Épiméthée, Fils de Japet et de Thémis

Épiméthée n'est pas quelqu'un qui montre facilement ses émotions. Lui qui était si impulsif  avec le cri de haine facile est devenu un être calme et taciturne. Du moins en apparence. Le titan a d'ailleurs perdu sa fâcheuse manie de jurer à tout va.  

Il prend aussi  le temps d'observer avant d'attaquer, de juger avant de pourfendre, de penser avant de dire. Mais les mauvaises habitudes reviennent parfois au galop. Il vaut donc mieux éviter de tester sa patience trop longtemps, même si celle-ci est bien plus grande que celle de certains de ses pairs.

Ce n'est pas pour autant un être désagréable à vivre. Il est respectueux de ses aînés, protecteurs envers ses frères et ses cousins titans, attentionné envers ses cousines titanides, d'une fidélité sans failles envers Cronos, mais méfiant envers les membres de sa famille qui ont trahi leur souverain lors de la Titanomachie. Il est probable qu'il ne leur pardonnera jamais leur traîtrise qui conduisit à la chute des déités archaïques. Pour lui ils sont bien pires que les olympiens même s'il présente à leurs propos un visage neutre et sans rancune.

Quelque part, cet être plusieurs fois millénaire est un peu fourbe. Du moins, il l'est devenu avec le temps. Son passé lui a appris que les ennemis des titans ne leur feront aucuns cadeaux et que tous les coups leurs sont bons  afin de gagner. Epiméthée a fait le choix de suivre les mêmes méthodes.

D'ailleurs, la grande guerre qui conduisit à sa chute lui aura aussi enseigné à être humble et à ne plus sous-estimé ses adversaires quel que soit leurs origines ou leurs allégeances. Ainsi, on ne le verra jamais railler un ennemi sur un champs de bataille. Par contre, s'il sent que son opposant lui causera des ennuis à  l'avenir, Épiméthée préférera toujours l'achever plutôt que devoir craindre une nouvelle attaque. En cela, il peut passer pour impitoyable.

Mais avant tout, Épiméthée est sans doute un des titans les plus attachés au monde des humains. Son rêve serait de revoir naître l'harmonie de l'âge d'or. Mais pour cela il ne voit qu'une solution: mettre un terme aux combats entre les Dieux Olympiens qui ne vivent que pour leurs guerres saintes. Partisan des solutions radicales, Epiméthée prône leur extermination pure et simple et le retour de Cronos en tant que souverain suprême. Alors, espére-t-il, les temps bénis reviendront et les titans ainsi que leur peuple pourront de nouveau gouter à la félicité éternelle.  

Épiméthée, le Titan
Épiméthée signifie  "qui réfléchit après coup". Ses parents furent fort inspirés le jour de sa naissance car on n'aurait pas pu trouver de meilleurs noms pour l'impulsif titan qu'il était.

Dans sa jeunesse, son caractère était qualifié d'irascible, colérique, sûr de lui et surtout doté d'un incroyable égoïsme ; seuls comptaient pour lui les membres de sa famille et sa « petite » personne. Le reste ne valait rien et était forcément plus faible qu'eux. De simples jouets avec lesquels le titan jouait au magnanime, les traitants comme des enfants.

Son arrogance d'alors pouvait être en partie excusée par sa naïveté, son jeune âge et surtout le fait qu'Épiméthée était né durant le Fameux âge d'or. Il n'avait donc pas contrairement à ses parents, oncles et tantes, subi les affres de la deuxième guerre apocalyptique. Ainsi, pour lui qui ne connaissait qu'un monde de paix et de prospérité, les titans étaient les garants légitimes et  éternels de ce printemps perpétuel.

C'est dit-on, à cette époque-là qu'il créa les animaux à partir de simples morceaux de pierre et d'argile. Si vous l'interrogez là-dessus, vous aurez le droit qu'à un simple sourire sans explication. Mais si vous insistez sur la question de la création de l'homme, il vous invitera à interroger son frère Prométhée à ce sujet, car selon leur père Japet, c'est à lui  qu'on doit ce miracle. Son sourire s'étirera alors en une mince grimace mystérieuse.

Alors que ce soit légendes ou vérités,  les heures furent douces  pour le jeune Titan. Il parcourait la terre ivre de découvertes et d'insouciance, se mêlait aux mortels par jeux et sculptait tout son cœur content sans se soucier des nuages noirs qui s'amoncelaient sur son avenir et de la folie de Cronos.

Et un jour il aima. Ce fut pour lui une découverte. un amour puissant et exclusif qui l'éloigna un peu plus des préoccupations trop terre à terre comme la guerre qui se préparait.

La Titanomachie fut une prise de conscience aussi brutale que dévastatrice de ses erreurs. Le Parricide du Seigneur des Archaïques, la renaissance des Olympiens,la perte de son être aimé,  la guerre, la défaite, et puis l'enferment dans le tartare… tout cela, il le prit de pleins fouets. Son existence dorée fut balayée. Il tenta de lutter. Il prit les armes aux cotés de ses parents.

Le jeune Titan fit même preuve de courage au combat. Et jamais Épiméthée n'abandonna sa famille même quand la défaite fut certaine pour les déités archaïques. Il aurait préférait se tuer lui-même plutôt que de devenir comme ces traites d'Océanos et de Mnémosyne.

Malheureusement, nous connaissons la suite. Les efforts de Cronos et des siens furent vains. Leurs rôles, leur grandeur furent oubliés. D'autres s’attribuèrent le mérite de leur labeur, récoltant indument les lauriers de leur gloire. Les titans subirent l'exil et la captivité dans les entrailles du Tartare.

Et la réclusion d’Épiméthée commença. Mais dans les ténèbres, il trouva enfin le temps de réfléchir pour comprendre. Ce qui sortit de cette réflexion, nul ne le sait encore, mais elle prit fin avec la disparition de ses chaînes et sa libération du tartare.

Benigno Genovese, L'homme
Benigno est né le 20 juin 1719 à Francavilla en Sicile. Cette date n'est rien pour les dieux, mais elle marque la victoire des Britanniques sur les Autrichiens lors d'une bataille mémorable aux portes de  cette bourgade. Ce jour marque surtout la mise à sac de la ferme familiale par des soldats ce qui jeta ses parents et leurs cinq enfants sur les routes, les obligeants à quitter leur île pour le continent.

Ils y connurent la faim, le froid et pour les plus fragiles d'entre eux la mort. Au cours de ces 10 années de disette Benigno perdit  sœurs et un père avant de voir les forces de sa mère décliner lentement jusqu'à qu'elle tombe gravement malade.

Dans le petit foyer, il ne resta bientôt plus que l'enfant et deux de ses sœurs. La vie était dure mais ils étaient unis, faisant face à l'adversité. Petit à petit leur situation à tous les trois s'améliora.  Rosana, l'aînée avait trouvé un époux. L'homme était bienveillant. Il accueillit son beau-frère et sa belle-sœur sous son toit. Quelque mois plus tard, Julietta trouvait un travail comme lingère dans une riche demeure de Naples. Benigno fut quant à lui engagé à l'âge de 10 ans comme apprenti chez un sculpteur. Le travail était dur, mais il lui plaisait. Comme il était doué et travailleur, son maître voyait déjà en lui son successeur.

Malheureusement, en ces temps d'infortune, on ne reste pas longtemps enfant et on devient un homme avant même de le vouloir. Une nouvelle guerre se préparait. L'armée avait besoin de bras. Un orphelin n'était rien. On pouvait l'envoyer à la boucherie sans remords. On le réquisitionna pour servir de chaire à canon. Son maître s'interposa. Mais face à la milice, le vieillard n'eut aucune chance. Il fut roué de coups et laissé pour mort tandis qu'on emmenait de force l'enfant de 14 ans pour en faire un soldat.

13 ans passèrent.  Benigno était devenu un mercenaire qui courrait d'un champs de bataille à un autre. Son visage était tanné par le soleil le vent et les intempéries. Ses yeux gris se faisaient ternes. Sa carrure était colossale, tout en muscle. De nombreuses estafilades couturées son corps, témoins de ses combats. Ses cheveux , longs et bouclés comme ceux des filles quand il était enfants, étaient maintenant rêches et courts. On le disait imbattable, fort comme un buffle, mais aussi froid et taciturne. La guerre seule semblait être sa raison de vivre.

Et pourtant, Benigno continuait à manipuler la terre et la boue. Sous ses énormes mains apparaissaient des sculptures délicates que ses doigts agiles embellissaient de milliers et minuscules détails. Un jour il créait un oiseau prenant son envol, un autre une fleur, là un lion et demain une sirène. Dans ces rares moments de plénitudes, il retrouvait le sourire.

Un jour, après une bataille particulièrement éprouvante,  Benigno repéra un affleurement de glaise. Il avait plu. Elle était parfaite. Lisse et brillante. De quoi créer un chef d’œuvre. L'homme ne put s'empêcher d'aller la manipuler. Il avait en tête l'image d'une jolie ballerine. Mais c'est autre chose qui s'insinua dans son esprit et qui depuis ne le quitta plus, prenant le contrôle de son corps.


9 ans plus tard...
Après quelques années à errer sous l'apparence et le nom du mercenaire italien Benigno Genovese, Épiméthée reprit le chemin du Chronos Labyrinthos. Il y retrouva certains des siens qui comme lui c'était libéré de leur prison du tartare.

Il y avait beaucoup à faire dans leur territoire laissé depuis trop longtemps à l'abandon. Et un peuple qui avait besoin d'être rassuré et guidé. Épiméthée eut ses journées fort occupées. D'autant que les révélations des origines de la malédiction qui avait pesée sur les Dieux archaïques lui donnait des insomnies. Comment Gaïa avait-elle pu trahir sa descendance ? Et pourquoi...

Malgré tout, le titan gardait toujours un œil sur le monde des mortels s'autorisant quelques escapades parmi les hommes. Des fois parmi le peuple des titans, mais le plus souvent sur la terre elle-même. Épiméthée fit preuve d'assez de prudence pour ne pas se faire repérer lors de ses voyages en terrains ennemis.

C'est ainsi qu'il vit d'années en années que les guerres entre les dieux Olympiens dévastaient de plus en plus cette dimension.


Une colère sourde commença à gagner le fils de Japer et de Thémis.

Puis vint le terrible hiver et ses créatures de cauchemars. Là encore, des morts,  des animaux  exterminés, des territoires ravagés... ceux qui se vantaient d'être les maîtres du monde se montrèrent si faibles, si longs à résoudre le problème. Même pour défendre leurs propres territoires, ils se comportaient comme des incapables.


Il était grand temps que les titans interviennent pour mettre une fin définitive à cette folie. 1755 semblait une année avec le potentiel pour cela.

On ne choisit pas sa famille , ses parents, , ni son roi. Épiméthée suit Cronos car c'est pour lui un devoir du sang. Une sorte d'allégeance tacite que devrait respecter tous les titans.