[FB]Une rencontre inopinée

Le jeune chevalier se baladait le long de la route, clopin-clopant, son armure dissimulée par la bure de moine qu’il portait à chaque fois qu’il quittait le sanctuaire. Sans être perdu, il n’était pas tout à fait sur de là où il se situait. Il fallait avouer que crapahuter dans les différents sentiers grecs n’était pas son principal hobby. D’un autre côté, les voyages formaient la jeunesse, ou quelque chose dans le genre, non ? En explorant un peu l’Europe, il y gagnait surement des connaissances pour ses futures explorations. Il s’améliorait dans la sélection des champignons et dans l’art obscur de se soulager en basse campagne. Par exemple, hein, ce n’est pas une liste exhaustive de tout ce qui lui était arrivé jusqu’alors…

Aratos était donc sur la route – toute la sainte journée – et avait fini par tomber sur un carrefour. Fatigué par tout le chemin parcouru, il s’accordait quelques minutes de répit, assis sur quelque chose qui ressemblait vaguement à une borne kilométrique romaine.

* C’est bien ma veine cette mission de postier. Faut que je me pointe chez le père Cronos et que je lui livre cette lettre, au péril de ma vie. J’espère seulement que ce sont des bonnes nouvelles et que le titan va pas m’exécuter en la lisant. Ça serait quand même con d’y passer. D’y passer … encore. * pensait-il en se massant les mollets endoloris avec une moue de soulagement.

Sauf que cela n’allait pas être aussi simple que ça. Sans crier garde deux hommes surgirent d’un bosquet, avec une mine patibulaire, et engagèrent la conversation avec le jeune homme sans attendre.
« Mon cher monsieur, nous sommes dans l’obligation de vous arrêter pour vous demander votre bourse. Vous nous voyez désolés de devoir en arriver là, mais vous vous doutez bien que … » amorça-t-il.

C’était bien la veine du jeune chevalier de bronze. Il était tombé dans un guet-apens et il n’avait pas que ça à faire, honnêtement. C’est donc un peu blasé par la situation qu’il rétorqua en coupant la parole du premier homme.

« Sans déconner, vous aviez rien de mieux à faire que de me casser les noix ? » Pour le coup c’était plutôt sec. La réaction ne fut pas l’escomptée. Fronçant les sourcils, les deux hommes attrapèrent leurs couteaux respectifs et s’approchèrent encore plus du chevalier du poisson austral. « On ne voulait pas en arriver là, mais bon, tu mérites une bonne leçon mon garçon. »

* Ah mais, non, j’ai aucune envie de sanctifier ces deux guignols ! On va dire que je vais leur coller une ou deux avoines et basta !* se surprit à penser Aratos. La confrontation était imminente !

A moins que ….

La situation prenait rapidement une mauvaise tournure. Nul doute qu'un chevalier n'aurait aucune difficulté à calmer par la violence ces deux gibiers de potence mais en l’occurrence Athéna n'aurait pas apprécier une telle débauche de coups.
Les deux bandits s'approchèrent d'Aratos pour le prendre en tenaille, l'ai menaçant, quand soudain une voix réprobatrice résonna à leurs oreilles.


- Deux contre un, voilà un combat bien inégal. L'homme à qui vous vous en prenez n'est même pas armé. Je me permets donc d'intervenir. Ne vous fiez pas aux apparences, vous avez quelques instants pour réfléchir et quitter les lieux. Tout le monde y gagnera, croyez moi.

Comme par magie, un homme venait de se matérialiser dans le dos des deux bandits, pris au dépourvu. Les traits fins, vêtu de manière simple tel un moine tibétain, l'inconnu posa un regard bienveillant sur Aratos.
Une fois la surprise passée, les deux mécréants se retournèrent pour ricaner à la face du nouveau venu à l'allure inoffensive.

- De quoi il se mêle celui là ?! Encore un pouilleux à plumer ! Tu aurais mieux fait de passer ton chemin. Nous allons faire d'une pierre deux coups.

L'homme ferma les yeux en souriant. A la grande stupeur des deux gibiers de potence, leurs couteaux sautèrent de leurs mains pour venir planer à quelques centimètres de leurs gorges.

- Je vous le redis... Quittez ces lieux ou subissez les conséquences de vos erreurs.

Hurlant à la sorcellerie et à la magie noire, les deux bandits ne demandèrent pas leur reste et s'enfuirent en courant comme s'ils avaient le diable aux trousses.
Amusé par leur "courage", l'inconnu se tourna vers Aratos et le gratifia d'un sourire amical.

- Orion du Bélier, pour te servir. Je ne doute pas que tu n'aurais fait qu'une bouchée de ces deux pauvres ères mais au moins le sang n'a pas coulé. Que fais tu sur les routes ?

Ca avait au moins eu le mérite d'être expéditif. L'arrivée inopinée d'Orion du Bélier et, avant tout, la démonstration de force qu'il avait réalisé à l'aide de ses pouvoirs télékinésiques avait fait fuir avait fait fuir le duo de malandrins en moins de temps qu'il m'a fallu pour écrire cette phrase – et ne me sous-estimez pas, j'écris plutôt vite. Si dans un premier temps, le jeune chevalier de Bronze s'était interrogé sur la raison qui avait poussé le chevalier d'or à se présenter ici, il n'en était plus question. Après tout, il lui avait quand même sauvé les miches. Bon, d'accord, il n'en avait probablement pas besoin, mais d'un autre côté, c'était tout de même un acte sympathique et, il l'espérait, désintéressé.

* On ne sait jamais ceci dit. Si ça se trouve il est venu me mettre une rouste parce que j'ai pas bien fait quelque chose. Ou que j'ai carrément oublié quelque chose. Ou pire. Ca peut être pire d'ailleurs ? Oh le bordel ... *

Aratos ne connaissait pas Orion, tout au plus il l'avait croisé alors qu'il échangaeait des mandales avec le brave chevalier noir du pégase. D'ailleurs il n'en savait pas plus que ça à son sujet. Si ça se trouvait c'était un psychopathe qui portait une armure sacrée ! Son maître l'avait prévenu, les chevaliers n'éatient pas tous bons, ils restaient humains avec leurs forces et surtout leurs faiblesses.

" Pour me servir ? Etrange expression... Oh, excusez moi, je divague. Je suis Aratos. Je suis dans le coin parce que ... hmm. Sans vouloir vous vexer, je ne suis pas sur que j'aie le droit d'en parler. La patronne a pas été assez claire sur ce point là, et comme j'ai pas envie de me planter ... " répondit-il. Il n'avait pas tort ceci dit. Autant ne pas présenter sa mission pouvait être une erreur, elle avait une solution simple : se confier. Autant l'inverse ...

" Je suppose que si je vous renvoie la question, vous me donnerez la même réponse non ? Je ne peux pas vraiment vous en tenir rigueur ceci dit. " ajouta-t-il en se grattant le menton. Il n'était pas sur de donner une bonne première impression, mais y pouvait-il quelque chose ?

* J'espère vraiment qu'il n'est pas venu me rouster, sinon je vais passer un sale quart d'heure. Mais d'un autre côté, j'ai rien fait de mal si ? Enfin ... Rien qui ne soit remonté jusqu'aux oreilles de la chef ou alors j'ai mal jugé mes actes. *

Le mot qui semblait coller à ce jeune saint était sans conteste : Stressé.
Orion fut grandement étonné de mettre par sa seule présence Aratos si mal à l'aise. Ce dernier avait-il donc quelque chose à se reprocher ? Ou alors peut être n'était-il tout simplement pas familier à la présence d'un chevalier d'or.
Une simple formule de politesse et le voilà plongé dans les affres d'une intense réflexion. Vraiment étrange.
Son langage "familier" écorcha les oreilles d'Orion mais ce dernier tenta de passer outre.
Dans un élan de méfiance ou de souci de bien faire, le jeune bronze saint refusa de révéler la raison de sa présence en ces lieux à son supérieur. Ceci dit, si Athéna en personne lui avait confier une mission, Aratos était dans son bon droit en désirant rester discret.
Avant qu'Orion n'ait pu le rassurer, Aratos enchaina en posant une question à la formulation pour le moins irrévérencieuse à son supérieur. Ce dernier observa un moment sans mot dire le jeune homme d'un air imperturbable. Après quelques instants, Orion répondit d'un ton neutre.

- Je ne fais nul mystère de ma présence ici. Je reviens de mon palais à Jamir et je me dirige vers le Sanctuaire car j'ai ressenti des présences au sein de mon temple. En me téléportant, j'ai cru ressentir une aura d'un saint et j'ai pris la liberté de m'attarder pour en avoir le cœur net.

Orion se rapprocha de quelques pas d'Aratos sans cesser de le jauger. Le regard du chevalier d'or se durçit pour devenir presque inquisiteur.

- Ta discrétion est tout à ton honneur mais sache qu'un autre chevalier d'or que moi aurait pu s'offusquer de ta manière de répondre. Je trouve étrange que tu sois si nerveux en ma présence. Dois-je en déduire que tu n'es pas familier avec mes pairs ou plutôt que tu as quelque chose à te reprocher ? Je suis un expert en perception et ton cosmos est... inhabituel. Qui est ton maitre ? Depuis combien de temps es-tu en possession d'une armure ?

Orion n'était, à priori, pas très content. Il avait le visage fermé et une voix neutre, sans aucune comparaison avec leur premier échange. "Vous avez un palais ?!" s'exclama-t-il sans pour autant couper son interlocuteur, en se rendant compte qu'il passait probablement pour un rustre, mais de toutes façons, le mal semblait déjà fait. Mais ce n'était rien par rapport à ce qui allait se passer. S'approchant du jeune ibère, Orion lui adressa quelques répliques cinglantes... Et Aratos n'aimait pas trop se faire marcher sur les pieds. Vraiment pas. Mais il savait que ses prochains mots pouvaient être, sinon les deniers, en tout cas mal interprétés.

* Alors comme ça il lit dans les esprits ou quoi que ce soit dans le genre ? Çà me fait une belle jambe, c'est pas comme si je lui avais dit quoi que ce soit. Et elle a quoi ma manière de répondre ? On croirait rêver, sans déconner... * se dit-il en résumant tout ceci dans un mouvement d'épaules. Si de toutes façons Orion pouvait "lire" son cosmos, il n'avait pas grand chose à faire à ce niveau là...

" Je ne suis pas spécialement stressé, c'est juste ma manière d'être." commença-t-il avant d'éviter d'ajouter "j'espère qu'elle ne vous convient." Ce n'était pas une raison pour se mettre à dos l'un de ses supérieurs hiérarchique pour des broutilles. Il voulut tout de même répondre aux interrogations du chevalier d'or.

"Que de questions ! Je suis chevalier du Poisson Austral depuis peu. Et, pour être honnête, je ne pense pas que vous connaissiez mon maître. Il s'agit de l'ancien chevalier de Persée, Marcus. Vu son grand age, il y a peu de chances que vous l'ayiez croisé. D'un autre côté, je ne connais pas le votre, d'age, donc si ça se trouve ..."

C'était techniquement possible, après tout, peut-être que le chevalier du bélier avait reçu un don de la déesse Athéna ? Peut-être que ses origines cachaient un age avancé ? Il n'en savait rien et n'avait de toutes façons pas le temps de se perdre dans des conjonctures.

"Ceci dit, c'est vrai que j'y connais rien en hiérarchie et en protocole. J'voulais pas spécialement vous froisser. Et entre nous, mon maître m'a prévenu : les chevaliers d'or sont rarement à un endroit sans raisons... et ne sont pas forcément tous des anges. Enfin, il avait peut-être tort, il était à moitié fou ..."

Il avait encore laissé sa langue déraper. Il fallait vraiment qu'il la calme !!

Une moue réprobatrice apparut sur les lèvres d'Orion dont le regard ne changea pas d'un iota.
Ce chevalier se voulait non seulement irrévérencieux mais bien maladroit dans ses propos. Il était bien étrange qu'Aratos s'interroge sur les quelques questions que lui posait le chevalier d'or. ce dernier se devait d'en apprendre davantage sur le jeune homme pour en découvrir le potentiel et les qualités. Bien que pour l'heure, son avis oscillait dangereusement vers le négatif.
Les quelques réponses malheureuses dues à la jeunesse et à l'inexpérience n'avaient pas donc de quoi froisser Orion et sa bonté naturelle. Mais Aratos avait piétiner une ligne dangereuse en insultant son propre mentor. La réponse glaciale du chevalier d'or ne se fit pas attendre.

- Je te trouve bien impertinent lorsque tu évoques ton maitre. L'âge est un signe d'expérience et bien souvent de sagesse. Rares sont les saints qui atteignent l'automne de leur vie. Moi même, je mourrais probablement d'ici quelques années tout au plus.

De son propre aveu, Aratos était peu familier avec les us et coutumes de la hiérarchie des saints d'Athéna. Mais même cette ignorance ne pouvait excuser certaines paroles. Pour avoir deux disciples, dont un parfois irrévérencieux, Orion était particulièrement sensible au respect dû à celui qui ouvrait les voies vers la chevalerie et ses valeurs.
Le cosmos pur et puissant du chevalier d'or commença à gagner en intensité, recouvrant son corps d'une aura dorée caractéristique.

- Tu sembles encore bien maladroit par les paroles. Qu'en est-il de tes pouvoirs et de la puissance de ton cosmos ? Voudrais tu bien m'en faire une petite démonstration ?

Des remontrances.

Voilà ce à quoi il avait eu droit, tout simplement. Aratos se passa la main lentement sur le visage, légèrement agacé d’être pris pour un jambon. D’un côté, il l’avait un peu cherché, mais de l’autre … Avait-il vraiment tort ? Marcus l’avait quand même balancé dans une flotte pleine de murènes et de raies alors qu’il avait neuf ans, et qu’il ne savait pas nager. Sans être un dangereux psychopathe, il n’était sans doute pas la personne idoine pour élever un jeune garçon. Mais évidemment, Orion ne le savait pas, et loin d’Aratos l’idée de tenir tête à son supérieur. Ce fut alors que le chevalier d’or commença à intensifier son cosmos.

* Oh le bordel, ça veut dire quoi ça ? Hé, mais j’ai pas envie de me faire démolir moi ! J’ai pas que ça à faire … Bon, si je lui dis que j’ai piscine il ne va pas me croire, mais quand même, j’ai aucune envie de « démontrer la puissance mon cosmos », c’est tout juste si je sais m’en servir, il va se foutre de ma gueule ! * S’il se trompait peut-être, ce n’était pas pour autant qu’il avait envie de se mesurer à qui que ce soit. Ce n’était pas son style, et encore moins face à un supérieur qui pouvait sans doute le balayer comme un fétu de paille.

« Je suis sans doute peu doué avec la parole, vous avez surement raison. » commença-t-il en pensant que c’était toutefois la première fois qu’il devait s’en excuser. « Je ne suis pas sûr de comprendre… Vous voulez que je fasse quoi exactement ? » Il espérait que le chevalier d’or ne proposait pas là un combat, parce qu’il en était tout simplement hors de question. Déjà il ne lui serait jamais venu à l’idée de lever la main contre un supérieur, même si ce dernier lui demandait. On pouvait sans doute radier un chevalier de l’ordre de chevalerie pour moins que ça. De plus il n’avait aucune confiance en cet Orion, aussi chevalier d’or fusse-t-il. Et puis, il y avait quand même un monde de différence entre les deux chevaliers. Aratos n’avait aucune envie de se faire rouer de coups.

« Non parce que si vous sous-entendez qu’il faut que j’élève mon cosmos pour le comparer au votre, on peut tout de suite arrêter là. J’suis qu’un vulgaire chevalier de bronze, moi, messire… » ajouta-t-il avec une pointe de reproche, pour être sûr qu’il n’avait pas mal compris la situation.

Plus le chevalier du poisson austral répondait, plus il s’enfonçait, à vraie dire. Il n’était vraiment pas doué, ce brave petit.

(vraiment désolé du retard !)

Non décidément, Orion ne parvenait pas à croire ce qu'il entendait...
Aratos n'avait-il donc jamais subit un entrainement digne de ce nom ? N'avait-il pas affronter d'autres saints en devenir pour gagner son armure ? Il allait de soit qu'Orion ne comptait pas évaluer son cosmos par rapport au sien. Quelle idée saugrenue.
Ce jeune garçon n'allait pas faire long feu avec si peu d'expérience ou même d'entrainement au simple contact diplomatique. Plutôt que d'être curieux et enthousiasme de ce qu'Orion pouvait lui apporter, il prenait cette discussion comme une gêne et un réel problème. Repoussant son agacement initial, le chevalier d'or du Bélier posa un regard compréhensif sur Aratos.

- Je te proposais tout simplement un petit exercice d'entrainement mais tu ne sembles pas vraiment adhérer à cette idée. Je suis navré que ma présence te rende si nerveux. Je vais donc te laisser poursuivre ta mission sans te déranger davantage. Toutefois, certains de tes propos me choquent, vois tu. Aucun chevalier n'est "vulgaire" comme tu dis. Tu as autant souffert que moi, sinon davantage pour obtenir ton armure et cela mérite le respect. Un saint, qu'il soit de bronze, d'or ou d'argent a la même valeur à mes yeux. N'oublie jamais cela.

Il était bien dommage de ne pas avoir su gagner la confiance d'Aratos mais en de meilleures occasions, Orion n'allait pas manquer de discuter de nouveau avec lui. Ce jeune garçon était intéressant et il était hors de question de le laisser empêtrer dans de tels réflexes de méfiance vis à vis des autres serviteurs de la déesse Athéna.
Dans un dernier sourire bienveillant, Orion se volatilisa en laissant dans son sillage des minuscules étoiles.