Être si proche et n'en savoir rien

Cinq autres corps venaient de rejoindre la chambre funéraire où l’ancienne spectre exerçait ses talents. Le plus âgé devait avoir treize ans et le plus jeune ne devait pas dépasser les quelques semaines, peut être même n’avait pas atteint son premier mois.

« Ton peuple va s’éteindre de vieillesse si tous les enfants de ta colonie poursuivent leur trépas. »

La chaman se déclarant chef de cette poignées d’hommes et de femmes désespérés avait fini par croire à ses balivernes religieuses comprenant le sacrifice humain.

« à ta guise mais si tu égorges encore un nouveau né, qu’importe qu’il soit mâle ou femelle, tu n’auras plus aucune engeance capable de mener ton troupeau…. »

Excédé et à bout de solution raisonnable le shaman s’en alla lever la  main près de Hyujae pour l’abattre violemment sur sa joue légèrement blafarde, bleutée presque. Elle ne sourcilla pas d’un millimètre mais le pauvre illuminé fini sa course dans le mur opposé. Les cahutes étant modelées sur le modèles des igloos actuels la chute ne fut pas si rude.

« Combien de fois devrais je te ressasser que là où tu n’as ni Dieu ni pouvoir, moi je sers le Grand Hadès, Monarque divin des enfers et possesseur de pouvoir que ton esprit ne saurait même pas concevoir. N’oublie pas que si je te laisse la vie sauve c’est uniquement car ces gens te font confiance et que je peux envoyer leur âme là où elles doivent être. » Son regard passa du dur glacier à la tendre poudreuse « même s’ils ne peuvent lui être utile chacun d’entre eux recevra la félicité s’il la mérite. » Son iris passa aux sombres orages « Alors que tu te contente de leur mentir et de jouer de tes cabrioles pour leur faire avaler tes mensonges et tes faux espoirs. »

Un léger sourire vint habiller son visage si pâle désormais qu’elle semblait se fondre à la neige du bâti.

« ce qui soulage ma frustration de te voir t’agiter dans tous les sens en psalmodiant un dialecte né de ta piètre intelligence est que je me tiendrais sur le pas de la porte des enfers pour t’accueillir. »
« Monstre ! »

Il s’était relevé en tremblant de tous ses membres tandis qu’elle lui servait ses tirades acides en faisant son office sur les si petits corps.

« Allons… Tu m’as habituée à plus d’inspiration. »

L’escroc se renfrogna, vexé.

« Tu es le mal en personne ! »
« Tu dis ça parce que tu ne connais pas mon maître d’armes. »
« Espèce de … de …. de dé démon ! »

Elle se tut le temps de se concentrer toute entière à sa besogne du tout petit être semblant dormir, enfin apaisé. C’était la faim qui l’avait emporté et le tour ;de son inconsolable mère viendrait trop vite à son goût. Garnir les enfers était une chose mais précipiter le trépas de ces pauvres crédules logeant désormais à flanc de montagne en était une autre. Ils avaient été assez dupes pour se faire avoir mais la crédulité n’était pas une raison suffisante pour mourir, la sentence était trop forte pour être juste, même pour Hadès. Sa stature était peut être moyenne mais lorsqu’elle se releva vers lui, drapée de sa colère, elle avait l’air de pouvoir le manger tout entier, d’un seul mouvement de mâchoire.

« Tu empeste… Ta pestilence s’exhale depuis ta carcasse jusqu’à ce qui vous sers de latrines et le parfum de la merde de tes victimes cache ta puanteur. Il n’y a aucune rédemption pour tes semblables… aucun pardon… aucune seconde chance… aucun jugement autre que l’enfer et la damnation pour l’éternité. »
« Recules ! »

Un sourire en coin déforma ses traits pourtant harmonieux.

« Ani (non familier) »

Son pas lent lui servait à prendre le temps de réfléchir à quelle sauce elle allait le faire disparaître mais lui devait prendre sa démarche pour un invitation à un jeu de coq.

« Recules ou j’te jure que j’te crèves… Personne t’as demandé de rester diable que tu es ! Engeance du mal ! »

Cette dernière tirade la fit rire aux éclats tant elle l’avait entendu du fait de ses yeux bleus au cœur de son village. Décidément RIEN ne changeait, même ici, même si loin de sa contrée natale.

" Neo (toi très familier) Jugeo … JUGEO NAPPEUN KAESSAEKKI’AISH !" (crèves, sale fils de chien p*tain) »

Elle n’eut qu’à tendre le bras et apposer sa main sur l’épaule du shaman qui se figea, givré, pour finalement se réduire en millions de poussière de glace sous l’impulsion du cosmos de la jeune femme ayant bien retenu les leçons du Bénou.

Elle détourna la tête vers l’extérieur. La fente de l’abri de fortune ne donnait que sur un paysage morne où les plus solides tentaient en vain de soigner les malheureux. La mère du bébé rendait son dernier soupir accrochée au bras d’une inconnue alors que la dernière de la famille du garçonnet de treize ans pleurait debout, seule, les pieds nus dans la neige.

« Ils vont tous mourir de toutes façons … »

Attendre ? Ou précipiter les choses ?

Peu de choses la touchaient profondément après sa vie de labeur et d’exclusion et enfin son trépas mais la vision de cette petite en larmes, seule, sans même une personne attentive à son sort pour lui donner des linges et de la corde pour protéger ses pieds lui enserra la gorge.

Elle recula de quelques pas, repoussa au sol ce qui recouvrait la pierre noire des sommets et y posa sa paume ouverte, rougie par le froid mordant.

« Ironasséyo … Ironajuséyo... » (levez vous, debout s'il vous plait)

Cette nouveauté lui venait de sa dernière rencontre avec le nippon. Depuis lors elle possédait une naginata de belle facture et cet étrange pouvoir de faire se réveiller les morts … du moins quelques uns, pas tous, son pouvoir étant bien trop faible pour le moment cependant dans son dos les gazouillis du bébé lui confirmèrent que certains avaient répondu à son appel.

Elle quitta le bivouaque lorsqu’une demi douzaine de défunts se mirent en marche pour achever les survivants dans une cacophonie de cris de terreurs. Elle resta là haut, sur une corniche surplombant la scène, une partie d’elle concentrée sur ce qui se jouait en contre bas et l’autre partie jouant nonchalamment avec le manche de la nagita.

Cela faisait quelques minutes que Ryûichi avait quitté Hiroshima et sa région. Entre ses mains se trouvait la grosse marmite en terre cuite remplie de cet excellent vin de palme qu'il venait de piquer à son clan. Traversant les nuages et volant vers l'ouest du pays le Bénou rêvassait. Soudainement une énergie cosmique spectrale se fit sentir assez loin d'ici. Il s'arrêta net et tourna la tête vers l'origine de cette puissance : c'était au nord du pays.

Qu'est-ce que ceci ? Un Spectre d'Hadès-sama ici ?

Ce n'était clairement pas Kazuki, le cosmos déployé était trop faible. Alors qui ? La distance empêchait Ryû de reconnaître celui ou celle qui dégageait cette force. Il n'y avait qu'un seul moyen d'en avoir le cœur net et le lieutenant ne se fit pas prier pour le faire. Bifurquant vers le nord de l'île Ryû s'entoura de son énergie ardente et avala rapidement la distance. Bientôt la température chuta drastiquement, les nuages devinrent épais et lourds. La neige se mit à tomber tandis qu'il passa sous la couverture nuageuse afin d'avoir plus de visibilité. Il finit par reconnaître les lieux.

Hakodate... La porte d'entrée de la région de Hokkaïdo...

Hokkaïdo était l'île la plus au nord du Japon. L'île où il faisait le plus froid aussi mais elle restait une belle région pour celui qui pouvait passer outre la glace. Le peuple autochtone des Aïnous vivait ici en autarcie et en paix avec les peuplades du Sud, commerçant vivres et eau sans réels problèmes. Ryû n'était encore jamais venu par ici car trop froid pour lui.

Alors, où es-tu passé petit cosmos ?

Il ferma les yeux et se concentra sur les environs. Là, à quelques kilomètres, cette énergie spectrale se manifesta de nouveau. Près du mont du même nom que la ville voisine un petit village aïnou niché au creux des collines. C'est une fois sur place que Ryû eut plusieurs surprises. Pour commencer son regard cola vit une dizaine de corps décharnés s'attaquer au reste de la population au milieu de cris de terreur. La quasi-totalité de ces cadavres avaient l'aspect de squelettes non intègres sauf un bébé et un adolescent. Ils pourraient passer pour vivants si leur peau n'avait pas bleui à cause du froid. À moins que ce soit par manque de circulation sanguine ? L'ado était en train de mordre à la nuque une jeune fille qui implorait de l'aide. Sa voix aiguë s'étouffa petit à petit dans son sang, son corps englouti par la masse squelettique de morts.

Ryû laissa le carnage se faire : après tout cela ne le regardait aucunement. Le silence vint se poser sur le village, silence seulement dérangé par le bruit du vent. Le Spectre se posa sans bruit et entreposa son alcool non loin. Avec son aisance habituelle il scruta les environs sans se faire remarquer par les squelettes. Il n'y avait que désolation et pauvreté. Seule une cahute disposait d'un peu plus de standing : de l'or ainsi que de la nourriture étaient cachés dans des jarres, du matériel de médecine entreposé sur des tissus à la limite du pourrissement. Était-ce la tente du chef ? Ou du chaman ? Quoiqu'il en était il subsistait un résidu cosmique ici. De la glace pour ainsi dire. Et de mémoire de Bénou il n'y avait qu'une seule personne capable d'un tel prodige.

Sortant de l'unique pièce Ryû se retrouva avec la troupe de cadavres qui l'encerclait.

Tss, zako domo me (bande de déchets). Poussez-vous et tout ira pour le mieux.

Aucune réaction. Tant pis il les avait prévenu. Son énergie cosmique se focalisa au niveau de ses yeux avant de fondre sur la troupe sous forme de kiai. Les squelettes tombèrent et laissèrent le champ libre au Spectre céleste.

Où est-elle passée ? Elle ne devrait pas être très loin. Oya ?

Au milieu du bruit du vent un son différent était imperceptible. Le son d'un objet assez long en rotation. Levant les yeux Ryû tomba sur la provenance de ce cosmos glacial. Elle était située en hauteur et n'avait pas changé si ce n'était un teint pâle légèrement bleuté et des yeux bleu plus clairs. Sa longue naginata dansait entre ses doigts habiles et son hanbok violine subissait les assauts ardus de Zéphyr tout en la protégeant. D'un bond il se retrouva face à Hyujae et ne prononça qu'une syllabe.

Yo.

Elle attendait ... détournant le regard lorsque le grand frère dévora sa petite sœur durant le festin des osseux qui ne se résolvaient à laisser une victime qu’une fois que celle ci était sans signe de vie. Parfois … lorsqu’ils étaient plus forts, plus charnus, lorsque visiblement son cosmos était mieux maîtrisé, plus élevé, ils s’assuraient que la mort était certaine en arrachant le cœur de la poitrine de l’ennemi. La terrible vérité était qu’elle ne savait rien comme toujours. Ses pouvoirs s’imposaient à elle sans qu’elle n’en comprenne la naissance ni le sens et il lui fallait travailler pour maîtriser et pour enfin comprendre que son étoile avait renforcé son éclat et qu’elle était devenue plus forte, parfois tout autre.

Le charnier devint silencieux … trop silencieux. Les osseux, le surnoms qu’elle leur donnait, avaient la tendance fâcheuse à s’écrouler sur eux même dans un fracas assourdissant d’os s’entrechoquant et roulant autour d’un monticule d’os longs. Là, il manquait quelque chose si ce n’est que ce sentiment étrange de n’être pas seule lui fit frissonner les limites de son cosmos. Elle n’eut le temps de reconnaître son maître d’arme qu’il était déjà posé là le plus naturellement du monde, aussi bavard que les osseux en bas qu’il avait renversé de son passage. L’espace d’un instant elle eut peur qu’il ne soit venu relever sa piste pour la corriger, voir la punir fortement de n’avoir pas posé un pied au mekkai depuis leur dernier entraînement.

Elle essaya de jouer la carte de la proximité sans pour autant bouger d’un iota, seule sa naginata cessa ses tournoiements dans l’air.

« Nathan’nim …Avant que je te demande comment tu m’as retrouvé j’aimerai me défendre de désertion. J’ai quitté le mekkai certes mais avec pour objectif d’envoyer le plus d’âme franchir le Styx avec l’espoir que l’un d’eux soit profitable autant que toi à Hadès’sama. »

Elle lui fit signe de rejoindre la scène macabre en bas tandis qu’elle se rendait sur les lieux en glissant sur un ruban de glace suivant le rythme de ses pas. D’une bourse à sa taille elle extirpa une poignée de pièces dont elle garnie toutes les bouches, langues lorsque les lèvres manquaient, parfois entre les dents lorsque plus rien ne demeurait du corps lacéré. À chaque fois elle semblait prier une courte litanie avant de passer au suivant et quitter les lieux sans se retourner.

Le regard sombre de Ryûichi était posé sur Hyujae. Cette dernière ne daignait pas le regarder en retour, pas par ignorance ni dédain mais parce qu'elle était dans ses pensées. La lance qu'il lui avait forgé arrêta de danser entre les doigts de la Coréenne tandis qu'elle leva la tête dans sa direction. De près son teint pâle faisait cadavérique mais n'affectait en rien sa beauté au contraire. Son énergie cosmique était aussi totalement différente comparée à la dernière fois qu'ils s'étaient vus. Belle énergie glaciale.

Elle l'avait appelé Nathan'nim. Une marque de respect mélangée à de la proximité. Personne à part sa famille de sang ne connaissait son véritable nom et seuls ceux en qui il avait confiance pouvaient aussi le savoir. Hyujae faisait partie des gens de confiance sinon il ne se serait jamais livré à elle. La jeune femme lança un plaidoyer avant même que Ryû ne lui dise quelque chose. Il sourit en coin et croisa les bras sur le torse de son Surplis ailé.

Baboya.(Imbécile en coréen.)Tu penses que si j'étais venu te chercher pour désertion j'aurais pris la peine de te dire "yo" ? Tu n'as pas à t'en faire je ne te veux pas de mal.

À force de rester debout pour la regarder il avait mal à la nuque. Il s'assit à même le sol afin de reposer ses muscles endoloris.

Si je suis là c'est juste un concours de circonstances. J'étais venu régler quelques "détails" avec ma famille dans le sud du pays et j'ai senti une grande énergie spectrale au loin. J'ai d'abord pensé à Kazuki ou ses sœurs mais ça manquait de puissance. J'ai donc voulu savoir ce qu'il en était et me voilà.

Hyujae l'écouta attentivement et lui demanda de la suivre vers le village désormais inhabité. La voir former un ruban de glace afin de se déplacer dessus ravi le Bénou : ses progrès étaient des plus prometteurs. Tandis qu'elle s'affairait à préparer les défunts pour leur traversée du Styx Ryû observa les squelettes redevenus tas d'ossements inertes. Seuls trois d'entre eux - ceux qu'il avait bousculé du regard - restaient debout en attendant les ordres de leur maîtresse.

Tu disais que tu envoyais le plus d'âmes possible pour trouver quelqu'un de valable au Meikai ? Tu m'excuseras mais je ne vois pas qui pourrait trouver grâce aux yeux de sa Majesté Hadès-sama parmi ces crédules-là... M'enfin fais comme tu l'entends.

La Coréenne leur rendit les derniers hommages et partit sans se retourner. Ryû la suivit des yeux - joli petit c*l - et s'engagea à sa suite, laissant les osseux comme seule présence du village.

C'est toi qui a fait ça ? Les morts qui attaquent les vivants c'est de ton dû ? Comment as-tu fait ?

À l'entente de la voix lui posant des questions et remettant en doute ses 2 derniers mois de travail, elle se retourna prête à lui jeter au nez une réponse cinglante ... pourquoi cinglante d'ailleurs ?  Aucune idée. Il n'avait rien fait qui ne devrait l'énerver et même pire elle était ravie de le revoir et de ré-entendre son timbre bas et sa diction toujours monocorde comme s'il s'ennuyait chaque seconde où il ne frappait pas... mais un détail attira son attention.

Les trois osseux ... statiques... debout... sans but.

"Ils n'attaqueront pas puisque nous sommes morts... je crois qu'ils ne savent pas quoi faire. Tu les as touché avec ton cosmos ? C'est la première fois qu'ils sont confrontés à un autre cosmos que le mien. Tu t'en es mêlé ? Je suis sûre que tu n'as pas pu résister à un nouveau type d'ennemi et que tu as touché à MES osseux."

Elle rebroussa chemin, vers ses créatures aux orbites vides tout en jetant une oeillade assassine à son maître.

"Quand ils ont fini ... ils tombent... point. Qu'est ce que ceux-là foutent encore debout shibal"

Arrivée à leur hauteur elle les dévisageait tout en cherchant une solution pour qu'ils cessent d'exister.

"Gomapseumnida ... ja jushipsyo..."

Il y eut une bourrasque de vent et les 3 osseux s'affaisserent dans un vacarme assourdi.

" igae mwonia ?! Mais qu'est ce que tu as fais !?"

Hyujae s'était retournée après ces quelques questions, l'azur de ses yeux changé en un sombre qui ne disait rien de bon. Elle n'allait pas l'attaquer quand même ? Ryûichi se tint prêt au cas où mais se ravisa presque aussitôt. La Coréenne revint à sa hauteur et le dépassa tout en expliquant le pourquoi du comment. Ses osseux ? Donc c'était bien de son dû ces squelettes revenus d'entre les morts. D'ailleurs le vent souffla à cet instant et les osseux comme elle les appelait s'effondrèrent sur eux-mêmes. Comment ça qu'avait-il fait ?

Oï oï du calme musume je n'ai rien fais de spécial. Ils étaient sur le chemin et je l'ai ai bousculé d'une simple onde de choc. Je n'vois pas pourquoi ça te met dans cet état.

La dernière fois qu'il avait vu un tel état de fureur chez sa jeune consœur c'était lors de cet incident pendant son entraînement. Tant de changements en si peu de temps. Pourquoi ?

Hyujae. Tu es devenue plus forte certes mais ton tempérament a changé aussi. Que t'est-il arrivé durant ces deux mois ? Pourquoi cette chasse aux âmes pour Hadès-sama ?

Son visage se crispa d'avantage. Elle avait l'air de chercher que répondre mais en fait elle essayait de ne pas lui hurler au visage alors que sa colère contre tout sauf lui et surtout envers elle-même bouillonnait dans son sang.

Elle inspira et souffla longuement el affaissant ses épaules.

"Mian (désolée très familier) je n'ai pas parlé à un ami depuis longtemps... depuis notre dernière entrevue.

Elle inspira rapidement en fermant les yeux et les rouvrit sur lui en lui offrant une vue imprenable sur son regard bleu glacier.

"Neomu mianae (très désolée) Tu es le seul que je considère comme un ami autant chez les vivants que chez les morts..." elle haussa les épaules et tendit ses paumes ouvertes vers lui. "Ne suis je pas la solitude après tout ?"

Elle lui parlerait plus tard des dissonances entre elle et son armure ... comme si cette dernière commençait à la rejeter.

"Je suis surprise et un peu déçue toute fois que tu penses qu'un chien galeux ne puisse pas servir Hades. Je ne suis qu'une fille de pêcheur pauvre et toi tu es la descendance d un peuple opprimé. Nous ne sommes pas des morceaux de premier choix."

Elle se tû en se détournant du spectre pour regarder le carnage et administrer les pieces dans les bouches.

"Je ne sers à rien pour Hades... je suis trop faible, trop lente, trop peu enclin aux combats physiques... je porte un surplis mais je suis inutile alors que dans ma quête des âmes je sers au moins à tester les plus courageux... forts... subtils... intelligents... leurs désespoir ou leurs guenilles ne sont pas un critère sinon je serais une embaumeuse morte seule sur le bord du chemin et fin de l histoire mais là... une étoile résonne avec moi... Hades m'a offert ce dont j ai toujourd rêvé... une famille, un foyer à défendre, un abri pour ma maison... il m'a tout donné mais rien n'est gratuit en ce bas monde ici ou chez les vivants alors j ai voulu payer ma dette en étant plus active au dehors que gauche et malhabile aux enfers."

Elle se racla la gorge et ajouta avec un air trop nonchalant "et puis j'y ai rencontré mon premier et seul ami. Même si c'est un balourd qui règle tout aux poings et manque de tuer son apprentie pour une erreur de trajectoire..."

Elle s agenouilla près du tas d os, y posant sa main.

" je crois qu un autre cosmos que le mien peut les ralentir voir les faire se suicider... je crois qu ils restaient parce que j etais le maitre mais que toi aussi tu aurais pu les commander. Je garde encore le contrôle mais il va falloir que je m'attèle à trouver de quoi il retourne. Quel cosmos peut les mobiliser ? Est ce qu ils peuvent être lancés contre moi ?"

Son regard se posa sur la petite fille qui pleurait les pieds dans la neige. Ellle avait eu peur et mal mais pire que ça son coeur avait été arraché

"J'en ai assez de toutes ces sales besognes.. les osseux eux dorment entre les combats mais moi ? Moi je tremble tous les jour de tout mon coeur. J ai grandi oui... c est vrai... la glace surgit de mes mains sanz contraintes aucunes mais je suis capable de chose qu on dit interdites et je ne sais pas ce qui se passe. "

Ryûichi ouvrit grand les yeux quand il entendit Hyujae le traiter d'ami. De seul et unique ami. Lui qui n'en avait pas à part son frère d'adoption Abel ou bien ce pirate Nereus voilà qu'une autre personne le voyait comme tel. Le Spectre fut touché par une telle révélation mais comme souvent il ne dit rien.

Ryû regarda les paumes ouvertes de la plantureuse brune. L'isolement...oui c'était son étoile protectrice mais rien ne l'empêchait de se lier à d'autres. Lui était sous couvert de l'étoile de la Cruauté et cela ne l'empêchait pas d'être sympathique. Des fois. Peu de fois peut-être ? Mais de nouveau il resta silencieux.

C'est après la longue tirade de sa consœur sur ses diverses forces et faiblesses qu'il se sentit d'intervenir.

Ne dis plus jamais que tu es inutile pour Hadès-sama. Si tu disposes d'un Surplis c'est que tu as un rôle à jouer dans son armée. Faible ? Lente ? Pas douée physiquement ? Et alors ? Depuis quand ce genre de co**eries te turlupines ? Tu peux toujours payer ta dette et être performante. Foi de Ry... de Nathan c'est possible. Après tout nous étions peu de choses avant de devenir des Spectres non ? À moins que je ne sois qu'un balourd qui règle tout avec ses poings ?

Il gonfla des joues et se retourna en boudant pour de faux. Il ne fit pas la tête longtemps et se mit de nouveau face à Hyujae.

Ce pouvoir "interdit" c'est bien celui avec tes osseux là ? Hmmm...

Le Bénou croisa les bras sur son torse et réfléchit intensément (oui ça arrive).

Te souviens-tu lors de ton apprentissage cette armure qui est apparu de nulle part ? Ton destin ta responsabilité. On dirait qu'une nouvelle étoile protectrice cherche à te prendre sous son aile Hyu. Quant à savoir comment fonctionnent tes...invocations sûrement que, ton cosmos étant encore jeune ils s'accrochent à l'énergie la plus forte et lui obéisse. Plausible ?

Elle hésita ne sachant par quel bout de la pelote commencer ce qu'elle avait à lui dire.

"Quand j'essuie un echec cuisant je m'isole aussi loin que mes pas me portent mais...Je ne sais pas comment je suis passée d'une ballade de recul à une traque aux défunts. Tout était comme une piste noire coupant les travées de neige. Même mon Surplis ne résonne plus avec moi. Il me protège des coups mais nous ne sommes plus... connectés."

Son regard balayait tout le campement... N'y trouvant plus de vivants, elle fit descendre une coulée de neige qui engloutira village et habitants comme les légendes de l'Atlantide.

"J'ai éprouvé la colère de devoir partir... puis la rancoeur... le désespoir d'être mauvaise en tous points... l amertume... la folie parfois. J'ai pris du plaisir à geler un poisson et à le réduire en poussière sous ma simple impulsion. Je n'exerce plus ce tour de passe passe, du moins pour rester tranquille, je ne le fais que lorsque les conditions sont réunies."

Elle parlait beaucoup trop. Son propre esprit essayait de la temporiser, de la faire taire... elle sentait le ridicule de ce trépignage de bavardage militaire.

"Oui ... autrement dit c'est comme ça que je tue. Il ne reste aucune trace mais ça on pourrait en parler plus tard... je n'ai envie que nos retrouvailles tournent autour de combats, de formation au cosmos ni à la lutte avec les mains.

J'ai un truc bien plus important à te dire... ça vaut bien mieux que toutes ces questions martiales, qui a gagné comment contre combien... "

Elle lui fit naître un trône en neige recouverte d'une couverture en peau de lapin.

"Assieds-toi là et ne m'interromps pas s'il te plait."

Les rafales de vent changeaient en lame la moindre goutte suintant d'un ciel aussi gris que la neige était d'un blanc parsemé de carmin. Elle aurait voulu une tente pour mettre fin à la litanie des rafales puis lourdeur pesante d'une nuit noire à flanc de corniche. Il était pourtant là... vigilant... placide... il n'insultait ni le vent ni le froid... il attendait, comme elle le lui avait dit.

" Je voudrais te parler... parler à  Nathan, pas à son grade. Ce qui va suivre nous concerne mais il n'implique pas ni nos forces ni nos Surplis et encore moins ses Majestés."

Quand il était à l'arrêt... statique... qu'il n'y avait autour de lui aucune flamme, il lui semblait être plus ... plus lui.

" Je dois t'en parler maintenant je pense. Nos rencontres sont toujours martiales ... je n'ai jamais pu te parler comme Hyujae l'aurait fait ... même si elle aurait attendu encore pour ne pas s'apprêter à faire ce qui va suivre."

On aurait dit une statue et elle s'inquieta un instant avant de se rassurer. Le Bénou saurait bien se réchauffer seul.

"Depuis notre rencontre dans le Labyrinthe et jusqu'à notre dernier entraînement... tout ce qui s'est passé dans le onsen... ton application phénoménale pour m'offrir ce hangbok et cette naginata..." ... elle soupira longuement, les yeux clos, le coeur lui battant aux oreilles. "Je ne méritais pas autant de temps et d'attention. Je ne le mérite toujours pas mais... ajiman ... bogoshippeoyo. (mais tu m'as réellement manqué. ) Je ne l'ai compris qu'au moment de ré-entendre le son de ta voix."

Elle n'osait pas relever son regard vers lui de peur d'y trouver une désapprobation sans discours... peut être même est-il parti ?

"Je n'ai jamais mis autant de ferveur à ma tâche depuis toi... si tu me demande de créer des charniers partout où tu me le demandera... je le ferais. C'est toi que je veux servir et honorer... Je ne saurai plus être éloignée de toi si longtemps. Je ne sais pas si c'est de l'amour... je ne l ai jamais éprouvé de mon vivant mais si je réunis tout ce que j'en sais je crois que je peux dire : naega, Kim HyuJae, neomu johae, neo Nathan'shi." (tu me plais fortement Nathan.)

Soit il la ferait brûler sur place ... soit il aura une reaction neutre et peut être même se laissera t'elle aller à espérer un baiser.

Un homme comme lui avait dû avoir de multiples occasions pour embrasser avec autant de naturel. Elle n'avait jamais pu approcher un homme dans la fleur de son âge sous peine d'être accusée d'avoir eu un rôle dans n'importe quel malheur le frappant.

Elle n'avait jamais ressenti le toucher d'un autre être humain. Parfois les filles les plus téméraires venaient avec elle dans la rivière ... démelaient ses cheveux tout en se sentant mal à l'aise sur la présence visible des coups que parents et autres prêtres de toutes religions lui faisaient subir. Elle avait le statut de possédée par le malin et pour faire fuir cette âme demoniaque il fallait subir les coups... le fouet... parfois des brûlures...mais ces filles n'étaient pas convoitées, un seul l'était et il était salement estourbi parfois. Ils auront l'idée d'avoir gagné, fêteront ce passif dans leurs histoires. Pour le moment il réalisait ses rêves avec Hyu... et eĺle le lui rendait bien.

Pour la première fois un humain l'enlaçait.
C'était si nouveau pour elle qu'elle n'osa pas y répondre sans savoir où mettre ses mains, surtout avec ces foutues armures. Elle allait lui demander d'ouvrir ses ailes, qu'elle puisse l'enlacer à son tour mais il lui avait déjà remonté le menton de ses 2 doigts pour déposer sur ses lèvres novices un baiser surprenant... vacillant.

Il était doux et attentionné... ses lèvres avait la chaleur d'une tasse de thé, la tendresse des petits gateaux fourrés que les vendeurs ambulants leur distribuaient par des sacs de dizaines de fruits. Elle eut l'image d'un fruit mature et de le humer avec satisfaction surtout lorsque déchirant sa chair laissait poindre un jus succulent.

Ses mains étaient immenses mais juste protectrices.... elle sentait son bras armé dans son dos, la pressant un peu plus contre lui sans jamais lâcher sa bouche plus fine.

Quand leurs lèvres se séparent, elle s'accrocha à son cou et dû lover ses jambes autour de la taille du lieutenant.

" On devrait trouver un endroit qui aille à nos entités. Moins chaud mais pas trop froid non plus  ... et moi... je ne sais pas voler... tu ferais le taxi pour nous ammener au Meikai ? Je te paierais le voyage avec ma solde du mois, à moins que tu ne prennes plus cher les personnes amoureuses accrochées à ton cou et tremblant de peur ?"

Les lèvres de la jeune femme étaient d'une douceur inégalée. Bien que ayant déjà la trentaine Ryûichi n'avait pas embrassé tant de femmes que ça. Les catins n'avaient pas à recevoir ses baisers et il n'avait connu le grand amour que deux fois avant Hyujae. Et il ne regrettait pas cette troisième fois qui débutait. C'était doux, c'était goûteux, c'était...whoah. Lorsque leurs lèvres se séparèrent le Bénou exalta un léger souffle givré ce qui le fit rire.

C'est bien la première fois qu'on me rend un baiser aussi frais. Je crois que je vais en devenir accro, hahaha !

Oui il y avait bien qu'avec elle qu'il pouvait se sentir aussi libre et vivant - ce qui était assez coccasse pour un mort dirons-nous - qu'il pouvait se laisser aller et montrer ses sentiments. Elle se lova contre lui, ses bras entourant sa nuque et ses jambes enserrant sa taille. Un court instant Ryû se dit que les Surplis étaient de trop mais il se ravisa en ne voulant pas précipiter les choses entre eux. Après tout ils avaient désormais tout le temps pour se découvrir.

Malheureusement toutes les bonnes choses avaient une fin et il fallait bien retourner au bercail. Hyujae se permit un brin d'humour, chose qu'elle n'aurait jamais faite auparavant. Il avait hâte de la voir plus détendue.

Madame a demandé un taxi ? La compagnie Bénou Airlines est là pour vous servir. Veuillez vous accrocher nous allons bientôt décoller...

Le rouge lui vint aux joues avant de prononcer la suite. Heureusement que sa peau ébène cachait le changement de couleur.

...uri manora. (Mon aimée en coréen.)

Leurs regards se croisèrent de nouveau plein de promesses futures. Puis le Spectre céleste écarta ses ailes et s'envola avec sa belle avec le Meikai comme direction. Alors qu'ils avaient disparu dans le ciel enneigé de Hakodate le tapis blanc s'ouvrit pour laisser passer la cuve de sodabi qui rejoint les cieux à leur suite : il n'allait pas la laisser là après tant d'efforts pour la voler quand même...

-> Royaume d'Hadès