Ces vertes et riantes contrées qui me manquaient tant

En un souffle, Mnémosyne se retrouva dans ce lieu qu'elle haïssait tant. Elle aurait mieux fait d'écouter Océanos, qui lui avait conseillé de rentrer tant qu'il en était encore temps. Ou alors...
Un doute insidieux s'insinua dans l'esprit de la Titanide, qui ressentit un frisson semblable à la peur omniprésente dans les abîmes. Et si... Et si son frère n'avait insisté sur ce point que parce qu'il savait qu'elle ne lui obéirait pas ? Et si il l'avait manipulée, connaissant les dangers qu'elle encourait en restant en Irlande ? Et si... Et s'il l'avait incitée à courir à sa mort ?

La divinité chassa ces pensées absurdes de son esprit, et elle ne put ignorer les espèces de graines que la peur avait laissées dans son esprit.
Pour l'instant, ce qui l' inquiétait le plus était l'état de sa sôma. Celle ci était morte. Il faudrait trouver un moyen de la faire réparer. Il s'agissait de l'une des rares situations où la Mémoire ne pouvait se débrouiller seule, et elle détestait cela.

De toutes façons le Tartare la torturerait. De toutes façons elle renaîtrait. De toutes façons elle mourrait à nouveau et reviendrait ici. Alors autant sortir au plus vite.

"Dis moi, toi qui règne sur le Tartare... Tu n'en as pas assez de voir passer sans arrêt les membres de ma famille ?"

Sa voix ne contenait aucune nuance de défi. Il n'y avait que de la lassitude.

« Encore eux... »

La voix malsaine du maître des lieux résonne dans l'environnement de souffre, de poussières et de cendres. Ses mots s'accompagnent alors d'un souffle glacial, douloureux... tandis qu'une vive douleur traverse le corps, l'âme, de cette divinité déchue. Une silhouette se dessine, au loin, avançant lentement. Un spectre, ses mains visibles seulement grâce à la présence de gantelets sombres, son « corps invisible » recouvert d'un manteau, qui laisse parfois voir d'étranges volutes noires. Aux yeux des dieux eux-mêmes, le véritable corps de cet être est invisible, car la nature n'a jamais pu lui donner une apparence suffisamment supportable... Ou peut-être est-ce que les déités espèrent.

« Encore les Titans... Rien ne changera donc dans ce monde ? Votre place est-elle définitivement en ces lieux ? ! » Sa voix obscure résonne alors brutalement, la douleur ressentie par la Titanide s'intensifiant brutalement. Elle sent ce regard invisible se poser sur elle, alors que l'être dominant ce monde s'arrête près de son corps. « Aurais-tu retrouvé ta cervelle ? La dernière fois tu étais qu'une décérébrée... et une maîtresse dans l'art d'empaler son neveu... ahahah ! » Les souvenirs de cet acte reviennent alors dans l'esprit de la Titanide, tandis qu'une pression intense l'oblige à rejoindre le sol. « Les Titans m'ennuient... »

Puis, brutalement, il lève la main, dans un geste de dédain, faisant subir de nouveau mille morts à la déité. Puis, d'un claquement de doigt, il fait disparaître Mnémosyne. Oh, elle ne se sentait pas libre. Loin de là... son corps s'écrase dans les ombres... Des chaînes percent violemment son corps, dont l'une traversant sa poitrine, s'enfonçant dans ce qui pourrait être le cœur d'un être vivant. Mais elle n'est pas seule dans cet environnement. Pas très loin, à sa gauche, se trouve une silhouette recoquillée sur elle-même, son corps de couleur cendre laissant voir de profondes marques de brûlures sur son côté gauche. L'infime aura n'est pas celle d'un Titan qu'elle a rencontré durant l'âge d'or... et pourtant, elle y ressemble. Pire encore... elle semble proche de cet environnement... Oui...

« Uhm... ? » Il lève la tête, observant alors la déité de ses yeux aux sclères sombres et aux iris écarlates. Sa voix semble... doublée, comme si son esprit était parasité par une once de « vie » qui n'est pas la sienne. « Ti...tanide... Fille de... Gaïa... »

A la laconique plainte poussée par le seigneur des lieux, Mnémosyne supposa qu'elle n'était pas la seule que ce running gag de mauvais goût n'amusait plus depuis longtemps. Encouragée par ces pensées elle se redressa et, fantomatique ombre de défunte, avança quelque peu à travers cette plaine morne et déchiquetée. Elle s'arrêta après un instant et, toujours en flottant, dirigea sa voix vers la silhouette qui commençait de se former, au loin:

"Oui, encore nous... Mais ce n'est pas que ça nous amuse de venir ici. Nous serions prêts à ne plus remettre les pieds dans votre désolante demeure, si vous nous donniez les moyens d'expliquer au reste du monde que ma famille n'est ni un hochet ni un jouet sur lequel on tape quand on s'ennuie."

En venir à demander l'aide du Tartare, à demi-mot... Mais la Titanide est trop lasse, et la haine vivace qu'elle avait pu autrefois ressentir pour cette entité commençait à s'estomper. Elle ne chercherait pas à se voiler les yeux face à la déchéance de sa famille. Ils étaient peu. Ils étaient faibles. Ils avaient perdu toute autorité, toute crédibilité, devant les autres dieux et mortels, suite à certaines erreurs de communication et à de mauvaises décisions diplomatiques ou stratégiques. Comme si la malédiction de Gaïa les poursuivait avec une malchance titanesque dont ils ne pourraient se débarrasser et qui vouerait chacun de leur pas à l'échec.
A moins que... A moins que, pour une raison ignorée de la déité, ce soient ses frères et soeurs qui aient sciemment tout saboté.

Elle n'eut pas le temps de s'attarder sur cette supposition aussi hasardeuse qu'absurde. En même temps que se formait la silhouette d'un corps, enveloppée d'un manteau, une douleur de plus en plus insoutenable vrilla l'âme de Mnémosyne. Celle-ci, par fierté, tenta de rester debout, de ne pas ciller. Elle y parvint quelques longues et intolérables secondes puis, sous une souffrance de plus en plus accrue, elle se mit à flotter de moins en moins haut, tandis que ce qui aurait dû être ses bras se resserrèrent autour de ce qui fut jadis son torse. Sa seule victoire fut alors de n'avoir poussé ni plainte ni supplication, sous le regard scrutateur du Tartare.
Celui-ci reprit la parole, pour l'insulter. La Mémoire poussa un long soupir. Elle commençait à se demander si cette divinité était fondamentalement méchante ou fondamentalement immature. Il aurait pourtant pu être extrêmement intéressant de mener une conversation avec un être aussi ancien.

"Dois-je vous rappeler qui m'avait volé ma cervelle?"

Vint alors la révélation, alors que les souvenirs de sa précédente mort inondaient son esprit. Ainsi... Ainsi ce Lebouquet, cet être attachant qui semblait pourtant la haïr, n'était nul autre que son neveu? Il restait bien sûr à savoir lequel.
Sous le choc, la Titanide resta quelques secondes sans réagir.

"Mon... Neveu? Et où est-il maintenant? Qu'en avez-vous fait?"

Elle passa sous silence les accusations mensongères de velléités de meurtre de son neveu. Elle ne l'avait pas empalé. C'était le Tartare lui-même qui les avait forcés à choisir entre rester empalés ou choir vers un inconnu rempli de promesses de tortures. Autant dire que la décision était prise pour les deux Titans. Et, à l'époque, Mnémosyne ne connaissait pas assez de mots de vocabulaire pour convaincre Epiméthée vers l'une ou l'autre des options.
Prouvant par là que son âge mental était plus élevé que celui du Tartare, elle garda le silence sur ce point.

"C'est étrange... Mais vous aussi vous nous ennuyez. Si on pouvait se passer de ces jours de congés gratuits ce serait avec joie."

Répondre ou ne pas répondre... Voilà une alternative totalement vaine et vide de sens. La Mémoire avait signé malgré elle pour une séance de torture, elle serait de toutes façons le jouet du Tartare pour le temps imparti à sa mort.
La seule question intéressante était "comment". Et, en l'occurrence, ce fut une longue chute à travers les ténèbres.

Mnémosyne ne s'inquiéta pas. L'inquiétude, dans un lieu tel que le Tartare, n'était rien d'autre qu'un sentiment futile. Chaque parole, chaque acte, chaque souffrance amènerait une autre torture, aussi certainement que un et un font deux. Elle se contenta d'attendre patiemment la fin de sa chute.
Une vive brûlure froide de métal transperça son âme. De surprise comme de douleur, elle sursauta. De nombreuses autres chaînes apparurent alors et la transpercèrent, perçant même ce qui aurait dû être son coeur. Mnémosyne ferma ses paupières et ferma les poings. Le Tartare avait décidément une imagination détestable.
Ce fut un cosmos qui la tira de son agonie. Aussitôt, la mémoire rouvrit les yeux, se demandant quel membre de sa famille le seigneur des lieux avait trouvé amusant de placer en sa compagnie.

Il s'agissait d'un être affreusement blessé par les flammes. Heureusement il était conscient car, à l'arrivée de sa mère/tante/soeur/cousine/belle-mère/grand-mère/trisaïeule -de toute façon il y en a au moins un de vrai-, il porta sur elle un regard pourpre.

"En effet... Qui es-tu?"

Mnémosyne tendait une main vers lui, comme si un quelconque réconfort pouvait être apporté dans le plus cruel cercle des Enfers.
Elle fit taire la légère inquiétude due au fait qu'elle ne reconnaissait pas son cosmos.

L'entité préfère ignorer la Titanide, la laissant sombrer dans cette prison où l'attend une autre âme errante. Outre les brûlures, l'être face à elle semble être dans un état qu'on ne peut atteindre qu'après avoir vécu de terribles séances de tortures dans cet environnement obscure. Bien qu'il observe la Titanide, il donne l'impression de ne pas la voir et réagi seulement après quelques secondes à la main tendue de Mnémosyne. Il recule... loin ? Non... tout comme elle, son corps est relié aux ombres par une chaîne mais, pire encore, on peut enfin observer, autour d'eux, une horizon totalement recouverte par un lac sombre. Les liens d'acier s'enfoncent dans ce liquide, ce dernier ayant d'ailleurs une certaine vie, la titanide peut le ressentir à travers sa chaîne...

Une vie propre, malsaine et oppressante. Cet endroit va la dévorer...

« Qui... je suis... ? » Cette question semble importante même pour lui. Il regarde à droite... puis à gauche... il donne l'impression de chercher quelqu'un, ou d'attendre une réponse qui ne vient pas... Non... il est tout seul maintenant. Mais sa mémoire n'est pas si défaillante que ça. Il lui faut quelques minutes, fouillant dans son esprit transformé en véritable dédale pour retrouver son identité. « Typhon... Je suis le fils de Gaïa et... du Tartare. » À ces mots, une vibration semble traverser l'espace, le lac et les chaînes. Le fils crée telle une arme est donc maintenant en ces lieux... et son regard sombre et vide se pose de nouveau sur Mnémosyne.

« Tu as été tué... Vous avez donc refusé la proposition ? » Dans son esprit, c'est une possibilité. Sa notion du temps s'est perdue dès ses premières minutes en ces lieux, dès les premières souffrances. Après sa défaite, son adversaire s'était envolé. Il restait ces deux êtres... dont l'âme sombre qui semblait intéressé par la force mystique des Titans. Le Dunamis... il avait offert un fragment de ce pouvoir... Était-ce pour cela qu'il était dans cet état ? Mais le temps est-il toujours aux questions … ? En effet, l'îlot sur lequel repose les deux titans s'effrite peu à peu.

Pas même un écho ne répondit aux paroles de la Titanide. Le Tartare était il trop fatigué d'elle pour ne même plus entretenir la conversation ou expérimentait il une nouvelle forme de torture, plus cruelle que ses habituelles railleries ?
Mnémosyne s'en moquait. S'il décidait de l'ignorer, elle n'irait pas le chercher, il ne lui manquait pas. Et puis elle avait une autre personne, bien plus intrigante, bien plus intéressante, avec qui parler.

Elle tenta de se rapprocher de cette divinité qu'elle était à présent certaine de n'avoir eu que le temps d'entre apercevoir aux temps mythologiques. Et, après ce moment, leurs routes ne s'étaient jamais croisées avant se moment.
Le douloureux glissement des chaînes à travers ses chairs tandis qu'elle avançait causa un instant d'arrêt, les poings serrés. Pas à pas, laissant à chaque fois le métal se rééquilibrer et raviver la souffrance, elle se rapprocha de son beau frère, lui aussi enchaîné comme une perle sur un collier.

Le prisonnier parla, d'une voix qui jadis aurait fait trembler tous les mortels. Mais aujourd'hui, chaque mot qu'il prononçait prouvait qu'il avait été entièrement détruit.
La supposition qu'il fit quant à la cause de la mort de la Mémoire surprit celle ci, qui prit garde à ne pas sursauter :

"Le contrat... Quel contrat ? Et c'est à cause de cela que tu as péri?"

Il se présenta alors. Typhon. Et le Tartare, avec son sens de la dramatisation, se fit à nouveau entendre.

"Typhon... Nous sortirons de là ensemble."

« Tu... ne t'es pas... présentée... Le Spectre... » En prononçant ces quelques mots, le titan déchu ressent de nouveaux spasmes douloureux. L'existence d'une victime du Tartare n'est en rien agréable, qu'importe si elle est née de la substance de la déité ou non, à ses yeux, ils sont identiques. Forçant alors sur la douleur, il reprend. « Le Spectre... il parlait... de Mnémosyne... à son Maître... C'est... toi ? » Cela ne changerait rien à la situation. Qu'importe la Titanide qui était à ses côtés, elle ne pourrait pas le libérer de ce paysage violent et terrifiant. Mais, elle n'est pas au courant. Ainsi, la divinité n'avait pas rencontré Océanos, Krios, ou encore Setesh, depuis la première transmission du message des Enfers. Ce serait donc à lui de le faire ? Bah... après tout, il avait dit qu'il le ferait et mourir de la main de la Wyvern ne change pas réellement ce fait. Après tout, autant la mettre au courant. « Les Enfers... laissent le choix aux Titans... Ils peuvent accepter d'être annexés par les forces d'Hadès... ou alors mourir. »

Au moins, l'information était maintenant donnée. Océanos saura prévenir les vivants... s'il ne compte pas faire la même chose que Typhon. En tout cas, la Titanide fait preuve de courage – ou serait-ce de bêtise ? - en lançant, d'une voix qui semble emplie de promesses, qu'elle et lui sortiront de là... C'est à ce moment là qu'une autre voix résonne dans ce royaume obscure.

« Magnifique... preuve d'amour. Mais peut-être que la divinité que tu es devrait apprendre à réfléchir, avant de parler, Mnémosyne. » Ainsi parle le maître des lieux, qui écoute tout, voit tout, ressent tout, dans son domaine. Il continue, invisible... « Typhon... Je te laisserais sortir si tu en as la puissance... Quant à toi Mnémosyne, essaye de me distraire un peu. Pour une fois. » Puis un claquement résonne, le corps de Typhon s'effondrant brutalement au sol alors que le secret des chaînes se dévoile peu à peu : les deux êtres sont en fait totalement reliés entre eux par les flots, à travers une seule et même chaîne.

Une violente force traverse alors le corps de Mnémosyne, alors qu'une douleur fulgurante déchire sa chair. Et la voix de Typhon résonne dans son esprit, alors que les souvenirs du dieu se mélangent aux siens. Sa naissance, son enfermement, cet être humain qui l'a accompagné, qui l'a rendu plus fort... Le combat contre le Spectre... L'entité... La rencontre avec Hadès. « Un... nouveau corps... Plus de puissance... dans ce corps... Plus de puissance ! » L'îlot, lui, continue de s'effriter, l'espace de vie devenant de plus en plus étroit. Il ne reste pas beaucoup de temps à Mnémosyne pour « être plus forte » que Typhon... Très peu de temps.

Devant les spasmes qui à nouveau secouèrent Typhon, Mnémosyne posa une main fantomatique sur ce qui aurait autrefois pu être une épaule. Elle avait en effet oublié de se présenter, son visage s'assombrit un instant. Il mentionna alors un Spectre qui l'aurait mentionnée... Elle ne s'attendait pas à avoir une telle notoriété, mais elle ne put que confirmer.

"Je suis en effet Mnémosyne."

Dans un lieu tel que le Tartare, la Titanide jugea bon de couper court aux titres tels que "personnification de la Mémoire" ou "celle qui sait tout ce qui fut, ce qui est et ce qui sera". Il n'y avait nul besoin de paraître pompeux ou prétentieux là où elle ne devait qu'être châtiée, ce serait mal venu.
Typhon présenta alors le chantage que les Spectres soumettaient aux Titans. Mnémosyne eut une première réaction de colère. Sa famille était libre. Ils étaient fiers. Ils ne se soumettaient à personne.
Puis elle réfléchit à la situation. Il n'y avait actuellement que deux ou trois Titans éveillés dans le monde, c'est à dire pas grand chose. D'eux mêmes, ils ne pouvaient exister sans être une proie facile pour le premier guerrier venu. Être intégrés à une armée pouvait être une solution pour survivre dans un premier temps. Car si la Mémoire acceptait ce contrat, ce ne serait pas pour l'éternité. Et ce n'était pas elle qui chipoterait sur des compromis pour le plus grand bien de sa famille.
Mais les Enfers n'étaient pas la solution qui l’enchantait le plus. Comme Spectre il y avait Kazuki, qui lâche un guerrier en pleine nature sans se soucier des conséquences, Setesh, qui avait laissé à Mnémosyne des souvenirs très mauvais quoi qu'un peu flous. Rien de bien réjouissant. Mais il y avait aussi Violate et Lenalee...
C'était donc à réfléchir. La divinité déchue fit volte face et s'adressa au Tartare.

"Vous, le voyeur, Rendez vous utile pour une fois. Vous savez comment je pourrais avoir une entrevue avec un Spectre compétent?"

Elle n'espérait pas de réponse. Mais elle estimait qu'un souhait verbalisé avait bien plus de chance de se réaliser que celui que l'on tait et cache. Dans ce monde, tout a des oreilles et les paroles volent toujours on ne sait où.
Le Tartare se contenta de railler la foi de la Titanide en elle même, avant de la sommer de le divertir. Celle ci n'eut pas le temps de soupirer, déjà un claquement brusque retentit et Typhon s'effondre, comme foudroyé.

Mnémosyne n'avança pas d'un pas vers lui. Elle scrutait autour d'elle, attentive, pour comprendre ce qui se passait et ce que l'exécrable seigneur des lieux leur réservait. Ses yeux s'agrandirent d'horreur lorsqu'elle comprit qu'il n'y avait toujours eu qu'une seule et unique chaîne, qui prenait sa source dans le lac sombre. Elle se reprit aussitôt et chercha comment se sortir de cette situation.
Son compagnon d'infortune ne l'entendait apparemment pas de cette oreille. Une nouvelle douleur incendia son âme, cette fois ci apportée par Typhon, dont la voix et les souvenirs submergèrent la Titanide.
Celle ci réagit aussitôt, lorsqu'elle comprend qu'il cherchait une nouvelle enveloppe, plus puissante. Seulement il a commis l'erreur de l'attaquer sur son point fort. La Mémoire construisit en une fraction de seconde une barrière psychique autour de ses souvenirs, de ses pensées, contre laquelle la vague mentale de son assaillant vint se briser et, l’espérait elle, refluer. Ces souvenirs ne la concernaient pas. Elle choisit seulement celui qui l'intéressait, le combat contre Setesh, avant rejeter avec violence le reste.

Et si... Et si ses frères et soeurs, aveuglés par la haine et par une fausse loyauté, avaient autrefois choisi Typhon, ce nouveau né dont elle ignorait alors l'existence, pour la poignarder dans le dos et l'envoyer dans ces limbes haies? Dans ce cas elle le laisserait pourrir avec joie.
Et, dans tous les cas, jamais elle ne considèrerait que servir d'hôte à l'un des siens pourrait les servir. Elle pouvait abandonner un instant son allégeance. Mais pas son corps, ni son esprit, ni sa liberté. Typhon l'apprendrait à ses dépends.
Mnémosyne tira de son torse une longueur de chaîne suffisante, maudissant sous la douleur ce beau-frère qui la poussait à un tel geste. Elle passa alors cette chaîne autour de la gorge de Typhon et resserra jusqu'à ce qu'il se retrouve à genou. De son autre main elle saisit son menton et approcha son visage des flots qui bientôt les engloutirait.
Il faudrait plonger ses bras dans ce liquide noirâtre...

"Toi en premier. M'attaquer n'était pas la bonne solution si tu voulais sortir de là."

Repoussant sa réaction instinctive de dégoût, Mnémosyne chercha effectivement à noyer Typhon pour se débarrasser de ce parasite qui cherchait à prendre possession de son âme.

La Mémoire ne se laisse pas faire, elle contre-attaque même avec une certaine véhémence l'assaut psychique de son demi-frère. Comprendre la réalité dans le domaine du Tartare est bien plus complexe que Mnémosyne semble le croire mais... face au danger de perdre son corps, face à sa peur, elle a réagi, oubliant de réfléchir à ses actions ou même aux actions de Typhon. Alors que le Titan au corps pleinement corrompu tente de se débattre, il devient peu à peu immobile... puis un phénomène s'active, le faisant disparaître, ne laissant plus que quelques grains de pavots glisser entre les doigts de le Titanide. La force psychique du fils du Tartare s'efface peu à peu, tout comme la chaîne, libérant ainsi Mnémosyne de ce tourment... mais pas de cette prison.

« Hyahahaha ! Je vois que tu as gagné en réaction ma chère ! Hyahahaha ! » A t-elle réellement vaincu Typhon ou cela n'était-il qu'une petite comédie que le geôlier avait décidé de mettre en place ? Qu'importe, cette question n'était plus d'actualité... elle avait réagi plus vite que prévu, alors elle allait devoir souffrir encore plus rapidement aussi. Ainsi, un claquement semble se faire entendre, les flots entrant en mouvement, s'élevant, avant d'avaler brutalement Mnémosyne. Son corps est frappé par les courants, s'enfonçant dans les profondeurs alors que l'air commençait à manquer. Mais, comme toujours, cela ne suffisait pas. Elle semblait exister à la limite de ses forces, ressentant toujours ce manque d'oxygène... tout en ne pouvant disparaître.

Puis, enfin, l'eau s'efface, ne la laissant que dans le noir absolu... Elle peut remplir à nouveau ses poumons divins, mais pourtant, une force oppressante continue de la fixer, de la harceler. « Un Spectre compétent ? Hahahaha ! Penses-tu sincèrement que c'est le moment pour toi de penser à cela ? » L'image du geôlier apparaît alors devant elle, tandis qu'il ouvre une main. Un cercle se dessine entre eux deux, montrant une silhouette connue... le Spectre Setesh, bien que son surplis soit différent. Encore faut-il qu'elle se souvienne de leurs dernières rencontre. Océanos et Prométhée apparaissent aussi dans cette vision du monde des vivants. Le premier Titan semble s'éloigner, décidant de... fuir ? « N'est-ce pas un Spectre compétent ? Il te tue, il tue Typhon, je pense que Océanos s'est déjà montré ici grâce à lui. » Puis, d'un mouvement de main, la scène disparaît, laissant ainsi Mnémosyne seule avec le Tartare.

Il lève alors doucement ses doigts, la pression dans cet espace vide s'accentuant brutalement, tordant de la douleur la divinité déchue. Chaque partie de son corps lui donnait l'impression de s'écraser, l'une après l'autre, tandis que les mots du geôlier résonnent directement dans la tête de la Mémoire. « Crios est passé ici, il y est ressorti... avec un nouveau corps, ses souvenirs vierges de son ancienne vie. Prométhée est venu ici, il y est ressorti, avec un petit arrangement à respecter.... Océanos est passé ici aussi et il repassera, quelque soit sa lâcheté ! Épiméthée ? La bête sauvage a déjà une place ici. Et enfin toi... Alors dis-moi... Mnémosyne... Pourquoi devrais-je te libérer à nouveau de mes chaînes ? Aurais-je dû même te garder pour moi... lors de ta première arrivée ici ? » Il augmente alors l'intensité des douleurs de Ménmosyne, terminant alors...

« Et attention à tes mots, ou à même à leur intonation... Je pourrais ne plus te donner le droit à la réponse. »

Est ce qu'elle a réellement voulu anéantir l'âme de son beau frère, elle dont le but n'a jamais été de détruire les membres de sa famille ? Certainement pas. Elle avait seulement espéré calmer le turbulent Typhon, sûrement partir sans lui et l'abandonner ici. Mais au moins elle avait compté lui laisser la possibilité de s'en sortir.
Lorsque la déité se dissolut entre ses doigts, Mnémosyne releva un visage choqué et perturbé. Elle leva vers ses yeux ses mains d'où glissèrent de nombreux grains de pavot. La dismutation à laquelle elle venait d'assister l'avait traumatisée. Venait elle réellement de tuer son beau frère ?
La Titanide se reprit. Il devait encore s'agir de l'une des mascarades du Tartare. Ce fourbe devait trouver très drôle de la faire passer pour une fratricide après l'avoir accusée d'une attaque contre Epiméthée.

Typhon avait totalement disparu. La Mémoire effectua un tour entier sur elle même, dans le vain espoir d'apercevoir sa malheureuse victime. Néanmoins, ce mouvement lui avait permis de remarquer que plus rien ne l'enchaînait ni ne la transperçait. Elle n'eut cependant pas le temps de se réjouir de cette bonne nouvelle, son geôlier se mit à railler.

"Ce compliment me va droit au cœur... Très cher."

Un claquement assourdissant ponctua ses propos et Mnémosyne but la tasse. Les flots gonflèrent et s'élevèrent dans des proportions effrayantes. Désormais encerclée par les rugissements de l'onde, elle n'eut pas le temps de réagir lorsque les rouleaux déferlèrent sur elle et l'emportèrent. Elle fut soulevée et ballotée dans tous les sens, son enveloppe en ces lieux ne répondant plus aux ordres qu'elle lui donnait.
À chaque fois qu'il lui semblait pouvoir atteindre la surface pour aspirer avidement de l'air, de nouvelles trombes d'eau la renvoyaient vers le fond. Elle sentait ses poumons tirer douloureusement vers le bas de son corps, et ses tempes battaient à en exploser. Sous le choc, elle avait expiré tout l'air qu'elle contenait, et il lui semblait à présent être une coquille atrophiée.
Pourtant, jamais le doux salut de l'anéantissement ne vint la délivrer.

Imperceptiblement, le roulis se fit moins violent, jusqu'à déposer sa prisonnière sur une grève inexistante. Flottant dans l'obscurité, celle ci tenta de reprendre son souffle malgré une sensation de malaise qui l'oppressait toujours.
L'insupportable voix du seigneur des lieux retentit à nouveau. Il avait entendu son voeu de rencontrer un Spectre et estimait que ce n'était pas le moment de s'en soucier. Seulement on n'était pas la Mémoire si l'on n'était pas capable de penser à plusieurs choses en même temps.
Et même le Tartare choisit de s'attarder sur le sujet.

Il se présenta en personne devant Mnémosyne, qui ne put soutenir longtemps cette vision effroyable. Après quelques instants, elle détourna les yeux vers le cercle lumineux qui se formait entre eux. Les couleurs contenues dans ce cercle finirent par représenter une personne que la Titanide ne souhaitait pas revoir de sitôt. Setesh - encore lui, toujours lui, avait en plus bénéficié d'une promotion. Mais en effet, il n'y avait pas à contredire le Tartare, il s'agissait bien d'un Spectre compétent. Elle acquiesça.

L'image disparut et, dans l'obscurité ainsi renouvelée, la souffrance fit son retour. Apparemment lassé de la noyade, le Tartare opta pour l'écrasement. De cuisantes contusions recouvrirent Mnémosyne, dont les os se brisaient à l'infini. Elle aurait même juré sentir plusieurs hémorragies internes. Sa gorge était trop plate pour laisser passer ses hurlements.
Son infernal interlocuteur reprit la parole. Il s'amusa à énoncer la rubrique nécrologique des Titans, avant de poser une énigme à sa prisonnière. Pourquoi devrait il la laisser partir ?

"Parce que tôt ou tard vous serez lassé de moi et qu'il serait bien plus amusant de voir quelle mort minable m'attend là haut ?"

Il n'y avait plus aucune ironie dans sa voix, seulement la résignation à la déchéance dans laquelle était tombée sa famille.

« Voilà une réponse qui ne manque pas de réalisme... En effet, ta famille n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était ! Ou peut-être était-elle destinée à sombrer ainsi ? Les fourmis elles-mêmes sont plus efficaces que cette imitation de groupe... »

Il approche alors de sa victime, levant légèrement la main dans sa direction tandis que les ombres s'agrippent à la Titanide, s'enfonçant dans sa chair, dévorant son corps immortel. Il continue d'avancer, pour être enfin proche de sa victime. Sans lui donner la chance d'éviter, il attrape son menton de sa main ganté, appuyant sur sa peau, sur l'os tandis que son aura intensifie les mouvements des ombres. « Te laisser ramper ici ne serait que justice... Aux côtés de celui que tu as trahi... Cronos... » Il appuie un peu sur le visage, tandis qu'une fissure commence à déchirer son propre avatar. Des volutes violacées s'échappent alors de celui-ci, entourant la titanide.

Puis, un étrange phénomène commence à produire... De fins doigts commencent à sortir de l'abysse violacé, une silhouette naissant à l'intérieur même de l'avatar brumeux du Tartare. « Ou peut-être est-ce ton hôte que je dois enfermer en ces lieux... Des rois se sont déjà trouvés dans mes terres... et bien d'autres âmes... alors pourquoi pas elle ? » Ainsi la main appartient à Aodé... elle semble quémander, supplier, par ces doigts tendus, l'aide de la déesse. Voilà ce qui se produit face à Mnémosyne, voilà ce que cette dernière doit subir pour châtier ses échecs, son existence divine déchue...

« Alors, maintenant, Mnémosyne ! » L'espace tremble à nouveau, tandis que les ombres continuent de maintenir et de torturer la titanide. « Qu'offres-tu ? Toi qui a trahi Ouranos puis Cronos... vas-tu trahir l'hôte que tu as pourtant tenté de protéger... Ou alors as-tu quelque chose à proposer... Hahahahaha !»

Le choix devait être fait.

Même si le Tartare semblait apprécier la réponse de sa prisonnière, il en profita tout de même pour les humilier, elle et sa famille. Mnémosyne soupira. Il n'y avait vraiment aucun moyen de s'entendre avec cet acariâtre.

"Les ombres peuvent toujours grandir et noyer le monde sous les ténèbres. Mais dites-moi... Vous avez déjà accueilli beaucoup de fourmis ?"

À peine avait elle fini ses mots qu'une armée de fantômes surgit de nulle part pour se saisir d'elle, illustration "vivante" de la foi en les ombres qu'elle venait d'exprimer. Les ombres s'agglutinèrent à la Titanide telles une grappe de sangsues, et se mirent à la dévorer.
Elle ne comptait cependant pas rester passive. Tentant d'utiliser sa maîtrise des ténèbres, elle voulut prendre le contrôle sur ses agresseurs. Augmentant son cosmos autant que les lieux le lui permettaient, elle tenta de dissoudre les ombres et de les rendre au néant dont elles venaient.

Le Tartare s'approcha alors silencieusement de sa victime, qui sursauta au contact de sa main gantée. Fière, la Titanide garda la tête haute et le dévisagea, les yeux droit dans ce qui pouvait bien se trouver en face. Même lorsque la pression contre son menton se fit plus forte, elle ne cria ni supplia.
Le seigneur des lieux estima alors juste de la laisser pourrir en compagnie de ce frère auquel elle avait tourné le dos. Cette possibilité ne fit ni chaud ni froid à la mémoire. Dans les quelques souvenirs auquel elle avait encore accès, son "roi" ne s'était jamais montré très rancunier.

"Je resterai peut-être ici. Mais de moi même, je ne rampe jamais"

Dans un instant d'espoir, Mnémosyne crut que ses paroles avaient fait mouche. Face à elle, l'image du Tartare se lézardait, répandant une fumée violette qui venait serpenter et s'enrouler autour d'elle.
Ses espoirs furent de courte durée. Aussitôt après, la divinité distingua, à travers les volutes, une main d'enfant, tremblante, suppliante. Son cœur se serra d'angoisse.
Il éclata lorsque son hôte sortit de la faille.

"PAS AODÉ !! ELLE EST INNOCENTE !!!"

Cette humaine orpheline qu'elle aimait comme sa fille, le seul être au monde pour lequel son raisonnement protecteur devenait désintéressé, elle ne laisserait personne lui faire du mal. Le Tartare avait bien pu héberger tous les rois qu'il voulait, elle ne le laisserait pas toucher à sa princesse.
Et le Tartare poursuivit ses diffamations. La colère qui habitait désormais Mnémosyne n'avait pas diminué.

"JE N'AI PAS TRAHI OURANOS ! Vous n'avez donc pas suffisamment de jugeote pour faire la distinction entre une félonie et une attaque de front ? Entre assassiner un tyran après l'avoir mis en garde et prêter main forte à ceux qui veulent tuer un frère devenu despote ?"

S'ensuivit une longue plainte de désespoir. Si même le Tartare avait une raison trop limitée pour discerner les subtiles différences de la Vérité, où allait le monde ?
Elle se ressaisit.

"Ce que j'ai à offrir... Mon allégeance, enfin pour un temps limité."

Devenir le pion du Tartare pouvait avoir des avantages. Il était clair que ses frères avaient perdu tout don en diplomatie ou politique extérieure. Peut être que par la terreur, elle arriverait à faire à nouveau craindre et respecter sa famille.
Et dans ce but supérieur, un fratricide ne l'effraie pas. Elle peut les tuer, si c'est pour leur bien.

Qu'importe les efforts d'un dieu, d'un titan, en ce monde ils sont égaux aux humains... Non, leur châtiment est bien pire que celui des mortels ! Ils doivent apprendre à craindre la puissance supérieure du Tartare, ils doivent apprendre à craindre... que leur immortalité ne les sauve pas du néant.

« Vous, Titan, avez foulé ces terres bien plus souvent que les autres dieux... Peut-être êtes vous plus insignifiant encore que des fourmis. » Une pression importante s'ajoute aux souffrances de la titanide qui sent ses forces la quitter. Ce phénomène semble suivre le propre mouvement de l'avatar du Tartare, qui écrase le sol tel un humain écraserait un insecte. Puis, vient sa réaction lorsqu'elle découvre le visage de son hôte.

« SILENCE ! TU N'AS NI DROIT NI POUVOIR EN MES TERRES ! »

La voix brutale traverse l'espace, les ombres vibrant elles-mêmes, semblant ressentir une peur que jamais elles n'auraient pu imaginer. Se reformant, il fait léviter la demoiselle humaine à ses côtés, tout en laissant apparaître un sourire mauvais aux propos de sa prisonnière.

« Ta naïveté te perdra, Mnémosyne. » Bien que l'avatar ait repris un ton plus posé, il fait maintenant preuve d'une froide effrayante... « Ton point de vue n'est pas universel... D'après toi, qui t'as envoyé jusqu'à moi la première fois ? D'après toi... que pourrait un Titan lorsqu'il te verrait, agonisante ? » Un rire malsain traverse alors les lèvres de l'entité, sa main se posant sur la joue de la divinité, lui glaçant le sang. Allant alors à son oreille, il murmure à la Mémoire quelques mots. « Qui est le plus loyal... Toi ou les Titans rêvant du retour de leur Roi ? »

Se retournant, il s'éloigne de Mnémosyne pour rejoindre son corps hôte, ce dernier lévitant tranquillement, les yeux fermés... La divinité propose alors quelque chose... une allégeance, mais elle semble se sentir obliger de préciser pour un « temps limité ». À nouveau l'avatar rigole, avant de répondre à cette proposition. « Un temps limité ? Tu te crois en position de négocier ? » Fermant peu à peu ses doigts, Aodé commence alors doucement à ouvrir les yeux, bien qu'elle ne soit ni consciente, ni capable encore de ressentir son environnement. « Cette demoiselle... que se passerait-il si elle venait à exister pleinement dans ce monde ? Je pense que tu le sais... Mnémosyne ! » Il ferme alors brutalement sa main, le corps disparaissant dans une flamme sombre tandis qu'une énergie entoure la divinité déchue.

« Ainsi soit-il ! Ton nom est maintenant, à jamais, lié au mien ! » Une ombre semble peu à peu avaler la titanide alors que le Tartare continue. « Montre moi que je n'ai pas fait une erreur ! Distraie moi ! Change les Titans si tu en as le pouvoir... Un échec de ta part... Et toi, tout comme ton hôte... subirez les pires atrocités que cet univers peut imaginer. Et n'oublie jamais que je vois chacun de tes mouvements ! » Il n'avait pas besoin de contrôler les mouvements d'une divinité pour s'amuser... En acceptant ça, il permettait à Mnémosyne de tenter, d'une manière ou d'une autre, de se redresser... de redresser le Labyrinthe, si elle le souhaitait...

Rejetée de la prison abyssale, l'âme pourra retrouver le corps d'Aodé, qu'importe là où elle se trouve...

Libération de Mnémosyne avec 50% de ses statistiques de vie et de cosmos.

Les Titans, plus insignifiants que des fourmis... Eh bien, pourquoi pas. Mnémosyne était bien trop faible, bien trop lasse, pour tenter d'argumenter. Ses forces, sa volonté même s'échappaient de son esprit comme de l'eau entre ses doigts ouverts.
Était ce elle, ou... Non, ce n'était pas une illusion. La pression avait encore augmenté. Si seulement elle avait des os qui pussent être brisés... Cette atroce souffrance prendrait enfin fin.
Et, face à cela, l'avatar du Tartare semblait plus imposant. Plus grand que les géants, plus effrayant que les hécatonchires, il fracassait le sol dans sa toute puissance.
La Titanide ne courberait pas l'échine. Jamais. Néanmoins, elle arrivait aux limites de ce qu'elle pouvait supporter.

Une voix de tonnerre répondit à sa colère. Et plus douloureuses encore furent les questions qui s'ensuivirent.
Qui l'avait envoyée en ces lieux la première fois ? Une part du voile qui couvrait ses souvenirs se déchira, blessant cruellement son âme. Voilà la question qu'elle s'était posées pendant des éternités... La question qui l'avait toujours torturée...
Mais la mémoire ne demanderait pas la réponse au seigneur des lieux. Elle préférait que le coupable se dénonce de lui même.
Que feraient ses frères ? Elle le savait car son cœur le lui hurlait. Ils l'achèveraient. Et cela ne lui semblait pas le moins du monde absurde.

Un sourire cynique étira les lèvres de la déité. Un humour amère venait éclairer ses souffrances. Oh non, elle ne se croyait pas en position de marchander. Loin de là. Elle était seulement réaliste.

"Tartare... Vous accordez une bien grande valeur à la parole d'une traîtresse."

Ses poings se serrèrent tandis que, malgré elle, des larmes pointèrent au bord de ses paupières. Un instant, elle crut que, dans sa cruauté, le Tartare réincarnerait Aodé dans ce monde de désespoir.
Le pacte était finalement accepté. Avant qu'elle ne puisse réagir, son âme fut aspirée.

» De retour des contrées des Hyperboréens...
» Le combat tant attendu
» Le retour tant attendu d'un juge...