Enfin chez soi

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Une étoile franchit les cieux rapidement, se fondant avec les rayons du soleil comme si elle provenait de l'un de ses rayons. Camélia atterrit avec douceur et grâce, sans difficulté apparente et malgré les talons qu'elle portait. Elle ne s'était pas arrêtée au premier domaine, préférant un sommeil mérité à une longue attente pour voir si quelqu'un serait là. On finirait bien par savoir qu'elle était incarnée, plus ou moins vite. Elle vait donc posé le pied directement dans son domaine.

Partout, des torches, des flambeaux, des guirlandes de flammes, il y avait même des fosses d'où sortaient de hautes flammes, continues comme des murs naturels. Le sol de marbre noirci rougeoyait de tous les côtés et la température était extrêmement haute. Elle s'y était vite habituée en y vivant étant petite. Une large place occupait l'espace devant ce que l'on pourrait appeler un "temple", où elle avait au fil des siècles accumulé tous les objets possibles produisant ou contenant du feu, afin de pouvoir regarder le tout danser sous ses yeux. Le temple en lui-même était principalement une grande salle sans porte ni fenêtre, comme les anciens temples de Grèce antique, par où la lumière rentrait devant et derrière. De rares pièces disposées sur les côtés abritaient cuisine et salle de bain pour un confort rudimentaire.

La berserk avançait tranquillement au milieu du feu permanent qui régnait donc. Elle se mit à faire danser les flammes d'un simple regard et dansa avec elles en faisant des rondes et quelques pas d'un côté de l'autre. Des figures animales se mirent à bondir ça et là de torches en torches ou bien sur le sol noir avant de se disperser en multiples flammèches dans un carnaval de formes et de couleurs avec lequel Camélia se confondait parfaitement, du fait de la blondeur de ses cheveux, de la pâleur de sa peau et de la couleur de robe, parfaitement accordées au lieu.

Elle finit par s'immobiliser devant un fossé qu'elle sauta sans craindre les flammes. De l'autre côté de ce no man's land interdit se trouvait un cercueil ancien mais pas usé. Cerclé de feu, il fallait être courageux, idiot ou ne pas craindre la morsure brûlante pour s'aventurer auprès de lui. Comme chaque soir, elle défit les lacets de son corsage, puis laissa tomber sa robe le long de son corps avant de la retirer. Elle plia le vêtement avec beaucoup de soin et le déposa dans un petit compartiment prévu à cet effet. Nue, elle s'allongea ensuite dans le cercueil mais ne referma pas le couvercle cette fois, afin de pouvoir garder Emilie avec elle sans risquer de l'écraser. Près de la jeune femme et sa poupée, l'amure de Cardinale qui appartenait à Camélia. C'était la seule chose qui trahissait l'appartenance de la jeune femme aux armées d'Arès. Rien dans ses traits, dans son attitude ou dans domaine ne précisait qu'elle aimait les massacres et la violence. L'innocence même, elle aurait pu passer pour une enfant retenue prisonnière s'il y avait eu un garde dans les parages. Mais non, elle était juste étendue dans son cercueil, se reposant d'une longue journée, son armure veillant.

"Dors bien Emilie. Demain nous irons voir tonton Arès s'il est présent ici. Il faut être présentable pour lui, alors n'ayons pas les yeux fatigués."

Une heure ou deux à peine avaient passé depuis que Camélia s'était glissée dans son cercueil. Le temps d'un cycle complet de sommeil parsemé de rêves féériques et incendiaires. Lorsque parut Calamity, l'armure de la cardinale du Feu s'anima d'une certaine agitation qui, combinée à l'émanation cosmique de la cardinale des calamités, fit ouvrir les yeux à la Belle aux feux dormant. Elle se redressa avec grâce, ni trop vite, ni trop lentement. D'un geste naturel et non prémédité, elle cacha un bâillement d'une main et son attention fut alors attiré par son invitée. Un sourire se peignit sur son visage et elle se leva, déposa Emilie et récupéra sa robe. Malgré son court sommeil, après des années cela suffisait à la remettre d'aplomb pour le moment.

Une fois de nouveau vêtue, elle récupéra sa poupée et franchit les flammes pour rejoindre Calamity qui l'avait sagement attendue.

"Bonjour Calamity ! J'espère que tu n'attends pas depuis longtemps."

Elle fit une charmante révérence en tenant un pan de sa robe et afficha un air joyeux.

"Pourrais-tu me dire en quelle année nous sommes s'il te plaît ? Je n'ai pas vraiment regardé l'heure sur la tour de Londres. Je crois que chanter m'a fait oublier ! Es-tu réveillée depuis longtemps ? Qui y a-t-il d'autres que nous ? As-tu vu maître Arès ? Comment va-t-il ? Comment nous a-t-il sorti de notre sommeil ? A-t-il été jugé par les dieux pour cela ?"

La jeune femme se rendit compte qu'elle avait beaucoup plus de questions à poser que ce qu'elle croyait et se mit à se dandiner sur place en se retenant d'en poser de nouvelles, le temps que Calamity lui réponde. L'euphorie de croiser une autre berserk la rendait toute joyeuse et pleine de vie. Elle en profita pour tendre sa poupée vers la cardinale de la calamité et la présenta simplement :

"Regarde ! Elle s'appelle Emilie ! C'est mon alter ego !"

Toute fière d'elle, elle fit un tour sur elle-même, laissant sa robe ondoyer au gré du vent et des flammes qui dansaient de plus belle. Tout à coup, elle remarqua une présence étrangère à l'entrée du royaume d'Arès. Une présence d'eau... Une présence poséidonienne. L'ancien protecteur de Troie avait donc envoyé un de ses émissaires chez les berserkers ? Intéressant.

Camélia était ravie de voir son enthousiasme partagé et d'être renseignée sur la majeure partie de ses questions. Cependant Calamity suggéra qu'elles devraient rejoindre leur seigneur. L'idée n'était pas mauvaise, mais Arès savait jouer avec adresse lui aussi, quels que soient ses adversaires, Camélia n'en avait jamais douté. Elle se mit à réfléchir... Si l'année 1740 était bien la bonne, cela devait faire quatre cents bonnes années au moins qu'elle ne s'était pas réincarnée, voire plus. Elle avait un peu oublié à quel moment les sceaux divins avaient enfermé les berserkers, ce qui comptait à présent était qu'ils étaient libres de revenir, au prix d'un hôte.

"Je n'ai pas envie de dormir encore ! Allons jouer ! Il faut que je présente Emilie à Arès, et aussi que je lui dise que j'ai réussi à sortir de mon cercueil ! Je suis sûre qu'il sera très heureux de l'apprendre, et que nos invités aussi !"

Elle prit spontanément Calamity par la main sans lui demander son avis et la conduisit à travers les arabesques ardentes jusqu'à l'autre bout de sa demeure. Non pas que la cardinale de la calamité ne connaisse pas le chemin, mais elle avait certaines habitudes, légèrement envahissantes pour qui ne supportait pas d'être approché, qui persistaient.

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