[Quête] A la recherche de la pretresse (2)

Une assiette pleine de ragoût venait d'être posée devant Wilfrid. L'aubergiste qui venait de faire le service n'avait pas prononcé un mot et gardait une expression fermée. Elle devait être partagée entre crainte et contrariété, car voilà que depuis que Loki était le maître à Asgard, ses partisans prenaient leurs aises et prélevaient leurs rations au gré de leurs déplacements. Il était rare qu'ils paient, et cela se voyait à la légèreté de la bourse de son hôte que la maîtresse de maison ne serait pas dédommagée cette fois-ci non plus.

" Vous avez de la bière ? "

Le guerrier divin se coupa une tranche de pain sans faire de manières. Il savait bien qu'un merci aurait peu de chances de diminuer l'inimitié qu'il sentait de la part de la salle de cette petite auberge. Les murmures qu'il saisissait n'étaient pas plaisants à écouter. Au fond, cela se comprenait, il s'était choisi la meilleure place, auprès du feu. Et il l'assumait parfaitement, n'étant pas d'humeur à faire autrement. Les mécontents n'étaient pas assez nombreux dans ce village pour s'allier contre lui, alors il prenait son temps pour se réchauffer. Car Wilfrid n'aimait pas avoir froid.

La première mission que le prêtre borgne de Loki lui avait confiée, avant qu'il n'aille se présenter au dieu dans le palais du Valhalla, avait été assez morbide. Il lui avait demandé ni plus ni moins d'aller chercher le matériel qu'un groupe de leurs alliés avait emporté au fond d'un gouffre au lors d'une avalanche. L'endroit, traversé par un torrent, était réputé dangereux - surtout en cette saison. Il avait fallut mener les recherches sur quelques kilomètres. Pour Wilfrid de Grani cependant cela avait été une simple promenade. D'autres que lui se seraient offusqués de recevoir ce type de tâche : dépouiller des cadavres était indigne de son rang. Cependant, le guerrier divin n'avait pas ce genre de fierté.

Avec cette résignation qui le caractérisait, il avait attentivement écouté le plaidoyer sur la nécessité qu'il y avait à récupérer des ressources dans un temps de reconstruction du pays - surtout lorsque Loki cherchait à étendre son influence. De plus, dans l'ensemble du matériel de l'expédition, il y avait les affaires d'un guérisseur : quelques remèdes et recettes bien utiles dans un havresac.

La morale de l'histoire avait été que le guérisseur était resté au fond du ravin, gelé entre deux rochers, et que son bagage séchait désormais étalé sur la table de Wilfrid. L'épée géante Gram était posée en travers du banc, et de concert avec l'armure de Grani, émettait un message assez clair que toute compagnie était indésirable. En regardant les fioles dont les étiquettes étaient parfois à moitié effacées par l'eau du torrent, Wilfrid se demanda si toute cette pharmacopée serait identifiée. C'était tout de même une drôle de brocante.

* Pourvu que je ne m'empoisonne pas par mégarde. *

Le temple d'Alpha

Alfrid avait suivi le départ d'Elias du coin de l'oeil avant de se tourner vers sa camarade pour l'inviter à la suivre. Mais surtout en restant à porter de voix car il ne voulait vraiment pas être séparer d'elle à nouveau.

Ils marchèrent d'un pas rapide, peut être trop rapide car Alfrid avait l'impression que Diana était un peu plus blanche que d'habitude. Il allait proposé de ralentir quand elle l'interpella.

- Oui, j'y suis passé durant mon voyage. En quittant la maison de père, j'ai voyagé pour trouver un temple en l'honneur d'Odin, pas celui de la où l'on vient. Il fit un sourire à Diana et repensa à son propre voyage. J'ai traversé beaucoup de petit village avant d'y arriver donc si je me souviens bien, on ne devrait plus être très loin. On pourra y faire des stocks de vivres et se reposer un peu avant de reprendre la route vers la scierie.

Il raconta un peu son voyage à Diana, rigolant de sa propre bêtise quand il s'était trompé de chemin et était revenu dans le village précédent. Il lui demanda de ne pas le raconter aux autres Guerriers Divins et surtout, qu'elle n'aurait pas peur de le suivre à présent.

En approchant du village, Alfrid se senti honteux de voir dans l'état il avait osé faire marcher d'un si bon pas Diana. Elle était vraiment avec les traits tirés et surtout, son ventre gargouillait depuis plusieurs minutes.

" - J'aurais du prendre de la nourriture avec... dire qu'en revenant du Royaume des Morts, j'ai pu traverser un village, et donc prendre de quoi manger mais je n'ai rien gardé... mais quel crétin je suis..." Il avait l'impression de ne pas avoir fait assez attention à son amie alors qu'il avait promis de veiller sur elle.

Quand ils arrivèrent dans le village, Alfrid essaya de se souvenir de l'emplacement de tout les magasins. Bizarrement, Diana trouva l'auberge du premier coup et Alfrid ne pu s'empêcher de dire que son ventre avait un bon sens de l'orientation.

Diana l'averti de son idée et qu'elle paierait, avant de s'engouffrer dans l'auberge. Alfrid eut un petit sourire en entrant un peu après elle. Mais il s'arrêta net en voyant Diana s’asseoir en se laissant tomber sur le banc, d'une table déjà occupé par un type étrange, dont la tête lui disait quelque chose mais impossible de se souvenir d'ou. Ce qu'il remarqua aussi, c'était l'armure qui était clairement une Armure d'un Guerrier Divin.

Il entendit Diana faire un "oups" et il se précipita derrière elle. Regardant l'individu, sans être menaçant mais avec une certaine fermeté.

- Tu vas bien Diana? Demanda-t-il en mettant une main sur l'épaule de son amie. Excusez-nous pour cette intrusion, nous avons fait un assez long voyage qui nous à fatigué et mon amie n'a pas du faire attention. J'espère que cela ne vous dérange pas?  Il fit un petit sourire à l'individu dont la tête lui disait vraiment quelque chose mais sans plus. Et si je ne me trompe, vous êtes vous aussi un Guerrier Divin?

Alfrid attendit la réponse de son interlocuteur pour savoir ce qu'il devrait faire, soit s'asseoir à son tour ou pousser Diana sur le coté, afin de la mettre à l'abris, vu son état de fatigue.

On peut dire que dès l'instant où la porte de l'auberge s'ouvrit à la volée, laissant apparaître une Diana titubante de faim, Wilfrid sentit que les ennuis allaient s'abattre sur lui et ne plus le quitter pendant longtemps. Il y eut seulement quelques instants où l'adolescente tanguait de droite ou de gauche, où le fol espoir qu'elle allait choisir une table dans un autre coin de la salle dansa comme une bulle de savon dans une brise facétieuse avant d'éclater en goutelettes d'amère déception.

Wilfrid n'avait même pas pris la peine de tenter d'arrêter le destin : il savait qu'une fois qu'une tragédie était en marche, celle-ci écrasait tout sur son passage. Ainsi la joue de cette fille qui s'était abattue sur les feuilles séchées et réhydratées de la pharmacie étalée sur la table. Lorsqu'elle se redressa en se rendant compte de sa malheureuse méprise (la petite était perspicace, les hoteliers vous accueillent rarement armés jusqu'au dents) les petites feuilles restèrent à moitié collées sur sa joue, et ses yeux croisèrent le regard infiniment triste et résigné du guerrier de Loki. La réplique consistant en un oups plein de contrition fit à peine ciller l'occupant de la table.

Elle fut rapidement rejointe par un compagnon très anxieux de son état et qui s'occupa de diplomatie. Il avait l'air bien dévoué pour cette fille si maladroite, c'était assez rare pour être remarquable. Qui étaient ces deux-là ? Malnutris, l'air égarés, n'ayant que des épaves d'armure sur le dos, ils ne payaient vraiment pas de mine. Et puis le guerrier le regardait d'une manière étrange, comme s'ils s'étaient déjà vus quelque part. Ce qui ne risquait pas de se confirmer. D'une voix morne, Wilfrid entreprit de répondre au fidèle compagnon de la jeune étourdie :

" Non, cela ne me dérange pas trop personnellement. Mais en ce qui concerne ces feuilles médicinales, je ne saurais dire si leur propriétaire, le seigneur Loki, serait ennuyé d'apprendre qu'elles servent à décorer le visage de votre amie. Il faudrait peut-être que nous allions le lui demander. "

Le nom de Loki avait le pouvoir dans la moitié des cas de repousser efficacement les attentions des personnes à peu près saines d'esprit et d'offrir une paix relative à ceux qui l'invoquaient. L'instinct de Wilfrid lui disait que cette intimidation ne servait à rien, mais cela ne coûtait rien d'essayer. Comme prévu, cela ne découragea pas en tout cas le jeune homme qui lui demanda s'il était lui aussi un guerrier divin. D'un geste résigné, le guerrier de Grani invita les deux nouveaux convives à s'installer à la table :

" C'est le cas. Vous avez des nouvelles ou des ordres venus d'en haut ? "

Un air apathique s'installa sur son visage : ce qu'il allait entendre allait sans doute entrer en contradiction avec la mission qu'il avait premièrement reçue, et comme d'habitude, il allait falloir bricoler une improvisation pour ne pas totalement manquer le premier objectif, sachant qu'une décision n'était jamais satisfaisante dans ces cas-là. Il jeta juste un petit coup d'oeil à Diana et à mi-voix tenta d'éveiller son attention à toutes ces petites fioles et paquets bizarres tirés du havresac.

" Attention de ne rien renverser. "

Le jeune Guerrier Divin eut un petit sourire amusé quand il remarqua les feuilles sur le visage de Diana. Elle devint rouge quand leur interlocuteur lui fit remarquer, ce qui amusa encore plus Alfrid, jusqu'à ce que la personne devant eux prononça le nom du Seigneur Loki.

"- Decidement, nous n'avons pas de chance... ça va nous poursuivre un moment j'ai l'impression" songea Alfrid en se retenant de faire un commentaire. " Il ne serait pas bon de faire des remarques désobligeantes sur le Seigneur Loki devant l'un de ses subalternes..."

Pourtant, Alfrid soupira intérieurement quand l'homme en face d'eux confirma être un Guerrier Divin. Au moins, Diana ne risquait pas grand chose. Il se décala un peu, laissant plus d'espace à Diana.

- Oui, nous avons eu des instructions de la part du... Seigneur Loki... et ils nous à chargé de retrouver la Prêtresse Séléne. Nous avons rendez-vous avec une source d'information près de la scierie. Alfrid s'arrêta pour regarder à nouveau le visage de son interlocuteur.

Alfrid était sur et certains d'avoir déjà vu cet homme. Mais à force d'avoir voyager un peu partout sur les frontières du Royaume et ses villages intérieurs, il avait vu tellement de visage que parfois, ça s'embrouillait dans sa tête.

Il allait continuer quand Diana interpella leur camarade pour lui demander au sujet des fioles et si ça pouvait leur servir de fourniture médicale. Mais avant que la conversation soit aller plus loin, le ventre de Diana fit un bruit peu gracieux. Alfrid devait se retenir de rire devant la tête gêner de sa camarade.

- Oui, excuse moi Diana. J'aurais du penser à cela avant. Je suis vraiment désolé. Il fit signe au tavernier pour commander à boire pour eux deux et pour leur nouveau camarade.
Personnellement je ne bois jamais d'alcool ou que dans les grandes occasions. J'ai donc commandé plutot des boissons chaudes, histoire de ne pas finir gelé.

L'aubergiste leur apporta d'abord les boissons. Alfrid bu une gorgée.

En faite, Je me nomme Alfrid, Fils de Stignan, Guerrier Divn d'Oméga du Loup-Garou. Et voici mon amie Diana, la Guerrière de la Géante à l'Epée de Fer. Il jeta un coup d'oeil à Diana pour voir si elle n'allait pas râler qu'il la présente pour la deuxième fois de la journée.  

Après que le Guerrier Divin inconnu se soit présenté, l'aubergiste apporta des assiettes plutôt bien remplis. Il espérait que ça soit au gout de Diana car il avait commander le premier plat qu'il avait vu en entrant.

Toute confuse, la petite guerrière entreprit de décoller avec soin les petites feuilles pour les reposer à leur place. Elles étaient à peine froissées. Toutefois, la jeune femme demanda si elle pouvait acheter les remèdes à côté.

" C'est pareil. Rien n'est à moi, rien de ce qui est là n'est à vendre. Et je ne suis pas à vendre non plus. "

Il termina sur ces mots pour signifier qu'il n'était pas question pour lui d'accepter de se faire graisser la patte : il ne voulait pas avoir de problèmes. Le guerrier de Grani avait prononcé ces mots sans hostilité, mais d'une voix butée. Il contemplait le fond de son assiette pour montrer ostensiblement qu'il ne ferait pas affaire. Etant donné l'enthousiasme audible dans la voix de Diana quand elle parlait de payer son repas et ses médicaments, il valait mieux prévenir. Qu'avait-elle donc à crier sur les toits qu'elle avait de l'argent ? Est-ce que ça lui brûlait les doigts, ou elle avait besoin d'extérioriser son immense satisfaction d'être en veine, alors que tout le monde n'avait pas la chance d'avoir reçu sa solde ?

L'affaire fut éclaircie par son compagnon qui expliqua que Loki les avait chargés de retrouver la prêtresse Séléné et qu'ils se préparaient à se lancer dans cette quête difficile. C'est alors qu'on entendit un bruit un peu gênant en provenance de la demoiselle. Petite taille, grosses dépenses d'énergie, peu de réserves, besoin de ravitaillement fréquent, estima Wilfrid en considérant la jeune affamée avec une expressionplacide.

Le compagnon de la guerrière s'empressa de commander deux assiettes et en signe de bonne volonté offrit une tisane au guerrier de Grani. Celui-ci ne se fit pas prier : il sentait comme un picottement dans le fond de la gorge qui présageait un rhume. C'était étrange une telle gentillesse, assez peu courant dans le milieu de la chevalerie. C'est lorsque vint le moment des présentations qu'il comprit à qui il avait à faire, ce qui se manifesta par un bref éclair de compréhension dans le regard.

" Et je suis Wilfrid, guerrier divin de Grani. Alfrid fils de Stignan. Je me souviens de toi. Cela doit faire quoi ... dix ans ? On dirait que tu n'as pas beaucoup changé. "

Il laissa un peu de temps au Loup-Garou se remémorer leur rencontre. C'était un drôle de souvenir et il fallait mettre cette rencontre sur le compte d'une ironie du destin ... Comme quoi, même avec sa dévotion et sa générosité aveugles, le jeune aspirant avait survécu aux vicissitudes de l'Histoire d'Asgard pour devenir guerrier divin. Et lui, Wilfrid qui avait toujours voulu quitter ce royaume était désormais au service de Loki.

" En tout cas, votre mission ne sera pas une partie de plaisir. Cela fait un moment que la prêtresse a disparu, si j'en crois ce que j'ai entendu. Donc vous dites qu'elle a survécu ? A mon avis elle en a eu assez d'être prêtresse, s'est enfuie et a demandé aux personnes de confiance de la couvrir. Vu l'état du pays, c'est de que je ferais si j'étais à sa place. Vous risquez de vous faire ballader. "

Même si on n'aurait pas trop sû dire s'il plaignait les deux guerriers divins d'Odin au ton blasé que prenait sa voix. Une chose était certaine, même si c'était le cas, cela n'était pas son problème. Ce qu'il avait à faire lui, c'était de veiller sur les biens de Loki.

Alfrid était heureux de voir Diana manger et boire avec autant d'appétit. Au moins, sa camarade allait retrouver des couleurs et surtout, sa bonne humeur. Et le ventre de celle-ci n'allait plus émettre des bruits qui la mettrait mal à l'aise.

Il commença a manger quand le Guerrier Divin lui annonça qu'il s'appelait Wilfrid et qu'ils s'étaient déjà rencontrer, il y a au moins dix ans, sans pour autant qu'Alfrid n'ai changé. Diana s'étonna et semblait surprise qu'Alfrid connaissait d'autre Guerrier Divin.

La remarque de son amie le perturba un peu, gêné de ce que venait de dire Diana.

Le jeune Guerrier Divin essayait de se souvenir d'où il se trouvait, il y a dix ans. L'image de la caserne de son père s'imposa à son esprit. Puis, en jetant un regard sur le visage de Wilfrid, leur rencontre lui revint en mémoire. Alfrid eut alors un sourire content de voir que le jeune homme dont le chemin avait croisé le sien était encore en vie et surtout, que lui aussi était devenu un Guerrier Divin.

- Ah oui, je me souviens à présent. C'est vrai que ça remonte à longtemps. Je suis content de voir que tu vas bien et surtout, que tu es resté à Asgard. Cela me fait vraiment plaisir.

Alfrid aurait aimé continuer à se remémorer leur rencontre mais Wilfrid évoqua leur quête. D'une façon qui ne plaisait pas du tout à Alfrid. La façon dont il évoqua les raisons de la disparition, en déclarant qu'il s'agissait d'une fuite, énerva Alfrid.

Il allait réagir mais Diana fut plus rapide que lui. Elle parla d'une voix tellement ferme et remplis de colère, que cela surprit le jeune Guerrier Divin.

La colère qu'il voyait dans ses yeux étaient incroyable. Et ce qu'elle déclara contre Wilfrid, le fit sourire.

Une fois la déclaration de Diana terminée, il mit sa main sur l'épaule de sa camarade en lui souriant. Si elle étai surprise des relations d'Alfrid, lui était toujours admiratif du courage, du caractère et de la ferveur dont faisait preuve Diana envers le Royaume d'Asgard.

- Je suis tout à fait d'accord avec ce que Diana vient de dire. Je n'ai eu la chance de rencontrer la Prêtresse Séléné qu'une fois mais dans sa voix, on pouvait entendre qu'elle tenait à Asgard. Il regarda dans les yeux Wilfrid, sans aucunes méchanceté ni colère. Je pense que l'un des devoir des Guerriers Divins, en plus de servir les Dieux d'Asgard, est de soutenir la Prêtresse. Et même si il vrai que la Prêtresse Séléné a décidé de quitter son poste, il est de notre devoir de la convaincre de revenir, soit pour qu'elle reprenne ses fonctions en la soutenant, soit le temps qu'une nouvelle prêtresse soit nommée, afin de maintenir l'ordre dans le Royaume. Car le Royaume d'Asgard est plus important que notre propre vie, afin d'aider et protéger les habitants.

Alfrid se leva tranquillement en sortant sa bourse pour déposer de quoi payer son repas et celui de Diana, plus la boisson de Wilfrid. Puis il fit signe à Diana de le suivre, en tendant la main à Wilfrid.

- J'ai été heureux de te revoir. J'espère que notre prochaine rencontre sera plus longue et qu'on pourra parler plus en détail de la décennie qui vient de passer. Il réajusta sa cape. Je pense que tu devrais venir avec nous, pour retrouver la Prêtresse. Comme ça, si nous nous trompons, tu pourras nous dire que nous tu nous avais prévenu. Dans le cas contraire, tu pourras voir que l'on avait raison de croire en la Prêtresse.

Il espérait que la loyauté pour le Royaume d'Asgard allait faire en sorte que Wilfrid les suivent. A trois, ils auraient plus de chance de retrouver et secourir la Prêtresse.

A peine Wilfrid avait-il exprimé son opinion sur ce qui s'était passé avec la prêtresse que les protestations s'élevèrent comme un rang de boucliers.

Diana qui avait été assez contente jusque-là de se reposer, qui était même épatée que son ami Alfrid connaisse un guerrier divin (qu'y avait-il de si extraordinaire à cela, Wilfrid n'aurait pû répondre à cette question ), n'hésita pas à dire ce qu'elle pensait avec indignation. Elle en était rouge de colère, autant qu'une enfant qui aurait piqué une crise après qu'un imbécile ait soutenu devant elle que Heimdall avait autre chose à faire que de distribuer des cadeaux pendant la nuit de Yule.

Puis ce fut au tour d'Alfrid de servir le couplet du bon petit soldat qui devait être prêt à mourir pour ses chefs et sa patrie. Oui, décidément, il n'avait pas changé. Wilfrid préféra éviter son regard, car il ne partageait pas du tout sa vision du monde. Il doutait qu'une prêtresse puisse faire des miracles pour soulager la misère du peuple, et s'il était revenu en Asgard, ce n'était pas par amour pour ce pays indigent replié dans le froid de l'hiver, mais parce qu'il ne se sentait pas chez lui ailleurs dans le monde. Mieux valait garder tout cela pour lui pour éviter une dispute stérile. D'ailleurs, Alfrid n'insista pas et décida de lever le camp.

" D'accord. Tu me raconteras comment tu es devenu guerrier divin du Loup-Garou. A la prochaine fois. "

Et il salua Alfrid, car il était difficile d'ignorer cette main tendue de la part de quelqu'un qui l'avait invité. Néanmoins Wilfrid ne se laissa pas convaincre par l'argument avancé par le guerrier divin, à savoir que s'il venait avec eux, il pourrait prouver qu'il avait raison d'être pessimiste sur cette disparition. L'épéiste secoua la tête, la provocation était bien tentée, mais ça ne prenait pas.

" J'aurais de vos nouvelles au palais ... ou pas. Bonne chance. "

Et il les laissa quitter l'auberge, avant de remballer son bagage sans zèle et de partir à son tour. Il trouva sur son chemin la servante qui attendait le paiement. Finalement, vu qu'il avait déjà commencé à travailler pour Loki, il avait gagné le droit à une petite avance, non ? Il se servit dans le butin qu'il avait prélévé sur les cadavres de l'expédition et dédommagea l'aubergiste. Puis il quitta le village et prit la route de la cité. Mais alors qu'il s'éloignait, il ne pouvait s'empêcher de revoir les yeux éclatants d'indignation de Diana et la déception mal dissimulée d'Alfrid de savoir qu'il ne les aiderait pas.

* Stupides idéalistes ... *

Il s'arrêta pour contempler le paysage et chasser de son esprit ces images. En bas, il y avait le village, et tout en haut le palais d'Odin battu par les vents. Il ne devait pas faire chaud là-haut. Loki ne l'attendait pas, qu'allait-il lui donner comme mission ? D'expérience, Wilfrid qu'en général, les chefs aiment bien avoir un gros-bras à leur côté. Celui-ci ne faisait rien de particulier, il était là simplement pour incarner au mieux une force dissuasive, au pire pour servir de faire-valoir au leader. Un rôle très ennuyeux et un peu inutile en somme.

Alors il réalisa qu'il préférait encore accompagner ces deux braves petits guerriers qui allaient lui rebattre les oreilles avec leurs sornettes sur le sacrifice de soi et l'amour de la patrie plutôt que d'aller végéter là-haut. Il était devenu guerrier divin non pas pour devenir le chien de garde d'une divinité, mais dans l'espoir de trouver sa voie, et peut-être un jour de découvrir qui il avait entendu jouer de la harpe dans la forêt treize ans plus tôt.

" Et Flûte. "

Et il tourna les talons et dévala le chemin en sens inverse en espérant que les deux fervents admirateurs de la prêtresse s'étaient attardés au village. Ils avaient sûrement des affaires à régler là-bas avant leurs recherches : avec un peu de chance il arriverait à les rattraper.

* S'ils sont déjà partis, je vais devoir tout remonter, la barbe ... *

Non loin de là, un jeune homme habillé de façon neutre circulait dans une allée de ce même marché, le regard fixant chaque personne qu’il croisait comme s’il avait besoin d’identifier quelqu’un. Ca faisait très longtemps qu’il n’avait pas remis les pieds ici et ses émotions étaient en effervescence, entre des souvenirs d’un temps où il était insouciant et le besoin de se rassurer en croisant une tête connue même après tant d’années loin de cette civilisation.

Il avait un peu d’argent en poche, pourtant il n’achetait rien, passant d’étale en étale pour continuer son chemin vers l’endroit où il pensait retrouver les siens. Etrangement, ce lieu de commerce ne semblait pas avoir subit les conséquences de la peur suite à l’attaque du territoire par des forces obscures, la vie continuait comme si cela était une habitude, certes la zone de Gamma était assez loin mais il fallait croire que la population était confiance en ses forces armées… Et puis, le grand Odin veillait sur tout ce petit monde donc personne ne pouvait imaginer que leur dieu ne saurait les protéger, Siegfried lui aussi avait confiance en sa divinité mais n’était pas serein pour autant.

Un chou tombant sur le sol froid le fit sortir de sa quête machinale, le jeune guerrier se baissa pour ramasser le légume éprit de liberté avant de le tendre à sa propriétaire, une dame d’un certain âge ayant bien du mal à se mouvoir. C’est en recevant ses remerciements chaleureux qu’il entendit qu’une voix féminine parlait de guerrier divin, dès lors il regarda dans la direction de la personne pas très discrète qui avait dit ces deux mots qui avaient fait tilt, une jeune femme se tenait là et elle tranchait bien dans le décors.

Siegfried décida de l’observer afin de savoir à qui elle parlait, puis il se rapprocha l’air de rien en allant au stand d’à côté pour y acheter une pomme, de là il allait pouvoir entendre leurs conversations et se rendre compte si ça valait le coup de les suivre. Il croqua dans la pomme tout en regardant ailleurs pour ne pas attirer l’attention mais en veillant sur ses arrières…

Alfrid avait eu tort de penser que Wilfrid allait les suivre. Mais bon, il lui semblait avoir vu une étincelle dans les yeux du Guerrier Divin.

" - Je suis sur qu'il a quand même eu un doute sur la proposition que je lui ai fait." songea-t-il en souriant intérieurement.

Par contre, Diana semblait l'avoir mal prit vu la façon dont elle avait regardé Wilfrid et qu'elle était partie de l'auberge. Il soupira en souriant.

- Elle est vraiment incroyable, murmura-t-il pour lui même avant de faire un signe à Wilfrid.

Une fois dehors, Diana déclara qu'ils allaient sans sortir sans l'autre Guerrier Divin et qu'en trouvant la Prêtresse, ils montreraient à Wilfrid qu'il avait tort. Alfrid acquiesça en étant content de voir la bonne humeur de Diana. Il avait eu un peu peur quand elle avait eu faim au point de tomber sur une table occupée. Et après la tournure qu'avait prit la conversation avec Wilfrid, le Guerrier Divin d'Oméga s'était demandé comment rendre le sourire à son amie.

- Tu as raison. Et quand on l'aura retrouvée, je te laisserai le plaisir de l'annoncer à Wilfrid. Alfrid espérait que cette boutade allait faire sourire sa camarade. Enfin, je pense que tu n'attendrais même pas mon avis ou accord pour le faire.  

Ensuite, ils continuèrent à se diriger vers le marcher. Mais au fond de lui, Alfrid avait un doute car il avait remarqué un truc dans les yeux de Diana. Mais avant qu'il ne se torture l'esprit, Diana décida de lui parler de ce qu'elle avait à l'esprit.

Il l'écouta sans l'interrompre, avant de réfléchir à une réponse qui pourrait rassurer sa camarade mais aussi le rassurer lui. Il s'arrêta, inspira avant de mettre une de ses mains sur l'épaule de Diana et lui sourire.

- Le peuple sait bien qu'il y a toujours des conflits entre les Dieux et que malheureusement, il arrive qu'on ne sache pas sauver tout le monde. Mais a partir du moment ou ils voient que l'on est toujours là, à essayé de les aider, ça devrait aller. Puis il songea à l'échec de la quête d'Avalon. Je suis désolé. C'est en parti ma faute que l'on n'ai pas réussi. Si j'avais fait plus attention après notre séparation, j'aurais réussi à mieux t'aider contre le loup-garou. Et je te promet que ça va mieux se passer cette fois et qu'on va réussir. . Il avança un peu avant de soupirer. Et j'ai un doute que Dame Séléné soit partie sans une bonne raison. Je suis sur et certains qu'elle aura une explication logique par rapport à sa disparition. Au pire, si elle a été capturée, on la sauvera. J'en suis sur.

Il tendit le poing à Diana en lui faisant un sourire franc et il était déterminé à réussir cette mission avec Diana.

Suite à cela, ils ne leur fallut pas longtemps pour trouver des provisions, des outres d'eaux qu'ils pourraient remplir aux différents puits des villes qu'ils allaient traverser. Alfrid était sur que la gentillesse et la compassion des habitants d'Asgard ne les laisseraient pas tomber.

Pour les trousses de soins, ils avaient trouvés de quoi faire le plus urgent.

- Il faudrait vraiment qu'on pense à avoir des capacités de soins, déclara Alfrid à Diana. Enfin, ne t'en fais pas, ca va aller. Mon père m'a montré un peu comment faire pour les soins rapides... faut juste que je me souviennes... Il fit une moue à Diana. Bon ben espère qu'on ne se blesse pas trop.

Ils continuèrent à marcher un peu dans le marcher quand Alfrid senti quelque chose. Une sorte d'aura qu'il connaissait par sa nature. Il allait en parler à Diana quand elle l'interpella en désignant quelqu'un qui venait vers eux. Alfrid regarda un peu pour voir la personne visé et un sourire apparu sur son visage.

- Oui, tu as raison, il semble que Wilfrid ait décidé de venir avec nous. Il se pencha pour murmurer à l'oreille de Diana. Tu vas pouvoir te moquer de lui, directement, quand on retrouvera Dame Séléné. Il se remit droit. On prend notre nouveau camarade et en route pour la scierie.

Une fois la réponse de sa camarade, il s'avança pour tendre la main vers Wilfrid qui les avaient rejoins.

- Tu as décidé de voir lequel de nos idéaux à raison? Lui lança-t-il en masquant son air amusé.

Il jeta un coup d'oeil à Diana mais une chose était sur dans son esprit, il avait senti la présence de quelqu'un.

" - Devrais-je le dire à Diana? Elle semble plus capable que moi pour sentir les cosmos... je verrais après avoir vu Wilfrid" songea le Guerrier Divin.

Tout au long de la descente au pas de course vers le village, Wilfrid s'est demandé ce qu'il allait bien pouvoir prétexter pour justifier ce revirement. De quoi allait-il avoir l'air s'il prétendait qu'il n'avait pas envie d'aller piétiner aux côtés de Loki au palais ? De toutes façons fuir cette corvée n'était pas le coeur de son intention. Le motif profond échappait à lui-même. Prétendre que Loki allait certainement l'envoyer à son tour s'ils échouaient, et qu'il préférait gagner du temps ? Pas sûr que cela fasse illusion.

Sans se résoudre pour l'une ou l'autre solution, il passa les premières fermes en bordure du village, passa le petit pont de bois en changeant les foulées précipitées en pas rapides et décidés. Comme c'était jour de marché, il n'avait d'autre choix que de se concentrer sur les visages, et il tenta de repérer la chevelure rousse de Diana, mais surtout la tête encapuchonnée d'Alfrid, qui se distinguait mieux car il était plus grand. Malheureusement, un premier tour de la place ne suffit pas à retrouver le duo d'admirateurs de la prêtresse.

* Bon, c'est bien ma chance, ils ont dû déjà partir d'ici. Il faut dire qu'ils avaient l'air assez pressés de retrouver leur chère dame Sélénée. Est-ce que cela vaut la peine que je me renseigne au cas où quelqu'un aurait vu la direction qu'ils ont prise ... *

Le bras armé de Loki dévisagea les marchands fourrures, de choux et de volailles d'un air morne. Il avait autant envie d'aller glaner des renseignements auprès de tous ces bavards que d'aller faire le tour du pôle Nord à la nage. C'est alors qu'une vision le saisit, et il se figea. A quelques pas de là, il avait vu une silhouette qui se baissait au milieu des étals lui rappelant quelqu'un qu'il n'avait pas vu depuis longtemps, mais qu'il ne pourrait pas oublier. Cette chevelure blonde, cette carrure ...

* Wilhelm ? *

De loin et de dos, ce personnage lui faisait penser à son frère réputé disparu. Il était vrai qu'il ne l'avait rencontré qu'une fois, et que cela remontait à huit ans. Heureusement - ou malheureusement car Wilfrid ne savait pas encore comment il devait prendre toute cette histoire, lorsqu'il put distinguer les traits du visage du flâneur, il se rendit compte que cela ne pouvait pas être lui. En tout cas, il fut soulagé, ce n'était pas le moment pour des retrouvailles familiales.

Et c'est à ce moment qu'il repéra Diana et Alfrid, à quelques pas à peine. Il se hâta de les rejoindre, en s'accomodant au mieux de l'air sceptique de la petite rousse et du regard amusé d'Alfrid qui semblait lancer un "je le savais". Lorsque le Loup-Garou lui demanda s'il était prêt à faire son pari, Wilhelm répondit d'un ton pince-sans rire :

" C'est ça, et je viens en spectateur. Blague à part, j'ai changé d'avis : je vous accompagne. Disons que c'est en souvenir du bon vieux temps. "

Lâcha-t-il de sa voix atone en s'adressant plus particulièrement à Alfrid. Puis, comme il savait que plus vite ils commenceraient les recherches, plus vite ils en auraient fini avec cette mission, il entra dans le vif du sujet :

" Alors, par où vous avez commencé ? Vous avez trouvé une piste ? "

Alfrid ne cachait pas son amusement sur l'évolution de la situation. Entre le sourire diabolique de Diana quand il lui avait dit qu'elle pourrait se moquer de Wilfrid et le retour de celui-ci, qui semblait avoir finalement décidé de les accompagner, le Guerrier Divin d'Oméga avait l'impression que ce voyage allait être des plus étonnants.

- D'accord, on va dire ce que c'est pour le bon vieux temps, juste pour ça. Répondit-il à Wifrid en levant les yeux au ciel.  

Une fois les trois Guerriers Divins réunis, Wilfrid interrogea Diana sur les informations qu'ils avaient, ce qui permit à Alfrid de réfléchir un peu.

" - Et puis, si la compagnie de Diana et la mienne permette à Wilfrid de devenir un peu plus sensible à la protection d'Asgard et de son peuple, cela ne pourra être que positif... faudra que j'en parle à Diana quand on sera seul." songea Alfrid en regardant du coin de l'oeil leur nouveau camarade.  

C'est Diana qui le sortie de ses pensées en lui demandant s'ils avaient tout pour le voyage. Ne sachant pas combien de temps prendrait l'aller et le retour, et surtout dans quel état serait Dame Séléné, Alfrid fit rapidement le compte.

- Je pense que oui. Il suffira qu'on chasse un peu si le voyage dur trop longtemps mais ça devrait aller. En plus, on devrait tomber sur des fermes où l'on devrait pouvoir se réapprovisionner facilement. Quand à l'eau, il doit bien y avoir des sources sur le chemin. Il ferma les yeux pour visualiser les villages ou habitations dans les alentours. Vu qu'on n'a pas plus d'indications sur notre destination, je ne saurai dire avec exactitude ce qu'on trouvera mais je pense que l'on devrait s'en sortir.

Il allait demander à Wilfrid s'il avait plus d'information que lui sur la région alentour quand Diana fit une remarque qui attira l'attention d'Alfrid.

" - Ouf, je ne suis pas fou, j'ai bien senti quelque chose" se déclara-t-il mentalement en regardant aux alentours pour essayer de trouver cette mystérieuse sensation.

- Oui, j'ai eu aussi cette sorte de sensation. Mais on dirait que ça s'éloigne sans faire attention à nous... Il croisa les bras sur son torse. Faut vraiment que tu m'apprennes à mieux sentir les cosmos Diana. Car si on est de nouveau séparé, cela pourrait nous être pratique afin de nous retrouver. Tu en penses quoi Wilfrid? Il se tourna vers son camarade en étant quand même sur le qui vive.

Après cet interlude au sujet du cosmos ressenti, Alfrid proposa de se rendre à la Scierie qui se trouvait un peu plus loin. Il indiqua la direction, en vérifiant bien son chemin, jusqu'à ce qu'elle soit en vue.

- Bon, on n'est plus très loin... j'espère qu'Ilias sera présent et qu'on pourra rapidement retrouver Dame Séléné.

Il songea qu'ils avaient fait confiance peut être trop vite à cet Ilias mais que de toute façon, c'était la seule piste qu'ils avaient actuellement. Et ils n'avaient pas le temps de fouiller tout les recoins du Royaume d'Asgard, alors que les Spectres et autres vils personnes pouvaient attaquer leur terre à tout moment.

" Elle vous a envoyé un messager qui vous a dit de suivre le guide qu'on trouvera à la scierie ... Que de secrets et de cachotteries ... Enfin, il faut bien commencer quelque part. "

Admit le guerrier de Grani avec résignation. Cette histoire était bien compliquée, qu'est-ce que cela pouvait bien cacher ? Etait-ce vraiment la prêtresse qui appelait ses amis à son secours ? Que craignait-elle pour mettre autant de prudence à se cacher ? Cela sentait les embrouilles. Quoiqu'il en soit, il ne fallait pas trop en demander à Wilfrid qui mettait déjà beaucoup de volonté pour s'efforcer de vaincre ses tendances à l'inertie et de suivre le mouvement. Il ne fallait pas lui demander non plus de s'impliquer ou de réfléchir à la meilleure manière de mener à bien cette quête.

D'ailleurs, il n'avait pas senti de présence faste ou néfaste à proximité comme Diana et Alfrid prétendaient le sentir. Lui ne sentait que la présence de guerriers qui se manifestaient orgueilleusement de la sorte, ou au mieux, qui utilisaient leurs pouvoirs pour se cacher -quand ils le faisaient mal. Le reste du temps, il ne faisait pas attention à ces signaux. Alfrid était pour sa part convaincu que c'était un atout, et encouragea sa coéquipière à s'améliorer dans le domaine, en demandant l'avis de Grani.

Quelle était l'intention exacte du Loup-Garou ? Essayer de susciter de la coopération voire de l'empathie entre les membres de son expédition ? Wilfrid regarda Diana qui depuis tout à l'heure réfreinait ses pulsions agressives à son égard. Elle ne l'aimait pas, la petite géante, ah ça non ! Et puis, c'était bien beau de demander des efforts, mais rien ne remplaçait un sérieux entraînement ou une expérience en situation, à la dure. Il faut dire que l'épéiste ne connaissait pas d'autre méthodes, le pouvoir des encouragements amicaux ne le convainquait pas plus que ça. Non, il n'avait pas envie de se laisser influencer aussi facilement par Alfrid.

" Je pense que ça se fera natuellement. Quand on a un handicap, on a tendance à le compenser. Si on ne voit pas loin, on se sert de ses autres sens, dont le sixième ... Je veux dire, tu es quand même pas très grande. "

Lâcha t-il en se courbant pour arriver au niveau de la géante. On ne devait pas avoir un point de vue très panoramique aussi près de la terre. Puis à l'adresse de son compagnon :

" Le ravitaillement est essentiel, Alfrid. Tu fais bien de t'en inquiéter. J'ai remarqué le sixième sens de Diana ne fonctionne pas quand elle a le ventre vide. "

Il faisait référence à leur rencontre à l'auberge, quand Diana s'était retrouvée nez-à-nez avec lui dans la plus grande confusion. Comme il voulait couper court aux éventuelles récclamations de Diana, il montra qu'il était prêt pour le départ.

" Bon, c'est pas tout ça, mais il faudrait s'y mettre. La scierie est bien de ce côté ? "

Alfrid soupira intérieurement en voyant que, malgré le fait qu'il est tenté de prendre à parti Wilfrid, celui-ci se maintenait dans sa carapace.

" - Ca promet... si il reste dans cet état d'esprit, ça ne va pas aider notre quête..." songea-t-il mais laissa vite cette sombre pensée derrière lui pour se concentrer sur la mission. En plus, ce n'est pas la dernière fois que j'essaierait de créer un certain lien entre nous trois.

La bonne humeur qu'avait Alfrid en sachant que Diana allait l'aider à apprendre à mieux sentir le cosmos tomba rapidement par la déclaration de Wilfrid. En plus, il critiqua aussi la taille de Diana.

Alfrid pensait que Diana allait le frappe pourtant elle semblait se contenir. Mais son visage était rouge de honte et cela, Alfrid n'accepta pas de voir son amie comme ça. Pourtant, il devait contenir sa colère pour le moment.

Ils continuèrent à coté de la scierie. Mais à un moment, il demanda à Wilfrid de venir un peu sur le coté. Il devait calmer sa colère interne. Une fois un peu à l'écart, il entreprit de lui parler.

- Tu sais, Wilfrid, je peux t'assurer que la taille de Diana n'a rien à voir avec son courage ou sa capacité de combat. Il lança un regard en coin à Wilfrid. Je l'ai vu affronter une créature plus grande que toi et moi, sans pour autant fuir ou tomber dans le désespoir. Et personnellement, je n'apprécie pas que l'on se moque d'elle. Il mit une main sur l'épaule de Wilfrid en le fixant du regard. Si nous devons faire parti de la même équipe, je pense qu'il serait bon d'éviter de se provoquer mutuellement...

Il retourna auprès de Diana pour voir si elle allait mieux après la remarque de Wilfrid. Diana lui avait bien fait un sourire en se remettant en route. Elle déclara que la scierie était la et qu'elle espérait qu'Elias serait là.

Alfrid regarda près de la scierie mais ne voyait pas Elias.

- Le bâtiment est grand, il est peut être de l'autre coté... J'espère que c'est une bonne piste et que tout ce passera bien. Il tourna sa tête vers Diana puis vers Wilfrid. Et que ça ira pour d'autres choses aussi...

Alfrid réfléchissait à un moyen de rétablir un semblant d'esprit d'équipe mais ne voyait pas. Wilfrid avait du blesser Diana en la critiquant sur sa taille et en étant distant.

" - Ca va être peut être un peu plus long que je ne le croyait mais je ne baisserait pas les bras...." se confirma mentalement Alfrid en souriant et arrivant devant la porte de la scierie.

- Je propose qu'on cherche un peu Elias. On finira bien par tomber dessus. Déclara Alfrid à ses compagnons de voyage.

Diana était presque muette de colère en entendant les provocations de Wilfrid. Elle se tenait droite en bombant le torse, un peu comme un chat qui se hérisse pour avoir l'air plus impressionnant devant un ennemi. L'épéiste la regarda passer devant en haussant des épaules quand elle fit comprendre qu'elle n'avait plus l'intention de lui adresser la parole.

Tandis qu'ils se mettaient en marche pour la scierie, Alfrid se glissa au niveau de la nouvelle recrue et commença à le sermoner sur son attitude avec sa compagne, en profita pour dire tout le bien qu'il pensait d'elle et prévint qu'il ne tolèrerait plus les provocations. Alors comme ça, on était prié de taire ce que l'on pensait si ce n'était pas en accord avec la pensée orthodoxe de l'armée d'Odin ou avec la petite amie d'Alfrid ...

" C'est bon, je ne le ferais plus. J'ai vérifié ce que je voulais : elle est mignonne quand elle se met en colère. Mais si tu veux vraiment mon avis, il y a quelque chose d'aussi important que de savoir sentir les cosmos étrangers : apprendre à se méfier de ses émotions. "

Et voilà, avec un peu de chance, il serait peut-être tranquille pour un moment. Entre l'une qui fulminait de colère et l'autre qui allait éventuellement chercher à comprendre où il voulait en venir avec ces paroles ambigües, il allait avoir la paix. En tout cas, Alfrid avait rejoint Diana. Le pauvre se donnait un rôle tampon entre l'irritabilité de l'une et l'entêtement de l'autre. Il était beaucoup trop dévoué pour son propre bien.

Wilfrid profita de ce répit pour essayer de deviner vers quel endroit d'Asgard on allait les conduire. Il avait été question d'une expédition assez longue et rude, même pour des guerriers divins. Et derrière la scierie, il y avait bien entendu un chemin partant vers un fond de vallée assez reculé mais aussi des montagnes assez abruptes, aux sommets glacials. Il espéra que ce n'était pas leur destination, mais son pessimisme ne lui laissait pas trop d'espoir.

* Maudit pays. Ce climat est tout simplement invivable. *

Il s'arrêtèrent devant la scierie. Alfrid estima qu'ils devaient faire le tour de l'établissement pour trouver leur guide. L'endroit était désert : était-ce l'heure de la pause pour les charpentiers ? Seul le chant d'une pie troublait la quiétude des lieux. Il était assez intriguant, plutôt varié. Il semblait que l'animal cherchait à communiquer avec les humains. C'était peut-être un animal apprivoisé, compagnon de cet Elias qui prétendait leur montrer le chemin vers l'objet de leur quête ?

Wilfrid se laissa porter par l'impulsion qui l'engageait à suivre le vol de l'oiseau, et dans les bois, il se trouva en face d'un enfant aux cheveux aile-de-corbeau. Et il entendit la voix de Loki. L'épéiste s'arrêta à une distance respectueuse et écouta attentivement ce que l'Ase aux mille ruses avait à lui dire. La voix qu'il entendait dans une sorte d'hypnose, un état proche de la méditation, mais d'une profondeur assez peu commune, lui annonçait un départ, puis lui recommandait de surveiller les évènements dans le pays.

Wilfrid se contenta d'incliner la tête, signe qu'il faisait entièrement confiance à Loki sur le fait qu'il allait revenir, et qu'il allait autant que possible tenter de suivre le fil du destin de ce royaume pris dans la tourmente. Aucune génuflexion, aucune salutation cérémonieuse : tout se lisait dans le regard de Grani qui s'était métamorphosé par la simple présence de Loki. Habituellement terne et dépressif, il était habité par une lueur d'audace. Le dieu ne lui avait pas donné d'ordre particulièrement autoritaire, et ce n'était pas un devoir que de faire ce que Loki lui demandait : c'était son souhait.

" Hmm ? "

Il fut tiré de ce songe par une voix. Elle paraissait bien fade cette présence, en comparaison de ce dont Wilfrid avait fait l'expérience. Il eut besoin de quelques instants pour reprendre ses esprits, à regret, car avec la disparition de Loki, il lui semblait qu'un horizon infini de possibles s'était évanoui. Ou plutôt était redevenu invisible, inaccessible à un esprit terrestre. A la place, il retrouva Alfrid et Diana auprès d'un vieil homme qui, pour un émissaire de la Grande Prêtresse de Polaris,  ne payait pas trop de mine, il fallait l'avouer. Wilfrid confirma sobrement la supposition de l'ermite.

" Tu imagines bien : je les accompagne. Je suis Wilfrid de Grani. Salutations à toi. "

Avait-il des questions ? Il en avait une foule présente à l'esprit, mais pas de celles qu'il aurait pû poser à Elias. Pourquoi Loki était-il parti d'Asgard, quand reviendrait-il, qu'en serait-il de son statut désormais ? Il laissa à Diana et Alfrid le soin de questionner Elias.

" - J'espère que la discussion que j'ai eu avec Wilfrid permettra d'améliorer sa camaraderie avec Diana... et depuis quand il dit qu'elle est mignonne?" l'esprit d'Alfrid s'égara un peu et il du remettre la mission en tête pour que certaines pensées l'envahissent. " Faudra que je lui demande un peu ce qu'il entend quand il parle de se méfier des émotions".

Le reste du chemin vers la scierie fut rapide et a part une le chant d'une pie, elle était vide.

Alfrid fit le tour mais ne trouva personne. Il fallut attendre quelques minutes avant que la voix d'Elias se fasse entendre. Il parla d'abord à Wilfrid pour savoir s'il comptait venir avec eux. Après avoir tenter une petite blague et regarder leur équipement, l'envoyé de la prêtresse leur demanda s'ils avaient des questions.

Wilfrid et Diana posèrent leurs questions et ils regardèrent vers Alfrid.

- En effet, je rejoins les questions de Diana et Wilfrid. Mais j'aimerais savoir comment vas Dame Séléné? A-t-elle besoin de soin en particulier? Il revoyait les kits de soin qu'il avait. Car si elle est blessé gravement, il nous faut le savoir. Sinon, je pense que l'on peux se mettre en route pour la retrouver.

Il attendit la réponse d'Elias, en priant Odin que le voyage se passe bien et surtout, que leur groupe n'explose pas.

Le guide, ce fameux Elias, inspirait plutôt confiance. Il y avait quelque chose, une sorte de mélodie au fond de la voix, à laquelle on pouvait reconnaître un sage, un peu comme le chant permet d'identifier l'oiseau. Ce que le guide leur révéla, c'était ce que Wilfrid avait craint : le chemin qu'ils allaient emprunter était le royaume du Gel. Ses conjectures pessimistes avaient préparé le guerrier de Loki et il encaissa le choc sans ciller. Le froid, l'un de ses pires ennemis. De plus, Elias avait laissé entendre qu'ils devraient éviter de s'emporter, qu'ils auraient à se passer de la force du cosmos.

" Comme le commun des mortels ... Pas d'armure, donc. "

L'armure était lourde lorsque le cosmos était dormant. En porter une n'était pas le meilleur atout pour faire de l'alpinisme. L'idée de se passer de cette protection n'était pas plaisante, d'autant que l'homme se gardait bien de dire ce qu'ils avaient à perdre à utiliser leurs forces secrètes. Wilfrid renonça à son armure et ne conserva que son épée, même si bien sûr il serait tentant de donner de la légèreté à la lame de Gram par une petite impulsion de cosmos. Le grand blond estimait qu'il se maîtriserait tout de même : il ne souffrait pas d'un tempérament sanguin. Finalement, il se retrouvait à égalité avec Alfrid et Diana, qui eux ne verraient pas la différence au vu de l'état de leurs armures.

En tout cas, Elias jetait en pâture aux deux amis de la prêtresse une information qui les réconforterait peut-être : elle était, à ses dires, saine et sauve, bien qu'elle ait été blessée. Wilfrid croisa les bras : pour sa part, il ne croirait que ce qu'il verrait. Et encore. D'ailleurs n'était-ce pas la mission que lui avait confiée Loki ? Lui servir d'yeux. Avoir croisé le Rusé sur son chemin sans qu'Il ne cherche à le détourner de cette quête était sans doute signe qu'il ne se trompait pas de voie et qu'il y avait bien quelque chose d'intéressant à découvrir dans les cimes glacées.

* Moi qui pensais avoir trouvé un guide ... maintenant qu'il a quitté le royaume, je vais peut-être devoir agir comme les guerriers d'Odin et me plier aux volontés d'un chef que je ne voulais pas suivre, épauler de manière plus permanente des compagnons aux côtés desquels je ne souhaitais pas combattre. Vais-je devoir me forcer à lancer des cris de ralliement pour la Grandeur d'Asgard et de son Père, pour le Bien de la Terre, et toutes ces choses auxquelles je ne crois pas ? J'aurais préféré être seul guerrier de ce dieu dont tout le monde se méfie, oeuvrer seulement pour ce qui peut être réellement sauvé, ou encore avoir pour compagnons des mécréants comme moi, si prévisibles. Les adorateurs d'Odin sont prêts à toutes les absurdités, et le pire est qu'ils s'attendent à ce qu'on les suive. *

Cependant, au fur et à mesure qu'ils progressaient dans les escarpements de la montagne, l'amertume se dissipait. Pour le moment, cela ressemblait à une session d'entraînement, et Wilfrid se détendit. Il se laissa rattraper par Diana sans lui souffler mot, car il sentait bien sa crispation, puis il fut au niveau d'Alfrid. Il lui parla à mi-voix afin de ne pas être entendu d'Elias et de Diana.

" Ta prêtresse est en bonne santé paraît-il, je suppose que tu en éprouves du soulagement. Tu te demandes peut-être ce que j'ai voulu te dire tout à l'heure ? Ecoute, j'ai bien vu que tu prenais le parti de Diana. Tu as sans doute tes raisons et je n'irais pas les chercher pour te faire la morale là-dessus. Garde simplement à l'esprit que je ne pense pas comme vous, et cela ne changera pas de sitôt. "

Le ton n'était pas hostile, mais le contrat était posé : il n'irait pas disséquer les raisons de l'attachement d'Alfrid à la jolie petite rousse -même si elles étaient faciles à imaginer- si en contrepartie on lui laissait le droit de ruminer son opinion dans son coin sans le reprendre sur le chapitre de l'idéologie.

"Je vais fermer la marche."

Sur ces mots, il indiqua qu'il prenait son poste et que sur ce point-là, on pouvait compter sur lui. Il était temps de se concentrer sur leur voyage. Ses yeux se levèrent vers les grands rochers aux formes fantastiques qui les surplombaient. Ils donnaient effectivement l'impression de corps monstrueux de géants endormis qui, s'ils se réveillaient, pourraient les attaquer pour les broyer sous des poings de roc, ou les précipiter dans les abîmes. Un mince sourire se dessina sur les lèvres de Wilfrid. Alfrid désirait peut-être même qu'ils se réveillent, ces géants : enfant, il avait cette fascination bizarre pour les créatures du royaumes des Ases.

Pour sa part, Wilfrid n'excluait pas cette possibilité, mais il craignait davantage les avalanches et utilisait ses oreilles plus que ses yeux, rivés au sentier, ne lançant que quelques regards dans la pente pour surveiller leurs arrières. Dernier de cordée, c'était la place qui lui convenait : ne pas avoir à donner l'énergie d'avancer au groupe, ne pas être au milieu, avoir de l'air pour respirer, ou plutôt pour se complaire dans son humeur maussade et cultiver son obsession paranoïaque qui lui faisait craindre les attaques à revers.