Asbjörn, Guerrier Divin de Bêta [Présentation terminée]

Sans être totalement bête Asbjörn n'est pas une personne très maligne, même s'il lui arrive d'avoir des fulgurances. Son passé a fait de lui un homme ambitieux, bénévole, haïssant l'injustice. Malheureusement il s'aperçoit rapidement que son caractère quelque peu paresseux, voire nonchalant à certains égards, l'empêche de faire preuve d'abnégation et de combativité pour le bien de quelconques inconnus. Néanmoins, si vous avez le bonheur de faire partie de son cœur rien ne l'arrêtera pour faire votre bonheur. D'ailleurs pour faire partie de son cœur rien de plus facile que d'être une jolie femme, en grand cœur d’artichaut qu'il est, Asbjörn peut tomber très rapidement amoureux et s'imaginer toute une vie de famille avec quelqu'un qu'il connaît depuis à peine cinq minutes. Si à l'inverse vous faites partie des gens qu'il déteste, vous vous en êtes sûrement pris à lui ou à une personne qui compte pour lui. Il donnera tout pour vous le faire payer.

En l'année 1720 la famille Aaren s'affirme comme l'une des plus grandes puissances de Stockholm. Hjalmar Aaren est celui qui a fait la fortune de sa famille, il était dans l'armée du Roi de Suède où il gravissait les échelons les uns après les autres, bataille après bataille, jusqu'à être reconnu comme un chef puissant et inégalé. Après des années de service dans l'armée, il lui sera accordé une énorme maison comparable à un petit château, ainsi qu'une très belle somme d'argent. Mais Hjalmar était un homme avide de richesse et de pouvoir. En voulant toujours plus, il se mettait à monter des escroqueries, à faire enlever des femmes et des enfants afin de demander des rançons, il lui arrivait même d'accomplir des meurtres s'il y voyait une possibilité d’accroître son rang et sa richesse. Les années passaient et personne ne réussissait à le prendre en flagrant délit, malgré la notoriété qu'il avait accumulée au cours de sa carrière de malfaiteur. En 1735 Hjalmar meurt d'une maladie dite incurable. Son pouvoir, sa fortune, son domaine et ses servants sont légués au premier de ses deux fils, Sigurd, ce dernier étant l'inverse de son père laissa à son frère une moitié de l'argent hérité. Le deuxième fils, Hildur, accepta son offre puis partit s'acheter un domaine non loin du petit château de son frère.

Une année plus tard naissait Asbjörn, le fils de Sigurd. Il avait été dit qu'il ressemblait grandement à son grand-père, ce que ses parents n’appréciaient guère, ils firent néanmoins l'impasse sur ce détail de ressemblance physique et élevèrent leur enfant du mieux qu'ils purent. À cinq ans Asbjörn était déjà turbulent, à sept ans il crachait sur les serviteurs et tentait parfois de leur faire des croches-pieds, à ses onze ans il parlait de façon déplacée aux invités de bal, à ses professeurs particuliers et même à ses parents. Seul son oncle Hildur était épargné de ses malices et autres méchancetés, la raison était simple, il était le seul à lui offrir des jouets, des vêtements, des bijoux et sucreries de grande valeur. Les parents d'Asbjörn étaient de plus en plus craintifs, leur enfant était la réplique exacte de Hjalmar. Démuni face aux injures et au comportement de son fils, Sigurd supplia son frère de parler à Asbjörn afin que ce dernier ne finisse pas comme le grand-père malfaiteur.

-Je t'en supplie Hildur, tu es le seul qu'il accepte d'écouter ! Prends-le avec toi, une journée ou deux ! Emmènes-le dans ton domaine, montre-lui comment tu traites tes invités ou tes serviteurs, apprends-lui à bien se comporter je t'en supplie, il est mon fils et mon seul héritier et il n'écoute personne à part toi !

-Calme toi, Sigurd, calme toi. (Hildur prenait une légère pause et soufflait du nez.) Bon. Je veux bien, mais rien qu'une journée. Tu sais bien que ça fait du mal à Kirsten de voir le petit, depuis qu'elle a perdu tout espoir d'avoir un enfant...

Hildur amenait alors l'enfant chez lui le jour même. En entrant dans le domaine, Asbjörn croisait divers serviteurs qui le saluaient, ils n'eurent en retour pas un geste de la part du garçon qui les ignorait de façon extrêmement hautaine. Hildur et son neveu arrivèrent ensuite dans le hall du bâtiment qui surplombait le domaine, dans cette pièce attendait déjà Kirsten, impatiente du retour de son mari. Les yeux de la femme d'âge mûr laissaient paraître à la fois la peur et la haine lorsqu'ils se posèrent sur Asbjörn. Kirsten détestait son neveu, d'une part à cause de l'incapacité qu'elle avait à avoir un enfant certes, mais la haine qu'elle lui vouait était bien plus en lien avec son comportement condescendant avec toute personne ne lui offrant rien de valeur. Elle ne mit pas longtemps avant de traîner Hildur par le bras dans la salle d'à côté en congédiant l'enfant et en fermant la porte derrière-elle.

-Je ne veux PAS de ce gamin ici Hildur ! Il est mal élevé et tyrannique, il ressemble trop à ton père ! Il va finir par tuer quelqu'un et je ne veux pas que ça se passe ici !

-Je t'en prie Kirsten ce n'est que pour aujourd'hui, je le fais pour mon frère. Et puis tu grossis le trait enfin! Ce gamin n'est pas très poli c'est vrai, mais de là à dire qu'il va tuer quelqu'un...

-Non c'est non !

De l'autre côté de la porte se tenait Asbjörn, l'oreille collée contre la serrure à écouter des minutes durant la dispute de son oncle et de sa tante, des larmes se mirent à couler le long de ses joues lorsqu'il entendait Kirsten l'insulter de tous les noms, et lui dévoiler indirectement ce qu'elle pensait de lui en des termes extrêmement durs pour un enfant de son âge. Il s'éloignait ensuite de la porte, ne supportant plus le déferlement de haine dont il était victime, pour aller s'asseoir près de l'entrée, la tête dans les genoux et ne pouvant retenir ses larmes. Il sera rejoint quelques minutes plus tard par son oncle, la tête basse et le visage emplit de tristesse et de pitié pour le jeune garçon.

-Je pense que tu as entendu suffisamment de choses pour aujourd'hui mon garçon. Je te ramène chez toi...

Sur la route Hildur essayait tant bien que mal de réconforter Asbjörn, de lui expliquer qu'il n'était pas responsable de tout ce que sa tante avait dit sur lui, qu'elle était très affectée par le fait d'être inféconde. Mais l'enfant était bien jeune pour comprendre de telles circonstances et restait très marqué par ce qu'il venait de se passer. Bien que ce passage un peu triste de sa vie le hanta pendant bien des semaines, Asbjörn se mit progressivement à changer par la suite, beaucoup dans le bon sens, quelques fois dans le mauvais. En quelque sorte sa tante a su remettre le garçon sur les bons rails.




La famille des Aaren atteint le sommet de la gloire en l'année 1752, elle est officiellement la famille la plus riche et la plus puissante de Stockholm. Sigurd tenait d'une main de maître son domaine et les divers fiefs qu'il s'était procuré. En atteignant cet objectif qu'il s'était fixé, le chef de famille était néanmoins très sceptique quant à sa persistance au plus haut échelon, encore plus quand il voyait sa descendance qui, bien que métamorphosé vis-à-vis de son enfance, restait d'une paresse et d'une nonchalance sans égale. Asbjörn avait à présent seize ans, il culminait à 1m80 pour un poids de crevette, il adoptait un style qui s'éloignait beaucoup de sa classe sociale avec ses cheveux mi-longs bleus et ses vêtements simples, parfois déchirés. En effet le jeune homme frêle n'aimait pas ce qu'il était, toutes les luxures, objets inutiles simplement là pour faire chic, broderies, soies et j'en passe, avaient été bannis de sa vie de son propre chef. Aussi, il refusait tout cadeau et ne se mêlait guère aux invités lors de quelconque fête organisée par sa famille.

Toutefois, le garçon avait bel et bien de l’intérêt en une chose, ou plutôt en une femme. Bien que lui-même persistait à se dire qu'aucune jeune femme n'avait grâce en son cœur, car elles se ressemblaient toutes, celle-ci avait effectivement réussie à se démarquer des autres. Elle n'avait pas encore ses dix-huit ans qu'elle était déjà rayonnante, le visage doux, des cheveux longs, blonds et bouclés lui tombant jusqu'au milieu du dos, un étrange pendentif d'argent en forme de cheval à huit pattes ornait constamment son cou. Bien sûr ce qui intéressait bien plus Asbjörn au premier abord était sa silhouette et ses formes quasi-parfaites. Cette jeune femme se nommait Liv, elle était la fille d'un proche ami de la famille Aaren, elle se rendait donc fréquemment au domaine de Sigurd, c'était les seules fois où Asbjörn allait volontiers voir les invités. Mais Asbjörn n'osait rien dire, rien faire, il était complètement éprit du physique de la demoiselle. Un beau jour, alors qu'elle se trouvait seule dans les jardins du domaine, il eut tout de même le courage d'aller lui parler.

-Bonjour, euh, tu sais je te trouve très belle et... Tu as un joli nom et...

Le jeune homme n'était vraiment pas doué... Heureusement pour lui la jeune femme, très belle et rayonnante, était aussi d'une grande bonté et dotée d'un sens de l'humour. Peu à peu, Asbjörn se rendait compte à quel point l'âme de Liv était pure. Les jeunes gens se côtoyaient de plus en plus, les semaines passaient et les deux éprouvaient une attirance mutuelle non plus pour le simple physique, mais pour ce que l'une et l'autre renfermaient en eux. Bientôt, ils se rendaient ensemble dans la ville main dans la main, visitaient tous les deux ce qu'ils avaient déjà visité seul, ils mangeaient sur la grand-place, préférant la beauté extérieure de Stockholm aux grands restaurants chics. Les deux jeunes amoureux aimaient passer du temps ensemble sans se soucier du monde qui les entourait, mais Liv voulait à tout prix faire découvrir à Asbjörn l'horreur de certains quartiers, avec ces pauvres gens en train de mourir de faim dans les rues. Notre héros détestait voir cela et n'y voyait pas d'intérêt, d'ailleurs il n'hésitait pas à le faire comprendre à son amie en la regardant droit dans ses yeux bleus.

-C'est bon Liv ! Je sais ce qui se passe dans ces rues, moi aussi ça me fait de la peine de voir ces gens comme ça, mais nous ne pouvons pas distribuer notre fortune à n'importe qui comme ça, dans le seul but de les sortir de leur misère !

-Qui te parle de leur donner de l'argent enfin ?! Je veux simplement que nous les aidions en leur donnant à manger ou des vêtements neufs, je ne sais pas !

-Bonne idée, nourrissons-les, qu'ils meurent de faim un jour ou deux de plus...

-Raah, tu commences à m'énerver Asbjörn !

-Ça va, ça va, j'ai rien dit ! Aidons-les...

Cette nature de Liv à aider autrui était certainement la chose qu'Asbjörn chérissait le plus en elle, même s'il se rebutait lui-même à faire ce genre d'action, pas par méchanceté ou par je m'en foutisme, mais uniquement à cause de sa flemme. Quoi qu'il avait à faire, le jeune homme n'était pas motivé, pas enthousiasmé, Liv était la seule qui réussissait à lui faire apprendre une leçon ou à lui faire faire une activité, physique ou non. Un soir, alors qu'il y avait un bal organisé au domaine pour le lendemain, Asbjörn devait s'y préparer au moins la veille. C'est Liv, qui était restée la nuit, qui le forçait à réciter le texte qu'il devait prononcer et à lui faire répéter les courbettes qu'il devait faire à certains invités. Malheureusement cette nuit-là, toute sa vie bascula. Un homme arrivait dans le rez-de-chaussée du petit château en courant et en appelant Sigurd, les cheveux trempés et les vêtements ruisselant d'eau de pluie. Toute la famille Aaren ainsi que Liv ne tardèrent pas à accourir dans le hall.

-Monseigneur, je suis porteur d'une horrible nouvelle ! Votre frère s'est fait assassiner !

-Comment ?! Qui a pu faire une chose pareille ?! Criait Sigurd.

Asbjörn, au côté de Liv, était complètement abattu et ne tenait plus sur ses jambes, il tombait à genoux, les yeux écarquillés. Il avait reconnu le plus dévoué serviteur de son oncle, aucun doute n'était possible.

-C'est la famille Östlund ! Ils sont très nombreux, ils ont envahi le domaine de votre frère avant de tuer tout le monde ! Il m'a hurlé d'aller vous prévenir avant de se faire transpercer par une lame !

Tous se tournèrent vers Liv. La famille Östlund, c'était la sienne. Asbjörn, toujours à genoux, tournait lentement la tête vers sa compagne, les larmes au bord des yeux et la bouche entrouverte, comme s'il cherchait constamment de l'air. Liv avait les yeux grands ouverts en lâchant un « Quoi ? » d'incompréhension, elle aussi commençait à avoir des larmes coulant le long de ses joues. Asbjörn se retournait vers son père en se relevant très difficilement.

-Liv n'y est pour rien ! Je crois en elle ! Elle n'aurait jamais laissé faire ça !

-Comme si tu avais besoin de me convaincre Asbjörn. Néanmoins, sa famille à qui je faisais confiance depuis tant d'années vient de faire tuer ton oncle ! On doit partir et on l'emmène avec nous, en cas de problème on s'en servira pour négocier !

Asbjörn ne contredisait pas son père, il savait également que sa famille devait fuir avant de se faire massacrer, mais il avait aussi planifié d'intervenir si Liv devait devenir une monnaie d'échange. Tous se hâtèrent dans une calèche que Sigurd allait conduire. Juste après leur départ ils aperçurent au loin des hommes à cheval en train de les poursuivre, Liv voulant se pencher pour essayer de reconnaître au moins l'un d'entre eux ouvrait malencontreusement la porte puis tombait hors de la calèche.

-Père ! Liv est tombée ! Arrêtez-vous !

-On a plus le temps Asbjörn ! Elle est de leur famille, ils ne lui feront rien !

Asbjörn ne l'entendant pas de cette oreille s’éjectait à son tour de la calèche, roulant sur quelques mètres. Il se relevait ensuite très rapidement et courait pour rejoindre Liv qu'il attrapa par la main avant de l'emmener avec lui pour se cacher dans les ruelles. Ils se firent malheureusement rattraper par quelques hommes de main, accompagnés du chef de la famille Östlund, le père de Liv.

-Tu es là ma sale petite peste ! Toujours à tourner autour de ce gringalet ! Cet avorton qui appartient à la famille d'Hildur Aaren, celui-là même qui a prit la moitié de tout ce que l'on possédait grâce à ses fourberies ! Ooooh ma petite, tu ne vaux pas mieux que lui, ta mère t'as loupé, tes frères et sœurs sont bien plus intelligents que toi... Aucune raison de m'encombrer d'une telle descendance, TUEZ-LA !

-Non ! Laissez-la bande d'enfoirés !

Asbjörn se battait, protégeant sa dulcinée de son corps, avant de subir un coup à la tête et de s'écrouler au sol. Liv était déjà hors de sa portée, en relevant les yeux, il la vit transpercée d'une lance.

-Nooooooooooooooooooooooon !!!

Asbjörn rampait vers le corps de Liv, se prenant des coups de pied de la part des hommes de main, sanglotant et hurlant comme jamais. Le père Östlund, le visage grave, ordonnait à ses hommes de tuer le garçon maintenant qu'il avait vu son amour mourir. Alors que les lames des meurtriers s'apprêtaient à déchirer la chair d'Asbjörn, un homme apparut en criant.

-GOD BREATH !

Suivant ces mots, tous les hommes, Östlund comprit, se firent balayer par un vent extrêmement violent qui allait jusqu'à leur attaquer la chair. Pas un ne se relevait, ils étaient tous morts. L'inconnu souleva Absjörn puis se mit à courir le plus loin possible.

-C'est trop dangereux par ici gamin, mieux vaut s'enfuir !

-Liv... Murmurait Asbjörn avant de sombrer dans l'inconscience.

Asbjörn se réveillait dans une plaine à l'extérieur de Stockholm, l'aube venait de poindre. Le jeune homme se redressait vivement, des gouttes de sueur coulaient sur son visage qui exprimait la terreur. « Liv. » Prononçait-il en tournant la tête de droite à gauche, cherchant du regard sa compagne. Il ne trouvait là que l'inconnu, assis par terre, qui lui avait sauvé la vie la nuit passée. Son cœur se serrait et des larmes ne tardèrent pas à s'échapper de ses yeux. Les quelques sanglots que laissait échapper Asbjörn interpellaient l'étranger qui se levait pour aller voir le garçon. Ce dernier relevait la tête pleine de larmes et de gouttes de sueur, constatant que l'homme qui l'avait sauvé était très imposant. Habillé d'un simple vêtement blanc à manches courtes et d'un pantalon marron, l'inconnu avait des bras aux muscles dessinés et des trapèzes qui élargissaient son cou et ses épaules de façon très impressionnante. Néanmoins, l'homme n'était pas très large, mais culminait à deux bons mètres.

-Tu vas bien ? C'était limite tu sais ? Une seconde de plus et je ne serais pas intervenu à temps.

-Elle est... Morte...

-Morte ? Qui ça ? (L'étranger aux cheveux bruns fronçait les sourcils d'incompréhension.)

-Mon amie... Liv...

-Je... (L'inconnu baissait la tête et serrait des poings, compatissant à la peine d'Asbjörn et furieux d'apprendre qu'il n'était pas réellement arrivé à temps.) Vous étiez deux...

Le sauveur fermait les yeux et respirait profondément. « Bon. » Disait-il avant de se diriger vers un vieux sac en toile. Il farfouillait dedans un moment avant de trouver ce qu'il cherchait et de revenir vers Asbjörn.

-Tiens, prends ça. (Il lui tendait des vêtements soigneusement pliés) Ce sont de vieux habits, ils sont un peu déchirés, mais je préfère te les donner plutôt que de te laisser attraper la crève. De toute façon j'ai bien trop grandi pour les porter à nouveau. Au sud du campement tu trouveras une rivière, tu pourras t'y nettoyer avant de prendre la route, tu veux sûrement rejoindre ta famille.

-Ma famille... Je n'en ai plus. Ils sont morts en même temps que Liv.

-Désolé de l'apprendre...

-Tu n'as pas à l'être.

Asbjörn prit les vieux vêtements puis alla en direction de la rivière en saluant mollement son sauveur. Notre héros était toujours grandement affecté par sa perte, il titubait jusqu'à la source d'eau avant de tomber dedans la tête la première. L'inconnu l'observant toujours de loin sortait du campement tranquillement pour aller le repêcher. « Mouais, toujours pas remis. » Se disait-il. D'une main il agrippa Asbjörn et l'extirpa de la rivière, il le ramena ensuite au campement sur son dos puis alluma un feu.

-Mon petit, je vais devoir m'occuper de ton cas ou tu ne survivras pas plus longtemps...

Asbjörn ne rouvrit les yeux que le soir de ce même jour. Le colosse de deux mètres était toujours là à veiller sur lui. Aussitôt qu'il eut remarqué que le garçon s'était réveillé, il lui expliqua clairement ce qu'il attendait de lui.

-Tu es réveillé ? Bien, alors écoute-moi. Je t'ai sauvé hier, je t'ai sauvé une fois de plus aujourd'hui, je n'ai pas envie que tu meurs demain, alors tu vas venir avec moi et je veillerais sur toi tant que tu n'iras pas mieux.

-Pourquoi ? Pourquoi faire ça ? Je ne compte pas pour toi, je ne suis rien. Je ne suis plus rien pour personne...

-Tu te trompes. Pour moi tu l'es déjà d'une certaine façon et même si tu as perdu ton amie et tes parents, toi tu vis encore. C'est une dure leçon que nous apprend la vie, mais c'est comme ça. Les gens meurent, parfois cruellement, mais nous devons nous relever et continuer à vivre.

-Pas pour moi... Liv était ma vie. Je me suis trompé, ce n'est pas mes parents qui sont morts en même temps qu'elle, c'est moi...

L'inconnu restait perplexe, lui-même n'avait jamais connu un amour aussi fort que celui que portait Asbjörn à Liv. Toutefois, il y voyait une opportunité de se racheter d'une faute ou deux qu'il aurait commise par le passé. Il lui annonçait alors la chose suivante.

-Tu as tellement souffert que tu ne voudrais pas que ça arrive à quelqu'un d'autre non ?

-Je ne le souhaite à personne évidemment.

-Très bien, alors laisse-moi me présenter et te faire une proposition. Je me nomme Håkan, je suis un ancien Guerrier Divin du puissant dieu Odin.

-Un Guerrier Divin ?!  Je veux dire... Bien sûr je connaissais déjà de telles histoires, mais je n'avais jamais vu un Guerrier Divin en chair et en os. C'est donc là d'où vient la source de ton pouvoir.

-Oui, mais je ne suis qu'une pâle copie de l'homme que j'étais avant. Néanmoins, j'ai pour mission de trouver de potentielles recrues. Puisque ta vie n'a plus la moindre importance à tes yeux, je me disais que défendre des personnes pouvant subir le même sort que toi et ton amie pouvait t'intéresser.

-Guerrier Divin ? Moi ? Euh... Excuse-moi, mais on dirait que tu proposes ça à n'importe qui, c'est vrai quoi, je n'ai rien de spécial. Et puis, je ne suis pas assez fort, je ne l'ai pas été même pour protéger celle que j'aime...

-Je ne fais pas ce genre de proposition à la légère gamin ! Ta ridicule stature n'est peut-être pas imposante pour le moment, mais à ton âge je n'étais moi-même pas plus gros que toi ! Si tu choisis de me suivre gamin, je t’entraînerais, une fois l’entraînement terminé... (Il fit une brève pause) Crois-moi si quelqu'un d'autre tente de tuer une personne chère à ton cœur, tu seras en mesure de lui faire la peau.

Asbjörn se posait réellement la question, son deuil n'était pas encore fait, mais Håkan avait su trouver les mots pour le convaincre. Ils trouvèrent donc un compromis, Asbjörn acceptait de suivre Håkan pendant au moins une semaine, le temps de faire son deuil, puis lui donnerait une réponse. C'est ainsi que notre héros se fit un nouvel ami, qui sera également son maître.




Pendant une semaine les deux hommes étaient en partance vers une destination connue seulement de l'ancien Guerrier Divin. Ce dernier avait seulement révélé à Asbjörn que leurs pas les mèneraient à un petit village. Alors qu'ils faisaient route ensemble, Håkan expliquait un tas de choses à son nouveau protégé, le jeune homme n'écoutait qu'à moitié, pensant constamment à Liv. Il ne retenait que ce qui lui paraissait intéressant mais sans plus, juste quelques mots : Cosmos, Armure, Odin, entre autres. Plus les deux compagnons avançaient vers leur objectif, plus le froid se faisait sentir. Asbjörn dû se vêtir en conséquence n'y étant pas habitué, de son côté Håkan continuait sa route sans le moindre souci. Le septième jour notre héros et son potentiel maître n'étaient plus qu'à quelques jours de leur destination, ce dernier posait alors un ultimatum à son jeune ami.

-Mon ami, maintenant il va falloir me donner ta décision, que tu le veilles ou non. Car tu n'iras pas plus loin autrement.

-J'accepte, je n'ai pas fait tout ce voyage pour finalement refuser, de toute façon avec ce froid je mourrais si je devais revenir seul chez moi... Répondait Asbjörn tristement, sans réfléchir longuement.

-Très bien. (Håkan souriait à pleines dents) Alors, on continue !

Les deux compagnons reprirent alors le voyage qui dura encore quelques jours. À leur arrivée Asbjörn constatait que le petit village était composé d'une dizaine de petites maisons, d'une scierie, d'une carrière, d'un pavillon de chasse et d'une taverne. Håkan, le visage heureux, annonçait fièrement à son nouveau disciple « Bienvenue, mon ami, à la frontière d'Asgard ! ». Asbjörn ne répondait pas, à la fois émerveillé qu'un tel village subsiste dans ce paysage inhospitalier et incapable de produire le moindre son, tellement il avait froid. Son maître lui proposait alors d'aller se réchauffer dans l'auberge, lui permettant par la même occasion de rappeler à son disciple tout ce qu'il attendait de lui.

Après un bon repas, accompagné d'un monologue de la part d'Håkan , et une bonne nuit de sommeil, les deux hommes partirent faire quelques achats afin que le jeune apprenti ne meurt pas de froid dans cet endroit. Asbjörn, se sentant bien mieux dans ses nouveaux vêtements de fourrure, pouvait à présent commencer son entraînement qui commençait par un renforcement physique. Le maître et l'élève s'éloignaient d'un kilomètre ou deux pour s’entraîner sans gêner les villageois. Jour après jour, il devait réaliser plus d'exercices, plus de séries, plus de répétition. Le jeune homme n'y arrivait pas vraiment et progressait très peu. Håkan se mettait à désespérer. Encouragements, railleries et réprimandes ne servaient à rien, Asbjörn ne faisait simplement pas assez d'efforts et son professeur s'en apercevait bien. À la fin d'un exercice de piètre qualité, ce dernier interpellait le jeune homme afin d'éclaircir certains points.

-Je suis las, Asbjörn. Disait Håkan, le regard noir. Voilà maintenant plusieurs semaines que je te fais faire des dizaines d'exercices censés te muscler, te sculpter. Mais jusqu'à maintenant... Quasiment aucun résultat... Veux-tu vraiment devenir un Guerrier Divin, gamin ? Car pour l'instant je ne t'imagine même pas en tant que simple garde.

-Peut-être que ces exercices ne sont pas aussi efficaces que tu le pensais. Se défendait Asbjörn, la tête basse. Après tout comme tu l'as dit, je n'ai pas vraiment progressé. Ou peut-être qu'ils sont trop difficiles pour un novi...

-Cesse de me mentir ! Le coupait l'ancien Guerrier Divin. Et par la même, cesse aussi de te mentir à toi-même. Tu ne fais pas d'effort, tu n'essaies même pas vraiment de bien faire les exercices ! Qu'est-ce qui ne va pas avec toi ?!

-Liv ! C'est Liv ! Ça te va ?!

Un moment de silence s’installait. Håkan pensait être allé un peu trop loin. Asbjörn préférait se lever pour ramasser ses affaires et retourner au village, mais à peine faisait-il quelques pas que son maître l'arrêtait en le retenant par le bras. Les yeux fixés au sol, Håkan tentait de se remémorer certains instants de son passé, des instants qu'il voudrait ne jamais oublier. Quelques secondes lui suffisait à ressortir ses vieux souvenirs de sa mémoire, sans qu'il omette le moindre détail.

-Tu sais Asbjörn, je cherche, je cherche... Je creuse toujours plus profondément dans ma mémoire, mais je ne me souviens pas avoir aimé une personne à un tel point. Il y avait... Une femme, qui combattait à mes côtés à l'époque, je l'ai tout de suite trouvée extrêmement belle et sympathique. Elle avait un sacré culot et c'est ce que j'ai apprécié le plus chez elle. Je pense que je lui plaisais aussi, maintenant, je crois que je ne le saurais jamais. Peut-être avec elle... J'aurais pu vivre un amour aussi passionné que celui que tu as toujours pour Liv...

-Que lui est-il arrivé ? Demandait Asbjörn, l'air compatissant.

-Elle ? Rien du tout, enfin à ma connaissance. Non, c'est moi. Je l'ai abandonné... (Håkan soufflait bruyamment par le nez.) J'ai été trop dur avec toi, excuse-moi. Je ne comprends pas ce que tu ressens, mais je te promets de faire preuve de plus de patience.

-Ce n'est pas de ta faute Håkan.(Asbjörn marquait une pause) Liv m'aidait... Je n'ai jamais pu faire la moindre chose qui demande des efforts sans son aide, elle était toujours là à veiller à ce que je mène à bien la plupart de mes devoirs. Et maintenant qu'elle n'est plus là alors que j'ai une fois de plus besoin d'elle... Son absence se fait encore plus ressentir...

-Elle t'aidait ? De quelle façon s'y prenait-elle ?

-Et bien... Elle était là et... Enfin, la plupart du temps ça suffisait, quelques fois elle m'encourageait. Je me sentais bien avec elle et je me disais que je ne pouvais que réussir grâce à elle.

-Haha, là est la solution mon cher disciple. À mon avis, si tu faisais toutes ces choses quand elle était là, c'était surtout parce que tu ne voulais pas la décevoir. N'ai-je pas raison ? Sa présence, certes, te réconfortait, mais le travail venait surtout de ce que tu ressentais dans ton cœur !

-Mon cœur ? Il est vide à présent...

-Pour l'instant Asbjörn. Mais si tu essayais, ne serait-ce qu'un peu, de repenser à Liv. Pas de souvenirs triste ou larmoyant, mais de tout ce qui fait ton amour envers elle, tu pourrais peut-être trouver la force en toi de réaliser ton entraînement. N'aurais-tu pas envie qu'elle soit fière de toi depuis l'au-delà ?

-Oui...

Asbjörn et Håkan s'arrêtèrent à cette discussion ce jour-là et ne reprirent les exercices que le lendemain. Le jeune disciple pensa toute la nuit à cette conversation, quelque part au fond de lui-même, il était persuadé qu'il pourrait réussir à ressortir cette force que Liv éveillait en lui. Le lendemain, Asbjörn était prêt, déterminé. Il s'attela à tous les exercices concoctés par Håkan avec une tout autre force mentale que les semaines passées, en quelques mois le jeune homme réussissait à obtenir de très bons résultats. Håkan était fier, de son apprenti bien sûr, mais également d'avoir réussi à percevoir la chose qui manquait à Asbjörn pour lui donner force et courage.

Les jours défilaient, le jeune homme frêle devenait un peu plus fort à chaque entraînement, mais le physique n'était clairement pas son point fort. L'ancien Guerrier Divin, voyant la progression de son disciple s'amoindrir de plus en plus, décida de commencer sans plus tarder l'initiation au combat. Il confectionna des mannequins de bois en quelques jours, pendant qu'Asbjörn continuait son renforcement musculaire. Dès le moment où les mannequins furent finis, Håkan les disposait en ligne puis demandait à son apprenti de répéter quelques mouvements à leur encontre. Un coup, qui se transformait en deux, puis en trois jusqu'à devenir un enchaînement qu'Asbjörn réussit à maîtriser à force de travail au bout de deux semaines. Il continuait, il apprenait d'autres bottes, d'autres coups. Il était devenu, en quelques mois, apte à combattre un véritable adversaire, il commençait donc un véritable combat face à son maître.

-Tu te débrouilles bien Asbjörn, tu retiens correctement les leçons et tu fais vivre un calvaire à ces mannequins. Néanmoins, il te manque maintenant un correct entraînement face à quelqu'un qui se défend.

Håkan attaquait son disciple sans plus de paroles, il retenait ses coups, mais parvenait sans mal à mettre le jeune homme à terre.

-Deuxième leçon de combat, l'esquive et la parade des coups.

Là encore, Asbjörn montrait rapidement ses limites. Il parvenait à esquiver les coups uniquement quand son maître se retenait. Bien que son adversaire était tout même redoutable et évidemment bien plus fort que lui, le jeune homme perdait confiance, jusqu'à ne plus du tout progresser. Håkan mit un terme rapidement au simple entraînement au combat après avoir constaté que son disciple avait atteint ses limites. Toutefois, il ne lâchait pas prise. En plus de l'initiation au combat, son apprenti allait désormais devoir apprendre à utiliser son cosmos. Le maître avait raison de s'acharner à entraîner le jeune homme, car quelques mois d'apprentissage plus tard Asbjörn démontrait qu'il possédait un puissant cosmos, digne d'un Guerrier divin.




Un an s'était écoulé depuis le début de l’entraînement. Bien qu'Asbjörn ait démontré une grande puissance cosmique, il ne la contrôlait pas vraiment et son habileté au combat était plutôt médiocre. Son apprentissage touchait pourtant à sa fin, en effet Håkan le pensait prêt à revêtir une armure de faible rang. Le maître l'annonçait à son disciple un soir, en l'invitant dans une taverne prestigieuse se situant dans une ville hors des frontières d'Asgard, quelques heures après l’entraînement journalier. Ce soir-là Asbjörn était exténué, il venait de réussir sa toute première attaque cosmique, après une bonne centaine d'essais. Son attaque était de faible intensité, mais cela représentait pour lui une grande réussite.

-Je te félicite Asbjörn, tu as enfin réussi à maîtriser cette technique que tu peaufines depuis de si nombreuses semaines. C'est déjà un grand jour pour toi et pourtant j'ai encore plus à t'annoncer. Je te pense prêt mon cher disciple. Tu vas très bientôt postuler pour devenir le nouveau Guerrier Divin d'Ymir, si l'armure te choisit tu seras son heureux propriétaire ! Mes félicitations encore une fois !

-Merci ! Ymir ?! Je m'imagine déjà la porter, Liv doit être tellement fière de moi là-haut... Est-ce que cette armure est puissante ?

-Et bien c'est une armure... De faible rang, mais dès que tu auras fait preuve de plus de qualité et si tu t’entraînes encore régulièrement tu pou...

-De faible rang ?!(Asbjörn se levait de sa chaise brusquement.) Mais... Je dois être en mesure de pouvoir protéger des gens, sans une armure d'exception je ne pourrais jamais réaliser cet objectif ! Et puis, je ne pourrais me convaincre que Liv soit fière de moi si je n'atteins pas le meilleur échelon possible !

-Ah ! Déjà que tu veux te servir d'une armure de Guerrier Divin pour servir tes propres desseins, tu veux en plus prendre possession d'une armure du plus haut rang ?! Une de ces armures sertie d'un des saphirs d'Odin ?! Hahaha ! Sache que pour avoir une telle opportunité il va falloir que tu t’entraînes beaucoup plus que ça, que tu sois beaucoup plus puissant ! Et puis une armure pareille ne choisit pas n'importe qui !

-Servir mes propres desseins ?(Asbjörn se rasseyait, plus calme.) Mais enfin, tu m'as bien dit que protéger les personnes sans défense faisait partie des devoirs d'un Guerrier Divin. En quoi est-ce que je sers mes propres desseins là-dedans ?

-Tu ne vois qu'un détail de tout un tableau, tu t'attaches à ce seul devoir alors qu'il y en a bien d'autres. Tu sais je te connais bien à présent, il y a des ordres que tu refuserais tout bonnement d'exécuter simplement parce que ça ne te paraîtrait pas juste. Tu te fies à ton propre jugement et ça, un Dieu ne peut le tolérer, alors il te faudra non seulement progresser sur le plan physique et technique, mais aussi sur le plan mental. De ce que j'ai vu jusqu'à présent... Tu n'y arriveras pas.

Furieux, Asbjörn balançait sa chaise quelques mètres plus loin puis sortait de la taverne en claquant la porte. Håkan était surpris de la rage qui s'était emparé de son disciple, il préférait le laisser seul quelques instants avec sa conscience, le temps qu'il reprenne ses esprits. Le jeune homme se retrouvait donc seul dehors, dans la neige. Il s'était assis sur un tonneau non loin de la taverne et regardait tomber les flocons, le visage grave. La rage qui le consumait n'allait pas s'éteindre de sitôt, car peu de temps après il apercevait dans une ruelle, faiblement éclairée par quelques torches, des silhouettes en mouvement. Un cri se faisait entendre, celui d'une femme. Asbjörn sautait alors du tonneau pour se ruer au secours de cette personne.

Deux hommes, de faible stature, avaient plaqué une femme brune contre un mur et commençaient à déchirer sa robe à l'aide de couteaux. Asbjörn débordait de haine, son sang bouillonnait, ses yeux écarquillés laissaient transparaître sa soif de sang, son envie de se défouler sur ceux qu'il considérait comme des ordures de la pire espèce. En quelques enchaînements de coups, les deux agresseurs se retrouvaient au sol. Une aura blanche commençait à entourer le jeune homme aux cheveux bleus, son cosmos était chargé à bloc et il s'apprêtait à en finir avec les deux hommes. Il levait son poing, cerclé de flammes, pour ensuite abattre son attaque cosmique. Heureusement pour nos deux agresseurs, Håkan arrivait au même moment et parvenait à bloquer le coup de son disciple.

-Es-tu devenu fou Asbjörn ?!

-Ces deux enfoirés étaient en train d'agresser cette jeune femme !

-Tu t'apprêtais à les tuer Asbjörn ! Même si ces deux fumiers étaient en train de commettre un acte ignoble et méprisable, tu n'as pas à les tuer !

-Sans un tel châtiment ils recommenceront ! (D'un vif mouvement de bras Asbjörn s'arrachait de l'emprise de son maître puis tendait sa main à la jeune femme.) Vous êtes en sécurité maintenant mademoiselle, permettez-m...

-Ne me touchez pas ! S'écriait la jeune femme, le visage terrifié, avant de s'enfuir au loin.

-Vois ce que tu deviens aux yeux du peuple quand tu ne te contrôles plus ! Liv doit être bien triste de te voir comme ça de là où elle est.

Asbjörn restait sans voix, d'abord étonné de la réaction de la victime puis attendrit d'un seul coup par une pensée envers son défunt amour. Cette dernière phrase d'Håkan le touchait tellement qu'il ne put retenir ses larmes.

-Qu'est-ce que je suis devenu ?...

Après quelques secondes de calme, les deux hommes rentrèrent ensemble dans la taverne, ils s'excusèrent au propriétaire pour la dispute survenue un peu plus tôt puis rejoignirent leur chambre. Pas un mot ne fut prononcé avant le lendemain matin. Asbjörn avait passé la nuit sans fermer l’œil, Håkan non plus. Ce dernier avait réfléchi à ce qu'il allait bien pouvoir dire à son apprenti une fois le soleil levé. À sa grande surprise, il n'eut aucunement besoin de réprimander le jeune homme qui s'excusait le matin même. La réconciliation fut rapide, Asbjörn avait conscience de l'erreur qu'il avait faite de s'opposer à son maître. Néanmoins, alors qu'ils étaient tous deux à l'entrée de la taverne, prêts à partir, le disciple questionnait Håkan sur une chose qu'il n'avait pas vraiment comprise.

-Håkan, pourquoi ne pas tuer ? Je veux dire, les deux types d'hier sont effectivement des ordures, alors pourquoi les laisser en vie alors qu'ils peuvent très bien recommencer leurs actions.

-Mon garçon, pour commencer vu la raclée que tu leur as mise ils ne risquent pas de recommencer de sitôt. Ensuite, ces gens sont mauvais, comme tu l'as dit. Seulement si toi, qui es apte à les neutraliser, tu décides de ne pas t'arrêter là et de les achever, alors tu ne vaudras pas mieux qu'eux. Ne ressemble pas à ceux que tu détestes Asbjörn, c'est le meilleur conseil que je puisse te donner.

Asbjörn acquiesçait, les deux hommes étaient sur le point de se mettre en route quand Håkan se faisait toucher par une pierre. Ce dernier cherchait d'où provenait le projectile avec de rapides mouvements de tête de droite à gauche. C'est alors qu'il aperçut cinq visages familiers qui se dirigeaient vers lui. Méfiant, Håkan fit un pas en arrière, se préparant par la même occasion à lever sa garde. Les cinq personnes portaient des vêtements légers qui ne protégeaient pas du froid, Asbjörn ayant remarqué ce détail se mettait en garde à son tour. En effet, les cinq hommes qui venaient d’apparaître ne semblaient pas être pacifique.

-Kinji, Général de l'Hippocampe... Cela fait bien longtemps, oooh grand chef des marinas. Lançait celui qui semblait être à la tête du groupe en affichant un large sourire.

-Toujours en vie ? Moi qui pensais que tu te ferais tuer peu de temps après mon départ.

-Tu ne vas pas te foutre de nous bien longtemps ! Olev ! Tu t'occupes du jeune qui l'accompagne pendant qu'on élimine notre ancien « chef » !

Quatre des étrangers se ruaient sur l'ancien chevalier pendant que le dénommé « Olev » fonçait sur Asbjörn. Le jeune homme devait se contenter de parer les attaques incessantes de son adversaire, il n'arrivait pas à trouver de faille et faiblissait très rapidement. De son côté le maître gérait efficacement ses quatre opposants, si bien qu'il mit rapidement les deux plus faibles au tapis. Les deux autres essayaient de se compléter pour toucher leur ancien chef, l'un bloquait les attaques pendant que l'autre tentait d'attaquer par derrière. Toutefois, l'ancien chevalier était beaucoup plus fort qu'eux, après quelques esquives il concentrait son cosmos avant de le laisser exploser. Ses adversaires furent projetés au loin, inconscients.

Asbjörn se battait toujours tant bien que mal, il souffrait de plusieurs blessures, entailles et hématomes recouvraient son corps. Un ultime coup de pied d'Olev l'envoyait s'écraser contre un mur avant de retomber lourdement face contre terre. Håkan avait à peine entamé une course pour porter secours à son disciple qu'il s'arrêtait à quelques mètres des deux combattants, il s'était aperçu qu'autour d'Asbjörn se formait une aura qui dépassait de loin ce que l'apprenti avait l'habitude de produire.

-Le... Septième sens...

Asbjörn se déplaçait à une vitesse phénoménale, en une seconde il s'était relevé et avait rejoint son adversaire. Autour de son bras droit virevoltaient des flammes, il serrait le poing puis portait un coup qui transperçait le tronc d'Olev. Une fois l'attaque portée, les deux hommes s'effondrèrent au sol. Asbjörn se réveillait un jour plus tard, entouré de bandages. Son maître était à ses côtés et avait sur le dos son grand sac en toile.

-Håkan ? Que s'est-il passé ? Je me souviens seulement de m'être battu puis d'avoir perdu connaissance. Qu'est-il arrivé aux cinq personnes qui nous ont agressés ?

-J'ai neutralisé mes adversaires, quant à toi, tu as tué le tien.

-Je suis désolé. J'ai tué mon adversaire alors que tu me l'avais interdit.

-Asbjörn, la différence c'est que là tu n'étais pas en position de te débarrasser de lui de manière non létale, tu n'avais pas le choix, il t'aurait tué si tu ne l'avais pas fait.

-Tu les connais ?... Mais au fait, il t'a appelé comment ?! Et général de quoi ?!

-Je te dois des explications je crois, je ne sais pas vraiment par où commencer... Bon, je m'appelle en réalité Kinji, je ne suis pas un ancien Guerrier Divin, mais un ancien Général de Poséidon. J'ai... fui. (Kinji marquait une pause.) Je suis un renégat, j'ai laissé mon armure au Royaume de Poséidon puis je suis parti, un grand combat se préparait contre les spectres d'Hadès. J'étais déjà à l'époque le Chef des marinas alors que Poséidon ne s'était pas encore réincarné. Toutefois quand il le fut, il me laissa à ce poste. J'ai su des choses, je savais que nous allions nous faire massacrer par les spectres, nous n'étions pas assez fort, pas assez nombreux. Depuis, des anciens marinas, qui ont été bannis, ont pour ordre de me traquer et de m'éliminer. S'ils réussissent ils pourront réintégrer le Royaume, enfin c'est ce qu'il leur a été promis. Je pense que même s'ils y arrivent, ils se feront exécuter ensuite. Je ne t'ai pas dit la vérité il y a un an car je ne te connaissais pas, je ne savais pas si je pouvais te faire confiance. J'ai essayé de te le dire depuis quelques semaines, mais je n'en ai pas trouvé le courage, pardonne-moi.

-Ça fait beaucoup à retenir d'un coup... Je... Pourquoi tout ça ? Pourquoi m’entraîner ? Et pourquoi vers Asgard ?

-Je suis un traître, Asbjörn. Tout ce que j'ai fait dans ma vie ne vaut rien, j'ai comme l'impression que je suis... Une mauvaise personne. Je n'ai pas souvenir d'avoir fait une seule chose positive dans ma vie. Quand je t'ai vu dans cette ruelle à Stockholm, je me suis dit que mon jour était enfin arrivé, que j'allais enfin pouvoir accomplir une bonne action. J'étais heureux, jusqu'à ce que tu me dises que j'étais arrivé trop tard pour Liv... Tu étais comme mort à l'intérieur quand tu m'en as parlé, je me disais que si je te faisais revivre... Mon échec pourrait devenir, une réussite, en quelque sorte. J'ai donc joué sur tes sentiments de tristesse, de vengeance. Le seul moyen pour moi de réussir était de faire de toi un chevalier, combattant l'oppression et la tyrannie. Je m'étais caché en Asgard à un moment, pendant que les bannis de Poséidon me cherchaient. Les villageois avaient été très protecteurs envers moi, je me suis donc dit que c'était le meilleur endroit pour t’entraîner. Maintenant j'ai l'impression de m'être servis de toi afin de racheter mes fautes, ce que je fais là... Je ne peux plus le considérer comme une bonne action...

-Alors... Tu vas faire quoi ?...

-Expier mes fautes. Je vais retourner au Royaume de Poséidon. Et je vais assumer les conséquences de mes erreurs. Et puis, il y a une femme que j'ai laissée seule là-bas. (Kinji lançait un sourire à Asbjörn puis se dirigeait vers la porte de la chambre.)

-Et mon entraînement ? Tu le sais, je ne veux pas m'en tenir à ce rang, j'ai besoin de plus pour accomplir ce en quoi je crois !

-Tu veux toujours être Guerrier Divin ? S'étonnait Kinji en s'arrêtant au niveau de la porte. Je suis désolé mon ami mais... Je n'ai plus rien à t'enseigner, tu sais déjà tout ce que tu dois savoir, le reste dépend de toi, de ta volonté de réussir. Néanmoins, je sais une chose depuis un bon moment... As-tu entendu parler de l'armure du Guerrier Divin de Bêta ? Elle fait partie de celles qui sont serties d'un des saphirs d'Odin, elle est toujours à la recherche d'un porteur. Elle est également très difficile à obtenir, car tu devras pour cela t’entraîner à résister à la chaleur d'un volcan... Finalement, je pense qu'elle est parfaite pour toi, de haut rang et difficile à obtenir. Retiens toutefois ceci, ce n'est pas l'armure qui fait le Guerrier Divin, c'est celui qui la porte. Bonne chance, mon ami.




Voilà deux mois que Kinji avait laissé le jeune Asbjörn qui s’entraînait désormais seul au volcan nommé Beerenberg, situé sur une petite île au nord de la Norvège. Les premiers jours furent difficiles, la température était telle qu'Asbjörn préférait commencer par s'entraîner à l'extérieur du volcan. Il avait énormément de mal à supporter la chaleur continue à laquelle il était exposé. Son corps dégoulinait de sueur en quelques minutes d'exercice, peu de temps après de la cendre volcanique s'additionnait à cette sueur rendant son entraînement encore plus pénible. Plusieurs fois par jour, il s'éloignait un peu pour aller prendre l'air et se rincer au bord de la mer de Norvège. Chaque jour il pensait de toutes ses forces à Liv pour se donner la force de continuer. Pendant toute une année, Asbjörn devait aller se ravitailler régulièrement dans quelques villages se situant au centre de l'île. Faisant attention à ses finances, il était parfois obligé de s’adonner à la chasse, la cueillette ou la pêche. Au bout d'un an, notre héros parvenait à endurer l'environnement extérieur du volcan et s'apprêtait à entrer à l'intérieur.

Plus il se rapprochait du centre plus l'air devenait irrespirable, sa peau et sa chair brûlaient sous la haute température. Au bout de seulement une minute ou deux d’entraînement, il se dépêchait de sortir de cette fournaise. Une fois sur les pentes rocheuses du volcan il parvenait à reprendre souffle et à sentir son corps apaisé. Néanmoins, il ne s'arrêta pas là et courut le plus vite possible en direction de la mer, piquant une tête dans l'eau. Il n'y restait que quelques secondes, car c'était à présent le froid qui le consumait. Il sortait rapidement de l'eau et se roulait dans le sable pour se sécher et réchauffer son corps. Asbjörn se sentait bien bête.

-Demain, je recommence demain...

Le jeune homme s'endormit, emporté par la fatigue. Chaque jour, pendant toute une semaine, il retentait l'expérience. Rien à faire, il ne progressait pas. Il n'arrivait pas à résister autant mentalement que physiquement, il se demandait même si quelqu'un avait réellement réussi cette épreuve. Sa motivation initiale n'était plus là, même ses pensées pour Liv n'arrivaient plus à le rendre plus fort.

-Je me suis entraîné toute une année ici, mais malgré mon endurance et ma force... Je n'y arrive pas... Liv, j'ai échoué. Pardonne-moi. Si seulement tu étais encore là...

Asbjörn abandonnait, le jour suivant il prenait un bateau en partance pour la Suède puis se dirigeait vers Stockholm. Arrivé en ville, il traversait des lieux lui remémorant d'anciens souvenirs, la grand-place où il mangeait régulièrement avec Liv, la ruelle où ils avaient tous les deux aidé de pauvres gens, puis venait le tour du domaine de son père. Il restait à l'extérieur, ne jetant qu'un coup d’œil lointain à travers les fenêtres, il s'étonnait par ailleurs d'y voir de la lumière et quelques silhouettes. Il poursuivit ensuite son chemin jusqu'à un autre domaine, celui d'Östlund. Il ouvrait la grille et traversait les jardins sous le regard terrifié des jardiniers. Nonchalamment, Asbjörn allait jusqu'à la porte puis toquait. Un valet lui ouvrait la porte qui cachait derrière elle la maîtresse du domaine, la mère de Liv. Les yeux écarquillés, la femme reculait de quelques pas avant de hurler.

-Gardes ! Aidez-moi ! Un assassin !

-Calmez-vous. (Asbjörn avançait tranquillement vers la mère de Liv en poussant le valet.) Je ne veux pas vous tuer, je veux seulement savoir où est enterrée Liv.

-Que voulez-vous faire encore ?! Vous les avez tués, elle et mon mari ! N'est-ce pas assez ?! Vous voulez en plus dépouiller leurs cadavres ?!

-« Tués » ?

En Asbjörn montait la colère, ses poings se serrèrent, ses sourcils se froncèrent et son cosmos bouillonnait, il commençait à avancer un peu plus vers la maîtresse du domaine quand surgirent tout à coup la plupart des domestiques. Ces derniers tentaient en vain de ceinturer le jeune homme, à peine l'avaient-ils effleuré que leurs mains cuisaient instantanément. Reprenant son calme, Asbjörn diminuait l'affluence de sa cosmo-énergie afin d'éviter de blesser plus de gens. Il reprenait ensuite sa marche en se dirigeant cette fois-ci vers l'ancienne chambre de Liv. En ouvrant la porte, il constatait que tout était comme dans ses souvenirs, rien n'avait bougé. Il soufflait longuement de soulagement puis entreprit d'ouvrir les tiroirs de la commode.

-Qu'est-ce que tu cherches ? Tu as tué ma sœur et maintenant tu lui voles ses affaires ?

Asbjörn ne se retournait pas, il n'en avait pas besoin, il avait reconnu la voix fluette de la petite sœur de Liv. Avec un pincement au cœur il lui répondait :

-Je n'ai pas tué ta sœur, ni ton père d'ailleurs. (Asbjörn tournait son regard vers la fillette de huit ans.) Tu as bien grandi, mais ta voix n'a pas changé Snöfrid. (Asbjörn marquait une pause.) Ta mère n'a pas voulu me dire où Liv était enterrée, je cherchais juste quelque chose qui me permettrait de me souvenir d'elle à la place...

-Un souvenir ? (Snöfrid enlevait alors un pendentif autour de son cou, caché par le col de son chemisier.) Il était à Liv, elle le portait tout le temps... Je te le donne. Liv t'aimait, je ne crois pas que tu l'aies tué, ni papa.

-Sleipnir...(Asbjörn tendait la main pour saisir délicatement le pendentif en argent.) Tu sais Snöfrid, tu es peut-être la plus jeune dans cette maison, mais tu es aussi la plus sage, Liv aurait été fière de toi...

-Viens. (Snöfrid tirait la manche d'Asbjörn.) Je t'emmène la voir au cimetière.

La fillette emmenait alors notre héros à travers la maison, passant à côté de sa mère en pleurs, puis le guidait jusqu'à l'endroit où était enterrée sa sœur. Une fois qu'ils furent tous les deux devant la tombe, Asbjörn patientait quelques instants avant de demander poliment à Snöfrid de le laisser quelques minutes. Ceci fait, il se retrouvait seul devant Liv.

-Liv, aujourd'hui je ne t'apporte pas de fleurs, il n'y a que moi. Je m'en veux, j'aurais voulu t'apporter quelque chose pour nos retrouvailles, finalement j'ai seulement pris ton pendentif. J'aurais voulu revenir ici en paix, mais je n'ai apporté que la rage. J'aurais voulu repartir avec ton amour, mais mon cœur m'a été volé le même jour de ta disparition... J'espère que de là où tu es, tu te rends compte à quel point tu me manques... (Asbjörn s'effondrait. Ses jambes ne pouvant plus le porter, il se retrouvait à genoux.) Tu me manques tellement si tu savais...

Asbjörn ne put retenir ses larmes, il pleurait, sanglotait. Cela durait plusieurs minutes, sa peine était si grande que son cosmos s'intensifiait à son maximum. Une fois qu'il eut fini de pleurer, il resta encore quelques minutes avant de partir. Il laissait devant la tombe de Liv un sol brûlé, l'herbe n'y repoussa plus jamais.

Tournant une dernière fois la tête vers Liv, il vit dans un éclair blanc apparaître une armure en forme de cheval mythologique. Stupéfait, Asbjörn s'avançait prudemment vers l'armure. Avec le bout des doigts, il effleurait légèrement la tête du cheval de métal qui disparaissait aussitôt dans un même éclair blanc.

-Je ne comprends pas... Est-ce que ça veut dire que... Je ne la mérite pas ? Non, ça n'aurait aucun sens...

Asbjörn ne comprenait pas vraiment ce qui venait de se passer, il reprenait la route quelques minutes plus tard, raccompagnant Snöfrid chez elle et la remerciant. Se demandant où passer la nuit, il retrouvait le chemin du domaine Aaren, où il croisait à l'entrée ses parents avec quelques domestiques. Tous étonnés de se retrouver à cet endroit, un léger blanc s'installa avant de laisser place aux cris.

-Tu as le culot de rentrer ! Après le meurtre de ton amie et de son père ! Comment oses-tu ?!

-Je ne les ai pas tués ! Comment aurais-je pu faire une chose pareille ?!

-TU les as TUÉS ! C'est bien en apportant cette preuve que nous avons pu retrouver notre maison !

-Toi, c'est toi qui as lancé ce mensonge... Seulement pour retrouver ton petit château et ta vie de luxe ? Quand Liv est tombée de la calèche, c'est moi qui ai sauté pour aller la chercher ! Et tu oses accuser ton propre fils pour tes petits privilèges ?! (Asbjörn reprenait son calme.) C'est toi qui as tué Liv en ne t'arrêtant pas. J'en ai assez, j’espérais trouver un toit, mais je préfère m'en sortir seul qu'avec ton aide.

-T'en sortir seul ? Jamais tu n'as été capable de t'en sortir seul ! Il fallait toujours que ta petite chérie soit là pour te forcer à faire quelque chose ! Tu n'as jamais rien accompli Asbjörn !

Asbjörn réfléchissait un instant, puis sortait le pendentif de Liv de sa poche avant de l'enfiler autour du cou.

-C'est vrai, je n'ai jamais rien accompli, mais je m'apprête à faire quelque chose que toi-même tu ne pourras jamais réaliser. Je vais devenir Guerrier Divin au service d'Odin, et ce faisant je protégerais les personnes qui pourraient subir le même sort que moi, ou celui de Liv.

-Toi ? Guerrier Divin ? Sauver les gens ? N'importe quoi ! T'as déjà de la chance que je ne lève pas la main sur toi !

En une seconde, Asbjörn agrippait son père par le cou en le soulevant de quelques centimètres.

-C'est toi qui as de la chance, il y a un an je t'aurais brisé la nuque sans une once d'hésitation, Sigurd. Disait-il avant de le balancer violemment contre un mur. Tu t’inquiétais que je puisse être comme mon grand-père, étant enfant. Rassure-toi, je crois bien que c'est toi qui es comme lui.

Le jeune homme quittait ceux qu'il appelait pour la dernière fois sa famille. Au lieu de chercher un endroit pour dormir, Asbjörn rassemblait son courage une ultime fois puis embarquait le jour même sur un navire direction le volcan Beerenberg. Deux heures après son arrivée, Asbjörn était déjà au cœur de la fournaise. Il saisissait le pendentif de Liv accroché autour de son cou, puis fermait les yeux en pensant à sa défunte dulcinée. Son cosmos s'intensifiait, il ressentait de moins en moins la chaleur du volcan.

-Tu me donnes la force de continuer Liv, comme toujours...

Son entraînement au cœur du volcan dura un an. Il y pratiqua tous les exercices qu'il avait déjà réalisés en compagnie de son maître, corsant de plus en plus leur difficulté. Il apprit également à maîtriser parfaitement son cosmos et ne sentait même plus la fournaise qui l'entourait. Au bout de cette année, un jour comme les autres, alors qu'il se rendait à son entraînement quotidien, un éclair s'abattait au centre du volcan sous ses yeux. Il gravissait alors la pente rocheuse, constatant par la suite qu'au point d'impact de l'éclair se trouvait la même armure qui lui apparut un an plus tôt au cimetière.

Contrairement à cette dernière fois, Asbjörn s'avançait rapidement vers l'armure et n'hésitait pas à la toucher à pleine main, de peur qu'elle lui échappe de nouveau. Au contact du jeune homme, l'armure s'appliquait directement sur lui. Asbjörn savait à ce moment précis qu'il était devenu le nouveau Guerrier Divin de Bêta, celui que l'armure avait choisi. Un nouveau voyage s'entamait pour le nouveau chevalier qui ralliait Asgard et prêtait allégeance à Odin. Entre-temps il apprenait la destruction du Royaume sous-marin de Poséidon, il n'eut toutefois aucune nouvelle de son maître qui restait introuvable. L'objectif était atteint pour Asbjörn qui se trouvait à présent au cœur du volcan de Bêta, toujours avec une pensée pour son amie.

-Liv, j'ai réussi...