[Quête tableau d'affichage : Le retour de Rakanoth ¤

Rakanoth ! Je te pourfendrai de but en blanc, créature des ténèbres ! Voilà les paroles qui s’étaient manifestées avec hardiesse dans mon esprit lorsque le cri de détresse avait été lancé. Alors donc, c’était une urgence. Un démon infâme avait fait surface quelque part en Espagne, et précisément à Saragosse, haut lieu de pélerinage pour les catholiques. Et curieusement, j’avais été désigné pour faire partie du commando chargé de mettre un terme aux agissements Ô combien odieux de cette bête infernale. Pasembleu, par mon sang, par mes pieds je jurai de détruire cet être innommable. Je me souvenais des précieuses paroles de mon maître et mentor, l’ancien Chevalier de la Baleine, Lulu le Merlu :

* Vois-tu, Gallion mon élève, mon disciple, mon apprenti, mon commis de cuisine, mon stagiaire en Cosmos, mon suppléant, mon assistant, mon subalterne … Les Chevaliers ont parfois la lourde tâche de protéger l’humanité des desseins de certains dieux maléfiques … Mais aussi de les préserver de démons en tout genre. Tu rencontreras bon nombre de créatures terrifiantes et magiques. Ces monstres parcourent le monde librement, et en tant que Chevalier tu te devras de voler au secours de leurs victimes ! Maintenant passe-moi le sel !!! *

C’était vrai … Cette soupe au crabe était bien trop fade, et il était nécessaire de lui passer le sel à temps. Je n’avais pas été prévoyant ce jour-là, et en guise de punition, Lulu le Merlu m’avait confiqué mon bilboquet favori. Mais il avait raison sur un point : le monde recelait de démons étranges et cruels, et cette mission allait être l’occasion pour moi d’en voir pour la première fois. Et quelle ne fut pas ma surprise lorsque je fus choisi par une déesse en personne ! Niké, l’incarnation divine de la victoire. L’autre comparse qui allait finir de constituer notre trio, était un Chevalier que je n’avais encore jamais vu : un dénommé Oro, porteur de l’Armure d’Argent du Calice. Ensemble, nous partîmes donc en direction de la belle cité de Saragosse.

Afin de garder une certaine forme de discrétion, notre supérieure nous intima l’ordre de nous voiler le corps, et nous encapuchonner le visage, tout en cachant nos attributs provenant du sanctuaire. Les espagnols étaient des dévots, Niké était sage de penser ainsi. Par conséquent, impossible pour moi de me résoudre à me promener avec ma boîte à armure sur le dos durant notre séjour. Alors avant d’entrer en ville, pendant une de nos nuits de bivouac, j’enterrai l’énorme boîte dans un bois, à une centaine de toises de la cité. Le lendemain, une fois en ville, Niké nous donna les instructions : collecter des informations, et se retrouver au point de rendez-vous une heure plus tard. Cela allait nous permettre de pénétrer la fameuse basilique, repaire de l’inénarrable RAKANOTH, démon maléfique. Je hochai la tête une fois que l’ordre fut donné. Avant de partir de mon côté je lâchai un :

– Bonne chance, camarades. Que la volonté d’Athéna soit avec vous.

Puis je m’enfonçai dans les ruelles puantes des quartiers les plus sales de l’endroit. Un odeur de pipi et de caca boudin régnaient. Une véritable pestilence. Il fallait dire qu’il ne faisait pas bon d’être mendiant ou malade dans les grandes villes. Même si j’aimais ma ville natale, Paris, je me souvenais de quelques pauvres hères qui faisaient peine à voir et qui vivaient dans la plus effroyable des misères. Au bout de vingt minutes de recherche, un petit détail me titilla. Bien entendu. Je ne savais pas parler un seul mot d’espagnol. Et justement, les ennuis commençaient à se profiler. Une patrouille de la garde. Comme j’étais aisément remarquable, à cause de ma grande taille, ces derniers m’interpellèrent.

– Hola, senor ! No te conozco, ¿de dónde eres?
– Ola, hé hé … moi … heu … tiéné dinéro. Je suis un mendianto, ha ha ha.
– Eres espanol ?
– Ha ha ha … muchas gracias …
– Alerta ! Un espia !!

Les gardes se mirent en branle, et pointèrent leurs hallebardes en ma direction. Pas question d’utiliser mon Cosmos contre de simples civils ! J’usai donc de mes techniques martiales simples afin de me frayer un chemin entre eux. Avec un simple Hokuto à Beurre, je glissai entre eux telle une brique de beurre, et me mis à sprinter dans les rues, harcelé par les cris de mes poursuivants. J’étais dans de beaux draps. Et dire que j’étais justement venu pour les aider ...

Pris dans une course-poursuite intense, je m’exposais beaucoup trop. Il ne faisait pas bon d’attirer tous les regards vers nous, ça non. Talonné par toute cette meute de gardes qui avaient la bave au bord des lèvres, je ne sentais plus mes jambes tant la course était intensive. J’haletai de même que mon coeur pulsait comme jamais. Soudainement, au détour d’une ruelle, je sentis un Cosmos démentiel, quasiment divin irradier les environs. Jamais je n’avais senti une telle puissance. Quand je me retournai, mes détracteurs s’étaient métamorphosés en une nuée d’oiseaux qui prenaient leur envol vers le ciel. Et non loin de moi, se tenait Niké. Elle venait de faire une démonstration de ses pouvoirs. Et cela faisait froid dans le dos … Un gouffre nous séparait. C’était certainement de cela qu’il s’agissait … De la frontière entre l’humain et le divin. L’air s’était également refroidi, à tel point qu’il devenait difficile de respirer. C’était également une attaque de type Cosmos, mais qui ne venait pas de la déesse de la Victoire … Non.

Il s’agissait là de l’oeuvre de ce Chevalier du Calice, qui avait l’apparence d’un enfant plutôt dynamique d’ailleurs. En somme, tous deux avaient fait leur possible pour me tirer de ce mauvais pas. Je me sentis assez honteux, et afin de ne pas me faire davantage remarquer par mon homologue et ma supérieure, je n’ajoutai mot lorsqu’elle suggéra de ne plus nous séparer. C’était une bonne idée, surtout dans un pays étranger. D’autant plus que je me sentais vulnérable, sans mon armure. Elle était là, à l’entrée de la ville enterrée. Nous parcourûmes davantage la cité à trois, direction la fameuse basilique, ou demeurait le fieffé Rakanoth. En demandant notre chemin à droite et à gauche, nous tombâmes sur un énergumène nommé Guéthenoc qui avait la boisson facile, et qui parlait notre langue. Nous promettant monts et merveilles en matière d’information, il exigea en contre-partie une beuverie dans l’auberge la plus proche. Beuverie qu’il paierait de ses propres deniers !

L’affaire était louche, et il fallait toujours se méfier de ce qu’un inconnu donnait à boire. Une fois à table et à visage découvert, Niké sonda ses deux chevaliers. On lisait sur son visage de l’incertitude. Elle avait visiblement la ferme intention de jouer au jeu de ce badaud, quitte à finir ivre morte, visiblement. Quelques secondes plus tard, le fêtard de service nous rejoignit, portant un plateau sur lequel vacillaient quatre pintes monumentales. Lors de cette première tournée il se montra beaucoup plus curieux.

– Alors mes g'ars, qu'est-ce qui vous amène dans le coin ?  Vous n'êtes pas d’ici, j'me trompe. J'ai le pif pour ce genre de chose.
– Toi non plus l’ami, puisque tu parles avec exactitude la même langue que la nôtre.
– Crévindiou ! Sacrecouille ! Z’êtes du genre perspicace la compagnie, hein ? Moi j’aime ça ! Buvons ! Buvons !
– Méfiez-vous de ces breuvages, mes amis, glissai-je discrètement à l’oreille de Niké et Oro, ils sont peut-être drogués.

Le débit de boisson s’enchaîna, et Guéthenoc ne tarda pas à revenir avec de nouvelles boissons. Il s’agissait là d’un nouvel assortiment d’alcools. Pas question pour moi d’en boire une seule goutte, j’avais déjà la tête qui tournait. Refusant aimablement les instistances de Guéthenoc, je me levai de table afin de me rendre aux toilettes. En vérité, j’en profitai pour enquêter un peu plus à l’intérieur de l’auberge. Je montai les escaliers menant à l’étage, afin de trouver la chambre que louait cet étrange inconnu alcoolique. Heureusement pour nous, l’ivrogne est de nature loquace : cet imbécile nous avait clairement dit lors de cet apéritif, qu’il louait la chambre 5. Une fois devant, je fis appel à mon Cosmos afin d’incruster sa poignée de porte d’un maximum d’humidité. Une fois le bois presque pourri, je n’eus aucune difficulté à la pousser et à pénétrer dans la pièce sombre. Elle semblait tout à fait normale, mis à part cet énorme sac qui trônait sur un des lits. Je m’en saisis et l’ouvris avant de découvrir ce qu’il renfermait : une armure !! Ni plus ni moins qu’une armure ! Cependant elle n’était ni de bronze, ni d’argent, et encore moins d’or. Provenait-elle seulement du Sanctuaire ? En tout cas je n’avais plus qu’une seule chose à faire, en informer Niké et Oro à tout prix !