[flashback] Return To Innocence [P.V Irène]

Le printemps était toujours une saison qu’appréciait la cinquième gardienne du Sanctuaire. Il faisait doux, les arbres reprenaient des couleurs, le soleil déversait ses rayons chaud. C’était aussi le moment où elle devait rencontrer les nouveaux apprentis Chevaliers et leur faire une démonstration de ses capacités et le discours de bienvenue. Tout ça dans le but de bien les intégrer et de les motiver à progresser, à développer un esprit de justice et d’entraide entre-deux, même s’ils seront rivaux dans l’absolue pour l’obtention d’une armure. Elle devait remplir son devoir de Chevalier exemplaire, et celui-ci en faisait partie.

La Lionne d’Or descendit les marches du temple du Bélier et se dirigea donc vers le Colisée, elle était très matinal. Elle croisa quelques gardes qui faisaient leur ronde, rien d’inhabituel en soi. Puis son attention fut soudain attirée par une chevelure rose qui dépassait d’un buisson. Assez intriguée, elle se rapprocha tranquillement pour savoir ce que ce buisson cachait. Irène s’arrêta juste à quelques pas et demanda l’air de rien :

"Est-ce que tu t’es perdue ?"

Elle attendit une réponse sans pour autant montrer de signe d’empressement ou de pression. Son visage était doux et elle avait l’air prête à discuter.

La jeune femme chevalier ne s’attendait pas à une telle réaction de la part de la petite fille aux cheveux rose bonbon. La fillette s’immobilisa de peur puis elle commença à sangloter pour terminer par des cris et des pleurs. Ce fut si soudain et inattendu qu’Irène eu un moment de recul, surprise d’avoir autant fait peur à la fillette.

Des gardes se rapprochèrent attirés par les cris de sanglots. Irène se retourna vers eux et leur indiqua d’un signe de la main que tout allait bien et qu’elle s’en occupait. Les gardes lui répondirent par un signe de la tête entendu et repartirent faire leur ronde plus loin. Irène souffla puis se rapprocha et s’accroupie près de la fillette avec un sourire rassurant.

"Eh là, eh là... Je suis peut-être le Chevalier d’Or du Lion mais ce n’est pas pour autant que je vais me jeter sur toi pour te manger. Ah ah !"

Rigola-t-elle.

"Tu n’es pas vraiment le type de repas que j’apprécie d’ailleurs, tu n’as pas à tant faire…"

Irène tourna la tête vers la gauche et la droite à la recherche de quelque chose.

"Tu as un frère ? Est-ce qu’il est par ici ? Ou est-ce que tu es toute seule ici ? Comment es-tu arrivé dans ce buisson ? Ce n’est pas vraiment un endroit approprié pour une jeune demoiselle…"

Puis la petite se figea et commença à s’auto-accuser comme si elle possédait une double personnalité. Irène lui tapota la tête.

"Rassure-toi, je ne te ferais aucun mal. Ta mère risque par contre de s’inquiéter si elle te sait toute seule au Sanctuaire. Qu’est-ce que tu es venue faire ici ?"

Irène sourie et plaisanta une nouvelle fois pour détendre l’atmosphère et rassurer la fillette.

"Tu es venue chercher des bonbons ?"

La jeune fille aux cheveux Rose commença à se calmer progressivement, la Sainte semblait avoir trouvé les bons mots pour la rassurer et la mettre à l’aise. La gamine restait néanmoins bien floue sur les questions qu’avait posées la Sainte mais Irène ne la brusqua pas pour autant. Elle voyait bien que la fillette mourrait de faim.

"Tu fais bien de ne pas accepter de n’importe qui des bonbons, on ne sait jamais ce qu’ils ont comme arrière-pensée… Alors pour ma part, je n’ai pas de maison en pain d’épice à te proposer néanmoins j’ai des cakes à la féta fait maison. Est-ce que tu connais ? J’aurais des bonbons après bien sûr. Et je ne te mangerai pas, comme je te l’ai dit tout à l’heure."

Irène se redressa et se mit debout, un sourire sur le visage.

"Je vois que tu as beaucoup de chose à dire. Tu vas me raconter tout ça tranquillement d’accord ? Est-ce que tu veux bien qu’on aille se poser dans la maison un peu plus loin ? J’ai une amie qui y habite."

Décidément, cette petite fille de 6 ans était bien mystérieuse. La Lionne n’était pas très habile avec les enfants, elle se demandait bien si un jour elle en aurait d’ailleurs et si elle aurait la patience de les élever. Elle partit du principe que cette petite était perdue et devait bien avoir une famille qui la recherche. Sans doute venait-elle du village de Rodorio. Bien qu’au vue des vêtements qu’elle portait, elle n’en était pas si sûre… Irène glissa sa main dans les cheveux de la fillette pour lui retirer une feuille qui s’y était logée.

"Tu es très coquette comme petite fille. Tu viens du coin ou tu es de passage dans la région avec tes parents ou frères et sœurs ?"

La Lionne cherchait à cadrer et cibler la conversation pour récolter des informations utiles lui permettant de trouver des indices sur l’identité de la demoiselle bien que cette dernière soit bien bavarde mais peu enclin à répondre précisément à ses questions. Mais Irène était patiente et elle prendrait le temps d’aider cette demoiselle à retrouver son chemin. Les deux filles prirent le chemin de la petite maison, Irène attrapa la main tendue d’Harmonie pour la guider.

"Mon amie s’appelle Clara et ses gâteaux à la Féta sont les meilleurs de la région. Je connais un confrère qui en raffole."

Irène eu un rictus.

"Aussi jolie que moi ? Eh bien je dirais qu’elle l’est beaucoup plus, oui. Qui est Harmonie ? Tu l’as connais depuis longtemps ? Elle m’a déjà croisé un jour ?"

Irène était un peu étonnée que son amie la connaisse. Surtout de la tournure de phrase qu’elle employait. Comme si cela se passait sur l’instant et qu’elle parlait à une amie imaginaire. Irène ne voulait pas la brusquer et rentra dans son jeu. Il était inutile qu’elle se mette à pleurer après la Sainte ne saurait sans doute pas la réconforter. Sa gentillesse la perdrait un jour.

"Moi ? Un amoureux ?"

La Sainte leva la tête et sourit. Cette idée était assez perturbante et démontrait la naïveté dû à l’âge de la fillette. Son statut ne lui permettait pas d’espérer une relation. Irène s’était toujours dit qu’elle ne trouverait jamais la personne qui pourrait faire battre plus vite son cœur. Et pourtant un visage lui vint automatiquement en tête qu’elle chassa aussitôt en tournant la tête vivement, rougissant un peu et niant tout en bloc. Non ! Impossible, il n’y a pas moyen… Elle se tourna vers la jeune fille.

"Je ne suis pas si vieille, tu sais ? J’ai encore le temps pour trouver le prince charmant (s’il existe…). Et toi ? Tu en pinces pour un garçon ?"

Insista la Lionne d’Or d’un sourire avant d’arriver devant la porte de la maison et de frapper de plusieurs petits coups pour qu’on vienne leur ouvrir.

La petite fille aux cheveux roses en dévoila un peu plus à son sujet, Irène comprit qu’Harmonie, comme le décrivait la fillette, désignait une voix dans sa tête. Cette petite montrait de sérieux signe de schizophrénie selon elle.

Des bruits de pas précipités se firent entendre derrière la porte de la demeure avant que cette dernière ne vienne s’ouvrir dans la volée assez violemment. La Sainte, comme touchée d’un don de clairvoyance, eut le temps de se décaler en pivotant le buste pour éviter la collision et de tirer la jeune fille par la main pour ne pas qu’elle percute la porte. Harmonie sentie le courant d’air créé par la porte passant à un centimètre de son nez. Irène avait anticipé les actions de son amie assez justement, la connaissant assez bien pour prévoir ses faits et gestes un peu brutal et bourrin, comme à son habitude. La jeune femme qui apparut, vêtue d’une robe blanche, était une servante du Sanctuaire et celle qui servait notamment et avec privilège la cinquième gardienne. Son air fâché prit tout à coup une autre teinte lorsqu’elle découvrit le visage de sa maîtresse. Clara passa d’un air étonné à une honte profonde, son visage virant au rouge écarlate.

"Mademoiselle Irène ? Mais ? Qu’est-ce que vous faites ici ? Est… Est-ce que je peux vous aider ?"

La Lionne acquiesça avec un sourire et des yeux pétillant de malice.

"Tu me complairas d’aise si tu évites d’assommer notre invité."

Et elle désigna Harmonie d’un mouvement de la tête.

"Oh ! Depuis quand est-ce que vous faites du baby-sitting ? Bonjour petite, comment tu t’appelles ? Moi c’est Clara !"

"Je lui ai vanté tes gâteaux à la Féta. Est-ce que tu en as encore ?"

"Mais oui ! Il y en a d’ailleurs en ce moment même dans le four. Mais entrez ! Je vous en prie !"

Et la servante les invita à rentrer. Irène s’avança et une douce odeur ambiante volait à travers la pièce, celle de gâteaux maisons.

"Hmm… Je pense que je vais t’en prendre également."

La Lionne venait de succomber à la gourmandise. La nourriture était toujours une chose importante dans sa vie. Elle raffolait de petits mets et n’hésitait pas à découvrir la gastronomie des pays lorsqu’elle avait la chance d’en visiter.
Clara se dirigea vers le four avec un tissu pour en retirer les petits pains. Elle les plaça dans une assiette et se pencha vers la fillette.

"Il faut attendre un peu avant de les manger car c’est vraiment très très chaud mais d’ici cinq minutes tu pourras te régaler."

Elle leva les yeux vers la Sainte qui tendait une main vers l’assiette pour y prendre un morceau de gâteau.

"Et ça vaut pour vous aussi !"

Irène se ravisa et croisa les bras, l’air un peu boudeur, tournant la tête dans une autre direction.

"Mais qu’est-ce que vous faites avec cette petite ? Je croyais que vous n’aviez aucune famille ?"

Irène tira une chaise et s’assit en fermant les yeux.

"Non, je n’ai aucune famille et ça ne risque pas de changer. J’ai trouvé cette jeune fille cachée dans un buisson près du Colisée. J’ai pensé qu’elle jouait à cache-cache mais il semblerait qu’elle ne se soit plutôt perdue."

"Oh ? Vous vous découvrez une âme charitable avec les enfants, c’est surprenant ! Vous qui les évitez d’habitude… Vous avez finalement un cœur derrière votre carapace et image de femme forte et rebelle. "

"Tssss !!"

Irène tourna la tête vivement, niant tout en bloc.

"N’importe quoi ! Au lieu de dire des bêtises, tu ferais mieux de faire attention à ton torchon, il est en train de prendre feu."

Clara tourna la tête et en effet, elle avait oublié son bout de tissu posé à côté du four et il commençait à prendre feu.

"Oh my Godess !!!"

La servante prit le pichet d’eau reposant sur la table et balança le contenu sur la serviette qui s’éteignit.

"Je me demande si Harmonie est vraiment en sûreté avec toi dans les parages… ?"

Dit la Lionne avec scepticisme avant que Clara ne se retourne pour la regarder. Lorsque leur regard se croisa, deux secondes passèrent puis elles explosèrent toutes deux de rire.