Hermès, Dieu des Voleurs, de l'Éloquence, des Marchands, Donneur de Chance - Terminée

Hermès

« Eden »

VOTRE HISTOIRE

L'histoire est écrite par les vainqueurs.

C'est ainsi que Lachance a terminé la présentation de son plan. Ce genre de phrase est essentiel, ne serait-ce que pour garder en haleine ses interlocuteurs jusqu'au bout, qu'ils aient un point de repère. Un point de repère pour se souvenir du rôle de chacun. Mais aussi de celui qui domine ce groupe. Les choses se sont naturellement fait, après la rencontre avec ce mystérieux commanditaire. Ils avaient tous, plus ou moins, entendu la même rumeur, le même murmure. Jusqu'à poser leurs 12 pairs d'yeux sur cette personne. Sur son visage partiellement caché. Sur ce visage fatigué, touché par le temps. Ils l'avaient écouté – certains l'ayant menacé. Ils sont alors passés de douze à dix. Personne ne menace quelqu'un qui offre un contrat en or, avait dit cet homme. Et plus personne n'a menacé. Quelques commentaires se sont fait entendre, surtout de la part du commanditaire. On ne juge pas un livre à son aspect vieilli, enfin, un truc du genre... C'est ce qu'il avait dit en laissant entendre un rire enfantin.
Il a donné ensuite la cible. De dix, ils sont arrivés à neuf. Il a ensuite donné les petites règles spéciales. De neuf, ils sont tombés à sept. Et... c'est tout. Du moins pour les défections. Car il avait encore parlé. Il avait donné des promesses de richesse. Mais aussi leur avait dit que ce serait tout ou rien, qu'ils ne feraient pas das la dentelle pour protéger le trésor.

Après, il serait trop long de dire comment le premier s'est fait embrocher par le sabre d'un corsaire qui passait par là et qui avait pas envie que son employeur – la victime de ce larcin honteux – soit de mauvais poil. Nous passerons aussi la défaite humiliante du duo de comique absurde qui n'a pas su remarquer les pièges dans la caverne censée être un moyen intéressant de pénétrer dans l'enceinte du domaine de la cible. Malchance, erreur et mort – ou emprisonnement, pour les plus chanceux – voilà comment cette histoire a failli se terminer.

Bon, ce n'est pas tout à fait vrai. Si l'on pouvait répartir les protagonistes de ce cambriolage – tentative de cambriolage serait plus exacte –, les choses plus claires. Déjà, il y a les quatre premiers. Le duo de comique et le premier ayant connu la tendresse  du corsaire – c'est ainsi qu'il appelait son sabre – font partis de cette catégorie, avec un autre pécore dont nous parlerons guère – faute de temps. Et d'envie. Donc, nous appellerons cette catégorie les... Quand ça veut pas... ça veut pas! Ensuite il y en a deux. Alors ceux-là, ils étaient plutôt bien partis. Ils ont fait leur part. Ils ont réussi à corriger les erreurs du premier groupe. Il y avait l'expérience pour l'un des deux. Il connaissait l'endroit, disait-il – ce qui l'avait motivé à tenter ce coup était d'ailleurs qu'il imaginait très bien le trésor contenu dans ces murs. Mais l'expérience peut devenir véritable fardeau lorsqu'il ne reconnaît pas la servante qu'il a un jour tenter de glisser dans sa couche, mais qu'elle se souvenait très bien du lieu, de l'heure et de son état alcoolisé. L'autre ? C'est un coup de poker osé, audacieux, qui le poussa à rejoindre une cellule. Pourtant, son bluff aurait pu tenir... Il aurait pu tenir ! Ces deux-là, dans tous les cas, forment le duo « C'est pas mal ! Encore un effort !.

Mais quatre plus deux ne font pas sept.
En tout cas paraît-il.

Lachance est un nom donné à William Nightingal assez tôt dans sa carrière de malandrin. Ce qui l'a poussé à venir dans les îles des Caraïbes ? L'argent, la gloire de ce monde souterrain qu'est celui des voleurs, des puissants ? En partie. Oui. Surtout l'argent en fait ! Mais, aussi, le goût du risque. No pain, no gain. À triompher sans gloire, tout ça tout ça. Bref. Pourtant, Lachance n'est pas un simple flambeur, il reste un homme qui met la chance de son côté. C'est d'ailleurs ce qu'il a fait lorsqu'il a réussi à prendre la tête de ce groupe. Qu'il a pu voir comment pensaient les autres. Comment ils allaient s'embourber. Et comment, lui, réussirait.
Dés pipés ? Voyons ! Jamais de la vie ! Juste un petit coup de pouce. Après tout, n'est-il pas né avec un sixième sens plus développé ? Enfin, qu'importe... Ce donc à base de chorégraphie endiablée – littéralement –, d'un soupçon de manipulation et d'un degré de chance en plus qu'il est parvenu jusqu'au trésor...

Là où il se trouve actuellement.
Là où sa vie va prendre une toute autre direction.

« Et on arrête là ! » Quelques applaudissements viennent accompagner les mots, laissant Lachance dans une certaine incompréhension. William a toujours eu un certain sixième sens – cela a déjà été dit, certes, mais l'art de la répétition est parfois impossible à contourner –, mais cette fois, rien. Il n'a rien ressenti de plus que d'habitude. Pourtant, quelqu'un est bien là, une silhouette fort bien connue – du moins, suffisamment pour se rappeler qu'il l'a vu dans l'auberge d'une colonie anglaise avant d'être invité, par cette même personne, à rejoindre une équipe de malfrat à la recherche d'un fabuleux trésor. Le commanditaire est donc face à lui, ayant remplacé sa tenue de voyageur – miteuse, ça faisait plus mystérieux – pour quelques atours sobres mais d'excellentes factures. Une main le long de son corps, cette dernière semble maintenir un livre... un livre de compte selon toute vraisemblance. Le voleur recule d'un pas, tandis son que le vieillard approche, lui, son autre main bougeant légèrement, au rythme d'une musique que seul lui semble profiter. « … J'imagine que c'était... bidon ? » La question de Lachance arrête alors le commanditaire dans son mouvement. Ce dernier penche la tête sur le côté, presque choqué par cette interrogation. « Comment ?! Tu penses que je ferai ça ?! Je suis un homme de parole. En tout cas, je l'étais quand j'ai parlé à toi. Et aux autres. » L'anglais hausse un sourcil. Il ne connaissait pas une telle énergie à ce Machiavel – c'est ainsi qu'il s'était présenté –, bien qu'il ne pourrait pas certifier qu'il avait réussi à bien le sonder lors de leur première rencontre.

« Je suis vraiment déçu que tu penses cela de moi. Vraiment déçu. J'ai tout bien préparé : l'épreuve, le décor et même le contrat ! » Le contrat ?

« Le contrat ? » Oui, l'art de la répétition, tout ça. « Oui ! Le contrat. » Un silence. L'ancien penche un peu la tête sur le côté. « Ah non, pas ce genre de contrat ! Tu crois quand même pas que j'allais mettre ta tête sur une belle petite affiche avec un recherché mort ou vif, avec une prime, etc … ? » Un nouveau silence. Ce n'est pas comme si William avait réellement l'occasion de parler, son interlocuteur semblant aimer faire les questions ET les réponses à la fois. Il lâche alors son livre de compte. « … Mais quel père crois-tu que je suis ? » Et encore un silence. Accompagné d'une surprise totalement légitime. « Eh mince. Je voulais garder les confidences pour quand on sera assis à une table. Bon, veux-tu bien ramasser ça Fils ? » Il montre d'un mouvement de main le livre de compte, avant de soupirer lentement, faisant apparaître une canne – une forme de caducée – sur laquelle il s'appuie...

Quant à William... difficile pour lui de se positionner. Regardant le livre. Regardant l'homme. Regardant le caducée... S'il était aussi nonchalant que son interlocuteur, il est certain qu'il aurait levé son index, légèrement, en demandant d'une voix tranquille : c'est quoi ce bordel ? Machiavel lui aurait répondu – il en est certain, là aussi –, que le bordel est à quelques étages plus haut. Et un nouveau silence serait né. Plus gênant que les autres. Car oui, une maison close occupe bien deux étages de ce bâtiment. « Je comprends... rien... » Il pose la main à sa tête. « J'ai besoin d'un ver- »

Aussitôt dit – ou plutôt, quasiment – aussitôt fait. Du moins c'est ainsi que les choses se présente. Car n'a t-il pas terminé sa phrase qu'il se trouve à une table, dans un endroit plus intimiste que la salle du trésor. Une table, une odeur légèrement envoûtante – accompagnée des effluves d'un opium de grande qualité – et de l'alcool. Le goût de ce dernier colle d'ailleurs à la langue et au palais de l'anglais, dont l'esprit est maintenant embrumé. « Et c'est ainsi que j'ai connu ta mère. Il y avait quand même beaucoup d'alcool maintenant que j'y pense. Bon, il faut dire, elle gérait un commerce de ce type. Ceci expliquant aussi peut-être la dette que j'ai eu à payer après. C'était cher... »
Il parle. Il parle... Tandis que le blond essaye de remettre de l'ordre dans ses idées, parasitées par l'absinthe. Absinthe que son interlocuteur bois sans ménagement, semblant ne rien ressentir. Quand est-il arrivé dans cette... oui ça ressemble à une auberge ?  Ça n'a juste pas la même odeur. Auberge de qualité. On ne vomis pas là-dedans.

Pour le moment.

« En tout cas, je suis heureux que tu l'es pris ainsi. J'ai connu des histoires de famille bien plus houleuses. Je me rappelle quand ma demi-sœur et cousine est arrivée dans les bras de mon oncle et que... » Il s'arrête, alors que le visage de l'anglais se lève vers lui, autant interloqué qu'absent. Déjà, une demi-sœur & cousine, aux côtés de l'oncle... « Non Non, ce n'est pas sa fille. C'est juste le frère de son père. Qui est le mien aussi. Enfin, l'arbre généalogique, c'est pas le plus important. » Il cligne des yeux une ou deux fois. Il regarde autour de lui. Ils sont seuls. Même les serveurs ne sont plus là. D'ailleurs, Machiavel se lève, avançant doucement – en s'appuyant avec sa canne à la forme de caducée – vers le bar , passant derrière. « Qu'importe. Donc je disais... C'est très bien que l'on puisse parler de tout ça aussi simplement. » Il essaye de se souvenir. De toute l'explication. Il n'arrive déjà pas à comprendre comment il est arrivé ici. Tout ce qu'il se souvient c'est de ce besoin d'avoir un verre... de ses mots... et... de sentir son crâne frappé par une ivresse bien entamée. Lâchant son verre, il cache son visage entre ses doigts. C'est flou. Et il continue de sentir le regard de cet homme sur lui. Et plus il réfléchis, plus la confusion s'intensifie. Ce phénomène continue au moins pendant une dizaine de minutes, durant lesquelles le commanditaire – et victime de la tentative de cambriolage, si vous suivez bien – explique certains détails concernant la conquête du cœur – ou plutôt du corps – de la mère de l'anglais.

Mais, fort heureusement, les images, lentement, deviennent plus claires.
Le voile de l'alcool semble s'effacer, au fil de la voix de ce Machiavel.

Il se souvient avoir tenté de frapper l'homme. Il se souvient d'avoir violemment rencontré le sol. Il vient lentement passer sa main derrière son crâne. La douleur est forte lorsqu'il passe sa main contre.
Il se souvient d'avoir été relevé par l'homme, qui l'a aidé à marcher. De l'avoir écouté parler d'une proposition... Quelle proposition déjà … ? Il sert les dents, il a encore du mal à se rappeler... Des choses se cachent encore derrière le voile de l'ivresse. Il a beaucoup bu. Pas seulement en un jour. D'ailleurs, il a même du mal à se situer. Est-il vraiment... au même endroit ?

Puis. Elle revient sur la table. Sur la forme du contrat. Et de quelques mots, des mots qui continuent de résonner dans son esprit. « La richesse de ce monde... »

Et il entend un claquement de main satisfait. Machiavel pose son caducée sur la table. « C'est bien ça. Je suis heureux que tu sois revenu au sujet initial ! Oui. C'est bien ce que je t'ai proposé. Mais je ne suis pas un amoureux de l'héritage directement. » C'est comme ça qu'il a commencé à parler de sa mère. Oui, il s'en souvient. Oh la migraine va revenir. Il parle trop. Beaucoup trop.
Mais non. Tout semble devenir bien plus sombre, bien plus sérieux, maintenant que l'alcool se dissipe. Comment, d'ailleurs, fait-elle pour se dissiper aussi vite... ?

« J'ai l'habitude de faire ça. Je choisis certains de mes petits rejetons. J'en ai quelques uns. Moins que Père, certes – il faut dire que je suis plus attentif à ce que je laisse sur Terre –, mais j'en ai suffisamment pour avoir quelques corps de rechange... » Cette fois, William se lève. Encore vaseux, certes, mais la situation est bien trop délirante, bien trop glauque aussi, pour que cet alcool – qui commence à disparaître –, soit un véritable frein. « De quoi... ? Vous êtes fou l'ancêtre. »

« Un peu de respect. Je ne suis pas aussi vieux que certains. Je suis le plus jeune en plus. Mais qu'est-ce dont l'âge... ? » Il continue de parler, philosophant de son côté sur l'âge, alors que William recule de quelques pas, faisant tomber la chaise. De nouvelles images viennent traverser son esprit. Des images qui ne viennent pas de son esprit. Un monde vaste, que des yeux observent tout en volant à travers ce même monde. Des âmes qu'une silhouette guide jusqu'aux sanctuaires sans vie. Des colères d'un foudroyant personnage... qu'il calme, à sa façon. Tout ça... Tout ça... Comment cela peut être dans sa tête ?! Il commence à tenir cette dernière entre ses mains. Impossible à suivre. Un mouvement violent et il retourne la table.
Il veut partir. Loin d'ici. Loin de ce vieillard qui maintenant le fixe. Il veut partir. Loin d'ici. Loin de ces images qui continuent de se bousculer dans sa tête. Un hurlement traverse alors ses lèvres. Il n'a jamais poussé un tel hurlement. C'est ignoble. C'est horrible. Et il se souvient, alors, clairement, de ce que cachait le voile d'alcool.

Il revoit sa main signer le document.
Il revoit l'encre s'élever, et s'enfoncer dans ses veines.
Et c'est surtout pour oublier cette douleur qu'il avait commencé à boire. Ainsi que la peur... Qu'avait-il signé ?

Le corps face à lui s'effondre, en douceur. Et à cet instant, il sent ses genoux contre le sol... Des genoux fatigués, épuisés par le temps... Il lève les yeux. Vers Lachance, qui approche alors que le contrat. « Bonsoir bonsoir Mach-... » Il s'arrête, passe sa main sur sa gorge. « Oh, nouvelle voix ! Je ne m'habituerai jamais ! » L'homme à l'accent anglais commence à faire quelques vocalises, semblant tester les graves et les aiguës de cette apparence. De cette apparence qui n'est pas la sienne.
De cette apparence qui appartient à celui qui est maintenant à genoux. Dans un corps qui n'est pas le sien. « Qu'importe. Si tu as lu le contrat, tu ne devrais pas être surpris. Quoi ? Si ?Je ne comprends pas. J'ai bien dis que je donnais tout ce que je possédais à Lachance... » Son rythme de parole est rapide, autant que l'est sa réflexion. « AH ! Bien entendu, tu n'as pas lu les petites lignes. Car je te donne tout. Mon esprit aussi. Et ce corps. Mais comme l'esprit d'un dieu est naturellement supérieur, je prends le corps jeune, tu gagne le petit vieux. Désolé pour les petits rhumatismes... Et les problèmes de cœur. Oh et les problèmes de foie. Oh et... euh... pour tout ? Bon. C'est pas tout ça, j'ai un empire commercial à diriger, des cambriolages à prévoir, des messages à donner... Des personnes à emmerder... »

Le cœur bat vite. Le cœur bat trop vite pour sa propre résistante. Tout un monde qui s'écrase sur lui, une réalité qu'il ne comprend pas... Lui offrant comme dernière image son corps, qui énumère tant de choses à faire. Une certaine colère montre. Se rappelant alors de ses propres mots... L'histoire est écrite par les vainqueurs.

« Ah mon Zeus. Qu'il est dur d'être Hermès. »

MES INFOS +

Décrire la personnalité d'une déité n'est pas considérée comme une gymnastique mentale extrêmement aisée, surtout lorsque cette psyché appartient au Prince des Voleurs. Il serait même judicieux de dire que, lorsque cela concerne cet exercice, les divins se mettent assez facilement d'accord sur un point : il est préférable de détourner la conversation plutôt de tenter de comprendre cet énième bâtard de Zeus. Oh, bien entendu, cette réalité existe aussi chez les mortels : les différentes incarnations du Douzième Olympien ne sont pas les plus simples à appréhender et les humains font rapidement le même constats que les dieux, ce dernier se traduisant par une phrase des plus simples... Vous savez, c'est quand même un drôle d'oiseau, cet Hermès.

Et ce n'est pas son paternel – un homme fort bien placé dans le cosmos, paraît-il – qui contredira cette vérité, ce fait. Après tout, n'est-ce pas le Tout-Puissant Zeus qui a rit aux facéties d'un jeune Hermès, cet enfant qui n'est pas né enfant, dont la langue était déjà à l'époque, plus acerbe et habile que celle des plus sages ? N'est-ce pas le Père des Nuées qui a vu les Onze Divins de son Conseil – lui inclus, bien entendu – devenir Douze par la seule parole de ce garnement ? S'il ne possède pas la Sagesse de Sa divine sœur, il n'en reste pas moins que sa faconde en fait le maître de l'illusion, une compétence qu'il n'hésite pas à utiliser.
Qu'ils soient dieux, qu'ils soient mortels, ils sont tous de potentielles victimes de cette capacité naturelle. Hermès – ou Lachance, ou encore Machiavel, ou tout autre nom que le divin pourrait choisir – aime dire que cette éloquence vient avec le poste. Il serait même juste de dire qu'il est le seul dieu capable et naturellement en droit – malgré ce que certains ou certaines pourraient faire ! – d'ergoter pendant des heures pour, finalement, ne rien dire.

Une façon de faire qui rappelle toujours à ses interlocuteurs, mortels ou divins, là encore, sa position. Celle d'un habile négociateur. D'un habile orateur. Et, dans le cadre des mortels qui côtoient ses incarnations, celle d'un supérieur hiérarchique qu'il est préférable – selon les rumeurs du moins – de ne pas froisser.

Pourtant, comment imaginer qu'une telle pipelette – car quand il s'y met, il faut espérer que sa langue se détache de son corps pour l'arrêter – possède le privilège d'être le porteur des secrets de l'Olympe ? Car en tant que Messager des Dieux, il est celui qui entend les choses, qui reconnaît la valeur de ces dernières, leur importance. Comment une langue aussi habile est-elle connue et reconnue pour sa loyauté ? Telle est l'essence même de l'entité divine, ainsi que son arme la plus efficace : la Contradiction. Et, possiblement, son extrême prudence, qu'il cache derrière ce masque de simple bouffon de l'Olympe. Le meilleur exemple de cette Contradiction n'est pas cette capacité à assimiler et à conserver les secrets – qui finalement provient d'un échange mutuel de service, le plus souvent –, ou encore cette loyauté, mais bien l'un des titres du Donneur de Chance.

Le plus humain des dieux.

Comment un dieu peut-il être « humain », qu'importe ce que cela signifie ? Comment pourrait-il être humain, lorsqu'il observe ces derniers tel un enfant observant, admirant, les insectes faire leur petite vie ? Comment pourrait-il être humain, alors qu'il attend leurs choix avec impatience, intervenant parfois, à l'image d'une petite pirouette scénaristique, dans la légende d'un Roi, d'un Héros, d'une Guerre ou d'un Miracle ? Comment un dieu peut-il être humain ?
Et pourtant. Pourtant, il n'est pas si loin d'être le plus humain des dieux. Perdus ? L'art de la nuance est subtile. La vérité derrière ces interrogations est que Hermès est le dieu qui a le mieux compris les humains et qui les aime, pour ce qu'ils sont, naturellement. Oui, il comprend mieux cette humanité que ceux qui se battent pour elle – ou que ceux qui se battent contre elle. Il a compris leur attente. Un dieu comme eux, qui n'irait pas les juger, qui n'irait pas leur donner une morale impossible à atteindre. Non. Juste être comme eux. Mais qu'importe leur demande – et qu'importe le jeu d'acteur du Donneur de Chance...

Un dieu restera à jamais un dieu.
Jusqu'à ce que le Destin n'en décide autrement.

Mais lorsque cette chose arrivera – soyons honnête, le monde risque de s'effriter bien avant que cette idée n'émerge dans le vaste esprit du Temps Originel –, lorsque les dieux perdront ce qui leur offre cette divinité... alors, Celui qui comprend les humains aura sûrement un nouvel avantage sur ses pairs. Celui d'avoir su s'installer bien avant dans ce monde. Celui de s'être mêlé à eux, facilement. Sans honte. Sans hésitation. Même si l'immortel n'a jamais aimé comme un mortel, même s'il n'a jamais vu les choses comme un mortel... au moins aura t-il déjà observé ce qu'est vivre avec les mortels, au milieu de leurs pensées.

Mais encore faudrait-il que la Destiné en arrive à une telle extrémité. Et par cette seule phrase apparaît une nouvelle Contradiction, qui vient opposer la qualité de divin – et donc la cosmogonie – à la personnalité du Prince des Voleurs. Un trait de caractère qu'il ne cache pas, faisant de celui-ci l'un de ses atouts : il est le Donneur de Chance. Une passion pour le jeu, pour le concept même du hasard, accompagne ses pensées. C'est cette Contradiction qui anime la Chance qu'offre le divin aux Humains. La possibilité de renverser, un cours instant, la table. Souvent gagnant, parfois perdant, il est difficile de savoir si la triche est une arme du Héraut de Zeus, bien que l'être aime préciser qu'il ne serait pas un adepte des jeux s'il ne suivait pas les règles. Le problème vient que les règles appartiennent à celui qui les dicte... et qu'en tant que Donneur de Chance, il est, finalement, le tisseur de ces lois du jeu, son esprit fécond les adaptant selon les situations, sans pour autant sortir du bon sentier.

Très peu mauvais perdant, il s'avère que son goût pour les jeux de dupe – ses préférés, selon ses propres mots – poussent toujours le divin à considérer une défaite comme une simple étape d'une partie. La victoire – qu'importe son apparence – arrivera bien à un moment donné. Du moins... si le joueur en face est sensible à cette réalité.
Cartes, dés, paris difficiles, le Psychopompe semble incapable de s'arrêter, son âme trouvant un réel plaisir à tirer sur le fil du hasard, transformant ainsi l'Éloquent en véritable stratège, qui affine, siècles après siècles, ses jeux, les adaptant aux sociétés humaines, bien plus sensibles à ces pensées. Pourtant, sans le savoir, les dieux ont, parfois, profité de ce sens du défi, que ce soit Zeus et ses nombreuses infidélités ou certains personnages mythologiques.

Dieu des Marchands, il protège pourtant aussi les Voleurs.
Dieu des Voyageurs, il est le premier dieu à mettre ces derniers sur de mauvais sentiers.
Donneur de Chance aussi Fourbe qu'Éloquent.
Toujours en quête de plaisirs, de rencontres, il n'en reste pas moins un esprit particulièrement libre.
Divin qui, finalement, semble préférer se perdre dans le monde humain plutôt que des les couloirs des palais divins.

Hermès est la Contradiction. Bienveillant avec les Humains comme avec sa Famille, il semble en fait être simplement à la fois acteur et observateur d'une longue pièce, qui n'écoute qu'un seul langage : celui de l'intérêt. L'intérêt de l'histoire. Celui du plaisir, qu'importe sa provenance. Bavard, mais empli de nombreux secrets. Car c'est le rôle qu'on lui a donné : celui d'être la voix de l'Olympe.
Et dans l'obscurité née de cette lumière, il a avancé, il a joué. Et il continue. Peut-être, tout simplement, dans l'objectif de suivre le véritable rôle que Zeus lui a offert.

Le Tourment des Hommes Mortels et des Dieux Immortels.

En somme. Un Divin Emmerdeur !