Awakening

HRP : Petit RP en attendant le retour de Phobos.

Installé au cœur d'une pièce, le visage à nouveau couvert par ce masque osseux, le héraut attend. Seule la volonté de son Maître pourrait le faire bouger de ces lieux. Les raisons de cette convocation puissante lui sont encore inconnues, des événements semblant avoir compromis la rencontre entre le  dieu et son fanatique serviteur. Genoux au sol, il observe les hauteurs de cette pièce, sa respiration tranquille accompagnant le crépitement des braseros. Hector a quitté les lieux, retournant dans la demeure familiale des Rosenthal. Ainsi Ludwig l'avait ordonné. Les derniers événements se bousculent dans sa tête.

Ai-je été le serviteur que je devais être ? Ai-je été suffisamment efficace et utile à mon Maître ? Ces questions étaient nés de ses pensées, de ses comparaisons. Après tout, ses ancêtres avant lui se sont manifestés comme de grands guides pour le clan. Comme de grandes aides pour leur véritable – et, avouons le, unique – Maître. Arès ? Non, ils ne le servent qu'indirectement. Ils le respectent, comme ils respectent tous les dieux, car ils sont supérieurs, ils sont essence et pouvoir, essentiel à ce monde. Comment ces humains, inférieurs et sans saveur, pourraient réussir à dominer leur propre destin ? Par la Peur. Jamais il n'en doutait et jamais il n'en doutera. Ce n'est qu'en apportant aux humains la véritable essence de la Peur, le fragment le plus pur qu'il soit, que leur évolution pourra débuter. Mais... a t-il réellement agis dans ce but ?

Dame Beatrix, intrigante de génie qui domina la politique de la première dynastie de l'Empire Romain, faisant naître en son sein le flamboyant Neron, son pantin, sa bête... Oh que les flammes étaient belles ! Quand elles montaient jusque dans les cieux, consumant Rome et ses habitants. Oui... elles étaient belles. Eleanore von Rosenthal, celle qui abandonna son véritable foyer pour apporter à ses descendants une protection qui leur faisait défaut encore à cette époque. Un moyen de défendre la mémoire qui, chaque jour d'un Héraut, s'inscrit dans les tomes. L'héritage de toute une lignée. Jamais il ne devait disparaître. Sauf si le Père en décidait autrement. Ils sont nombreux à avoir marqué le monde des Rosenthal. Mais lui ?

Impossible de réfléchir avec tous ces murmures qui envahissent son cerveau. Des voix, de natures différentes, dont les mots rappellent des chants, des prières, des litanies en l'honneur de cette Peur incessante, de cet effroi rampant. Une exaltation, la marque même du Nosferatu, le Père de cette famille. Si ces murmures sont l’œuvre de la lignée du premier héraut, alors il est fort possible qu'ils aient débutés suite au combat contre Dio. Sont-ils là pour rappeler la défaite face à l'humaine Shôko ? Ne pas avoir pu l'emmener dans les Terres Infernales est une frustration qui continue encore de le ronger. La fuite de cette femme, l'apparition de cette manifestation... Se redressant, le héraut commence à s'éloigner du centre de la pièce, venant se poser face à une œuvre picturale. Les mains dans le dos, son masque commence à se résorber, sa chevelure pâle retombant sur son visage tandis que l'obscurité revient peu à peu les engloutir. La défaite contre Setesh reste aussi un événement important, qu'il ne doit pas oublier. Certes, il ne pouvait faire autrement et mourir au nom de son dieu, au nom de ses convictions, il continuerait de le faire, encore et encore... Mais cela soulève une question, qui habitait déjà les souvenirs de ses ancêtres. Quelle est la limite des Spectres ? Ils ne sont peut-être pas les plus nombreux à marcher à travers les époques, mais leur présence questionne sur leur place dans l'évolution imaginée par Phobos. Combien peuvent se vanter d'avoir vu les nations évoluées, disparaître, se reformer ?

L'humanité est une faiblesse, mais elle est un trampoline vers quelque chose de plus grand. La mort est-elle l'une de ces évolutions ? La question se pose, non pas par curiosité, mais par véritable conviction. Qui peut gagner la guerre entre ces allégories que sont la Peur et la Mort ? Baissant légèrement la tête, un fin sourire s'étire contre ses lèvres...

« La Peur. Cela ne fait aucun doute... » Se retournant simplement, il prend congé de la salle, tandis qu’apparaît à côté de lui cette même silhouette qui l'accompagne. Il n'y a aucune raison de s'inquiéter. Il partage la destiné de ses sœurs et de ses frères. Il partage la destiné du héraut de Phobos. Qu'importe le sacrifice à accomplir...

Maintenant, il n'avait plus qu'à attendre. Que ce soit le Seigneur des lieux ou les créatures à son service, il ne sera pas difficile à repérer, obéissant au deuxième ordre qui avait été transmis: ne pas sortir du sanctuaire, attendre la volonté de Phobos.

Les murs tremblent, les yeux se baissent. Cette voix est celle de l'unique souverain du royaume des Abysses. Les mots puissants apportent des frissons, mêmes aux créatures les plus hideuses. L'effroi guette ces monstres, ainsi que la joie. Qui n'est pas heureux de ressentir cette peur, après tout ? Le héraut s'arrête alors, tout comme la silhouette qui l'accompagne – éternelle compagnie, jamais lassante, toujours présente – avant de tourner son visage en direction de l'origine de cette voix. Qu'importe la personne appelée, ces mots ne sont qu'une seule chose : un fil d'Ariane, qu'il faut suivre, avec obéissance. Mais ce n'était pas un simple monstre, une simple gargouille, ou même un quelconque majordome, qui était appelé... Le héraut de Phobos doit rejoindre son Maître. Personne n'oserait les déranger, tant que la volonté du Père de l'Effroi ne l'a pas permis. Sans un regard pour la silhouette – qui laisse entendre, du moins dans l'esprit de son vieil ami, un rire froid – le serviteur le plus loyal de Phobos avance donc. Passant la main sur son masque, des mouvements commencent à se produire contre ce dernier. La matière osseuse semble alors se résorber. Quelques éclats abyssaux se dévoilent, un mouvement indicible, que même le plus courageux ne pourrait supporter, se produit, alors qu'un œil s'ouvre. Le reste du visage se forme, remplaçant totalement ce crâne aux arabesques étranges. La chevelure sombre tombe dans le dos du héraut, alors que son pas rapide et décidé claque contre le marbre du domaine...

Ainsi totalement libéré de ce « masque », Ludwig ouvre les yeux, les mains dans le dos. Son regard se pose contre l'ombre, qui recule légèrement tandis qu'il avance. « Je n'ai pas besoin de toi... Et tu n'es pas autorisé à approcher. » Parler à un être que seuls l'héritier des Rosenthal peut voir est toujours surprenant pour un public ordinaire. Mais, ici, cette silhouette est une réaction ordinaire, un lien avec les Abysses. Elle penche tout de même la tête, avant de disparaître dans un dernier rire malsain. Il serait impoli d'imposer une autre présence au Seigneur de la Peur.

Traversant les couloirs, il observe d'un coup d’œil rapide les sombres gargouilles, les vigies silencieuses du domaine. Pour les faibles, ces créatures sont une épreuve. Combien sont-ils à tomber dans ce couloir, à se refermer sur eux-mêmes, paralysés par la peur qu'impose leurs yeux de pierre ? Bien trop nombreux, malheureusement. Arrivant enfin devant les lourdes portes d'acier et d'ébène, le héraut de Phobos pose solennellement sa main gauche contre sa poitrine, inclinant sa tête devant cette entrée. Pourquoi une telle preuve de respect ? Entrer dans la salle du trône de Phobos signifie pénétrer dans le cœur même de ce domaine. Des énergies indicibles sont éternellement en mouvement et, pour un héraut, cet endroit est plus important encore que les secrets du domaine Rosenthal. Faisant connaître sa présence, le démon allemand observe les portes s'ouvrir lorsqu'il est enfin autorisé à entrer. Rapidement, la présence des énergies mentionnées précédemment font naître un frisson agréable dans le corps du héraut. Un frisson qui lui rappelle, finalement, le véritable lieu où il est né. Le véritable lieu où il vivra, lorsque sa mission sera terminée chez les mortels. Foulant alors le sol de l'Antre de l'Effroi, Ludwig ignore le regard des créatures des ombres et des compagnes de son Seigneur. En rien dérangé par leurs présences, il est finalement à sa place ici. Pourtant... quelque chose de moins monstrueux semble être présent en ces lieux. Un résidu, d'une puissance au demeurant formidable. Il n'est pas difficile de comprendre de quoi vient cette présence : une forme d'existence supérieure, une divinité, était présente en ces lieux il n'y a pas très longtemps. Une divinité différente du seul maître de ces lieux...

Posant alors un genoux au sol, le serviteur baisse la tête. Le visage qu'il a pu voir, le corps qu'il a pu observer... la voix qu'il a pu entendre... et l'énergie qu'il a pu ressentir, lors de la venue des Saints dans le Royaume de la Guerre. Un éclat originel, une forme primaire. Qu'importe le visage, Phobos reste Phobos... mais pour un héraut, pouvoir ressentir cette essence même de la Peur... C'est par respect pour son Seigneur, pour cet endroit, qu'il fait preuve de calme et de dignité... Mais dans son cœur, le lien avec les anciens hérauts s'accentue... et cette joie malsaine, cette vénération, s'associe à son propre fanatisme. Ils aiment ce visage, cette essence...

« Votre Altesse... J'obéis à Votre volonté. »

Le Porteur de Lumière était donc l'origine de ce fragment d'énergie ? Ainsi il n'y avait rien de bien inquiétant à cela. Il n'est pas rare que des êtres à l'existence supérieure se rencontrent et parlent de nombreux sujets, que cela soit les guerres en cours, ou même, comme le souligne si bien le Seigneur de l'Effroi, des « banalités sans intérêts ». La vie des dieux est une succession d'événements plus ou moins intéressants... c'est le lot de tous les éternels. Maintenant, à savoir si cette rencontre était intéressante ou non, ce n'était en aucun cas à Ludwig d'en juger, que cela soit à cause de son absence lors de cet instant bien précis, ou même, tout simplement, du fait de son infériorité par rapport à eux. « Bien, Votre Altesse. » La curiosité de Ludwig aurait pu pousser ce dernier à connaître la raison de la venue du Déchu en ces lieux, mais il n'en est rien. Si son maître l'avait convoqué, par deux fois – la présence de Lucifer expliquant l'ordre de patienter –, ce n'était sûrement pas pour parler des raisons expliquant le mouvement d'entités divines.

Un raisonnement qui semble se confirmer lorsque le Père du Nosferatu en vient à balayer ce sujet d'un simple revers de la main pour se concentrer sur les événements qui se sont déroulés entre leur dernière rencontre et celle-ci. De nombreuses choses se sont déroulées et faire un rapport sur chaque événement n'est sûrement pas ce que souhaite Phobos.

« Eh bien, suite à votre ordre de me mettre au service de Sa Majesté Arès, j'ai rejoint les terres Irlandaises ou j'ai combattu aux côtés de la Prêtresse Alia et du Maître d'Arme Katharina. Notre ordre était de profiter du chaos ambiant pour vaincre les forces qui nous feraient face, qu'importe leur allégeance. Samhain s'était libéré pour tenter d'envahir le monde, mais il semble qu'un groupe de combattants se soient débarrassés de celui-ci. » Les choses étaient posées. Curieux, l'héritier du Nosferatu aurait bien aimé savoir ce que pense le dieu de la peur de Samhain. Mais préférant continuer sur sa lancée, il reprend ses mots. « Bien que je n'ai pu la tuer suite à une intervention cosmique, j'ai tout de même vaincu une Sainte... Je vous prie d’accepter mes excuses pour cet échec. » Une certaine frustration semble apparaître dans la voix de l'abyssal. Ses mots confirment cette réalité : il n'arrive pas à prendre cette victoire comme telle. La mort permet de graver bien plus efficacement le message qu'un héraut transmet à sa victime. Survivre n'est pas permis. Ainsi sont les dirigeants de la famille Rosenthal : fanatiques, passionnés, ils rejettent la notion même de l'échec, détestant plus que tout l'idée que des faibles réussissent à s'échapper. « J'ai aussi vaincu la Titanide Mnémosyne, qui avait participé à la destruction de Samhain, avant de tomber face à Setesh, l'ancien Spectre d'Anubis, maintenant Juge des Enfers. » Cette défaite, bien que violente, n'est finalement pas plus douloureuse que l'humiliation de ne pas avoir pu détacher la tête du corps de cette gamine aux idées manichéennes. Une honte pour un Héraut de la Peur.

Mais qu'importe, Ludwig reprend, continuant avec de nouveaux événements.  « Enfin, lorsque j'ai reçu vos directives concernant certains lieux, je me suis mis en route aux côtés de Dame Siléa pour rejoindre Babylone. J'ai aussi envoyé le Cardinal du Feu et sa sœur – cette dernière avait disparu lors des événements en Irlande – en direction d'Avalon. Je n'ai eu aucune nouvelle de leur part depuis. Malgré tout, je me dois de vous annoncer que les terres anciennes de Babylone appartiennent maintenant à votre Père. Des Saints ont bien tenté de nous empêcher de prendre possession de ces terres, mais Siléa et moi avons tous deux vaincus nos ennemis... »

De nouveau silencieux, les derniers mots résonnent dans la salle du trône tandis que Ludwig reste attentif et patient. Le dernier combat contre Dio n'aura pas été, finalement, difficile. Une stratégie de coups « réservés » animait le Saint durant cette confrontation. Cela l'avait frustré, sur l'instant, pour ne devenir plus qu'un souvenir. Rapidement, le démon allemand tente de voir si des éléments manquent. Mais outre les rencontres avec quelques Saints – rencontre à laquelle le Père de l'Effroi à participer, dans un autre domaine – et d'avoir croisé des membres des forces de Sparte, rien ne semblait être véritablement d'une importance capitale.

Pour les curieux.:

Ainsi le Père de l'Effroi ne cache plus longtemps que nécessaire ses intentions. Avait-il réellement cacher celles-ci d'ailleurs ? Observateur, le Héraut avait bien remarqué une lueur différente dans le regard de son maître, bien qu'en déduire son origine était impossible. Seuls les mots pouvaient réellement expliquer la situation qui se dessine actuellement. Baissant légèrement la tête alors que le silence se mélange à l'obscurité oppressante qui est tombée sur la salle du trône, Ludwig laisse ses idées allers et venir. Serait-ce ainsi que lui, l'héritier du Nosferatu, apporterait sa pierre au puissant édifice qu'est sa famille ? Il ne peut refuser – et son silence en est la preuve, acceptant sans un mot le destin qui lui est imposé –, mais cette décision va mettre fin à une ère. Son corps ne pouvant donner naissance maintenant... le Héraut et le dirigeant des Rosenthal ne seront plus liés. Fermant ses paupières, il inspire silencieusement, redécouvrant les multiples sentiments que cette évolution apporte.

Mais personne ne dira que le Seigneur des Ombres est un être qui ne fait preuve d'aucune générosité. Suite aux explications de son objectif et de la mise en place de ce pentacle, le Père de l'Effroi laisse alors à son Héraut la chance de lui demander une faveur, l'utile don qu'un maître peut offrir à son serviteur. Dominant alors ses propres émotions, le démon allemand laisse son esprit trouver la meilleure faveur à demander au Père du Nosferatu. Puis, tout simplement, il brise le silence qui s'est instauré. La faveur était toute trouvée... « En tant que Héraut de la Peur, je me suis donné de nombreux objectifs, l'un d'entre eux était, comme mes ancêtres avant moi, de guider la Famille Rosenthal et de lui donner un héritier lorsque le moment sera venu. Grâce à mon serviteur, Hector, je sais que l'héritage de ma famille pourra perdurer et saura toujours rester à vos côtés. Mais je souhaite, moi aussi, rester à vos côtés. » Posant ses yeux sur Phobos, le démon reprend alors, doucement. « Je souhaite que votre divin frère n'écrase pas mon âme. Je souhaite que celle-ci vous soit toujours acquise, qu'importe si je dois en sacrifier ma mémoire et l'offrir à la Terreur. Donnez-moi l'autorisation et le plaisir de marcher dans les pas de mes ancêtres, comme il en a toujours été question. Je pourrais ainsi continuer à vous servir, à répondre à votre appel. Même si cela n'est qu'à travers une âme désincarnée. » Hector saura dominer les branches du clan, il saura écrire les dernières pages de la lignée des Hérauts et représentera la nouvelle ère des Rosenthal, une ère toujours liée à la Peur, à l'Horreur... Aux Abysses.

Mais disparaître sans réaliser le véritable désir, sans répondre à cet ordre génétique, serait le pire cauchemar de l'héritier du Nosferatu.

Et alors que le temps des mots semble se terminer, le rituel, lui, commence. Cela serait douloureux, insupportable, même pour une créature comme le Héraut. Les premiers frémissements commencent alors qu'une énergie semble émaner du rituel, s'accrochant à lui, les liens semblant à la fois organiques et osseux, rappelant presque la chitine de créatures arachnoïdes. Le rythme cardiaque du démon gagne en intensité, alors qu'il pose sa main contre son torse. Ce geste, cette fois, n'est pas simplement militaire, mais bien solennel. Ouvrant les paupières pour ne montrer aucune faiblesse durant ce phénomène cosmique, il regarde son Maître. Peu à peu, l'énergie que les liens déversent dans sa chair commence à se graver sur sa peau, des veinules par lesquelles se dégage une brume sombre, cette dernière tournant alors lentement autour du corps qui allait devenir de l'hôte que l'énergie commence à invoquer, sous la forme de résonances, des pulsations qui accompagnent les derniers souffles du dernier Kaiser des Rosenthal.

Les pulsations augmentent en intensité, les veinules creusant plus profondément dans la chair, semblant préparer le corps à un phénomène bien plus violent encore. Son corps tremblant, le Héraut continue pourtant de regarder le Seigneur de l'Effroi. « J'ai... peur Maître... » Un sourire s'étire sur ses lèvres, un rictus qui semble être animé par l'unique fanatisme – non, le désir – du démon, alors que sa main gauche vient rejoindre son visage, les veinules venant creuser celui-ci. « J'ai toujours... eu peur... haha... Car ce n'est qu'ainsi que je po... que Nous pouvions... honorer votre nom... Car ce n'est qu'ainsi que Nous existons... » Les impulsions semblant avoir trouver l'objet de leurs recherches, de nouveaux flux se concentrent alors à l'intérieur de son corps, les liens organiques semblant vibrer sous la puissance du phénomène. « Tout ce que Nous avons pu faire... Tout ce que... Nous avons pu ressentir... » Une plainte douloureuse traverse alors ses lèvres, tandis qu'une pression s'exerce brutalement sur son corps. Oui, il y avait « ça » aussi... Habituellement, son corps sait le subir, sait le faire de lui-même... mais là... « Nous ne l'avons pas fait... ni ressenti... que par devoir, honneur, ou... besoin génétique... C'était aussi... une joie... ! » Le temps des mots est ainsi définitivement terminé, alors qu'un hurlement de douleur traverse le corps du démon abyssal.

Violemment, son corps se détache de la relique du Nosferatu. La cuirasse sombre à l'apparence démoniaque, accrochée aux appendices chitineuses, est ainsi séparée de Ludwig, rendant le physique de ce dernier instable. Son œil, animé d'une lueur de clair de lune, semble continuer de fixer Phobos. Si ce dernier n'avait pas été présent, il aurait sûrement laissé son corps sur le sol, à se tenir la tête, priant peut-être même que ce calvaire s'arrête, de ne plus être ce qu'il est. Car c'est bien la nature du démon qui obligeait ce dernier à ressentir tant de souffrance en cet instant, qui l'aurait poussé à être faible dans une autre situation. Une nature abyssale, qu'un dieu doit reforger à l'apparence qu'il souhaite. Un dieu qui, peu à peu, prend place dans ce corps, chassant cet esprit. L'image du Père de l'Effroi s'efface alors peu à peu, tandis que les ombres englobent l'âme. Des murmures résonnent dans son esprit, une lueur pâle apparaissant au loin. Cherchant à tendre la main dans sa direction, il est rapidement stoppé par une seconde force, qui l'attire alors loin de cette lumière, dans des profondeurs insondables. L'âme déchirée laisse alors les fragments de sa mémoire, tandis que les Abysses accueillent Ludwig. Les ombres, plus profondes encore que l'abîme des océans, plus sombre que les nuits sans lune. Et une voix qui résonne légèrement, une voix qu'il n'avait plus entendue depuis les Enfers.

« Bienvenue à la maison. » Des orbes d'ambres s'ouvrent alors au-dessus de l'âme épuisée, un sourire se dessinant dans les ombres, tandis que d'autres silhouettes se forment dans les alentours. Il avait donc obéi, il n'était pas venu. Il l'avait juste... attendu.

***

Une flamme cendrée enveloppe le corps abyssal sans existence, dévorant la chair pour entamer la transformation de celle-ci. Un nouveau souffle de vie semble apparaître lorsque la brume sombre s'efface d'une simple impulsion d'énergie, dévoilant une masse sombre, contre laquelle goutte une eau sanglante. Animée par une énergie aux lueurs de clair de lune, cette dernière commence à sculpter la masse, lui donnant forme, dessinant une silhouette plus grande que l'avait été celle de l'ancien héraut. Rapidement, des ombres enveloppent cette silhouette pour former des vêtements sombres, une cape venant recouvrir ceux-ci, tombant autour de son corps. Ce dernier s'extraie alors des ombres, avançant pour quitter le pentacle tracé par le Père de l'Effroi. Sa main gauche venant suivre le tracé de sa barbe, le nouvel acteur sur l'échiquier politique semble finalement incarné. Ouvrant alors ses yeux le dieu de la Terreur pose son regard sur son frère... Un regard qui, pendant un instant, laisse échapper une lueur de cette même aura pâle, avant que celle-ci ne s'efface, laissant place à une obscurité naturellement autoritaire.

« Tu as toujours autant d'imagination... » C'est bien la première qu'il voyait une telle méthode d'apparition d'une divinité. Mais c'est justement parce que c'est une première que cela a pu l'aider. Il aurait été difficile, autrement, pour la Terreur de revenir sur le devant de la scène, lui qui avait préféré le silence. Ouvrant et fermant sa main - tout en l'observant, semblant prendre conscience du corps que lui avait fourni son frère - le fils d'Arès se retourne alors, regardant la Cuirasse du Nosferatu. « Je ne pouvais ignorer ton appel... et voir le sacrifice que tu as dû consentir pour une telle chose me pousse à te remercier. J'ai une dette envers toi, mon Frère. » Faisant de nouveau dos à la Cuirasse, il regarde maintenant Phobos, un léger sourire naissant contre ses lèvres alors qu'il inspire profondément la puissance qui coule dans cet endroit, ainsi qu'à travers leurs corps respectifs. Que cela lui avait manqué. Malgré tout ce qu'il peut dire concernant les origines de la Terreur, les champs de bataille lui avaient manqué. Le chaos qui, éternellement, tisse les conflits, marquant profondément ce monde, tout en ignorant les objectifs de conquête... Oui, cette odeur, celle des émotions, de la folie, des puissances utilisées sans limite... Tout ceci lui avait manqué. Mais ce silence était essentiel, que cela soit pour lui ou pour les Berserkers. Il lui faudrait tout de même être attentif à ce que les erreurs du passé ne se reproduisent pas.

« C'est un plaisir d'être à nouveau à tes côtés, mon Frère. »

« Il semble que j'ai bien fait de remédier à quelques... problèmes.... au vu de ce que tu me raconte sur cette époque. Et je veux bien, merci. » Ouvrant légèrement ses doigts dès la fin des quelques mots, posant ses yeux sur la coupe qui apparaît entre ceux-ci. Portant le verre à ses lèvres, il laisse alors quelques gorgées venir rafraîchir son palais, alors que son frère le prévient du réveil des différents membres du clan. Voilà un détail troublant. Il serait idiot de considérer la décision de Phobos comme précipité, au contraire. S'il en est venue à de telles extrémités, alors que le clan divin est réveillé... A sa dernière apparition sur l'échiquier politique des Guerres Divines, Deimos faisait déjà équipe avec la Peur ainsi que leur père, Arès. Ainsi leur Mère et Harmonie étaient maintenant pleinement réveillées... « Je vois... Merci de m'avoir prévenu mon Frère. » Aurait-il préféré le contraire ? Une question qu'il est préférable de ne pas étudier.

Bien que poser cette interrogation aurait eu au moins le mérite de ne pas avoir à subir cette petite provocation et ironie de la part de son père. Ce démon. Ce sale parasite a donc obligé Phobos à bouger ? « Je l'avais presque oublié celui-ci... » Ce qui n'est pas une bonne chose. Par le passé, certaines de ses décisions ont été parasitées par une approche plus brutale, plus guerrière, de la Terreur. Un fait qui s'explique sûrement par la présence d'Arès, ainsi que par plusieurs événements, dont un voyage dans les Abysses du monde. « Ce genre de choses ne se... reproduira plus. Je me suis débarrassé de ce qui n'allait pas. » La Terreur n'a pas besoin de la Guerre pour agir, mais elle trouvera son compte en celle-ci. Pourquoi ? Parce que la Guerre, par contre, fera toujours naître la Terreur. Ce n'est qu'ainsi qu'il faut exister. Pas autrement. Mais si les choses sont plus claires, ce n'est pas le cas de certains faits accomplis par le passé, surtout à cette époque – une période pas si lointaine que ça, d'ailleurs. La réputation qu'il s'est bâti ainsi devra être brisée, pierre par pierre, pour redonner un éclat, sombre et vicieux, à ce qu'il est, à ce qu'il représente. Ce ne sera pas le travail le plus simple à faire. Après tout, la réputation... voilà un puissant ennemis que même une divinité ne peut vaincre facilement.

Déposant la coupe de vin – décidément, son frère avait toujours bon goût –, la Terreur croise alors les bras, tandis que Phobos fait part des raisons de cette invocation. Son regard s'assombrissant, la Terreur hoche doucement la tête, approchant de son frère. « Je comprends... Je vais me charger de ça. Toi... » Il pose la main sur son épaule,ses lèvres s'étirant en un léger sourire, rare sont ceux qui auraient pu voir une expression aussi douce sur son visage. « Prends le temps de te reposer. Je m'occuperais de voir Père, ainsi que d'administrer les Berserkers présents. Si les choses sont inquiétantes, n'oublie pas tout de même que... rien ne presse. Au revoir, mon Frère. » Inclinant alors la tête, il décide donc de laisser son frère se reposer tranquillement, le temps qu'il lui faudra, tandis qu'il quitte les lieux. Rejoignant bientôt l'air de Sparte, il inspire alors profondément, les paupières closes.

Il avance alors, quittant le domaine de son Frère, tandis que de son ombre sort une créature bestiale, cette dernière se posant devant la porte. Personne ne dérangera le repos de Phobos.

==> Ailleurs.