier je suis sûre qu’il n’a pas peur. S’il ne fait rien c’est uniquement pour pas blesser le monstre. Puis je me rappelle que parfois papa ramenait ce genre d’animal à la maison pour en manger mais d’habitude ils sont beaucoup plus petits.

Je ne lâche pas la manche d’Altia et je recule exactement en même temps que lui. S’il a décidé de faire comme ça je ferais comme lui. Parfois il va à la chasse avec papa. Il doit savoir quoi faire. Soudain l’immense masse animale se redresse, le regard en direction du centre de la forêt, encore plus loin. Son immense œil brille d’un étrange éclat comme attiré par les profondeurs.

« Il est beau. »

Nouveau chuchotement de ma part mais cette fois à l’attention d’Altia. Bien que je devine la dangerosité du monstre, la scène n’en demeure pas moins magnifique selon moi. C’est une chose que j’ai hérité de mes parents, l’amour de la nature. C’est aussi cet amour qui m’a poussé à entrer dans la forêt à plusieurs reprises pour y découvrir toutes ces merveilles. Jouer dans une pâture ou un champ ne permet pas d’explorer et de découvrir tout un tas de chose comme une vieille forêt par exemple.

Le sanglier est toujours là, mais il semble nous avoir oublié….

Le rouquin s'était figé. C'était la première leçon que lui avait donné son père s'il tombait sur une bête sauvage bien plus grosse que lui, et surtout aussi dangereuse. Se figer tel un arbre, et attendre que l'orage passe. La deuxième leçon était d'essayer de prendre ses distances, pour ne pas que la bête prenne le jeune garçon pour une menace. Ainsi, pas à pas, Altia recula doucement mais sûrement. Mais c'est alors qu'il sentit un choc dans son dos. Cela le pris par surprise, mais il fit de son mieux pour ne pas bouger outre mesure face au Sanglier. Ce n'était autre qu'Aria, qui se prit le dos de son frère de plein fouet.

La jeune fille semble en admiration face à la bête, alors que son frère lui fit signe d'être silencieuse. Le rouquin passa aussi son bras devant elle par réflexe, pour la protéger si jamais le Sanglier venait à charger. L'animal semblait les oublier au fur et à mesure que la fratrie reculait.

Bien, maintenant on va le laisser tranquille et s'en aller.

Chuchota-t-il à a soeur alors qu'il la serra contre lui et se dirigea pour sortir de cette situation. Mais alors qu'ils bougeaient un petit peu plus pour se sortir de cette situation, le sanglier s'agita subitement et chargea les deux enfants !

Cours Aria !

Cria-t-il à sa sœur alors qu'Altia la prit par la main et se mit à courir aussi. Altia tira sa sœur et couru aussi vite qu'il pu, jusqu'à voir un tronc abattu à terre. Le rouquin prit sa sœur et la cacha derrière avant de la suivre et se caché à côté. Il serre Aria contre lui, alors que le Sanglier n'est pas très loin et essaye de renifler la trace des deux enfants.

Ne t'en fais pas, cela va bien se passer.

Chuchota-t-il à la rouquine, avec un léger sourire.

Une bête magnifique. C’est ce que je pense malgré le danger de la situation. L’envie de le toucher, de le caresser est présente, exactement de la même manière que de pénétrer dans cette forêt un peu plus tôt. Il m’en faut peu, je le sais je suis comme ça. Altia le sait aussi sans doute puisqu’il prend la parole me tirant de mes rêveries. Laisser la bête et s’en aller. J’hoche la tête ne réalisant pas qu’il ne peut me voir posté ainsi de moi.

Il se serre contre moi et prend la direction opposée au monstre des forêts avec la plus grande des précautions. Il prend son rôle de frère très à cœur. Il est protecteur et c’est dans ces moment-là que je me sens plus proche de lui. Une fois en sécurité je sais aussi qu’il va me passer un savon mais je sais aussi que ça ne va pas durer très longtemps. Un grognement similaire au bruit que ferait un cochon attire notre attention. L’animal charge et Altia l’a bien deviné puisqu’il a déjà crié et tiré en avant.

Nous courons… plus vite que d’habitude à travers la forêt. La peur arrive à nous transcender, elle nous permet de faire jeu égal ne serait-ce que quelques instants avec la nature. Puis je me retrouve manipulée comme une poupée, Altia me met à l’abris derrière un tronc d’arbre avant de me rejoindre. Il me rassure.

« Je n’ai pas peur tu es avec moi. »

Je serre mon frère contre moi, plus fort que la normale. Peut-être qu’inconsciemment j’ai plus peur de la situation qu’il n’y parait ? Je réalise que je n’ai pas peur pour moi mais pour mon frère et là les larmes montent. C’est de ma faute si nous sommes pris au piège d’un animal aussi grand que terrifiant. Si je n’avais pas voulu jouer dans la forêt rien ne serait arrivé. Une larme coule puis une deuxième mais heureusement je n’éclate pas en sanglot. Mes larmes sont silencieuses.

Je dois agir…

C’est ma faute….

Doucement, j’essaie de m’extirper de l’étreinte d’Altia. Je me baisse avec lenteur pour ne faire aucun bruit et attrape une pierre. Mon regard croise celui de mon frère et je pense qu’il a compris où je veux en venir. Le sanglier est derrière le tronc donc si je lance la pierre là…

TOC

La bête tourne la tête exactement où j’ai lancé la pierre et charge sans autre forme de procès un malheureux buisson, puis un autre. Elle n’est pas très intelligente puisqu’elle charge le vide en ligne droite jusqu’à disparaître de notre champ de vision.

Je regarde Altia de mes yeux larmoyants et dis :

« Pardon. »

Je renifle.

La fratrie était cachée derrière un tronc abattu. Collé l'un à l'autre, ils attendaient que la tempête passe. Cette tempête n'est autre que ce sanglier qui les a pourchassé pendant plusieurs minutes avant que le frère et la sœur ne trouve refuge derrière cet arbre.

Aria n'avait pas peur, du moins c'est ce qu'elle disait. Altia, lui, avait peur. Il le sait, il n'a pas honte de ça. Il a peur pour lui, mais surtout, il a peur pour sa sœur. Elle, commence à pleurer. Sans doute doit-elle se dire que tout cela est de sa faute. Et en un sens, elle aurait raison. Altia va lui passer un sacré savon pour ça, du moins c'est ce qu'il comptait faire, mais on dirait qu'elle a compris d'elle même. Les larmes commencent à couler le long de sa joue, mais elle n'explose pour autant pas en sanglots. Et c'est avec ces larmes qu'Aria commença à se sortir de l'étreinte de son frère, pour ramasser une pierre par terre. Ses gestes sont silencieux et Altia la regarda faire. Il ne pouvait rien dire, à peine bougé: cela s'entendrait à tous les coups. Mais la jeune fille réussit le sien. Elle envoya la pierre dans la direction opposée, attirant l'attention du Sanglier par la même occasion qui chargea sans réfléchir, jusqu'à disparaître de la vue des enfants.

Passant sa tête par dessus le tronc pour vérifier qu'ils étaient maintenant en sécurité, Altia scruta la présence d'autres dangers, avant de lâcher un immense soupir de soulagement et de se relâcher.

On l'a échappé belle !

Dit-il, alors qu'il reposa sa tête contre le tronc, assit par terre, avant de tourner son regard vers sa jeune sœur. Il la regarda intensément, avant de la prendre dans ses bras, et de la serrer avec force contre lui.

Ne fait plus jamais ça, d'accord ?

Glissa-t-il à l'oreille de sa sœur. Oui, il était hors de question de refaire une chose pareille. Il fini par relâcher l'étreinte, et se relever finalement.

On devrait rentrer, les parents vont commencer à s'inquiéter.

Dit-il. Mais soudain, des bruits sourds se firent entendre. Altia se demanda ce qu'il se passait encore. Mais ces bruits ne venaient pas de la forêt. D'autres bruits sourds se firent une nouvelle fois entendre, suivi de cris cette fois. Il n'y a plus de doute à avoir, cela vient du village !

Viens vite, Aria !

Lança-t-il alors qu'il commençait à se diriger vers là d'où les cris viennent. A grandes enjambés, la fratrie fini par arrivée à l'orée de la forêt où ils pouvaient commençait à constater les dégât, la forêt surplombant leur village...

Oui je ne ferais plus jamais ça. Mon hochement de tête qui suit le confirme une nouvelle fois. La curiosité m’a poussé à enfreindre la règle instaurée par papa et maman et maintenant je le regrette sincèrement. Je sais aussi que ce n’est pas le moment mais je reste certaine que le sanglier devait garder quelque chose. Il est le monstre-gardien comme dans les histoires de maman. Altia me serre contre lui. Lui aussi a dû avoir peur. Je lui ai joué un bien vilain tour. Il paraît soulagé et propose de rentrer à la maison.

Cette fois je ne me fais pas prier pour obéir. J’ai eu ma dose de sensation forte pour les prochaines années. Je resterais avec maman pour écrire le livre et rien d’autre. Plus de forêt, plus de monstre, mais….

Que garde le sanglier ?

« Oui on rentre. »

J’essuie quelques larmes sur ma manche et je souris à mon frère. Il est toujours là pour moi, prenant son rôle d’ainé très à cœur. Il est un peu comme un deuxième papa.

« Merci. »

On n’a pas fait quelques pas que d’autres bruits bizarres se font entendre. Des bruits sourds. Rapidement on comprend tous les deux que ces bruits ne viennent pas de la forêt mais du village. Des cris. Je cligne des yeux ne comprenant pas. Il y a une fête ? Maman ne m’a rien dit tout à l’heure. Sauf que je compris rapidement qu’il ne s’agissait pas d’une fête devant le regard de mon frère. Il ne tarde pas d’ailleurs à me faire courir. Il a l’air préoccupé et nous pressons le pas sous son impulsion. Je peine à suivre la cadence imposée mais après ma bêtise j’essaie de me faire toute petite.

Je reste sans voix devant le spectacle qui s’offre à nous. Grâce à notre position nous avons une vue imprenable. Mon cœur loupe un battement, le temps ne défile plus, il est comme suspendu. Puis je crie de toutes mes forces, de tout mon âme avant de partir en courant. J’ai déjà tout oublié de la mésaventure de la forêt, la peur, le sanglier, tout.

« Papaaaaaaaaaa, Mamannnnnnnnnnnnnnn ! »

Devant nous se dresse un village à moitié agonisant en proie à des batailles. Certaines maisons sont déjà écroulées, d’autres se font dévorer par les flammes. A travers les larmes je distingue des corps jonchant le sol, d’autres sont debout puis tombent. Je crois distinguer des cris, des pleurs. Tout se mélange dans mon esprit d’enfant. Comment peut-on passer de la beauté naturelle de la forêt à l’horreur de la guerre ? Comment ?

La pente m’aide à accélérer. Je m’emballe, loupe un pas et trébuche pour atterrir dans une flaque d’eau. Le liquide a une drôle de consistance et d’odeur. J’ouvre les yeux. Tout est rouge. Du sang. Je suis dans une flaque de sang. Déboussolée, je tourne la tête espérant voir mes parents. Ou sont-ils ?

Elle disposait tout de même d'une force insoupçonnable. C'est ce que se dit Altia à propos de sa sœur. Cette dernière, même sous la peur, malgré ses larmes, sut réagir pour les sortir de cette situation. Aria dit souvent que son frère est très fort, ce que fait souvent plaisir au rouquin, voire même le gêne parfois. Mais elle ignore probablement sa propre force dont elle dispose.

Ce sont les quelques pensées qu'eut Altia, juste avant d'entendre les bruits sourds, qui les firent courir de nouveau comme des dératés. Pour le coup, le jeune garçon n'avait pas fait attention et avait pressé le pas, à tel point qu'Aria eut du mal à suivre. Mais Altia connaissait ces bruits. Il les avait déjà entendu auparavant. Certes, pas très souvent, le village étant paisible. Mais il savait les reconnaître, ces bruits ne s'oublie même si on ne les entend qu'une fois. Et lorsque la fratrie arriva à l'orée de la forêt, il eu la confirmation de ses pires idées. Le village n'était autre qu'à feu et à sang, des coups de feu se faisait encore entendre mais ils étaient très vite éteint. Altia ne su pas quoi faire dans cette situation, la première chose serait de retrouver leur parents, mais doivent-ils se jeter là-dedans à corps perdus au risque d'être aussi blessés, voire pire ?

Aria elle, ne se posa pas de question. Elle dévala la pente à grandes enjambés criant pour retrouver son père et sa mère. Sans surprise, elle trébucha même. Altia lui couru après, encore. Et arriva enfin à sa hauteur. Sa petite soeur avait trébuché dans ce qui n'était autre qu'une énorme flaque de sang. Elle en était recouverte, mais chercha encore les parents des yeux. D'un geste, Altia la prit contre elle, et la releva. Elle ne devait pas rester là-dedans plus longtemps.

Tu as raison, allons retrouver papa et maman.

Dit-il calmement à Aria, qu'il serra contre lui en marchant, se tâchant à son tour avec du sang.

Si leur parents devait être quelque part, cela serait probablement dans leur petit maison. Il n'en était pas si loin, mais il allait falloir marcher un peu. Altia se mit donc à marcher dans cette direction, ne pressant pas le pas outre mesure. Le rouquin en profita pour essayer de voir ce qu'il se passait dans le village, qui les attaquait. Et la seule chose qu'il remarqua et qui resta gravé dans son esprit, ce sont les armures noires que portaient les assaillants. Ceux avec ses armures trucider tout simplement les villageois sans autre forme de procès. Mais le pire, c'étaient probablement les rires qui souvent accompagnaient ces tueries. Altia détourna le regard, pour ne pas en voir plus et fit en sorte qu'Aria en voit le moins possible.

Et après quelques minutes, ils finirent par arriver en vue de leur maison.

La voilà ! Papa, Maman !

S'exclama Altia, avant de se dépêcher d'y aller. Il arriva devant la porte, et la poussa. Il ne voulait pas en voir plus, mais le sang coulait encore et atteignit les pieds du rouquin qui les regarda, avant de reposer son regard sur l'intérieur de la maison. Son monde s'effondre, petit à petit.

Pas de parents aux alentours. Je ne vois que des flaques rouges, des gens à terre qui ne bougent pas. Même les animaux sont à terre et en morceaux comme un puzzle géant. Mon cœur accélère encore une fois. Je ne comprends pas ce qu’il se passe si ce n’est que des personnes font du mal à d’autres personnes. Je pense que ce sont des trucs de grands qui ne sont pas à ma portée. Altia arrive bien vite et je me sens soulagée. Heureusement qu’il est là mon grand frère. Il est mon chevalier rien qu’à moi. Il me serre contre lui et m’aide à me relever.

Il est d’accord avec moi. Nous devons retrouver nos parents rapidement.

Nous prenons la direction de la maison. Il y a des gens en armure noire. Ils me donnent froid dans le dos et ressemble comme deux gouttes doigts aux méchants dans les histoires que maman me raconte. Après le gardien de la forêt voilà les méchants chevaliers. Les histoires de maman seraient-elles réelles ?

« Altia, pourquoi ils sont méchants ? »

Phrase naïve d’une enfant tout aussi naïve. Je comprends de moins en moins ce qu’il se passe. Je rêve peut-être ? Je vais me réveiller et je me retrouverai dans mon lit. Maman serait dans la cuisine en train de préparer le petit déjeuner et Papa serait en train d’aiguiser sa hache pour couper des buches avec Altia.

Nous évoluons à travers le village ou plutôt ce qu’il en restait. Il y avait encore de temps en temps des cris, cris rapidement éteints. Je vois bien ce que mon frère essaie de faire en m’empêchant de regarder sauf que ma curiosité me pousse encore et toujours à dépasser les limites. Il y a aussi cette odeur de cochons grillés qui commence à être insupportable.

Voilà la maison.

Altia est le premier, comme pour me protéger. Il y a encore une flaque rouge à l’entrée de la maison, des buches à même le sol… une main. Mon regard remonte cette main qui se transforme en bras, en torse jusqu’à la tête. Papa. Mon monde s’effondre. Je comprends que je ne suis pas dans un conte de fée, ni dans un cauchemar. L’odeur de mort est bien réelle. Mes larmes ne se stoppent plus et ma serre celle de mon grand frère de toute ses forces.

« Papa. »

Je ne dois pas bien le prononcer, mes sanglots et hoquets m’en empêchent. Il me fixe, horrifié. Ses yeux sont blancs, vides. Il est différent de d’habitude. Il est mort. Je suis terrifiée si bien que je suis dans l’incapacité de bouger jusqu’à ce cri féminin qui me réveille.

« Maman. »

Pour ceux qui sont méchants comme ça, il n'y a pas de raison. Ils sont juste méchants parce-que ils en ont envie, ce sont les plus dangereux.

Répondit Altia à sa soeur. Sa question était naïve, mais c'était celle d'une enfant qui ne comprenait pas ce qu'il se passait autour d'elle. Le rouquin n'était d'ailleurs pas beaucoup plus avancé. Mais au vue des horreurs que commettent ces personnes, il n'y avait pas de doute: ils sont le mal incarnés, il n'y a pas à chercher plus loin.

La fratrie traverse tant bien que mal un village qui brûle. Il ne reste plus grand chose. Des cris se font entendre au quatre coins de celui-ci avant de rapidement disparaître. Altia faisait ce qu'il pouvait pour préserver Aria, mais cette dernière avait la curiosité poussé à l'extrême et il ne pouvait pas y faire grand chose.

Finalement, ils arrivent enfin devant leur maison. Le sang coule à flot alors que le rouquin est sur le palier, ouvrant la porte. Ses pieds sont pris dedans. Son regard se dirige vers ceux-ci, il n'y croit d'abord pas. Cela ne peut pas arriver. C'est un rêve, ou plutôt un horrible cauchemar. Mais c'était bien la réalité. Un corps froid leur faisait face, baigné dans son propre sang. Ce corps, ce n'est autre que celui de leur père. Aria ne retenait pas ses larmes, qui tombèrent une à une par terre, alors qu'elle prononça "papa" de façon à peine compréhensible. Quant à Altia, il pleura aussi abondamment. Sa sœur tenait sa main fermement, encore plus qu'avant. Altia lui rendit. Le rouquin ne prononça pas un moment, trop choqué. Il pleura seulement.

La fratrie fut cependant tiré de leur torpeur par un cri. Un cri féminin. Cela réveilla tout de suite Aria, qui dit rapidement que cela pourrait être leur mère. Altia eut la même réaction. Reniflant un gros coup, le rouquin chercha l'origine du cri.

Derrière la maison !

Dit-il une fois trouvée. Effectivement, le cri venait de derrière la maison. Toujours tenant la main de sa sœur, le jeune garçon la tira et les emmena tous les deux derrière leur petite maison. Il n'y avait plus rien à faire pour leur père. Il était mort, c'était fini. Mais peut-être pouvait encore faire quelque chose pour leur mère. Peut-être il y avait-il une chance qu'ils ne finissent pas orphelin.

Naïveté, def. Crédulité de quelqu'un qui résulte de l'inexpérience, de trop de confiance allant jusqu'au ridicule.

La fratrie arrivèrent rapidement derrière la maison. La vue n'était pas meilleure, voire même pire, en réalité. Un homme en armure noire tenait leur mère à bout de bras, alors que son autre bras traversait de part en part le torse de la maman au niveau de la poitrine. Les larmes d'Altia n'étaient pas sèchent qu'elles se remettent à couler immédiatement à la vue de ces images.

Mamaaaaaan !

Cri-t-il, dans le désespoir le plus total.

Altia pleure aussi devant le corps de papa. Il est fort mais je devine que c’est dur pour lui aussi. Il me serre la main que je ne compte pas lâcher. Hors de question. Je n’arrive pas à penser à autre chose. Le regard vide de papa ne me quitte pas. Je ne me sens pas bien. Ma tête tourne encore et encore. J’en reviens à l’hypothèse que je suis en plein cauchemar, c’est la seule explication plausible et pourtant….

Un cri nous ramène tous deux à la réalité, maman. Altia l’a bien compris et m’incite à la suivre derrière la maison. Par réflexe, j’attrape le livre de maman posé sur la table à coté de papa. Il y a quelques gouttes de sang bientôt rejointes par mes larmes. Maman sera contente de le retrouver. Je suis toujours aussi naïve ou plutôt je ne veux pas deviner pourquoi Maman a crié.

Nouvelle vision d’horreur.

Une silhouette dans une armure sombre comme celles que l’on a vu à travers tout le village venait de transpercer ma mère. Son bras ressortait dans le dos. D’instinct les enfants « normaux » iraient se cacher dans les bras de leur frère, profiter de sa taille pour ne plus rien voir mais pas moi. Je sens de la colère monter en moi. Mes larmes ne se stoppent pas, coulent encore plus qu’avant. Et je craque.

Je lâche la main d’Altia pour foncer sur cette masse sombre. Ses protections de métal sont froides et me fond mal aux mains dès le premier coup que je porte. Je ne m’arrête pas, hors de question. Il va payer pour le mal qu’il a fait à ma famille. Dans ma colère, le livre de maman est tombé aux pieds de mon grand frère, je l’ai oublié. Je crois que j’en viens à hurler, ça m’aide à extérioriser toute cette douleur que je ressens.

Je l’entends pousser un rire ou un grognement je n’entends pas très bien et puis plus rien. Le trou noir.

Ah si, je crois ressentir une affreuse douleur à la tempe.

Cette vision était digne de celle que l'on doit montré au pêcheur en Enfer, sans aucun doute. Leur mère était là, empalée sur le bras de cette homme à l'armure sombre, son sang coulant dessus avant de se répandre par terre. Les larmes d'Altia elles aussi se répandaient sur le sol et la fratrie eu le même réflexe de crier pour extérioriser leur douleur.

Mais Aria, elle ressentait encore autre chose. La rouquine avait déjà son petit caractère malgré son jeune âge, et s'en était trop pour elle. Si Altia pouvait ressentir le danger imposant que représentait l'homme, Aria n'en avait que faire et se jeta sur lui. Elle lui donna des coups mais c'est à peine si en terme de taille elle lui arrivait au niveau du bassin. Altia lui n'avait pas bougé. Dans sa fureur, sa sœur avait jeté le livre qu'elle venait de récupérer. Ce fameux bouquin auquel elle tient tant et qu'elle a rempli avec sa mère. Il se ne sait pas bien si c'est le choc, mais le rouquin semble paralyser. Est-ce que c'est la peur ? Que peut-il faire dans cette situation ? Il fut sortie de sa torpeur par une coup sourd. Aria venait d'être projeté à quelques mètres par un violent coup au visage, quelques gouttes de sang s'échappant de sa bouche. Le poing de l'homme faisait quasiment la taille de la petite tête de la jeune fille, qui s'écroula sans surprise.

Dégage de là, sale gamine

Grogna-t-il.

Cette fois, s'en était trop pour Altia. Il serra les dents et hurla un cri de colère avant de se lancer lui aussi sur l'homme. Altia était plus grand que sa sœur, mais il n'arrivait tout de même pas à la poitrine de l'homme qu'il avait en face de lui. Ainsi, le rouquin lança ses poings, maladroitement sans aucun doute, que l'homme esquiva sans effort. Une première mandale fit reculé le jeune garçon, mais cela ne l'empêcha pas de retourner à l'assaut, alors qu'un filet de sang coulait de sa lèvre ouverte. Plusieurs autres mandales suivirent. Mais Altia était persistant.

Tu commences à me soûler toi !

S'énerva-t-il alors qu'Altia ne lui donna qu'un cri de fureur en réponse. Mais cela sera probablement son dernier puisque l'homme ferma maintenant son poing avant d'enchaîner le garçon de plusieurs coups au visage et l'abdomen. Un coup de pieds l'envoya ensuite valser plus loin. Elle essaya de se relever une dernière fois alors que l'homme s'approchait de lui, probablement pour l'achever. Il avait lâché le corps de la maman, ce dernier faisait un bruit lourd en tombant au sol. Une autre voix se fit alors entendre, disant qu'ils avaient fini et qu'ils s'en allaient. L'homme en armure noire acquiesça par la positive, avant de lâcher une dernière phrase au rouquin.

C'est votre jour de chance, on dirait !

Dit-il, avant de lâcher un dernier coup au garçon puis de s'en aller.

Altia lui, entendit seulement les dernière parole de l'homme avant de recevoir le coup sans pouvoir riposter. Il le prit de plein fouet, ses oreilles bourdonnaient et sa vision se troubla avant de se noircir. Puis plus rien.

J’ai mal. J’entends des bourdonnements et une drôle d’odeur vient taquiner mes narines. C’est comme quand… maman cuisine un petit cochon de lait. Oui c’est ça ! J’ai dû faire un mauvais rêve ! J’ai dû me cogner quelque part voilà tout.

J’ouvre les yeux un peu contre cœur.

Et absolument tout me revient en pleine figure. Le genre de souvenirs qui te reviennent en tête et que tu aurais préféré éviter. Tout de suite mon ventre me fait mal, j’en ai même la nausée. Mes larmes coulent de nouveau et je me tiens la tête. J’ai une belle bosse. Je cligne des yeux et horrifiée je comprends que l’odeur de brulée vient de notre maison et accessoirement du reste du village. Toutes les habitations sont en flammes.

« Papa ! »

Là encore un souvenir en pleine face. Papa est encore dans la maison. Je ne réalise pas que l’odeur de cochon grillé est…. Non je ne peux pas y penser. Je me relève, titube comme certains adultes ayant trop bu à la fête du village et m’élance vers la maisonnée en flamme. Je fais plusieurs pas avant de trébucher sur quelque chose de mou. J’ouvre à nouveau les yeux pour fixer le corps inerte d’Altia. Si je savais ce que c’était je pourrais dire que je suis en train de devenir folle. Tous les membres de ma famille viennent de tomber comme des mouches.

Je reste à côté d’Altia incapable de bouger, incapable de le laisser seul. Je pleure en silence avant de sursauter suite à un fracas provenant de la charpente de la maison. J’éclate en pleurs cette fois. Je craque. Maman me regarde aussi, elle me fixe, me juge même. Dans un élan de désespoir je frappe le corps inerte de mon frère, le secoue sans aucune précaution. Je le supplie de se réveiller, de ne pas me laisser toute seule. Il n’a pas le droit, pas lui.

« Altia, réveilles toi ! »

Toujours aucune réaction. Paniquée, je ne remarque même pas qu’il respire encore. Tout un tas de scénario passent dans ma tête. Je n’arrive plus à bouger, l’angoisse me gagne.

Grrrrrrr

Un chien…. Poils gris, hérissé, une oreille à moitié déchirée, qui s’approche de maman. Il est dans un sale état. Il doit trainer à droite à gauche et se nourrir dans les poubelles.

« Recule ! »

J’hurle ! Me lève devant la bête qui grogne encore plus. Il ne faut pas être idiot pour s’avoir ce qu’il veut. De la viande. Maman n’est pas une viande, c’est maman. Je ramasse un caillou et lui lance en pleine tête. Il recule d’une patte et se met à aboyer. Son grognement est plus sourd, plus mauvais même. Instinctivement je me mets entre lui et Altia. Je dois faire un choix. Il ne touchera pas mon frère.

Mon menton tremble, il n’a pas le droit. Pas elle. Et toujours cette odeur…. Quel cauchemar.

C'est noir. Tout est noir. Il n'y a rien, à part ce noir ambiant.

Où suis-je ?

Pensait instinctivement le jeune garçon.

Ah, je suis mort, c'est ça. Le paradis n'a pas une bonne tête, en tous cas.

Poursuivit dans ses pensées le rouquin. Maus une voix vint le troublé. Une voix légère, qui sanglote, tremblante. Une voix aigue. Une voix qu'Altia connait. On le remua d'ailleurs par la même occasion, alors que son nom n'arrêtait pas d'être appelé.

A... Ria...

Se souvient-il.

D'autres bruits se font entendre. Des grognements, des aboiements. Puis une voix d'une petite fille qui hurla, toujours embuée dans ses larmes. Puis les sens du jeune garçon lui revint, et c'est une puissante odeur qu'il sentit maintenant. Une odeur de mort, littéralement. Les grognements se font maintenant plus forts, entrecoupés d'aboiements. Ils se font menaçant alors qu'Altia sent maintenant sa sœur se mettre devant lui. Il est en danger... et Aria veut le défendre ?

Non, il n'est pas mort. Il est encore vivant, et il n'a pas droit de laisser Aria toute seule. C'est lui qui doit la protégée, et pas l'inverse. C'est comme ça que marche l'ainesse ici. Alors, encore à demi inconscient, il tenta de bouger sa carcasse tant bien que mal. Que pouvait-il faire ? Que pouvait-il faire dans un état pareil ? Il posa d'abord sa main sali par la terre sur l'épaule de la jeune fille et poussa avec son autre main pour se mettre sur ses genoux. Puis, petit à petit, il fit passer Aria derrière lui. Il se traîna sur ses genoux pour s'avancer avant de se mettre debout difficilement. Ses mèches rousses couvraient son regard, la tête baissée regardant vers le sol. Sa silhouette n'était autre que celle d'un petit garçon qu'on avait malmené un long quart d'heure dans une ruelle après un larcin.

Le garçon ne ressemblait à rien, mais son aura se fit comme plus menaçante. La bête senti cela et réagi du tac-au-tac, se faisant elle aussi plus menaçante. Mais Altia n'y réagissait pas. Il releva seulement la tête, ses mèches de cheveux se relevant pour laisser apparaître un regard vide. Toujours inconscient, le rouquin avait tout de même réussi à se relever. Son regard était vide toute conscience, mais pas de vie, pas d'intensité. Ce regard, il exprime une force insoupçonnée par le jeune garçon, un éclat qui apparu dans ses yeux.

Dégage.

Dit-il d'une voix forte et ferme, en posant ce regard sur la bête qui menaçait la fratrie. Ce regard ferait sûrement en pâlir plus d'un. Et la bête reconnu immédiatement sa défaite face à ses yeux en se calmant et courant dans la direction opposée des enfants.

Quant à Altia, il retomba raide face vers le sol.

C'est instinctif. Quelque part au fond de moi j'espère qu'il est encore en vie. Maman... elle... Ce serait impossible. La main du méchant, sa main l'a transpercé. Et je suis donc là devant le corps inerte de mon frère essayant de faire de mon mieux pour que ce chien ne nous attaque pas. Il grogne de plus en plus. J'appréhende mais je peux pas dire que c'est de la peur.

Ai-je déjà eu peur ? Sans doute, c'est normal pour une enfant.

Ria ?

Je tourne la tête pour voir Altia se relever ! De nouvelles larmes coulent mais cette fois c'est de la joie. Je suis heureuse, il est encore là avec moi. J'en oublie même le chien qui pourtant grogne encore. Mon frère pose la main sur mon épaule, se sert de mon corps pour se relever et sans que je ne réagisse, il est déjà devant moi. Il se présente face à l'animal. Je vois bien qu'il est dans un sale état.

Choquée si c'est le terme approprié me concernant, je pose une main sur ma bouche. Je ne veux pas faire de bruit inutile. Altia semble prendre les choses en main. Il est en colère je crois. Il relève la tête pour fixer le chien. Il y a quelque chose de bizarre dans l'air, une atmosphère étrange. Je... je crois enfin... mon frère est différent. Il donne un ordre et le chien obéit, fuit sans rien demander en retour.

Je suis sur le point d'enlacer mon frère mais il ne m'en laisse pas le temps tombant à même le sol. Même pas le temps de crier victoire.

"Altia ! Altia !"

Plus rien.

Tout était plus calme maintenant. Les cris s'étaient tus. Les feux avaient arrêté de brûler et subitement, tout reposa dans le silence.

Les sens du jeune garçon n'étaient plus sollicité. Il se souvient seulement qu'on l'avait appelé, et qu'il avait peut-être réussi à répondre à cet appel. Mais après cela, c'est le trou noir pour le rouquin. Il n'est pas d'ailleurs pas encore réveillé. Il faut dire qu'il était dans un sale état et que les secours sont arrivés très tardivement. Plusieurs côtes cassés, une mâchoire et une épaule déboîtées, voilà le bilan pour Altia. Fort heureusement, il n'eut pas de séquelles sur les organes internes, mais au vue de la médecine dans ce pays, il n'aurait de toute façon pas pu y faire grand chose.

Mais il était temps pour lui d'ouvrir les yeux. Ainsi, ses paupières commencèrent à bouger et le jeune garçon ouvrit finalement les yeux alors que son regard se posa directement sur le plafond.

Où... Suis-je ?

Laissa-t-il échappé d'une voix faible.

Il était allongé dans un lit. Pas très confortable, certes, mais un lit tout de même. Il avait les yeux engourdis tant ils avaient été fermé, et ne serait-ce que les garder ouverts était un effort pour lui. Mais il fit balader son regard pour balayer la pièce où il se situait. D'autres gens s'y trouvaient. Aussi allongé sur des lits, et inconscient ou en train de dormir, peut-être. Mais Altia sentit un poids alors qu'il chercha à bouger son corps. Il n'eut pas à chercher très longtemps pour trouver ce que c'était. Sortant sa main de dessous la couverture, il l'a posa ensuite délicatement au-dessus de la tête rousse de sa jeune sœur, endormi sur le corps de son frère, avant de la caresser doucement pour ne pas la réveillé. Un sourire égaya alors le visage du rouquin. Il semble qu'il s'en soit sorti sain et sauf, et surtout, plus important que tout, Aria va bien.

Les derniers jours ont été éprouvants. Des questions, des médicaments à prendre, encore des questions. Ils ont même essayé de me placer dans un couvent. C'est comme ça lorsque l'on a plus de parent. Au début les gens sont gentils puis après... on est traité comme des parasites, des gêneurs et on cherche par tous les moyens à vous placer. Je n'ai pas lâché. Je me suis débattue, accrochée au lit d'Altia et ils ont fini par abandonner.

Ils ont dit que personne ne voudrait adopter deux enfants ensemble surtout des "aussi vieux". Je m'en moque, je reste avec mon grand frère. Ils ont dit aussi que toutes nos affaires avaient brulé dans l'incendie de la maison. Nous n'avons plus rien si ce n'est le livre de maman que je n'avais plus lâché depuis. Moi je vois que j'ai encore Altia et c'est le plus important.

Je me suis assoupie aux cotés du grand blessé et c'est une main sur ma tête qui aide à me réveiller. Mes yeux brillent et je me jette à son cou oubliant ses blessures.

"Tu es réveillé."

Les larmes coulent de nouveau, à croire que c'est à cause de la pression qui redescend. J'ai eu tellement peur. Je reste ainsi quelques minutes profitant de mon frère avant de lui expliquer la situation.

"On est à l'hôpital. Ils veulent nous séparer... tu ne vas pas les laisser faire dis ? Ils disent que si on reste à deux on ne sera jamais adopté, qu'on restera à l'orphelinat pour toujours."

Je lui montre le livre de maman qu'Altia ne connait que trop bien.

"C'est tout ce qu'il nous reste grand frère."

Désolé, je ne voulais pas te réveiller.

Mais le rouquin eut à peine le temps de dire ces quelques mots que la jeune fille sauta au cou de son frère. Ce dernier se tordit un peu de douleur. Il était endolori dans tous le corps et bien qu'il venait de se réveiller, la douleur se fit immédiatement sentir.

Tu me fais mal, Aria.

Dit-il, un sourire aux lèvres. Il valait mieux ça que l'inverse, à vrai dire. Et lui est surtout heureux de voir qu'Aria n'a rien, si ce n'est quelques blessures plus légères. La fratrie resta de longues minutes ainsi, alors qu'Altia serra sa sœur contre lui à son tour, il pu sentir les larmes de la jeune fille coulées. Puis, la rouquine fini par lâcher l'endroit où ils étaient: un hôpital, ça tombe sous le sens. Mais elle ajouta autre chose, notamment que les adultes voulaient les séparer. Altia prit un visage plus grave. C'est vrai, c'est maintenant que le plus dur commence. Maintenant qu'ils sont orphelins et n'ont plus rien ni aucunes ressources, ils ne seront pas considérés si ce n'est comme des gêneurs ou des parasites.

Les adultes veulent tout de même les placer dans un orphelinat, disant qu'à deux ils ne seront jamais adopté. Cela importait peu maintenant.

Bien sûr qu'on restera ensemble. Je ne quitterais pas Aria, jamais.

Dit le jeune garçon, se redressant difficilement contre son oreiller et mettant ses deux mains sur les joues de sa sœur.

Qu'une famille nous adopte ou pas, tant qu'on tous les deux ensemble, cela m'importe peu. Si toi, tu as le livre de maman, moi, tu es tout ce qu'il me reste, Aria. Je ne te laisserais pas toute seule.

Enchaîna-t-il, d'une voix calme en souriant à la petite rouquine. Puis, prenant une main d'Aria pour la mettre sur le livre de fleur qu'elles entretenaient avec tant de soin, Altia lâcha quelques mots supplémentaires.

Prends-en grand soin, d'accord ?

Conclut-il.

Au fait, ils t'ont dis quand et où on serait placé à l'orphelinat ?

Je vois bien dans son regard qu'il ne me ment pas. Altia promet que l'on restera toujours ensemble et je le crois dur comme fer. Nous sommes plus que deux mais aussi soudés que jamais. Je lui souris lorsqu'il met ses deux mains sur mes joues, rassurée et je l'écoute avec attention.

"Je suis d'accord avec toi. De toute façon personne ne peut remplacer Papa et Maman."

J'essaie encore de sourire bien que l'évocation de nos parents me détruit un peu plus. La douleur est encore trop récente, trop vive. Pourquoi les adultes souhaitent à tout prix les remplacer comme si ils n'avaient jamais existé. Nous n'avons même pas pu leur dire aurevoir.

"Oui je vais le continuer pour maman."

Je caresse le livre, de manière automatique. Nous passions beaucoup de temps maman et moi dessus à le complèter et à chaque fois c'était après une grande balade en famille. Altia me demanda ensuite si j'avais connaissance de notre entrée à l'orphelinat... J'hausse les épaules.

"Quand tu iras mieux je crois. J'étais trop occupée à tenir le lit pour rester avec toi. Je crois qu'ils ont demandé si on avait de la famille en dehors de papa, maman. Tu le sais toi ? Ils vont venir te poser des questions je pense."

Mon esprit vagabonde de nouveau, retraçant les derniers évènements. Je me sens coupable d'une chose et je dois lui demander. C'est important, les autres adultes ne me répondent pas, m'ignorent lorsque je leur ai demandé.

"Tu crois que papa et maman sont fâchés ? Je suis allée dans la forêt... ils... ils sont partis en colère tu crois ?"

C'est précisément après cette question qu'un type avec un costume tout noir, trop juste par la taille et laissant apparaître des chaussettes blanches entre dans la chambre. Lui, je ne l'aime pas. Il veut m'envoyer avec les bonnes sœurs et ne veut pas entendre parler de rien d'autre. Si une infirmière n'avait pas insisté pour avoir le calme, il m'aurait séparé de force. Sans m'en rendre compte, je me crispe, serre la main d'Altia tandis que le Monsieur se présente.

"Bonjour les enfants. Ravi de voir que vous êtes réveillés et en pleine forme. Il est temps de voir ce que l'on va bien pouvoir faire de vous."

Il s'approche d'Altia, qui a selon toute vraisemblance son attention et m'ignore royalement. Il porte sous bras une sorte de valisette qu'il pose sur le lit comme il veut et qu'il ouvre. Il sort tout un tas de papiers qu'il agite sous notre nez.

"C'est toi le chef de la famille maintenant mon garçon. Il faudrait que tu me signes quelques papiers pour que l'on puisse s'occuper de ta soeur. A moins que vous n'ayez de la famille ? Un oncle, une tante peut-être ?"

La fratrie discutait simplement, calmement après la tempête qu'ils ont vécu, de choses parfois anodines. Mais ils l'avaient toujours à l'esprit, tous les deux, l'horreur qu'ils ont vécu leur de cette journée et la souffrance que cela a engendré.

Tenir le lit ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Demanda naïvement Altia à sa sœur qui visiblement n'avait pas eu de repos depuis qu'ils ont atterri ici. La petite soeur demandait d'ailleurs si les deux enfants avaient de la famille en dehors de leur parents. Le garçon réfléchit quelques instants pour être sûr de ne rien oublier.

Non, pas que je le sache. Les seuls personnes que l'on recevaient à la maison étaient des amis et les voisins. Ils ne nous ont jamais présenté d'autres membres de la famille.

Dit-il d'un ton calme, le doigt sur son menton, continuant de réfléchir un peu. Il est vrai que s'ils avaient de la famille autre part, même éloigné, cela pourrait leur être d'un grand secours. Malheureusement, cela ne semble pas être le cas. Et alors que le rouquin semblait se plonger dans ses pensées, il en fut sortie très rapidement par une question d'Aria. Il s'attendait malheureusement à cette question. Et si bien sûr auparavant il comptait lui faire la morale quant au fait qu'elle est allée dans la forêt malgré l'interdiction, cette morale n'a aujourd'hui plus lieu d'être. Et pour cause.

Ne dis pas ça. Ils n'étaient pas du tout en colère, j'en suis certain. Je pense qu'ils étaient même heureux de nous savoir hors de porté de ces tueurs. Parce-que si nous avions été à la maison ou dans les alentours, on aurait probablement subi le même sort qu'eux. Alors en un sens, tu nous as sauvé la vie à tous les deux, Aria.

Dit-il d'un air chaleureux et d'une voix douce à sa sœur, alors qu'il posa sa main au-dessus de sa tête pour la réconforter. Ce n'était pas de sa faute. Aucunement. Au contraire même, s'ils sont aujourd'hui en vie, c'est parce-que Aria s'est enfoncé dans cette forêt et qu'Altia l'a suivi.

C'est alors ensuite qu'un homme entra dans la pièce. Cette dernière était petite, et on ne risquait pas de le louper avec son costume noir et ses chaussettes blanches. La vue de cet homme sembla angoissé profondément Aria, cette dernière serrant la main de son frère comme si ça vie en dépendait. Car c'était littéralement le cas. Le rouquin posa ses yeux sur sa sœur, puis sur l'homme qu'elle regardait d'un air mauvais. L'homme au costume parla avec un ton calme, presque chaleureux, mais les mots qui sortirent de sa bouche n'était pas aussi réconfortant. Paternaliste, l'homme posa sa valisette sur le lit comme si de rien n'était avant d'en sortir des documents, qui semblent être des documents officiels. Il ordonna ainsi presque au jeune garçon de les signer afin "que l'on puisse s'occuper de ta sœur".

Nous n'avons pas d'autres familles que nos parents.

Dit-il d'abord d'un ton calme. Avant de poser un regard plus accusateur sur l'homme et de reprendre.

Qu'est-ce que vous comptez faire avec ma sœur ? Qu'est-ce que ces papiers ? Vous occupez d'elle ? Aria restera avec moi.

Altia me demande des précisions sur ce que j’appelle « tenir le lit ». C’est vrai qu’il dormait lorsque ça s’est passé. Ce bonhomme que je n’aime pas avait voulu me séparer sans nous demander notre avis. Je ne peux pas vivre sans mon frère, c’est impossible.

« Ils ont voulu nous séparer. Je me suis accrochée au lit pour rester avec toi. »

Puis mon frère m’éclaira sur notre situation familiale, à savoir que nous n’avions pas de famille connue. C’est vrai que contrairement à d’autres personnes du village, nous n’avions pas d’oncle de tante ou encore de grands parents et la question n’avait jamais été abordée au sein de notre famille. A nous quatre nous avions tout ce dont nous avions besoin.

Je cligne des yeux, étonnée de la réponse d’Altia mais surtout soulagée. Papa et Maman ne m’en voulaient pas. Je suis à deux doigts de fondre de nouveau en larme. Mon frère vient de m’enlever un poids. Je n’ai pas le temps de m’en réjouir que ce fameux type débarque dans la chambre pour embêter mon frère, tout en m’ignorant. Je me crispe, serre la main de mon frère. Je ne veux pas partir d’ici, je veux rester avec lui.

Le type tiré à quatre épingles semble contrarié dans un premier temps par les réponses d’Altia mais réajuste ses lunettes et revient à la charge. J’ai l’impression de ne plus exister. Je suis comme une marchandise ou un petit chat que l’on ne sait pas où placer. Je gonfle les joues pour montrer mon mécontentement mais ça semble passer au-dessus de la tête de cet affreux personnage.

« Rien rien du tout mon garçon. »

Il continue d’un ton qui se veut encore plus mielleux, ses paroles sonnent faux.

« Il est de coutume que les petites filles soient envoyer avec les bonnes sœurs pour prier. Et les garçons sont placés à l’orphelinat. Un bon garçon comme toi ne va pas y rester très longtemps d’ailleurs, tu as l’air robuste et je suis certain qu’un maître d’œuvre dans la maçonnerie pourrait te prendre en tant qu’apprenti. Ou bien même un bucheron pour travailler dans la forêt. »

« Mais on veut rester ensemble ! »

Je n’ai pas pu m’empêcher d’intervenir. Cette fois il ne m’ignore plus mais son regard me glace le sang. Il a le regard d’un serpent. Il fait le gentil en façade mais en réalité….

« Jeune fille, on n’interrompt pas les grandes personnes. Je discute avec ton frère s’il te plait. »

Il tend les papiers à Altia, m’ignorant de nouveau avant de reprendre :

« Il s’agit d’une autorisation pour que ta sœur suit les enseignements des religieuses. Elle ne manquera de rien, elle aura de quoi manger, une solide éducation et pourra même aller à l’école. Et si elle est sérieuse elle pourrait même suivre des cours de peinture. C’est inespéré d’avoir une telle chance. »

« C’est nul la peinture d’abord ! »

Le monsieur pose de nouveau son regard sur moi. Je comprends que je n’ai pas intérêt à l’ouvrir d’avantage. J’ai presque peur.