La brise douce et chaleureuse d'un soir d'été caressait la nuque du jeune garçon. Assis au sommet d'une colline, le jeune Toval observait le ciel avec des yeux émerveillés. Les constellations étaient si éclatantes dans le ciel que l'on aurait presque pu les toucher... Elles semblaient si proches, et pourtant si lointaines à la fois. Le lieu où il se trouvait était comme hors du temps... le Sanctuaire d'Athéna offrait un cadre de vie des plus étonnants. Un bruit de pas le fit sortir de sa réverie.
« Ainsi te voilà, Toval. Je me doutais que tu serais ici. », dit un homme trentenaire ans à la voix grave et rassurante.
Le jeune Toval se releva, et s'inclina respectueusement devant l'homme.
« Maitre, je suis heureux de vous revoir. Le temps m'a paru long sans vous.- Tellement long que je te retrouve à rêvasser, hein...- Mais non ! Je vous assure que j'ai travaillé ! », se défendit le jeune garçon d'une voix offensée.L'homme fixa le jeune garçon sévèrement, le jaugeant comme un juge examinerai une preuve avant de prononcer son verdict. Toval déglutit, ne sachant trop si son maitre lui pardonnerait sa rêverie. Cela faisait maintenant plusieurs nuit qu'il se sentait attiré vers cette colline, que son esprit semblait ressentir comme un manque, un vide à combler... L'homme éclata finalement d'un rire franc et jovial, cassant d'un coup l'atmosphère pesante qui semblait vouloir s'installer.
« Je n'en doute pas Toval, mais tu sais très bien que j'ai de grandes exigences ! » Il posa sa main sur la tête du jeune garçon et ébouriffa ses cheveux.
« Il est temps de dormir. Demain, dès l'aube, tu me montreras le fruit de tes efforts. »Acquiesçant, l'apprenti suivit son maitre jusqu'à la spartiate demeure dans laquelle ils résidaient. Une autre journée s'achevait, sereine et tranquille...
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Le coup de poing cueilli Toval au menton et le sonna. Il tenta de reprendre ses esprits mais son adversaire enchaîna avec un coup de pied retourné qui l'atteignit dans le ventre. La puissance de l'impact le propulsa de quelques mètres en arrière. Le jeune homme avait l'impression qu'il allait vomir tout son estomac et peinait à reprendre son souffle.
« Et bien alors Toval, tu dors ? T'as peur ou quoi ? », cria en ricanant l'un des spectateurs de l'affrontement.
Trois ans s'étaient écoulés maintenant. Trois années d'entraînements, de découvertes, de joies... et de peines. Siphius de la Coupe, le maitre d'arme de Toval, n'était plus. Cela faisait maintenant un peu plus d'un an qu'il s'était fait tué. Contre qui ou quoi, Toval l'ignorait... Dès lors, le jeune homme n'avait plus qu'une obsession : découvrir la vérité sur la mort de son mentor. Seulement il y avait un problème et celui-ci était de taille : avant de pouvoir prétendre à ne serait-ce que demander officiellement des informations sur la disparition de Siphius, il lui fallait se montrer digne de porter l'armure de son défunt maitre... Chose bien plus simple à faire qu'à dire !
Réda lui envoya un nouveau coup de pied particulièrement violent mais cette fois-ci, Toval le dévia, amortissant grandement l'impact. Contrairement à lui, Réda semblait prêt à tout et faisait preuve d'une grande agressivité pour se montrer digne de l'armure... Sans doute était-ce qu'il manquait à Toval ?
« Bats-toi ! Tu n'es qu'un lâche ! Un lâche peureux et incapable de se défendre ne peut prétendre défendre le Sanctuaire. Tu n'es pas digne de servir Athéna ! »Toval encaissa un autre coup et tomba à genoux, crachant une gerbe de sang qui macula le sang. Réda devait avoir raison... Il détestait la violence inutile, préférant rester en retrait et observer patiemment avant d'agir. Oui, Réda devait avoir raison : un guerrier incapable de se battre pour prouver sa valeur devant ses pairs ne pouvait prétendre à l'honneur de servir la déesse Athéna...
« Allez mauviette ! Lèves toi ! Vraiment, je ne vois pas ce que Siphius te trouvait... Tu es faible et pathétique ! Comme lui en fait...»Réda ponctua son insulte d'un crachat avant de faire craquer ses doigts, se préparant à asséner le coup de grâce à Toval. Pourtant il s'interrompit lorsque le jeune homme se remit péniblement sur pieds, l'étonnement se lisant sur son visage...
« Tu aurais mieux fait de rester à terre Toval, tu vas me forcer à te faire du mal ! », déclara Réda d'une voix qui se voulait assurée... mais sans l'être réellement.
« Je voudrai bien voir ça... », répondit simplement Toval.
Le prétendant s'élança vers le jeune homme, visant directement le coeur du jeune homme. Les spectateurs massés autour d'eux retinrent leur souffle... mais le coup de Réda n'atteignit jamais sa cible. Se déplaçant trop rapidement pour des yeux humains, Toval venait de bloquer le poignet de son adversaire à quelques centimètres de sa cible. L'air vibrait autour de l'apprenti de Siphius, prenant une teinte légèrement mauve tandis que ses yeux viraient à l'ambre. Sans avoir l'air de fournir le moindre effort, il saisit Réda par le col l'envoya s'écraser contre l'une des nombreuses colonnes qui ornaient le terrain d'entraînement des apprentis. Réda s'y écrasa durement et roula au sol, tentant de se relever sans succès en lâchant plusieurs cris de douleur. Visiblement, Toval y était allé fort. Trop sans aucun doute.
« Laisse moi te montrer ce que mon maître m'a appris... », lâcha-t'il d'une voix étrangement neutre en s'approchant.
Allait-il achever son adversaire blessé ? La tension était palpable dans l'assistance et les Chevaliers en charge de l'épreuve semblaient sur le point d'intervenir. Mais lorsqu'il arriva au niveau de Réda, il s'agenouilla à son niveau et posa la main sur son épaule, laissant son cosmos léchait ses plaies.
« J'ai appris de lui une qualité essentielle : la générosité. Réda, ta force ne vaut rien si elle n'est pas animée par un coeur généreux. Je crois que c'était là le principal enseignement de Siphius. »Toval se releva péniblement, peu habitué à faire démonstration de ses pouvoirs. Des pouvoirs qu'il avait encore bien du mal à canaliser. Alors qu'il semblait sur le point de défaillir à son tour, il eut l'impression de sentir une présence familière autour de lui. La sensation d'une main amicale se posant sur son épaule se fit ressentir, mais lorsque le jeune homme porta sa main à son épaule il ne n'éprouva que l'étrange chaleur de l'orichalque reposant sur sa peau... La chaleur se répandit à son corps, n'ignorant aucune partie de son être. Un infime instant, il lui sembla être à la fois tout et rien, puissance et néant, ordre et chaos. L'armure d'Argent de la Coupe venait de choisir son nouveau porteur...
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Encore deux ans plus tard...
« Pourquoi cet air ennuyé, Toval ? », demanda le chevalier d'Argent qui l'accompagnait.
« Je n'aime pas l'affrontement, tu le sais très bien.- Certes, mais tu dois t'entrainer et montrer tes talents. Tu sais, on commence à se poser des questions sur ton... comment dire... ton utilité.- Tu sais très bien ce que je vaux.- Oh ce n'est pas moi qu'il faut convaincre, Toval, mais le reste de la Chevalerie. Tu ne peux pas te permettre de rester à l'écart plus longtemps.- Je sais », soupira Toval en suivant son compagnon.
« Allons-y, il est temps que je fasse mes preuves auprès des autres. »******
Encore quelques années plus tard...
Grimaçant sous l'effort, Toval frappa de nouveau le manequin d'entrainement. Sous l'impact, le bois céda avec un craquement sinistre. Cela faisait des mois qu'il s'entrainait sans relâche pour remonter la pente et retrouver ses pleines capacités après une défaite mortelle, une descente aux Enfers et une résurrection des plus douloureuses. Pendant plusieurs mois le Saint s'était fait oublié et avait quitté le Sanctuaire, arpentant le monde sans étiquettes et sans donner de nouvelles à qui que ce soit.
Cependant il était temps de retourner au Sanctuaire et de reprendre sa place au service d'Athéna. Une place qui serait pourtant différente : l'armure de la Coupe, son ancienne armure, avait accordé sa bénédiction a un autre Chevalier. Toval n'en portait aucune rancœur car vu comme les choses s'étaient passées la dernière fois, c'était sans doute mieux ainsi.
Un long voyage l'attendait encore pour rejoindre le Sanctuaire, ses frères et soeurs et sa Déesse. Une constellation accepterait-elle de le prendre sous sa protection ? Seul l'avenir pourrait le dire.