Sous l'Acacia de Ouaset ~ Ft Styx - Flashback

« Retrouve celle qui va de paire avec Athéna. Retrouve la Victoire … »

Des ordres clairs. Plutôt qu'une équipe de recherche, capable d'être repérée par différents adversaires, l'ordre avait été donné à quelques Saints. Qu'ils se séparent. Qu'ils réussissent à retrouver alliés ancestraux et artefacts liés à la Sage Guerrière. Quelques semaines se sont écoulées depuis cet ordre et voilà que le Chevalier d'Argent de l'Autel avance dans les rues d'un des joyaux de la Haute-Egypte, Ouaset, l'une des deux Capitales de l'Empire Égyptien. Une lourde cape, noire, souvenir d'une rencontre alors qu'il se trouvait en des lieux différents, en des circonstances différentes. Rencontre prédestinée ? Peut-être.
C'est en tout cas cette rencontre qui lui avait fait argumenter sur son souhait de partir à la recherche de la Victoire. Celle qui, lorsqu'elle n'est pas dans la main droite d'Athéna, est aux côtés de celle-ci pour combattre les ennemis du Sanctuaire. Et en ce moment, ils existent. Ils sont présents. Certaines Constellations se voient dépourvues, violemment, de gardiens. Une masse se forme. Elle rampe. Frappe avant de retourner dans son ombre. La guerre a commencé, bien qu'elle ne soit pas une violente rencontre entre deux armées, mais plus des petits conflits meurtriers.

Le mouvement des astres est perturbé. Ça, il en est persuadé. Mais ce qu'il sait aussi, ce que le Grand Pope lui a appris, est que la lumière sidérale liée à la Victoire ne cesse d'osciller. Elle marche dans ce monde, le Représentant Terrestre d'Athéna en est certain. Et pourtant …. Pourtant … Il semble difficile de savoir si Elle est réellement ce qu'Elle doit être. Ou encore si Elle est en état viable. Là est le lot des incarnations au milieu de la population humaine : entre les conflits saints et la nature violente de l'être humain, parfois, même une déité peut se perdre.

L'ombre impressionnante des Temples à l'Est de la cité accompagne la nuit, encore quelque peu animée. Quelques spectacles et animation aux origines religieuses éclairent et brisent les silences habituels du voile de Nyx. Malgré l'obscurité, la chaleur est encore présente, remontant du sol d'un côté et poussée par un vent sec de l'autre. Certes, Damian n'est pas là pour profiter des lieux, ni de l'ambiance … Mais son enquête l'oblige à passer ici. Quelque chose a attiré son attention dans ces rues. Dans cette ville. Quelque chose de suffisamment marqué pour que cela ne soit pas à prendre à la légère. Alors il avance. Les idoles importantes …
La grande différence entre les Grecs et les Égyptiens ? Les derniers n'oublient pas. Ils n'oublient pas les divinités qui sont supérieures à Osiris, Seth, ou encore Isis et Ptah. Ce qui est connu par son peuple comme les Titans, les rejetés, sont omis, oubliés pour la plupart. Mais, comme un jour il l'avait lui-même dit … Certains n'oublient pas. Certains par crainte. D'autre par dévotion envers l'idée même de Passé. Être au milieu d'un festival qui accepte les plus anciennes divinités du culte égyptien est en quelque sorte … agréable.

Athéna n'oublie pas les Titans. Nombreux de ses dévots, par contre … préfère les voir continuer à croupir au Tartare. Un jour, peut-être, un mortel ou une force divine sera capable de briser les lourdes portes des geôles des Titans. Ce jour-là, eh bien … Qui sait si une nouvelle Titanomachie verra le jour.

Les choses changent avec le temps. Des ennemis d'hier peuvent devenir des alliés – même s'il ne faut pas oublier de les garder sous surveillance. Après tout … la confiance se gagne. Et s'entretient. Mais qu'importe.

D'un regard neutre, donc, il observe cette foule qui va et vient dans les rues. Depuis son arrivée ici – il y a de cela plus d'une journée – il cherche des indices. Certains espions infestent la cité … En quelques heures, il a pu en découvrir quelques uns … morts. Tués par une vibration cosmique qui ne laissait aucun indice : quelque chose avait été marqué sur eux, pour qu'ils évitent d'être les voix qui guideraient un quelconque adversaire jusqu'à un lieu plus important. Proche de cette ville, il n'en doutait pas …
Il l'avait ressenti, lors de son voyage. Cette présence marquée. Il avait aussi observé cette oscillation de la lumière stellaire, plus importante. Mais …

Dans cette cité, dans ce pays, où même le miel est sacré, il semble que cela soit facile pour une force cosmique de se cacher. Alors, ce sont les autres sens qui doivent être utiles. Voir. Écouter. Poser les bonnes questions. Et déduire, aussi. Si j'étais une petite déesse, à peine consciente de mon rôle, où irais-je me cacher ? Où si je venais à être la proie de ravisseurs … Où ces derniers m’emmèneraient ?

Ce sont ces questions qu'il faut se poser.

Hm ? Ralentissant dans sa marche, Damian tourne sa tête en direction de l'étale d'un marchand, intrigué non pas par l'échange mais par la demoiselle avec laquelle il échange. Une étrangère – tout comme lui – des frontières égyptiennes. Enfin, si cet élément n'était que la seule chose d'étrange, il devrait observer une grande partie de la population présente. Entre marchands, représentants politiques et bien d'autres … il n'est pas rare de voir des hommes et des femmes à la peau claire. Non. L'élément réellement particulier est cette présence qui l'entoure. Fronçant un instant les sourcils, captant à peine l'échange avec le brouhaha ambiant, le jeune homme avance de quelques pas.

Toute forme d'indice est bon à prendre. Tant que cette présence, cette manifestation, n'a pas révélée quel mystère elle cachait – comme son origine par exemple – il n'avait aucune raison de détacher ses sens d'elle. Le problème premier dans cet échange est surtout de ne pas avoir entendu les premiers mots. Mais maintenant, alors qu'il observe quelques pierres sur l'étale à côté, il reste conquis par la discussion innocente.
Tout ça pour du miel hein. Il s'imagine déjà parler de ceci dans le rapport au Grand Pope. Bien entendu, Excellence, quand j'ai ressenti cette présence particulière je me suis de suite penché sur son activité. La demoiselle semblait être en adoration devant le miel – pouvant même sûrement se vanter d'être experte en la matière – et a passé quelque temps à marchander – ou plutôt à dire « ça, c'est pour moi » - avec un producteur.

Oui. Bien entendu. Cela serait une partie essentielle du rapport de mission. Bien sûr.

Ignorant un instant le marchand de pierre, le jeune homme tourne son regard vers l'étale de miel alors qu'un phénomène semble se produire. Surpris, oui. Peut-être pas autant que l'égyptien qui vient de voir sa cargaison disparaître. Mais il reste surpris. Faire ainsi les choses, au milieu de la population non-éveillée. Voilà quelqu'un qui n'avait guère de respect pour les frontières entre les phénomènes cosmiques et la perception humaine … Mais … est-ce cela le plus important ? Réellement ? Non. Car après l'énervement et les menaces d'amputations de l'égyptien sur la demoiselle, un nom souffle entre les lèvres de cette adolescente aux cheveux d'argent. Styx …

Styx …
Ce nom n'est pas commun.
Il est rare, impossible même, que certains osent appeler un de leur enfant comme une divinité. Surtout celle-ci. Et pourtant … Elle ne lui ressemble pas. Si cette demoiselle est réellement Styx, alors on lui a tout a arraché. Ses couleurs. Sa sévérité. Mais il y a bien quelque chose qu'elles ont en commun. L'impulsion. L'absence de limite. Certes, cela fonctionne différemment – et cela ne prouve rien. Mais il est vrai que cette Styx et la précédente … ne font pas vraiment grand cas de la perception des autres autour d'elles.

Une main se lève. Et est bien vite arrêtée. Un geste rapide, tout comme l'avancée de Damian. Celui-ci serre le poignet de l'égyptien. La capuche baissée, il regarde la demoiselle aux cheveux d'argent, avant de poser son regard sur le marchand. Il prend alors la parole, dans un égyptien correct. « Baissez votre main. Ou je vous la ferai baisser moi-même. » Neutre, l'ordre est soufflé. En fait, on pourrait même y percevoir une certaine sévérité. Que ce soit dans cette poigne ou dans cet ordre soufflé. Mais, il continue de le fixer. De fixer l'iris de ses yeux. Comme pour capter quelque chose, au fond de son regard. Lentement, la main se baisse. Un air plutôt absent de la part du marchand. La couleur de ses yeux légèrement plus pâle. « Bien … Maintenant vous allez oublier cela … Félicitations. » Sa voix est toujours neutre, alors qu'il lui tapote l'épaule d'une main avant de glisser une bourse dans l'une de ses mains. « Vous avez fait la vente du siècle. Vous devriez fêter ça à la taverne. » À nouveau, il lui tapote le dos. Pour que la suggestion devienne un ordre. Et pour que l'absence s'efface.

Face à lui, un Damian avec un léger sourire. « Merci pour votre miel. Bonne soirée à vous. » Ce n'est pas réellement honorable, ou fair-play. Mais … Après tout c'est un moyen comme un autre d'éviter qu'un homme finisse par crier sur tous les toits des inepties qui pourraient le pousser dans les geôles. Ou pire.
Et puis … il ne faudrait pas que certains commencent à le croire, aussi. Qu'il ait vendu toute sa cargaison et qu'il ait fait la meilleure affaire de sa vie, voilà qui devrait être une histoire plus agréable à écouter et moins dérangeante.

Le marchand parti, Damian regarde alors la demoiselle au miel. « Donc … Vous dites vous appeler Styx ? »

HRP a écrit:

Désolé pour le retard !
*Offre du miel en excuse.*

Dire qu’il espérait une réponse plus concrète et un échange plus développé ne serait pas un mensonge. Face à la réaction de ce qui semble être la Titanide – bien qu’une partie de lui en doute un peu –, Damian reste plutôt surpris. Silencieux, aussi. De toute façon, a-t-il réellement le temps de répondre quoique ce soit ? À peine la question de la demoiselle est posée que la voilà passer à autre chose. « Eh … ! » Pressant le pas pour éviter de la perdre de vue, le jeune homme lève tout de même un instant les yeux au ciel.

Est-ce réellement la même Styx qu’il a rencontré ? De toute évidence, non. En fait, une petite voix lui murmurait même que ce genre de comportement ne serait sûrement pas apprécié par la Styx dont il a fait la rencontre. Pourtant, entre les impressions et sa façon de gérer « l’achat des pots de miel », il semble difficile de croire que son nom ne soit qu’une coïncidence.
Et, de toute façon, il est rare – pas impossible, bien entendu – que les noms divins soient utilisés sans transformation par les mortels. Par respect pour les dieux. Par respect pour leur importance. Et aussi que, malgré tout le respect qu’il peut avoir pour les déités … s’appeler Zeus ou Apollon, ou encore Thanatos ou Cronos, n’est pas réellement une sinécure.

Mais voilà que Damian se trouve à suivre celle qui porte le nom du Fleuve des Enfers. Utiliser leurs puissances respectives – et principalement celle de Styx s’il s’avère qu’elle est bien la fille d’Océanos – pourrait être un pari risqué dans sa mission.

L’un comme l’autre auraient la possibilité d’attirer la Victoire – ou ses ravisseurs.
Mais … L’un comme l’autre auraient aussi la possibilité de faire fuir de potentiels ennemis en lien avec cette affaire.
D’un côté, si Styx est vraiment ce qu’elle prétend être … Alors peut-être que son lien avec la Victoire serait un atout précieux pour la retrouver. Ou pour attirer des requins affamés. Avides de dieux. Qu’importe ce qui se déroule en ce moment … Elle pourra être utile. Enfin, encore faut-il capter toute son attention. Une mission bien complexe.

La voilà de nouveau près de l'étale d'un commerçant. Et à nouveau, son petit tour de passe-passe. Et, pour ne rien changer, une réaction aussi véhémente que la précédente. Et une main, qui vient se poser sur son épaule. « Calmez-vous, voyons. » Une légère pression, cachée sous un visage neutre, bien qu'aimable. Dans ses mots, à nouveau, une légère vibration. Sans doute, cette fois, la demoiselle pourrait mieux la ressentir. Un léger cosmos, qui danse avec les mots. « Je n'ai plus vraiment l'impression qu'il y ait quelque chose à observer d'intéressant ici. » Un léger sourire, alors que la main se désolidarise de l'épaule. Ses autres doigts viennent chercher de quoi satisfaire le commerçant légèrement hors de cette réalité. Cette mission commence à me coûter cher. J'espère que tu en vaux la peine, petite Styx. Un regard dans sa direction, alors que sa pensée reste pour lui.

Il analyse, un instant, cette demoiselle. Oui. Elle en vaut la peine. Du moins va-t-il parier sur son impression. Et sur les possibilités que cela lui offre.

« Dans la Maison des Sables Endormis. » Une main sur le dos, pour le guider un peu, et le ramener à cette réalité. À cette réalité suggérée. « La Bien Aimée sera sûrement disponible. Fêtez cette vente. » Un clin d’œil. Une légère lueur amusée dans le regard.
Utiliser ce genre de techniques ne fait pas de lui un Saint souvent féliciter. Après tout, il profite des faiblesses de ceux qui ne sont pas éveillés. Mais si cela peut permettre d'éviter tout bain de sang ou de longues explications … autant faire le choix du plus efficace.

Une tape sur le dos. L'homme de retour à la réalité remercie Styx et son accompagnateur pour les achats. Avant d'aller retrouver les bras tendre de La Bien Aimée. J'espère juste que tu n'en profiteras pas de trop ma chère. Puis. Les yeux du Troyen se tournent vers l'Océanide. Une main se pose sur son flanc, alors que l'autre montre du pouce l'étale vide.

« Il me semble avoir suffisamment investi dans votre consommation de miel, Dame Styx. » Quelques pas. Légèrement, il s'incline. « Vous souvenez-vous de moi ? »

« Vous ne l'êtes pas. Mais je me vois mal vous affubler d'un titre royal. Dame a le mérite d'être … aussi respectueux que neutre. Là où la royauté impose une humanité. » Ses mains glissent dans son dos. Il l'observe. Répond avec cette même neutralité. Oui. Il pourrait utiliser un autre terme. Sans doute Titanide – après tout, n'est-ce pas son véritable titre. Mais l'appellation est … peu agréable en bouche. Titanide Styx. Titan Océanos. Titan Coeos. Titanide Thémis. Il continue de l'observer. Cette petite Styx. Elle porte ce nom. Et pourtant … Pourtant …
Elle semble si différente. Peut-être est-ce là le nouvel hôte. Mais … Cette façon de parler. Cette façon de se présenter. De se tenir. S'il y a bien la même absence de limite, celle-ci apparaît sous une forme de nonchalance dont peu peuvent se vanter de ressentir.

Ses couleurs ne semblent pas exister. Son regard semble voir autre chose que ce qu'il y a face à elle. Oui. Damian pourrait presque imaginer que cette demoiselle parle sans penser à ce dont elle parle. Comme si son esprit, embrumé, avait déjà autre chose en tête que cette discussion – sans doute fort ennuyante à ses yeux. Une discussion qui menait à une réalité … Elle ne le connaissait pas. Si c'était bien la Titanide qu'il avait rencontré dans la ville de Troie, il ne pouvait ignorer qu'elle semblait n'avoir aucun souvenir de lui. Peut-être … finalement … n'est-elle pas la même Styx. Peut-être est-ce un phénomène lié à sa réincarnation.

Elle ne côtoie pas les humains, dit-elle. Sans doute. Et pour valider ce propos, elle commence à quitter les lieux. Elle s'arrête. Lorsque le Saint entend de premiers mots. Des Grecs. Qui parlent d'une divinité. Une divinité se transformant en Sceptre. Un instant, il baisse la tête. Devant ce manque de respect. Devant cette façon qu'ils ont de parler de cela. Comme s'ils échangeaient sur les dernières activités politiques de la Cité. Au moins … cela avait arrêté Styx. Dont le regard semblait gagner une certaine lueur. Qui semblait bien plus lui parler que cette apparence sans couleurs, terne. Mais … Avant toute chose … « Vous êtes bien bavards … » Sa voix résonne. Alors qu'il approche légèrement. Son accent accompagne ses mots. Un accent d'un coin bien précis – connu pour ne plus être réellement en activité, du moins, pas autant. Un accent que certains reconnaissent facilement.

« Tch. Ne t'avise pas de me parler, Troyen. » Damian s'arrête. Les mains dans son dos. Il observe l'homme – celui qui ne respecte pas la fille de Styx. Qui la compare à un simplet objet. Qui approche, d'ailleurs, de lui. « Cette conversation est privée, alors … » Il pose sa main contre l'épaule du jeune homme. Le repoussant. « Hors de ma vue, bélître. » Un léger sourire. La main est rapidement attrapée par le Saint. Son pouce appuie sur la jointure du poignet. Ce qui arrache un cri à l'homme.
Damian tourne son regard vers le second. Celui qui a fait une autre preuve d'irrespect. « Les orgies vous plaisent tant que vous en oubliez nos dieux ? Celle qui trône aux côtés d'Athéna n'est pas la Justice. Mais la Victoire. » Il repousse d'un coup de pied son agresseur, dont la main tremble de douleur après avoir été relâchée.

« Je … Euh … » Le Troyen pose sa main sur son épaule. « Oui. Il peut vous arriver malheur. Mais avant qu'il ne vous arrive quelque chose. Pourquoi avez-vous ainsi débattu de la Victoire … ? » Son regard le fixe. Celui qui n'a pas encore été blessé voit son ami, qui est a du mal a fermer ses doigts tant la douleur est insupportable. « Je … J'ai vu une Égyptienne. Dans un Temple de Sekhmet. Elle … Elle disait qu'elle s'appelait Niké. Elle n'était pas en bon état. Elle semblait un peu … vous voyez … transparente ? » Il écoute. Plus attentivement. Sa poigne se fait légèrement plus forte. Juste suffisamment, pour qu'il accélère. « Arg ! Je ne mens pas … Elle y était puis a … Disparu ! Elle voulait que … j'envoie un message … à Athènes … » Le silence redevient présent.

Le jeune homme ignore pour le moment les quelques regards qui vont et viennent sur la scène. En fait. Pour le moment, il assimile seulement les informations. Puis, d'un mouvement, il lâche l'homme, qui tombe au sol. « Où est le temple … ? » La question – qui ressemble plus à une forme d'ordre à répondre – résonne avec une certaine sévérité. Bien qu'il tremble de peur, le témoin de l'apparition de Niké semble réussir à donner rapidement la localisation du Temple.

Alors … Il se détache des deux hommes. Passe à côté de la Titanide. Il s'arrête. Incline doucement la tête. « Je suis à la recherche de votre fille. Souhaitez-vous m'accompagner ? »

Quitte à chercher la fille … Autant profiter de la présence de la Mère … Elle saura peut-être réussir à trouver un quelconque indice sur sa présence – si elle a réellement disparue. Sinon … Eh bien. Il observe un instant les deux qui semblaient se relever. « Je vous invite grandement à ne pas bouger … Sur ces terres, les fléaux et malheurs arrivent souvent à un nombre élevé. » Une menace à peine voilée sur le fait qu'il saurait les retrouver s'il a besoin d'eux et qu'il est préférable de ne pas s'éloigner.

C'était bien elle.

Pour comprendre cela, il aura fallu quelques minutes. De longues minutes. Un instant, à la fois rapide … et pourtant difficilement long. Tout commence par une énergie, qui se réveille. Un frisson, qui glisse, remontant jusqu'au creux de sa nuque. Une aura de violence. Lui, pouvait la ressentir. Eux, autours, ils ne voyaient que les dégâts causés par cette intensité. Les vents qui se lèvent, soulevant le sable et la poussière. La pression Qui s'exerce. Sur leur vie. Sur leur esprit. Des bruits de poteries brisées. Des os, qui craquent. Qui s'écrasent. Alors que quelque chose d'ancien se réveille. Brutalement. Sans une once de pitié. De compassion.
Car il n'y a pas à avoir de compassion. Car il ne peut y avoir de pitié. La Haine n'a ni pitié, ni compassion. Elle naît au moment où l'Amour est frappé. Humilié. Oublié. Abandonné. Blessé. Et en cet instant, cette Haine – Styx elle-même – est celle d'une Mère.

Le Troyen s'est éloigné, dès les premiers signes de puissance. De changement, dans l'air ambiant. Dès que la tension est devenue énergie. Dès que les vents sont devenus des mouvements dévastateurs. Il s'est éloigné, pour arriver plus loin. Toujours dans cette Capitale. Pas loin de ce marché. Qui lentement s'est transformé en un champ de ruines. En une cicatrice – preuve de ce qu'est la Haine. Preuve de ce que peut faire la puissance cosmique.
Et c'est uniquement en apparaissant – à travers un portail formé par de la manipulation gravitationnelle – que Damian a véritablement compris. Qu'il avait eu de la chance d'être un survivant de sa première rencontre avec la Fille d'Océanos. Mais, surtout … Que c'était bien elle.

Jamais il n'oubliera pas cette tignasse.
Jamais il n'oubliera ce regard.
Et jamais il n'oubliera cette sensation. Cette aura naturelle qui entoure la divinité.

La Mère de Niké a entendu que sa fille n'était pas dans sa meilleure situation … Et cela avait suffit à être déterminant pour ce marché. Une cloche est sonnée, dans une des tours de la ville. Une alerte. Comme s'il avait besoin de ça … Mais que peut-il dire ? Certains Saints diraient qu'il aurait dû empêcher ce massacre. Mais contrôler la Haine alors qu'elle s'éveille simplement, alors qu'elle se défoule avec comme seule idée de briser ce qui entoure … Le Grand Pope, sans doute, observera cela d'un œil noir. Mais personne ne peut réellement comprendre et s'adapter à Styx – c'est ainsi. Comme toute émotion, elle est versatile. Dangereuse. Entropique.

Le Saint écoute. Depuis sa position plus en arrière. Il écoute les commentaires de la divinité, tout en approchant légèrement. C'est vrai. Il avait préféré parler. Débattre. Plutôt que d'envoyer le message – et la déité ne lui donna aucune possibilité de répondre, de chercher une rédemption. Tout comme son interlocuteur, il a fini la tête séparée du tronc.
Elle lui parle, cette fois. Laissant entendre qu'elle ne savait pas qu'il était là – mais le félicitant pour la prouesse d'être toujours vivant. Le Troyen observe le carnage. Ses paupières se ferment un instant – ce n'est pas si différent d'un champ de bataille … Oui. Pas si différent. La guerre propre n'existe pas. Les batailles qui ne tuent pas des civils, cela n'existe pas.

« Sans doute ne l'avez vous pas entendu … » Son regard se pose sur elle. « Mais je suis à la recherche de votre fille, Niké. Et, le cas échéant, m'occuper de ceux qui pourraient s'en prendre à elle. » Aucun tremblement dans sa voix. Il observe. Cette déesse. Avant de la quitter des yeux. Pour observer les corps décapités. « Vous semblez avoir retrouvé des manières plus proches de celles que je connais … Dame Styx. » Son pied appuie sur quelques morceaux de bois brisés, calcinés. Deux Styx, partageant la même enveloppe … ? Est-ce possible ?

Dans leur grande majorité, les humains se vexent d'être oubliés. Sans doute une envie de reconnaissance, un désir de marquer les esprits. Quelque chose de ce genre. Cette envie, ce désir – cette force, appelons la ainsi – est encore plus présente lorsqu'ils font face à des Seigneurs, des Rois ou des Reines, des Princes ou des Princesses. Ou même de grands noms des Arts, de la Pensée, ou du Culte. Une idée leur bouffe l'esprit. Un grand homme – ou une grande femme – se souvient de moi. Une personne importante peut me nommer. Peut se rappeler de mon visage. Elle peut se dire : lui, il existe. C'est un besoin. Un besoin naturel d'être remarqué. D'être accepté. D'être apprécié – à une valeur que les humains surestiment, parfois.

Si Damian possède des défauts, il remercie sa famille de ne pas l'avoir élevé dans cette vision du monde. Sans doute, déjà, car il a déjà été à la place des Hauts noms. En tant que fils de Général Troyen, il avait un nom. Un visage. Une expression. Et rares sont ceux qui n'ont pas tenté, au moins une fois, de rencontrer son Père – un héros anonyme dans les textes, mais un héros pour les soldats – à travers lui.
Avoir fui ces tentatives – ou avoir profité de celles-ci – l'a sans doute appris à relativiser. Par exemple. Styx ne se souvient pas de son nom. Sans doute même ne se souvient-elle pas de son visage. Et ? La vie d'une divinité n'est pas aussi intense que celle d'un être humain – celle-ci étant une flamme, éphémère mais brillante, alors que celle d'une divinité est un océan, qui ne se soulève parfois qu'au rythme de quelques vagues. Et ces dernières sont parfois très loin de l'idée même du cœur que la divinité pourrait avoir.

Donc. Ce n'est qu'avec un haussement d'épaules invisible qu'il reçoit la question de la Titanide. Il répond, même, simplement. « Damian. » Il laisse un léger silence. Avant de reprendre. « J'ai été envoyé suite à certaines visions et renseignements concernant l'apparition de Niké sur les terres Égyptiennes. » Certes, il pourrait avouer que le Grand Pope avait ressenti une étrange ombre autour de la lueur de la Victoire. Mais sans véritables éléments, cela pouvait autant être un présage d'un futur lointain que proche. De plus, à l'heure actuelle, beaucoup de constellations voient des ombres les entourer. Et d'autres se voient littéralement dévorées par celles-ci. Oui. La Guerre est en marche.

Le portail apparaissant, le Saint ne pu contenir un léger sourire. Un air de déjà-vu. Mais cette fois, il savait à peu près où la déesse souhaitait aller : là où sa fille a été vue pour la dernière fois. Concernant la question de la Titanide … « En effet. J'ai été surpris d'une telle … différence. » Il avance. Sans véritables hésitations. Se glissant dans le portail noir aux côtés de Styx, le duo fini par atteindre la vaste salle d'un temple égyptien. Cette fois, il ne vacille pas – habitué à ce genre de voyages, pour utiliser quelque chose de similaire.
Quelque chose ne va pas. Dans ce temple. Car la statue de Sekhmet est décapitée, souillée par le sang de quelques prêtres. Souillée, aussi, par l'épée qui est plantée en plein milieu de sa poitrine. Il n'y a pas besoin de vérifier pour se dire que cela est récent – très récent. Une voix résonne. « Tu penses qu'elle a pu prévenir quelqu'un d'autre ? » Un silence lui répond. Avant que la première se fait de nouveau attendre. « Quoi, des gens ? Ah. Oui. En effet. » L'origine de la voix se redresse alors, tenant à sa main la gorge d'une prêtresse.

Son regard – déjà épuisé par tout cela – semble observer le duo sans véritablement le voir. « Vous, vous n'êtes pas du coin. » Il jette le corps, qui s'écrase contre la statue souillée. Une énergie résonne autour de lui. Une lueur pâle. Ouvrant sa main, l'épée plantée dans la pierre se détachant pour apparaître entre ses doigts. Quelque chose, dans l'ombre, bouge doucement. L'homme – une personne aux cheveux noir, au visage couleur du désert et au corps recouvert d'une armure pâle – hoche la tête. « Je sais. Aucun témoin. Désolé hein. C'est pas que je ne vous aime pas. » Il avance d'un pas. Alors que Damian garde les yeux clos.

« C'est juste que j'ai un travail à terminer. » Il arrive alors, brutalement. Dans leur direction. Avant d'être arrêté dans sa course par une autre arme. Une épée, tenue par la main du Troyen. Une matière cristalline, sombre et étoilée à la fois. Certains pourraient appeler cela une cristallisation de cosmos. « Ah. Il m'a arrêté. Tu es quoi ? Un Guerrier de Sekhmet … ? Un Spectre … ? Non. Non. Tu es autre chose. Ah. Je sais. » Pour l'instant, aucune armure sur le corps de Damian. Juste un manteau noir, donné par une déesse il y a quelques années – travaillé, pour qu'il accompagne la progression du Troyen.

Un sourire apparaît sur le visage de l'adversaire. Alors que son regard vert brille d'une certaine malice assumée. « Un Saint. C'est ça. »

« Seize. »

Il semble préférer répondre au commentaire de la demoiselle, alors qu'il recule de quelques pas. Penchant sa tête sur le côté, il observe le Saint – qui l'observe. « Ah. Je n'ai pas pour mission de m'occuper des Saints, normalement. Mais … » Il fait tourner son arme. Alors que son cosmos commence à prendre en intensité. Tandis que le même phénomène se déroule depuis l'énergie de l'Autel. Un regard vert. Amusé. Chez l'un. Des yeux acajous. Sérieux. Chez l'autre. La main gauche de Damian bouge. Légèrement. L'épée se brise, les morceaux lévitant au-dessus de la paume de sa main. « Moi qui voulais te défier à l'arme. Enfin, qu'importe. » Il tend son épée en direction du Troyen. Quelques éclats pâles venant caresser la lame.

Ils sont prêts, l'un comme l'autre, à combattre. Jusqu'à ce que Damian cesse totalement de bouger. Il sent la main sur son épaule. Tourne les yeux vers la Titanide. « Que faites … » Il n'a guère le temps de finir qu'une impression traverse son crâne. Son rythme cardiaque, lentement, s'accélère. Encore. Ce sentiment … Non … Cette fois c'est plus violent et présent que dans son souvenir.
Ses paupières se ferment. Sa main gauche s'ouvre. Se ferme. S'ouvre. Se ferme. Il semble comprendre. Ce lien. Il semble accepter. Pour le moment. Après, c'est une méthode comme une autre d'agir. D'avoir ce qu'il faut. Comme renseignements.

L'inconnu, lui, ne comprend guère – du moins, il se doute qu'une action a été réalisée pour empêcher le Saint d'agir, mais quoi exactement … ? Il écoute. Les mots de la demoiselle, dont il ignore encore l'identité. Il écoute sa demande. Penche un peu la tête sur le côté. Il regarde. Alors que la malice dans son regard disparaît doucement. Ennuyé. Elle … l'ennuie. Oui. Elle … l'ennuie. Simplement. Naturellement. « Vous n'êtes pas amusante … Pas du tout amusante. » Il glisse la pointe de son épée sur le sol. Avant de redresser légèrement les yeux. Vers elle. Une intense pression commence à résonner dans la salle principale du temple. La roche éclate, au contact d'une foudre blanche. Pour l'instant, celle-ci ne s'attaque pas à la déesse. Elle ne fait que ramper. Éclatant ici et là de la pierre taillée.

Puis … « Bah. Faites le venir. Si je ramène la tête d'un Saint … Puis la vôtre en prime. » Son expression garde cette fatigue naturelle. L'impression qu'il n'est pas réellement présent, ou même intéressé par cette discussion. « J'imagine … que j'aurai le droit aussi … d'écorcher la fausse déesse. » Son regard s'assombrit. Ses lèvres s'étirant en un sourire. Froid.

Sans doute sont-ce ces mots. Ou simplement le contrôle qui n'était pas assez puissant. Mais la silhouette de Damian a disparue à la fin du court monologue de l'inconnu. Pour apparaître devant lui. Sa main ouverte brille d'une lueur étoilée. La chaleur se fait violente. Pesante. « Ah … Il est … proche … Eh … Tu fais quoi ? Tu vas vouloir me tuer avec ça ? Quoi ? T'es pas content hein. C'est ça. Pas content de quoi ? » La lame vient frapper l'énergie stellaire. Alors que sa voix résonne à nouveau. Damian ne répond pas. Alors, il continue. « De servir de pitoyables imposteurs ? D'en être un ? » Un nouveau verrou est brisé. Violente. La Haine froide de l'Autel vient nourrir son énergie. Alors que l'épée commence à se fissurer. L'adversaire cligne des yeux. Son sourire s'étirant un peu plus.

La lueur frappe violemment. Elle transperce l'épée, la brise sur toute sa longueur, avant de trancher le corps en une faille particulière. Qui palpite. S'ouvrant un instant sur une vision galactique. Avant de se refermer, ne laissant qu'une vaste plaie béante, l'armure pâle du combattant fissurée. « Réponds … à la question … » Damian avance. Sa main s'ouvre. Se ferme. La Haine résonne bien en lui. Mais pas en un hurlement bestial. En quelque chose de froid. Pour quelqu'un de différent de Styx, sans doute cela serait presque effrayant. Tant la Haine semble suinter de toute son aura. De sa présence. « Hey … Je crois que c'est un peu foutu pour moi. Tu penses pas qu'il faudrait un peu m'aider ? Non ? Ah. D'accord. Ah. Il est parti … » Une main attrape sa gorge. Serrant. Alors qu'une lueur apparaît dans l'autre main. « Tu comptes me faire manger ça ? Ce n'est pas vraiment … appétissant. » Silence. Alors que la lueur palpite. Tremble.

Damian le regarde. Le fixe. D'un regard sombre. Sincèrement destructeur. Puis. Il le lâche. « Dans les deux cas, tu vas mourir … » L'autre penche la tête sur le côté. Alors que la lueur brille un peu plus. Puis. Le Troyen regarde le cou du jeune homme. Il se penche, un instant. « Plus besoin que tu parles … » Sa main attrape le pendentif, dévoilé par la déchirure de l'armure. Avant de l'arracher. « Hey ! L'objet est précieux. » Le Saint le lance en direction de Styx. En l'attrapant – ou simplement en le regardant arriver au sol – elle verra un artefact, prenant la forme d'une feuille d'acacia. « Il y a un tombeau scellé. À l'est de la ville. Sous un acacia du Nil. » L'importance de faire des recherches. Sur les lieux. Sur les légendes locales et nationales. Sur les endroits intéressants. « Vu l'objet et l'énergie qui s'y dégage. C'est une clé. » Son jeune ennemi, lui, pousse un grognement, alors qu'il tente de se redresser.

Le Troyen pose son pied contre son torse. Appuyant sur la blessure. « Je te l'ai dis … Dans les deux cas … » L'énergie se concentre alors en un point. En une bille. Qui lévite jusque dans la blessure. Il ferme sa main. « Tu meurs. » La bille se brise. L'énergie se déversant dans le corps avec fureur, dévorant sa chair. Alors que son corps, lui, est brisé. Os. Muscles. Par cette pression violente. Un hurlement terrible traverse la bouche de celui qui n'a pas de nom – qui n'avait sans doute pas envie, de toute façon, qu'il soit dit. Puis. Le silence.

Se retournant et commençant à s'approcher de Styx, le Troyen la regarde. Une lueur traverse son regard, alors qu'un portail s'ouvre sur leur gauche. « Niké nous attends. » Même dans la voix. Il n'y a aucun son haut. Et pourtant. Elle suinte elle aussi, de cette haine qu'elle a fait naître. Simplement, sans d'autres mots, il s'enfonce dans la masse gravitationnelle. Ne comptant pas la Titanide y aller seule.

« Ne vous méprenez pas. Certains d'entre nous ne cherchent pas à plaire ainsi à leurs dieux. » Les mots résonnent, alors qu'il quitte la masse gravitationnelle. Un léger soupir traversant ses lèvres. Il sent encore sa main s'ouvrir. Se fermer. Lorsque la Titanide quitte elle-même ce portail, celui-ci se referme, ne laissant que la marque certaine de l'altération de la gravité.

Face à eux, un mausolée. Un tombeau. Et autour de celui-ci, une aura. Un cosmos imperturbable. Aux origines sans doute – pouvait-on le croire – divine.
Sa main vient chercher l'arête de son nez. Qu'il masse doucement. À nouveau, un soupir. Alors que le rythme cardiaque est encore puissant, dans son crâne. Dans sa poitrine. Pendant un instant, il ferme ses yeux. Inspire. Légèrement. Expire, régulièrement. Fixe une idée. Une pensée. Un visage. Avant d'ouvrir les yeux. Son regard se pose sur la Mère de Niké, avant de poser une main sur son flanc. « Mais je ne crois pas que nous sommes là pour parler d'amour. » Il approche. Près d'elle. La regarde un instant. Oui. Il aime. Quelque chose. Quelqu'un. Oui. Il est loyal. Respectueux. Des rites. Des forces qui composent ce monde. Et dans les phrases de celui qui a été tué, il insultait ces deux existences.

Il la regarde. Encore une fois. Puis, le Saint récupère le pendentif, sans autre forme de procès. Avant de se retourner, approcher de la porte scellée du mausolée. Sa main glisse, sur quelques hiéroglyphes. Non, pas sur les hiéroglyphes. Sur la pierre. Il semble quelque chose. Même s'il entend ce cœur qui frappe continuellement dans sa poitrine – dans son crâne – Damian arrive encore à … réfléchir. À sentir les choses sous ses doigts. Un instant, le Troyen s'arrête. Ses doigts viennent se faufiler entre deux roches taillées. Un hochement de tête, alors que son regard vient croiser celui de la Titanide. Alors, simplement, il glisse la clé. Pour l'enfoncer dans la roche et la laisser.

Bientôt, la porte laisse entendre un bruit sourd. Un mécanisme qui semble se déverrouiller – et surtout, un changement dans une aura. Cette aura qui s'efface. Pour laisser quiconque possède cet artefact de pénétrer dans ce lieu sépulcrale. Approchant de la porte de l'édifice, il pousse la roche qui glisse lourdement. Comment dit-on, déjà, dans certains contes … ? Ah oui. Sésame, ouvre-toi. Enfin, le trésor qui se trouvait à l'intérieur n'avait rien d'or ou d'argent. Il était plus important. Précieux. Et essentiel.
S'enfonçant dans l'obscurité, le Saint ouvre sa main, laissant une petite lueur apparaître. Avant de regarder les hiéroglyphes. Par endroit, la pierre a été brisée. Détruite. Comme pour effacer des noms – des visages. « J'imagine qu'on peut retirer les divinités du Panthéon Grec et celles du Panthéon Égyptien comme coupables. » Il avance. Doucement. Sa voix est froide, alors qu'il continue d'avancer. Donc. C'est un autre panthéon qui s'en prend à eux. Et qui s'en est pris à Niké, aussi.

« J'ai été envoyé par le Grand Pope car une ombre est apparue autour de la lueur de la Victoire. Nous n'avons pas eu de véritables informations. Juste des retours persistants sur l'Égypte. Il m'a donc été ordonné de trouver Niké et de la mettre en lieu sûr. Lorsque je vous ai rencontré, je suivais une piste concernant cet endroit. Mais sans la clé. » Il tourne sa tête. S'arrête. En fait, il semble étudier un peu la divinité. En silence. Ne disant rien pendant quelques secondes, il reprend ensuite sa marche. En lieu sûr, hein.

Il entend. Quelque chose bouger. Plus loin. Quelque chose qui attend, aussi.
Descendant quelques marches, son regard glisse sur une forme, alors qu'un sifflement résonne. Une ombre bouge. Rampe. Mouvement ophidien qui remonte contre un mur. Mais qui n'a rien d'un serpent. Quelque chose de plus abyssal. Profond. Un œil s'ouvre. Fixe les deux. Avant de se refermer et de s'enfoncer telle de l'encre dans interstices de la paroi. « Hm. Au moins ils savent qu'on est là. » Et pas qu'eux. Car alors qu'ils avancent, ils commencent à la ressentir – comme si elle avait été bloquée, cachée, avant. L'aura, la présence de Niké.

Damian presse le pas. Pour arriver alors avec Styx dans le sanctuaire funèbre du tombeau. Une momie a été jetée au sol, malmenée. Humiliée. Tout comme des statues représentants différentes divinités chthoniennes du Panthéon Égyptien. Une silhouette est assise sur le sarcophage fermé – c'est bien là où se trouve Niké elle-même. Une silhouette, au visage caché par un tissu troué.

« Vous avez tué Salim. Pauvre Salim. Il était encore un jeune gardien. Enfin. Je ne l'ai pas aidé. Stupide Salim. » C'était donc lui, qui était avec Salim – dans une ombre. Ou autre part.

Jouant avec une poupée de chiffon, il enfonce une aiguille dans le tissu. Ne regardant pas les nouveaux venus. Autour de lui, une protection. Et cette protection arrache une insulte à Damian. Car cette protection est nourri par l'énergie divine de Niké elle-même. « Si vous brisez le bouclier, le sarcophage absorbe de sa vitalité. Si vous tentez d'entrer dans son rayon d'action ... l'espace vous rejettera. Pour nous protéger à nouveau. Elle et moi. Vous voyez. Je la protège … Votre fille. » Le Troyen avance d'un pas. « Drôle façon de protéger. » L'autre hausse les épaules. Il ne s'en occupe pas vraiment, de la méthode. Tant qu'il peut juste gérer ceux-là.

D'ailleurs. Il doit s'en occuper. Et à cette simple idée, son cosmos commence à bouger. Sans s'éloigner. Sans se diffuser. Sans s'étendre. Il appelle juste. De l'encre. Qui coule de certaines interstices. De certains pots. Pour mieux exister. Bouger. Vivre. Et s'assembler. En plusieurs silhouettes vaguement humanoïdes. Des yeux s'ouvrent. Un par créature. « Ne bougez pas. Faisons ça rapidement, d'accord ? » Il reprend alors sa couture. « Si vous ne vous laissez pas faire. » Il pose sa main sur le sarcophage. Le tapote sans respect. « Qui sait ce qui pourrait arriver. »

Au fond du Sarcophage. Elle est là. Une présence. Qui se débat.
Qui se débat, sans faillir. Mais quelque chose s'accroche à elle. Quelque chose se bat contre elle. Sans faillir, aussi.

Les dieux ne sont pas du même niveau que nous, simples humains. Leur façon d'aimer. Leur façon d'évoluer. Leur façon d'exister. Leur façon de détester. Tout ceci est différent. Sans doute est-ce pour cela qu'ils finissent par avoir besoin d'une humanité – car cela leur permet de faire des choses qu'ils ne peuvent, sans doute, concevoir.

Le Troyen pense à cet enseignement en observant un instant la Titanide, Fille d'Océanos et Mère de Niké. Celle qui préside à la Haine semble échapper à cette vérité. Est-ce simplement parce qu'elle est une Mère ? Est-ce pas qu'elle est une ancienne divinité, qui a croisé les Primordiaux ? Ah … Une énigme. Voilà qui aura le mérite de faire débattre. S'il survit à cette rencontre – même si la divinité ne lui laisse réellement pas le choix de cette survie. Après tout. Il doit s'occuper de son enfant. Être digne d'un tel acte – dit elle. Ah. Oui. Sans doute parle-t-on de dignité dans ce cas là. Peut-être.

L'homme au visage caché par du tissu se redresse sur le sarcophage. Il fixe le phénomène. Franchement, c'était aberrant. Cette simple idée qu'un lien puisse … pervertir l'équilibre et les capacités de l'artefact. Non. Non. Cela ne doit pas arriver. Elle ne va pas aimer. Elle ne va pas apprécier. Elle … Tendant sa main, il s'arrête alors. Alors que son regard se lève vers une brisure formée dans sa défense.
En un mouvement. Il s'est approché. Pour frapper ce bouclier d'énergie avec un éclat de lumière stellaire. Pour en briser non pas toute sa structure, mais simplement un espace suffisant. Pour qu'il traverse. « Tu … comptes tuer une divinité … pour en sauver une autre ? » Damian ne répond pas. En fait, son mouvement n'est pas arrêté – et il ignore même cette présence.

Son énergie vibre. « Ah … Ce serait sans doute plus simple. » Sa main recule. L'homme ne bouge pas. Il ne doit pas bouger. Non. Il ne peut pas bouger. Puis, Damian frappe violemment le sarcophage. À l'impact, une activité gravitationnelle commence à se mettre en branle. Avec pour épicentre, l'objet même de leurs convoitises. Le Couturier est obligé de bouger. Non pas par choix – mais parce que la gravité le repousse brutalement, le faisant sortir de cette protection. Là. Là. L'Autel daigne lui lancer un regard. L'adversaire se rattrape à une décoration murale. Une partie du tissu couvrant son visage étant maintenant déchiré, dévoilant une peau mutilée, déformée. Mais il n'est pas le seul à être repoussé. La Haine elle-même est envoyée plus loin. Pour la détacher de ce lien – alors qu'il avait déjà commencé à reformer le bouclier. Avec cette même force. Une fissure apparaît alors sur le sarcophage. Qui tient. Qui tient bien. Pour le moment. « N'essaye même pas ! » Il veut attaquer. Le Couturier veut attaquer. Mais il est hors du bouclier. Et … les créatures de Styx …

Non. Non. Elle ne va pas aimer.
Elle va détester.

Le Saint recule à nouveau sa main. Son armure apparaît alors. Recouvre son corps. Avant de que le poing ne s'écrase. Brise cet ancien artefact qu'est le sarcophage. Libérant sa prisonnière, dont le corps n'a guère le temps de tomber qu'il disparaît déjà. Pour mieux arriver dans les bras de sa Mère. « Considérez cela comme un remerciement pour notre rencontre à Troie. » La voix de Damian est assez faible. Alors que son regard se redresse vers le Couturier. Plus de bouclier. Mais surtout … une vibration. À travers le corps de l'Autel.
Sans doute serait-elle déjà morte, si elle n'avait pas fait ça avant. Ah. Les dettes, ce n'est jamais quelque chose de très agréable à porter. Sa nuque craque un instant. Ses phalanges aussi. Ah. Oui. Cette Haine. Elle est toujours là. Toujours là. Toujours là …

Niké est là. Entre les bras de la Mère. La Fille est blessée – mais pas autant que la situation le laissait présager. Quelques marques, rappelant les traces laissées par des liens. Et autour de son cou, un pendentif. Une étoile à huit branches. Qui lentement tombe en cendres.

« Non. Non. Je peux encore me battre. Déesse ! Je peux … encore … » Sans véritable autre forme de procès, du sang coule de sa bouche. Le corps tombe. Lourdement. Sur le sol. Il roule. Quelqu'un ne semble pas vouloir que son nom soit prononcé – ni même pensé. Quelqu'un ne souhaite pas remercier l'échec par une autre tentative d'échec.
Il ouvre. Ferme. Sa main. Il reste silencieux. Brûle, à l'intérieur. Il ignore les créatures d'encre, qui s'affaissent – du moins celles qui n'ont pas été brisées par les invocations de la Titanide. Le Troyen se retourne. Avance. Jusqu'au duo de déesses. Niké, pour le moment, est inconsciente. Elle s'en tirera. Même si. Styx elle, peut le savoir. Quelque chose a tenté de voler la nature divine même de la Victoire. Son essence. Sa force. Sa combativité. Et pas dans le souhait d'utiliser un simple bouclier.

« Partez. Avec votre Fille. Je doute qu'elle soit … plus en sécurité chez moi que chez vous. » Oui. Ils ont peut-être une armée. Mais, à l'heure actuelle, cette armée fait autre chose. Et … Il serait préférable que la Victoire se rétablisse pleinement – et quoi de mieux qu'être proche d'une essence similaire. « J'expliquerai au Grand Pope la situation. » Sa main vient cacher un instant ses yeux. « Ah. D'un autre côté … J'imagine que cette mission est un véritable échec au niveau des informations à récupérer. Quoique ... je peux peut-être trouver quelques preuves dans leurs affaires ... »