[VIIe Tournoi]8eme de Finale: Alessio du Griffon - Lenalee de la Vouivre :.

Je te souhaite bonne chance ainsi qu'un bon combat.

En faveur de qui le vent va-t-il tourner ?

S'opposer à lui était synonyme de mort. Le Guerrier Divin en avait fait les frais. Sans avoir pu porter ne serait-ce qu'une seule attaque, il était devenu le prisonnier permanent de ce piège macabre. Vaille que vaille, ses restes avaient alors été évacués de l'arène pour faire place aux prochains combats. Ce n'était sans doute pas le seul à avoir connu ce sort tragique et Alessio n'en était que plus discret. C'est tout à son honneur, car ne pas se faire remarquer voulait aussi dire bénéficier d'un plus ample effet de surprise. Ses prochains adversaires n'en seraient que mieux traités. Moins ils en sauraient et mieux ils se porteraient... Tant qu'il ne serait pas passé à l'offensive, tout du moins. Toutefois, ce mode de procédure ne pourrait s'appliquer cette fois. Avant même le début du combat, son stratagème était éventé. À l'annonce du nom de son adversaire, le Juge avait réprimé un sourire teinté d'ironie. Les organisateurs ne manqueraient pas d'humour. Car on ne pourrait lui faire croire que c'était le hasard qui avait décidé d'une telle confrontation.

Il n'était pas sans savoir que de nombreux Spectres avaient pris part à la compétition, mais s'il y avait bien un nom qu'il ne s'attendait pas à voir ressortir, c'était celui-ci. Lenalee était femme à préférer les solutions pacifiques et à se montrer conciliantes en toutes circonstances, sans doute trop pour se fondre dans la masse comme il le faudrait. Mais c'était aussi pour cette raison qu'il lui portait autant d'intérêt. Pourtant, elle était là et c'était à lui qu'incombait la tâche de l'éliminer de ce championnat. Alors que les vivats des spectateurs emplissaient le colisée d'un vacarme assourdissant, il se demanda comment la Vouivre appréhendait cette rencontre. Il se pouvait qu'elle en soit heureuse, soulagée d'enfin pouvoir lui rendre la monnaie de sa pièce pour tous ses sévices. Ou encore qu'elle soit transie de peur à l'idée de faire face à son supérieur, à son sens l'un des hommes les plus dangereux qu'il lui ait été donné de connaître, et redoute de subir les mêmes tortures que ses nombreuses victimes. Enfin, solution la moins probable, l'hypothèse selon laquelle elle en serait honorée et aborderait ce duel sereinement... Le Griffon en doutait sincèrement.

Tant était-il que quand sonna l'heure prévue, il était déjà prêt au combat. Son obscure silhouette se dressait au milieu du terrain dans toute sa noblesse, son immobilisme n'étant nuancé que par les arabesques que dessinait la fumée de sa cigarette. Néanmoins, contre toute attente, il éteignit cette dernière quand il la vit faire son entrée. Depuis quand se souciait-il de ce que les autres pouvaient penser de lui au point de ne pas les incommoder par ses frasques ? Difficile de se dire que cela ne cachait pas quelque chose. Mais la demoiselle n'eut pas l'occasion de s'interroger sur ses motivations que déjà le Griffon fondait sur elle. Non pas pour l'attaquer, cependant, mais pour se saisir de sa main et y déposer un charmant baiser comme le lui dictaient les règles de bienséance. Ses doigts gantés caressèrent ceux de Lenalee alors qu'il se détachait d'elle prestement. Un sourire énigmatique se peignit sur son visage alors qu'il prenait ses distances, le coup d'envoi ayant été donné. Ce qui se cachait derrière se masque de galanterie ? Nul n'aurait su le dire.

Puissions-nous leur offrir un joli spectacle...

Sans plus attendre, le romain esquissa un hochement de poignets. Les fils qui s'étaient dissimulés de part et d'autre du stade n'en demandèrent pas plus pour entrer en scène. Quel que soit le moment où il les y avait déposé, l'étau qu'ils infligeraient très bientôt à Lenalee leur conférerait la même dangerosité. Dans le même élan, cinq d'entre eux fusèrent à toute allure vers la clavicule de la jeune femme pour la transpercer proprement, à moins qu'elle ne réussisse à les esquiver. Du domaine de l'impossible compte tenu de sa position, mais il ne faut jurer de rien... Mais pouvait-on vraiment dire qu'il s'agissait de l'une de ses fourberies ? Ses câbles étant invisibles tant qu'il en décidait ainsi, on ne pouvait affirmer avec certitude qu'il lui avait tendu à piège à moins qu'il y consente. Or, le fait qu'il n'ait pas changé d'expression tendait à démontrer que ce n'était nullement un coup en traître, sans quoi l'on pouvait supposer que l'exultation aurait transparu sur ses traits. Il n'en était rien. Et alors qu'il aurait broyé n'importe quel autre adversaire dans le carcan de son Cosmic Marionetion, elle n'eut pas l'occasion d'endurer ces atrocités. Le Juge ne fit que s'approcher d'elle et lui soulever le menton de manière à la regarder droit dans les yeux. Sa mine sincèrement navrée portait à confusion.

J'espère ne pas t'avoir fait trop mal. Si c'est le cas, j'en suis navré, crois bien que j'aurais aimé m'en dispenser. Néanmoins, il semblerait que nous n'ayons pas le choix, aussi je te demande de pardonner mon geste ainsi que ceux à venir, déclara-t-il sur un ton parfaitement neutre.

Citation :

¤ PV : 175
¤ CS : 175 - 30 = 145

¤ Cosmic Marionetion : 30 CS pour 30.

¤ Coups Physiques reçus : 5
¤ Coups Physiques parés : 0
¤ Coups Physiques donnés : 5

Cosmic Marionetion:

La tempête qui s'était déchaînée prit fin au contact du déplacement d'air qu'il avait généré. Lenalee semblait oublier un peu vite qu'ils utilisaient les mêmes armes, et que pour ce genre de tours il pouvait se montrer beaucoup plus performant. À l'abri derrière son bouclier atmosphérique, c'est à peine s'il fut secoué par l'attaque de la Vouivre – ou ce qu'il en restait. Toujours aussi porté sur la mise en scène, le Juge esquissa une parodie de révérence afin de souligner sa prestation. Pour peu qu'on se soucie plus que de raison du sens caché de ses réactions, comme c'était sans doute le cas de la demoiselle, on pouvait y voir une provocation. Moqueuse, certes, mais n'ayant pour but que de lui faire utiliser son plein potentiel. Sourire aux lèvres, comme à son habitude, le Griffon n'entendait toutefois pas rester passif. Elle avait contre-attaqué, à son tour de surenchérir. Et pour le connaître de longue date, elle devait au moins savoir qu'il n'était pas en reste quand il fallait faire grimper la mise.

Fût-ce au beau milieu d'un combat. Il fondit sur elle tel une ombre, en pleine possession de ses moyens malgré la vigueur avec laquelle elle l'avait attaqué. La joute n'était peut-être pas son fort, mais sa résistance était digne d'éloges. À quoi bon être un habile manipulateur si c'était pour succomber au premier coup reçu ? À défaut de posséder une force de frappe plus élevée que la normale, il la compensait largement par d'autres moyens. Et n'en déplaise à sa subalterne, elle allait les mémoriser non pas avec sa tête, mais avec son corps. Tandis qu'il se rapprochait d'elle à la vitesse de l'éclair, sa paume fusa vers l'abdomen de la jeune femme avant que le tranchant de sa main ne percute ses côtes à deux reprises – une fois de chaque côté. Ensuite, ce fut au tour de son pied de décoller du sol pour l'atteindre à la hanche d'un coup rotatif – du moins le pensait-il.

Pour terminer, il approcha son visage du sien, si près qu'elle put sentir son souffle sur sa peau et sonder la pureté limpide de ses pupilles bleutées. Semblables au lit d'un lac profond, mais clair comme à l'aube du premier jour. En total contraste avec son étonnante personnalité, mais d'une couleur troublante. Ses doigts gantés effleurèrent la nuque de sa « protégée » et un fil s'en dégagea pour venir l'enserrer avant qu'il ne la projette vers le sol d'une impulsion de cosmos. Mais même là, difficile de croire qu'il avait fait de son mieux. Tout portait à croire qu'il retenait ses coups pour ne pas la blesser plus que le strict nécessaire. Une attitude galante, mais surprenante de sa part. Aurait-il tout simplement décidé de montrer à la belle une autre facette de sa personnalité ? Ou n'était-ce qu'un stratagème de plus à son actif ? Cela, elle ne pourrait le savoir que d'une seule manière. En continuant ce combat où, lentement mais sûrement, le marionnettiste prenait l'avantage.

Force est de reconnaître que tu as raison. Ce n'est qu'un mauvais moment à passer, après tout.

Ses doigts tendus passèrent non loin du visage de Lenalee, sans doute assez près que pour lui faire fermer les yeux par réflexe. Seulement, si c'était le cas, elle serait dans un autre monde quand elle les rouvrirait. Et ce n'était pas un monde meilleur, loin s'en faut. C'était le royaume des cauchemars et des peurs, la maison des doutes et des ombres changeantes le labyrinthe des pensées, obscur et sans fin. Et dans ce labyrinthe bâti à l'image de celui de feu Minos en son temps errerait l'âme éthérée de sa jeune amie, prisonnière de son inconscient. Son propre esprit était une prison où elle demeurerait pour l'éternité, à moins de pouvoir briser ce triste sort à la force de sa cosmo-énergie. Rares étaient ceux à y être arrivés, et Alessio était curieux de voir si elle s'en sortirait aussi bien que ces miraculés. Il fondait en elle de nombreux espoirs et espérait sincèrement qu'elle ne le déçoive pas, mais le sang qui coulait dans ses veines était un gage de qualité. Il n'y avait probablement pas de souci à se faire.

Citation :

¤ PV : 175 - 15 = 160
¤ CS : 145 - 30 - 40 + 10 = 85

Dégâts reçus : 45
30 CS pour parer 30 de dégâts.
Dégâts subis : 15

¤ Gate of Treason : 40 CS pour 40 de dégâts.
→ Si plein fouet, drain de 5 CS pendant deux tours.

¤ Coups Physiques reçus : 5
¤ Coups Physiques parés : 0
¤ Coups Physiques donnés : 5

Gate of Treason:

Ah oui ? Je serais curieux de voir ça.

Un sourire narquois se peignit sur ses lèvres tandis qu'il jetait sa cigarette par-dessus son épaule. En raison de la vivacité de mouvements, elle s'était éteinte et il ne pouvait prendre le temps de la rallumer. Quelle importance, de toute façon, puisqu'il était capable d'en produire à volonté. Il devait admettre l'avoir sous-estimée. Sous ses airs de gentille petite fille pouvait parfois se cacher une bête féroce. Néanmoins, elle avait le défaut d'être d'une sensibilité accablante. Aussi avait-il toutes les raisons de penser qu'elle ne se battrait pas au mieux de ses capacités sans une excellente motivation. Or, il n'y en avait aucune dans ce tournoi hormis la victoire. Et en dehors de la fierté qu'elle pouvait en retirer, c'était un bien maigre prétexte pour quelqu'un d'aussi sentimental. Alessio, en revanche, n'avait nul besoin d'une justification pour montrer toute l'étendue de son savoir-faire. Lenalee en connaissait déjà la majeure partie, mais c'était la première fois qu'elle en faisait l'objet. Et il n'avait qu'un souhait, qu'elle en vienne à souhaiter que ce soit la dernière.

Sa volonté de ne pas la blesser était sincère, ne fût-ce que pour ne pas entacher leur relation plus qu'elle ne l'était déjà au naturel. Mais s'il pouvait profiter de ce tournoi pour lui apprendre à manifester le respect qui lui est dû en toute occasion, il n'allait pas s'en priver. Bien évidemment, elle était sans doute celle qui se donnait le plus de mal pour y parvenir en dépit de son aversion. En comparaison, Kyrian n'essayait même pas de minimiser la sienne. Seulement, un rappel à l'ordre ne pouvait pas faire de mal, plus encore s'il était implicite. N'était-ce pas son domaine de prédilection, après tout ? La flèche de feu qui lui était destinée fut saisie au vol par sa propre main. Les flammes eurent tôt fait de faire fondre son gant et de brûler sa chair mais son sourire ne disparut pas pour autant. En dépit des nombreux coups portés par sa subalterne, le Griffon était toujours aussi tenace. À croire que rien ne pouvait amoindrir sa présence oppressante. Comme si son existence était inaltérable, hors d'atteinte du commun des mortels – et des immortels, d'après l'inefficacité de la Vouivre.

Le trait ardent se brisa entre ses doigts, et la gerbe d'étincelles résultant de sa destruction fut balayée d'une bourrasque. User d'un élément qui n'était pas le sien ne la sauverait pas. Elle ferait mieux de se reposer sur ses acquis plutôt que d'aller d'un pas hésitant vers un pouvoir que rien n'affiliait au sien. Un cadeau de son frère, sans doute, songea le Juge des Enfers. Il n'était pas insensible à la douleur, mais la voir sortir de ses gonds le mettait de bonne humeur. Non pas cet enthousiasme qu'on peut distinguer chez les gens du commun, mais une jouissance malsaine et inquiétante comme seul lui peut en laisser paraître. De plus, son surplis amortissait excessivement bien les chocs, réduisant les dégâts subis au strict minimum. Bien sûr, la jeune soeur du Garuda ne sut jamais rien de cela tant sa mine confiante ne changea pas d'un iota. Quand bien même ses menaces auraient été plus convaincantes, Alessio n'y aurait pas cru.

Comment aurait-elle pu être crédible, elle si fragile, elle si sensible, alors qu'elle tentait d'intimider un fou dans son genre ? C'était impensable. Alors que le Griffon soufflait sur sa paume pour en chasser les odeurs de chair brûlée, il fut sur elle d'un unique battement d'ailes. Qu'elle le veuille ou non, il était bien obligé de s'approcher d'elle, ne lui en déplaise. Une demi-douzaine de fils furent tendus pour limiter sa liberté de mouvements et la piéger dans sa toile de câbles tranchants. Passer à travers aurait été une mauvaise idée, à moins de vouloir finir découpée en morceau. Il eut été déplorable que ce joli minois finisse séparé du reste du corps, si bien que toute sa cruauté n'aurait pas suffi à l'en persuader. Tant qu'elle serait prise dans ses filets, l'étoile céleste serait inoffensive. Aussi avait-il tout le loisir de poursuivre la conversation sans qu'une riposte inopinée ne lui coupe la parole. Paisiblement, il prit Lenalee dans ses bras, l'un ceignant sa taille tandis que le second allait effleurer son menton. Il ne s'était pas approché, il avait fait plus que cela. Elle n'avait donc pas besoin de tenir parole.

Je ne te veux aucun mal, sais-tu ? Certes, le moment est mal choisi pour te dire cela, mais que tu te défies de moi me blesse énormément. Tu devrais pourtant savoir que je suis digne de confiance. Ne suis-je pas ton supérieur ? Je n'ai rien à gagner à ce que tu sois blessée ou même pire. C'est même tout le contraire. Je ne demande qu'à prendre soin de toi, mais je ne le peux tant que tu t'y refuses. Et puis, tu n'as aucune raison d'avoir peur. À ce jour, je ne me suis rendu coupable d'aucun crime. On ne peut pas en dire autant de ton propre frère... Mais j'en ai déjà trop dit, je suppose.

Son ton était resté neutre tout au long de ce discours conciliateur, mais intérieurement, il exultait. Il venait de distiller dans l'esprit de Lenalee une goutte de ténèbres qui s'empresserait d'y semer la confusion. Même si sa parole n'avait aucune valeur à ses yeux, la jeune femme ne pourrait ignorer ce qu'il venait de lui dire. Pourvu qu'elle soit suffisamment troublée, il n'aurait plus qu'à lui porter le coup de grâce de quelques paroles de réconfort. Même au sein de ce tournoi supposé n'être qu'un divertissement, le Juge trouvait le moyen de tenter de la rallier à sa cause. Ce ne serait pas chose aisée compte tenu des excellentes relations qu'elle entretenait avec son ainé, mais Alessio ne désespérait pas d'un jour y parvenir. Et tandis qu'il la libérait de son étreinte éphémère, laquelle n'avait pour but au final que de lui murmurer ces douces paroles à l'oreille le vent se leva avec un emportement qu'il était seul à lui connaître. L'instant d'après, une tornade se déchaînait dans l'arène. Dans l'oeil du cyclone, il estima que Lenalee n'avait que peu de chances de pouvoir s'en sortir, mais demeura néanmoins sur ses gardes bien qu'il prenne la liberté d'allumer une nouvelle cigarette. Les meilleurs plaisirs sont souvent les plus petits...

Citation :

¤ PV : 160 - 35 = 125
¤ CS : 85 - 60 + 10 = 35

Dégâts reçus : 35

¤ Gigantic Feathers Flap : 60 CP pour 30 dégâts et perte de 40 CS.
→ Perte de 10 CS. Possibilité d'infliger des dégâts sur la CS au lieu des PV (maximum de 40 CS).

¤ Coups Physiques reçus : 5
¤ Coups Physiques parés : 0
¤ Coups Physiques donnés : 5

Gigantic Feathers Flap:

Citation :

Désolé pour l'énorme retard, ça ne devrait plus se reproduire.

La corde sensible venait de vibrer. L'équilibre intérieur de Lenalee avait été bousculé par ses paroles et Alessio se réjouit de la voir perdre contenance. Son sang-froid n'était plus qu'un souvenir. Il n'en faudrait pas beaucoup plus pour la mener où bon lui semble et en faire le plus joli pantin de sa collection. Lenalee était dotée de qualités innombrables, lui-même était forcé de l'avouer. Cependant, elle était également pourvue d'un défaut que tous ses aspects positifs ne suffiraient pas à compenser. Elle était trop sensible, à plus forte raison pour faire partie de l'armée d'Hadès. Dès lors, la perturber était chose facile : il suffisait de savoir où frapper. Inutile de dire que le Juge était passé maître dans l'art subtil de viser là où ça fait mal, et elle venait d'en faire les frais.

Maintenant qu'il avait ouvert une brèche dans sa défense, il n'avait plus qu'à l'exploiter pour arriver à ses fins. Le combat n'était qu'une préoccupation secondaire à ses yeux : il préférait de très loin « jouer » avec Lenalee plutôt que se contenter de la mettre hors d'état de nuire pour accéder à la prochaine phase. Les bourrasques de la Vouivre l'avaient décoiffé et il plaqua ses cheveux en arrière pour n'avoir pas à s'en soucier par après. La rage dardait dans les yeux de Lenalee, habituellement si tendres, si purs. Leur éclat s'était terni de celui de la colère, et son courroux avait durci ses traits si doux d'ordinaire. Réjoui de la voir si belle dans la fureur, Alessio se laissa malmener sans l'ombre d'une riposte, ne demandant qu'à la voir relâcher ce trop-plein de frustration qui l'avait envahie en une fraction de seconde.

Elle s'était métamorphosée, et il en était le seul responsable. Cette pensée lui arracha un sourire en coin qu'il s'empressa de balayer tandis qu'elle se préparait à repartir à l'assaut. Serein, il la regarda s'élever dans les airs sans sourciller, conscient de la violence de ce qu'elle était en train de lui préparer. Comment aurait-elle pu ne pas être à bout de nerfs après avoir entendu tant de vitupérations ? Et pourtant, elle serait bien forcé d'y croire. Le marionnettiste suivit sa course vers les étoiles d'un oeil attentif, et attendit patiemment qu'elle soit à nouveau à portée de voix pour continuer son virulent discours. Si le toux était aussi mielleux qu'à chacune de ses prises de paroles, le contenu de son soliloque érodait ses convictions, et c'était sans doute le plus agaçant au bout du compte.

Pauvre petit oiseau, trop tôt tombé du nid... Crois-tu vraiment que je sois le seul à avoir quelque chose à me reprocher ? Au contraire, je suis un modèle de vertu à côté de ton cher frère. Je sais de source sûre qu'il a autrefois conspiré avec Myst d'Alpha à des fins que je qualifierais de peu honorable. Et ce sans parler de l'affection d'une intensité peu commune qu'il nourrit envers l'actuel Chevalier d'Or du Lion, mais je crois savoir que tu n'es toi-même pas un exemple de ce côté... Me trompe-je ?

À mesure que ses paroles pénétraient le conduit auditif de Lenalee, elles prenaient une toute autre dimension. Chaque syllabe était comme un coup de poignard. Un couteau en plein coeur, d'autant plus effilé qu'il ne s'agissait que de la plus stricte vérité. Et cela, en dépit de toute l'animosité qu'elle pouvait avoir pour son supérieur, la jeune femme ne pourrait en douter car cela ne lui serait pas permis. À la force de son cosmos, le Griffon immisça dans son esprit les paroles de Belhys, qui lui avait autrefois fait cette confidence pour lui permettre de jouer ses pions dans les meilleures conditions. Ensuite, ce fut au tour de l'aveu d'Irène de retentir dans les méandres de ses pensées. Elle n'était pas même en droit de croire à un mensonge, à un produit de son imagination : chaque phrase, chaque mot était nanti de l'accent de la vérité.

Alessio n'avait pas accès à ces dernières, et il le regrettait amèrement : après y avoir semé tant de confusion, il aurait été ravi de contempler le résultat de ses efforts. Néanmoins, s'il ne pouvait y assister directement, l'observer devrait lui en donner une idée assez précise. Il n'avait pas menti, et sans doute était-ce le plus douloureux dans toute cette histoire. L'ainé de Lenalee n'était pas le sauveur qu'il prétendait être, et perdrait de son éclat à ses yeux qu'elle le veuille ou non. Quant à connaître ses raisons, lui-même n'en avait pas idée, mais la quête du pouvoir était rarement motivée par de nobles ambitions. Ainsi, le simple fait d'avoir vent de ces secrets mal gardés dévoilerait son égoïsme à sa soeur, dont l'état de choc serait sans doute on ne peut plus délectable une fois qu'elle aurait assimilé chacune de ses paroles. Quand elle le percuta de plein fouet, sa tirade reprit de plus belle et faisait cette fois appel à la fibre sentimentale. Tout Spectre qu'elle soit, elle n'en était pas moins une fragile jeune fille, et son coeur n'en était que plus influençable.

Tu me trouves peut-être cruel, mais je ne me souviens pas t'avoir menti. J'ai toujours été loyal à sa majesté Hadès, et n'ai jamais rien fait qui puisse nuire à sa suprématie. Ton bien cher frère ne peut en dire autant, j'en ai bien peur. Tu as raison, il n'est pas comme moi : il est pire que moi. Peut-être n'est-ce pas la seule chose sur laquelle il t'a caché la vérité, qui sait ? Peut-être même n'es-tu que son instrument sans t'en rendre compte, auquel cas il se peut qu'il se débarrasse de toi dès qu'il n'aura plus besoin de toi. Tu es sans doute mieux placée que moi pour savoir ce qu'il en est. Sache néanmoins que si par malheur il devait te tourner le dos, je t'accueillerai à bras ouvert. Je n'abandonne pas ceux qui me sont fidèles... Et tu l'es plus que quiconque.

Contraint de reculer sous la violence du choc pour ne pas être grièvement blessé, Alessio n'en était pas moins tout sourire - et cela, elle ne pouvait le voir au milieu de cette déferlante de cosmos. Elle était d'une rare agressivité, et ce n'était aucunement en adéquation avec son caractère. Il avait réussi à distiller une goutte de ténèbres au fond de son âme et n'avait à présent plus qu'à veiller à ce qu'elle s'auto-détruise jusqu'à n'être plus que l'ombre d'elle-même. Il ne souhaitait pas lui faire de mal, mais c'était une étape indispensable pour qu'elle se range de son côté au détriment de ce cher Garuda. À la guerre comme en amour, tous les coups sont permis, et celle qui couvait à chaque entrevue des Juges des Enfers prendrait tout son sens avec cette hypothétique trahison. C'était bien sûr trop s'avancer que de penser que ces révélations lui feraient oublier son frère sans plus attendre, mais il avait bon espoir de voir ses efforts de persuasion porter ses fruits. Cela prendrait le temps qu'il faudrait, voilà tout.

Quand enfin l'afflux d'énergie parut faiblir, ce fut le moment d'agir. Sans ciller, il brisa sa garde pour lui porter un direct à l'estomac. Il était regrettable de devoir rendre les coups, mais s'il était mis à terre avant d'avoir pu lui tourner la tête, se montrer si convaincant n'aurait servi à rien. Or, Alessio n'aimait guère gaspiller ses talents, d'autant plus qu'ils tendaient à perdre en efficacité quand ils étaient trop souvent mis à profit. Ensuite, ce fut au tour du tranchant de sa main d'atterrir dans les côtes de la demoiselle, qu'il souleva ensuite d'une seule main comme si elle n'était qu'une plume portée par le vent. Vision poétique mais pourtant rigoureusement exacte. Ceci fait, il frappa de la paume au plexus solaire pour couper le peu de souffle qu'il devait lui rester et acheva son enchaînement d'un coup à la gorge, pas assez brutal pour lui laisser des séquelles mais assez pour ne plus l'entendre pendant une petite minute. Plus qu'il n'en fallait pour lui laisser le temps de réfléchir sans pouvoir répliquer : il tenait à ce qu'elle assimile chacune des précieuses données qu'il venait de lui confier et se forge l'opinion qu'il attendait d'elle. Ce ne serait qu'alors qu'il saurait quoi faire de ce charmant pantin.

Enfin, il la saisit par la gorge et exerça une pression dont elle n'aurait aucune peine à se dégager. Seulement, le voudrait-elle encore ? C'était une façon pour lui de mesurer l'avancement de ses « travaux », de voir à quel point il était parvenu à entamer ses barrières mentales à la force de ses mots. Dans un geste d'une tendresse en total contraste avec cette pluie de coups d'une précision chirurgicale, il posa sa joue contre la sienne. S'en approcher alors que sa raison elle-même pouvait être en train de vaciller n'était sans doute pas la meilleure chose à faire, mais il devait prendre ce risque. Être auprès d'elle dans un moment difficile – même s'il en était la cause – l'inciterait à le prendre pour confident, et tisserait ainsi un lien de confiance qui sans cela n'aurait jamais pu naître. Ce n'était bien sûr qu'une hypothèse, mais le Juge connaissait suffisamment bien la psychologie humaine pour savoir que la Vouivre la partageait en grande partie et pourrait donc se montrer sensible à cet élan d'attention et d'affection de sa part. La détresse est la plus grande porte ouverte qui puisse exister pour toucher quelqu'un droit au coeur.

Il y a un adage qui dit qu'on fait du mal à ceux qu'on aime...
Mais il oublie de dire qu'on aime ceux qui nous font du mal.

Citation :

¤ PV : 125 - 60 - 5 = 60
¤ CS : 35 - 20 + 10 = 25

Dégâts reçus : 60

¤ Language of Despair, 20 CS pour 20 de dégâts.

¤ Coups Physiques reçus : 5
¤ Coups Physiques parés : 0
¤ Coups Physiques donnés : 5

Language of Despair: