Le Cavalier Pâle, Berzerker de la Mort [fini]

Annatar est avant tout un homme de lettres. Rien ne le passionne plus en ce monde que la littérature, les vers bien écrits et les poèmes harmonieux. Il n’y a rien qui le fasse plus se sentir bien que d’écrire une belle chanson ou une douce ode. En raison de ses nombreuses lectures sur les poètes et philosophes grecs et romains, il est quelqu’un d’extrêmement cultivé et intelligent, qui en sait long sur le monde et sur les Hommes. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il fut un excellent conseiller pour Prasutagos et Boadicée, malgré le fait qu’il n’ait pas pu empêcher leur mort à tous les deux…

Annatar avait autrefois beaucoup de mal à comprendre la guerre et les combats, il ne comprenait pourquoi son frère si intéressait tant. Mais après avoir reçu les enseignements guerriers de Prasutagos, il commença à comprendre, bien qu’il ne prît jamais réellement goût à cela. Malgré cela, se battre ne lui déplait pas, mais ce qu’il aime le plus dans le combat c’est de donner la mort à son adversaire. Ce goût lui est venu après qu’Arès lui ait offert l’épée, le cheval et la maîtrise de son cosmos. Mais en réalité, bien qu’excellent épéiste, Annatar est plutôt fin stratège. Il est capable d’établir rapidement une stratégie de bataille, d’analyser ses adversaires et de savoir s’il faut attaquer ou non dans la plupart des situations. Ainsi, il est quelqu’un de très réfléchi et de très peu fougueux. Il n’agira jamais sans avoir analysé la moindre possibilité, et ses deux seules défaites furent causées à cause de son attachement aveugle pour Boadicée.

Depuis son récent retour à la vie, Annatar, autrefois joyeux et très bon vivant, est devenu quelqu’un de très froid et distant. Il ne souhaite plus s’attacher à personne, l’attachement ayant causé sa perte, et veut à tout prix se venger des romains, ne sachant pas encore que le monde est devenu bien différent de ce qu’il était avant.

Annatar naquit en l’an 29 après Jésus-Christ, en Britannia. Il vint au monde dans ce que l’on pourrait qualifier de noble famille, entretenant une certaine relation d’amitié avec une autre famille Icénienne, une famille dans laquelle devait naître une reine-guerrière qui allait marquer l’histoire : Boadicée. Annatar était très proche de son frère, Maelgad, de quatre ans son aîné, bien qu’ils ne partagent pas les mêmes centres d’intérêts. En effet, là où le cadet prit vite goût à la poésie et à l’art de lettres, l’aîné lui préférait s’atteler aux arts de la guerre. Les deux frères se lièrent rapidement d’amitié avec Boadicée, en raison du lien amical unissant les deux familles dont ils étaient issus. Et bien qu’une bonne-entente régnait entre les trois gamins, une relation particulière s’était installée entre Maelgad et Boadicée, et ce malgré leur différence d’âge de cinq ans. Ce n’était sûrement pas de l’amour, mais plutôt une très forte amitié, presque fraternel, si bien que Maelgad en vint à devenir plus protecteur envers la jeune fille qu’envers son propre petit frère. Malgré cela, Annatar continua d’aimer profondément son grand frère, et en son amour pour lui se transforma bientôt en une grande admiration grandissante, bien qu’il ne comprenne pas sa passion des arts de la guerre.

Pourtant, les liens unissant Maelgad à Boadicée et à Annatar se dégradèrent lorsqu’il s’engagea dans l’armée Icénienne en l’an 43 après Jésus-Christ, alors même que les légions romaines viennent de débarquer en Britannia. Mais Annatar aime toujours son frère et commence à prier les dieux pour lui, particulièrement Arès, dieu grec de la guerre, dont il a entendu parler à travers des poèmes. Maelgad, alors âgé de dix-huit ans, craint la perspective d’une invasion romaine. Il prévient le chef des Icéniens et d’autres personnes encore, mais à ce moment-là, personne ne se doute que Rome, allié commerciale de Britannia et trop occupé à lutter contre les Gaulois, convoite la Britannia. Tous se moquent du jeune homme et lui dise d’obéir sagement aux ordres ou de rentrer chez lui. En l’an 45 après Jésus-Christ, Boadicée, n’ayant plus vu Maelgad depuis plus d’un an, se marie avec Prasutagos, nouveau chef de la tribu des Icéniens, et lui donne deux enfants : deux magnifiques filles. Annatar se lie d’une grande amitié avec Prasutagos, et devient son plus proche conseiller. Malgré son incompréhension des arts de la guerre, Annatar accepte que son ami Prasutagos l’entraîne aux maniements des armes, et il s’avère que le jeune homme manie l’épée comme personne. Maelgad s’éloigne encore plus de Boadicée et d’Annatar, n’appréciant pas vraiment le mari de son ancienne amie.

En 47 après Jésus-Christ, quarante mille soldats romains envahissent le sud de Britannia, éradiquant toute forme de résistance. Maelgad souhaite ardemment que les Icéniens viennent en aide aux tribus du sud, mais Prasutagos refuse et pactise même avec les romains, leur offrant à sa mort la moitié de ses terres, l’autre moitié revenant à sa femme et ses deux filles. Maelgad, voyant cela comme une trahison de Prasutagos envers les celtes, tente de rassembler des hommes autour de lui, mais seuls une centaine de soldats acceptent de le suivre. Il part alors, accompagné de cette centaine de soldats, pour combattre les envahisseurs romains, mais revient quelques mois plus tard, seul. Il est le dernier survivant de ceux qui étaient partis pour le sud, et implore alors la pitié de Prasutagos, qui lui accorde selon les bons conseils d’Annatar. Celui-ci se rend alors compte qu’Arès n’est pas resté sourd à ses prières : en effet, avant que son frère ne parte combattre les romains, il avait prié le dieu grec de la guerre de donner la force à Maelgad de rester en vie. Annatar commence alors à partir de là à vouer un véritable culte à Arès, sans n’en informer personne, de peur des représailles qui pourraient tomber sur lui si quelqu’un apprenait qu’il vénérait d’autres dieux que les dieux celtes.

Ainsi les Icéniens vécurent pendant treize ans dans la paix, Maelgad nourrissant une haine de plus en plus grandissante et Annatar conseillant Prasutagos et Boadicée pour que la paix continue. Mais tout allait basculer en l’an 60 après Jésus-Christ. Prasutagos mourut cette année-là, à quarante ans, lors d’un malencontreux accident durant un entraînement de tir à l’arc. Boadicée devint alors la reine des Icéniens, mais les romains ne le voyaient pas de cet œil-là. Ils s’emparèrent de la moitié des terres de Prasutagos, comme l’avait promis ce dernier dans son testament, et commencèrent un règne tyrannique. Ils augmentèrent les impôts et prirent des Icéniens en esclaves, les traitants comme des riens que moi. Boadicée tenta de s’y opposer, mais elle n’était aux yeux des romains qu’une femme sans descendance masculine et ils ne firent point attention à elle. En tant que reine des Icéniens, elle annula alors le testament de son défunt époux et tous les pactes passés avec les romains. Pour la punir, ces derniers la fouettèrent devant tout son peuple et violèrent devant elle ses deux filles. Maelgad, plein de rage, tenta de s’interposer, mais fut tué par un soldat romain d’un coup d’épée dans la gorge. Une rage sans nom naquit alors dans le cœur d’Annatar, mais une rage qu’il sut contenir attendant le bon moment.

Sous les conseils d’Annatar, Boadicée s’allia avec d’autres tribus de Britannia, rassemblant autour d’elle cent mille hommes. Annatar pria Arès de toutes ses forces, et ce dernier lui apparut en rêve. Il lui promit un grand pouvoir s’il acceptait de le servir après sa mort, au moment où il l’appellerait. Sans réellement se soucier des conditions du pacte, le futur Berzerker accepta avec enthousiasme. Arès lui offrit alors une épée noire, une épée de mort, et la maîtrise du cosmos, ainsi qu’un cheval complètement noir. Boadicée, sous les conseils de son ami d’enfance, s’allia aux tribus voisines et réussit à réunir une armée de cent mille hommes. Dans la même année, ils réussirent à prendre Camulodunum et Londinium, et le nouveau pouvoir d’Annatar n’y était pas pour rien. Ainsi commença la révolte de Boadicée.

En l’an 61, Boadicée projettent de piller les entrepôts de Verulamium pour nourrir son immense armée. Annatar la prévient que c’est une mauvaise idée, que les romains s’attendraient sûrement à ce coup-là, mais forte de ses dernières victoires, la reine-guerrière décide de mettre à exécution son plan. Trop tard, les romains ont déjà brûlé tous les entrepôts, attirant Boadicée et quatre-vingt mille de ses hommes jusqu’à Watling. Là-bas, ils sont confrontés à douze mille légionnaires et sont massacrés malgré leur surnombre. Boadicée, vaincue, se suicide à l’aide d’une fiole de poison.

Mais Annatar, le cœur empli d’une rage encore plus grande,  décide de continuer la révolte avec les vingt mille hommes restant. Ils sont confrontés aux romains qui tentent de reprendre Londinium et sont tous massacrés. Annatar tombe le dernier, et prononce ses mots face au général romain Suetonius Paulinus, celui-là même ayant vaincu Boadicée à la bataille de Watling :

-La mort n’est pas une fin, seulement un autre chemin… Je marcherais bientôt sur ton cadavre, pauvre fou.

Et ainsi s’éteint Annatar

Pourtant ce n’est pas là la fin de son histoire, car après avoir reposé pendant près de mille sept cents ans, le poète guerrier fut réveillé de son sommeil par Arès, qui lui offrit le titre de Cavalier Pâle, Berzerker de la Mort, membre des Cavaliers de l’Apocalypse, la garde personnelle du dieu de la guerre. Et Annatar répondit à l’appel du dieu grec, non seulement pour honorer son serment, mais aussi en espérant tenir sa vengeance. Et ainsi Annatar retrouva sa vieille épée et son cheval noir, en plus d’une puissante armure.